Lettre d'information du 6 novembre 2022



Le 23 octobre 2022

 

Les thèmes suivants sont abordés dans cette lettre d’information… Une question parlementaire qui, au-delà de la situation d’un parlementaire, permet de rappeler une disposition facilitant le cumul d’une pension d’invalidité avec une activité professionnelle… Des jurisprudences… L’une relative au licenciement pour motif économique d’un salarié en suspension du contrat de travail pour une maladie professionnelle… et l’autre au fait que la caisse primaire d’assurance maladie doit indemniser le FIVA, subrogé dans les droits du patient, s’il y a liquidation judiciaire de l’entreprise condamnéeUne étude sur le fardeau que représentent en Europe les atteintes cardiovasculaires et les dépressions liées aux expositions à des facteurs de risque psychosociauxUn commentaire du Guide pour les CRRMP qui fait un point sur l’appréciation par les CRRMP d’un certain nombre de pathologies et introduit la prise en compte des atteintes coronariennes liées à des expositions aux facteurs de risque psychosociauxLe bilan 2021 du CRRMP national dédié aux demandes de reconnaissance des maladies professionnelles liées à la Covid-19…

 

Les lettres d’information sont accessibles, depuis janvier 2019, sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires, Conseil d'Etat

 

Question parlementaire

Cumul des indemnités d'élus et d'une pension d'invalidité

Cette question parlementaire, plus largement que la problématique d’un parlementaire, permet de rappeler cette disposition du décret n° 2022-257 du 23 février 2022 relatif au cumul de la pension d'invalidité avec d'autres revenus et modifiant diverses dispositions relatives aux pensions d'invalidité qui, depuis le 1er avril 2022, facilite le retour à l’emploi ou le cumul avec l’emploi d’une pension d’invalidité. Ce décret a été commenté dans la lettre d’information du 6 mars 2022, voir le blog.

Question écrite n° 01404 de M. Hervé Marseille (Hauts-de-Seine - UC) - publiée dans le JO Sénat du 14/07/2022 - page 3593

« M. Hervé Marseille attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances sur le statut des élus bénéficiaires d'une pension d'invalidité. Une note datant du 2 novembre 2018 et émanant du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, considère que les « indemnités des élus doivent être considérées comme des revenus ». En vertu de l'article L. 341-12 du code de la sécurité sociale, les bénéficiaires de la pension d'invalidité peuvent cumuler une pension d'invalidité avec leur indemnité de fonction si et seulement si le total ne dépasse pas un seuil (seuil qui inclut l'indemnité de fonction d'élu). Dans le cas contraire, la pension d'invalidité est écrêtée ou totalement suspendue. Le projet de loi engagement et proximité a permis de remettre en lumière cette injustice qui entraîne inévitablement des inégalités entre les élus et les personnes handicapées et peut contribuer à dissuader les personnes en situation de handicap de s'impliquer dans la vie politique. Ainsi, une modification de l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale permet aux élus de cumuler leurs indemnités avec une allocation aux adultes handicapés (AAH) pendant six mois, puis de bénéficier d'un abattement. Cette modification d'article résulte d'un amendement qui avait été proposé par le Gouvernement. Cependant, ce dernier amendement ne concerne que l'allocation aux adultes handicapés et non la pension d'invalidité payée par la sécurité sociale. Par conséquent, il lui demande comment concilier les indemnités censées compenser les frais inhérents à l'exercice d'un mandat politique, montant déterminé par le code général des collectivités territoriales aux articles L. 2123-20 à L. 2123-24 et la pension d'invalidité qui vise à la prise en charge par la solidarité nationale des contraintes liées à la situation d'invalidité.

Transmise au Ministère auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargé des personnes handicapées. »

Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargé des personnes handicapées - publiée dans le JO Sénat du 03/11/2022 - page 5446

« Avant le 1er avril 2022, en application des articles L. 341-12 et R. 341-17 du code de la sécurité sociale, lorsque la pension d'invalidité, cumulée avec les revenus d'activité du pensionné, excédait le salaire trimestriel moyen antérieur à l'attribution de la pension d'invalidité, tout revenu gagné au-delà de ce seuil se traduisait par une réduction à due concurrence du montant de la pension d'invalidité. Les indemnités de fonctions des élus sont prises en compte pour l'application de ces règles d'écrêtement de la pension d'invalidité, dans la mesure où ces indemnités sont considérées comme des revenus d'activité. L'écrêtement de leurs indemnités pouvait ainsi être important si leurs revenus dépassaient ce seuil. Cependant, une réforme mise en œuvre par le décret n° 2022-257 du 23 février 2022 relatif au cumul de la pension d'invalidité avec d'autres revenus et modifiant diverses dispositions relatives aux pensions d'invalidité est revenue sur cette règle d'écrêtement. Désormais, depuis le 1er avril 2022, la réduction de la pension d'invalidité, au-delà du seuil correspondant au salaire antérieur à l'attribution de la pension, n'est plus que de moitié. Cela permet aux pensionnés d'invalidité de continuer à augmenter leurs ressources lorsqu'ils reprennent une activité professionnelle. Ce dispositif s'inscrit dans une perspective d'incitation à la reprise d'activité professionnelle des pensionnés d'invalidité. S'il n'est pas envisagé d'exclure les indemnités de fonctions des élus locaux de l‘application de ces règles, la réforme profite aux élus en situation d'invalidité, en permettant de ne plus pénaliser les pensionnés d'invalidité qui exercent un mandat, en maintenant un gain financier pour tout revenu supplémentaire. Cette mesure facilitera le maintien dans l'emploi de ces assurés, mais aussi l'exercice d'un mandat électoral. »

 

·     Jurisprudence

 

Le juge doit bien examiner le motif du licenciement lorsque le salarié est en suspension du contrat pour une atteinte d’origine professionnelle

Il s’agit d’un arrêt du 26 octobre 2022 – Cass. soc. pourvoi n° 20-17501, publié au Bulletin d’information de la Cour de cassation – qui pose la question du licenciement d’un salarié alors qu’il est en arrêt suite à une déclaration de maladie professionnelle.

Rappelons que la jurisprudence de la Cour de cassation considère qu’il y a nullité du licenciement lorsqu’un licenciement est prononcé alors que le salarié est en suspension de son contrat de travail pour un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Cette protection des salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle résulte des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du Code du travail stipulant respectivement que « Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. » et que « Toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-18 est nulle. ».

Ce que rappelle encore une jurisprudence Chambre sociale du 12 janvier 2022 - Cass. Soc. pourvoi n° 20-17904, inédit – dans lequel « la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait été placé en arrêt de travail dès la survenance de son accident du travail jusqu'au 30 novembre 2014, en sorte qu'à la date de la rupture, le contrat de travail était suspendu, ce dont elle aurait dû déduire que la cessation de la relation contractuelle au cours de la période de suspension s'analysait en un licenciement nul ».

Faits et procédure – Un salarié, exerçant les fonctions de peintre, a été placé en arrêt de travail pour maladie le 30 mai 2017.

Le 13 novembre 2017, l’employeur convoque le salarié à un entretien préalable pour un licenciement économique fixé au 31 novembre 2017, l’entreprise devant complètement cesser son activité au 31 décembre 2017. Mais, suite à un problème de distribution postale, le délai de 5 jours entre la convocation et l’entretien préalable n’étant pas effectif, l’employeur l’a convoqué à un nouvel entretien préalable pour le 27 novembre 2017.

Or, le 24 novembre 2017, le salarié a adressé à son employeur un arrêt de travail dans le cadre d’une maladie professionnelle et l’a informé, le 28 novembre 2017, d’une déclaration de maladie professionnelle.

Le 6 décembre, l’employeur notifie au salarié son licenciement pour motif économique.

La cour d’appel juge le licenciement nul et condamne l’employeur à payer diverses indemnités.

L’employeur se pourvoit en cassation.

Moyen de l’employeur

L’employeur conteste la nullité du licenciement car la cessation définitive et complète d’activité de l’entreprise constitue bien un motif économique de licenciement et que c’est celui-ci qui a justifié le licenciement du salarié. En outre, le salarié n’avait informé l’employeur d’une demande de reconnaissance de maladie professionnelle que le 28 novembre 2017, ainsi que du fait qu’il avait demandé à passer une visite de reprise du travail.

L’employeur conteste donc le caractère discriminatoire du licenciement, lié à l’état de santé du salarié, et sa nullité.

Réponse de la Cour de cassation

Au visa des articles L. 1233-3 alors en vigueur et L. 1235-1 du Code du travail, la Cour de cassation émet la réponse suivante

« Selon le premier de ces textes, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié résultant d'une suppression d'emploi consécutive notamment à la cessation d'activité de l'entreprise. Selon le second de ces textes, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur.

Pour prononcer la nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'au moment de la notification du licenciement le 6 décembre 2017, l'employeur était informé de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle par le salarié et de ce que le médecin du travail était saisi par celui-ci en vue d'une reprise, et que, dès lors, au moment de la notification du licenciement pour motif économique, l'employeur disposait d'éléments suffisants lui permettant de retenir que l'état de santé du salarié pourrait faire l'objet d'une inaptitude en lien avec l'activité professionnelle, et que le véritable motif du licenciement était lié à l'état de santé du salarié.

En se déterminant ainsi, sans rechercher si la cessation d'activité de l'entreprise invoquée à l'appui du licenciement ne constituait pas la véritable cause du licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. »

La Haute juridiction casse l’arrêt en ce qu’il déclaré la nullité du licenciement et renvoie l’affaire devant la même cour d’appel autrement constituée.

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046510318?init=true&page=1&query=20-17.501&searchField=ALL&tab_selection=all

Remarque – Nous ne disposons pas de la lettre de licenciement et ne savons pas quelle est l’exacte indication du motif du licenciement, en particulier s’il explicite la cessation définitive d’activité de l’entreprise, ce qui pourrait effectivement être considéré comme un cas de force majeure. Il s’avère en effet que, dans plusieurs jurisprudences précédentes, la simple indication d’un motif économique ne suffisait pas à justifier la légalité d’un licenciement durant une suspension d’un contrat de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle. Il en est ainsi dans un arrêt inédit du 3 octobre 2018 – Cass. soc. pourvoi n° 17-16474 - dans lequel la Haute juridiction casse l’arrêt de la cour d’appel en écrivant : « qu’aux termes de l'article L. 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ; que ni l'existence d'une cause économique de licenciement ni l'application des critères de l'ordre des licenciements ne suffisent à caractériser l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif non lié à l'accident ».

Il sera donc intéressant de voir quelle sera la position de la cour d’appel appelée à rejuger cette affaire.

 

La Cpam doit prendre en charge l’indemnisation d’une faute inexcusable par le FIVA subrogé aux droits des ayants-droits

Arrêt du 13 octobre 2022 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass. 2e Civ., pourvoi n° 20-21276, publié au Bulletin d’information de la Cour de cassation.

Faits et procédure – La caisse primaire d’Assurance maladie a reconnu le caractère professionnel d’une maladie d’un salarié et de son décès, le 25 février 2015.

Les ayants droits ont saisi une juridiction de Sécurité sociale afin de faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur. Le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), subrogé par les ayants droits suite à l’indemnisation qu’il doit prendre en charge, est intervenu devant la cour d’appel. Celle-ci a considéré que les montants que devrait indemniser le FIVA devaient être placés au passif de l’entreprise qui était en liquidation judiciaire.

Le FIVA se pourvoit en cassation.

Moyen soulevé par le FIVA

Le FIVA fait grief au fait que la cour d’appel a fixé au passif de la sociétés les sommes correspondant à l’indemnisation de la faute inexcusable reconnue par le tribunal (soit un montant de 176 715, 20 €) qu’il a versées ou versera aux ayants droits. Alors que, selon le FIVA, c’est la caisse primaire d’Assurance maladie qui aurait dû assumer le paiement de ces indemnités.

Le FIVA s’appuie sur l’article L. 452-3 du Code de la Sécurité sociale stipulant que l’indemnisation des préjudices dus à une faute inexcusable de l’employeur à la victime ou à ses ayants droits leur est versée directement par la caisse primaire d’Assurance maladie. À charge pour celle-ci d’en récupérer le montant auprès de l’employeur. Or, la cour d’appel a considéré que le FIVA devait récupérer la somme de l’indemnisation non pas auprès de la caisse mais auprès de l’employeur. L’entreprise étant en liquidation judiciaire, la cour d’appel a considéré que seule la fixation de créance au passif de la société pouvait être ordonnée. Ainsi, la cour d’appel aurait violé l’article L. 452-3 du Code de la Sécurité sociale.

Réponse de la cour de cassation

Au visa des articles L. 452-3 du Code de la sécurité sociale et 53 (VI) de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 (créant le FIVA), la Haute juridiction écrit :

« Il résulte du second de ces textes que le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge des dites personnes, est en droit de demander la fixation des préjudices indemnisables visés au premier de ces textes, et la condamnation, en tant que de besoin, de l'organisme social à lui rembourser, dans la limite des sommes qu'il a versées, celles correspondant à cette évaluation.

Pour dire que le FIVA peut récupérer sur l'employeur, auteur de la faute inexcusable, et non sur la caisse, les sommes versées ou à verser au titre des préjudices personnels de la victime et des préjudices moraux des ayants droit, l'arrêt retient que si le Fonds dirige sa demande à l'égard de la caisse, manifestement en raison du fait que l'employeur est en liquidation judiciaire, seule la fixation de sa créance au passif de cette procédure peut être ordonnée.

En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

L’arrêt de la cour d’appel est cassé et l’affaire renvoyée devant la même cour autrement composée.

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046437423?dateDecision=&init=true&juridictionJudiciaire=Cour+de+cassation&page=1&query=20-21.276%29+&searchField=ALL&tab_selection=juri

 

·     Atteintes cardiovasculaires, dépressions, et risques psychosociaux en Europe (Étude)

Il s’agit d’une étude publiée en ligne en juin 2022 dans la revue European Journal of Public Health (vol. 32, n° 4, pages 586-592) sous le titre « Burden of cardiovascular diseases and depression attributable to psychosocial work exposures in 28 European countries » signé par H. Sultan-Taïeb et al. Vous pourrez accéder au texte en pièce jointe et sur le site à l’adresse en fin de commentaire (pour ceux qui voudraient creuser cette problématique, il y a sur le site de très nombreux tableaux supplémentaires, en particulier des données par pays).

Introduction

Les facteurs psychosociaux au travail représentent un risque majeur dans les pays européens. Leur prévalence est importante et ils sont associés avec des atteintes cardiovasculaires et des troubles mentaux, en particulier la dépression, avec un fort niveau d’évidence [NDR – Pour l’association de ces pathologies avec différents facteurs de risque psychosociaux, voir la très intéressante étude de Niedhammer et al. «  Psychosocial work exposures and health outcomes: a meta-review of 72 literature reviews with meta-analysis » commenté dans la lettre d’information du 13 juin 2021, voir le blog.]

Les évaluations des pathologies attribuables au travail sont rares dans la littérature et celles pour les expositions à des facteurs de risque psychosociaux encore plus rares.

L’objectif de cette étude était d’estimer la prévalence annuelle des atteintes cardiovasculaires et de la dépression attribuables aux facteurs de risque psychosociaux en 2015 dans 28 pays européens [NDR – Le Brexit n’avait pas encore eu lieu et la Grande-Bretagne était incluse dans l’étude].

L’étude est basée sur les dernières estimations des fractions attribuables des atteintes cardiovasculaires et des dépressions à cinq expositions à des facteurs de risque psychosociaux en Europe : le job strain, le déséquilibre efforts / récompenses, l’insécurité de l’emploi, la réalisation de longues heures de travail et le harcèlement au travail. Ces fractions attribuables ont été estimées à partir des prévalences des expositions à ces facteurs psychosociaux dans l’enquête sur les conditions de travail en Europe de 2015.

Les différentes pathologies retenues sont les atteintes ischémiques coronariennes, les atteintes artérielles périphériques, la fibrillation auriculaire, les AVC et la dépression.

Matériel et méthodes

Les données sur les pathologies étaient issues de la base de données globale d’échanges pour 2015 (GHDx) qui fournissait ces données pour la population en activité des 15-64 ans des 28 pays de l’Europe pour hommes et femmes séparément et ensemble pour les atteintes cardiovasculaires et la dépression.

Les résultats portaient sur la prévalence des pathologies, les cas de décès, les années de vie perdues (YLL), les années de vie perdues en incapacité (YLD) et les années de vie en incapacité ajustées (DALY) [NDR – Ce dernier indicateur représente la somme des années de vie perdues en raison d'une mortalité prématurée et des années de vie productive perdues en raison d'incapacité en lien avec une exposition à un facteur de risque pour la santé].

Pour prendre en compte les disparités de taille des populations dans les différents pays européens, des taux de prévalence, de mortalité et de DALY ont été calculés, pour chaque exposition, pour 100 000 travailleurs.

Des fractions attribuables significatives ont pu être calculées pour :

ü les atteintes ischémiques coronariennes et la dépression pour le job strain, le déséquilibre efforts / récompenses, l’insécurité de l’emploi et les longues heures de travail ;

ü uniquement la dépression pour le harcèlement au travail ;

ü les atteintes artérielles périphériques pour le job strain ;

ü la fibrillation auriculaire et les AVC pour les longues heures de travail.

Résultats

Fardeau global des expositions aux facteurs de risque psychosociaux

La charge globale des atteintes coronariennes attribuables aux facteurs de risque psychosociaux étudiés, en 2015, a touché 299 460 sujets (203 745 hommes et 95 715 femmes) et  a été estimée à 6 190 décès (5 092 chez les hommes et 1 098 chez les femmes) et 212 867 DALY (173 629 pour les hommes et 39 238  pour les femmes).

Relativement à la dépression, l’exposition à l’ensemble des facteurs de risque a touché 2 738 696 personnes (1 107 449 hommes et 1 6331 247 femmes) et il en a résulté les fractions attribuables suivantes : 9 685 décès (7 862 pour les hommes et 1 823 chez les femmes) et 872 701 DALY (528 549 chez les hommes et 344 151 chez les femmes).

Effets de chacun des facteurs de risque pour l’ensemble des pays

Les taux pour 100 000 personnes de DALY étaient  :

ü pour le job strain en termes d’atteintes coronariennes de 72.77 pour les hommes et 19.23 pour les femmes (différence significative avec p<0.001) et pour la dépression de 261.15 pour les hommes et 199.04 pour les femmes (différence non significative) ;

ü pour l’insécurité de l’emploi en termes d’atteintes coronariennes de 83.23 pour les hommes et de 22.02 pour les femmes (différence significative avec p<0.001) ;

ü pour les longues heures de travail, les taux de DALY / 100 000 personnes pour les atteintes coronariennes étaient de 11.82 pour les hommes et 1.21 pour les femmes, pour les AVC de 11.48 pour les hommes et de 2.93 pour les femmes (pour ces deux derniers items, différence significative avec p<0.001) et pour la dépression de 10.99 chez les hommes et 3.25 chez les femmes (différence non significative) ;

ü les taux de DALY/ 100 000 personnes pour dépression en lien avec le harcèlement moral étaient de 131.37 pour les hommes et de 116.80 pour les femmes (différence significative avec p<0.001). À noter que ce taux était le plus fort des 28 pays européens pour la France avec 370 DALY / 100 000.

Une analyse séparée du retentissement de chacun des facteurs de risque psychosociaux nous fournit les données suivantes en termes de DALY [NDR – Les chiffres fournis sont des estimations avec marges d’erreur ce qui fait que la valeur globale des nombres pour hommes et femmes n’est pas toujours strictement leur somme. J’ai respecté les chiffres fournis dans l’étude] :

ü pour le job strain, en termes d’atteintes ischémiques coronariennes globalement 112 995 (92 714 chez les hommes et 20 702 chez les femmes), en termes de dépression globalement 546 502 (332 698 chez les hommes et 214 315 chez les femmes) et, de façon nettement moins importante, en termes d’atteintes artérielles périphériques, globalement 3 697 (2 698 chez les hommes et 1 008 chez les femmes) ;

ü pour le déséquilibre efforts / récompense, en termes d’atteintes ischémiques coronariennes globalement 51 502 (46 795 chez les hommes et 8 378 chez les femmes) et pour la dépression globalement 208 844 (140 200 chez les hommes et 73 054 chez les femmes) ;

ü pour l’insécurité de l’emploi on trouve globalement pour les atteintes ischémiques coronariennes 129 280 (106 036 chez les hommes et 23 710 chez les femmes) et en termes de dépression globalement 294 680 (179 422 chez les hommes et 115 643 chez les femmes) ;

ü pour les longues heures travaillées on estime globalement pour les atteintes ischémiques coronariennes 12 800 (15 064 chez les hommes et 1 306 chez les femmes), globalement pour les AVC 15 859 DALY (14 623 chez les hommes et3 159 chez les femmes) et, en termes de dépression, globalement 16 027(14 006 chez les hommes et 3 497 chez les femmes) ;

ü enfin, le harcèlement au travail est associé à la dépression globalement pour 276 337 DALY (167 363 chez les hommes et 125 771 chez les femmes).

Données concernant la France

Ces données figurent dans les tableaux supplémentaires consultables sur le site du journal. J’ai retenu deux facteurs de risque psychosociaux dont la prévalence est importante en France, le job strain et l’incertitude de l’emploi.

Reprenant les données issues de l’enquête Sumer 2016/2017, le document Synthèse Stat’ n° 36 de septembre 2020 (ce document a été commenté dans la lettre d’information du 25 octobre 2020, voir le blog), nous fournit des informations relatives à l’exposition au job strain en France. Globalement, 29.6% des salariés sont touchés (24.7% chez les hommes et 29.3% chez les femmes).

Relativement à l’insécurité de l’emploi, le document Dares analyses n° 44 d’août 2021 estime, en 2019, que 20% des sujets craignent pour leur emploi, ce qui est encore plus marqué pour les sujets en contrat à durée déterminée (41%) et ceux en intérim (34%).

Dans la présente étude, nous relevons les effets suivants associés à ces deux facteurs de risque psychosociaux.

Job strain

Pour l’ensemble de la population active en France, en 2015, pour les atteintes ischémiques coronariennes, la prévalence est de 13 786 sujets, les décès sont estimés au nombre de 194 et les DALY à 6 915. Ces valeurs sont respectivement pour hommes et femmes de 8 529 et 4 788, 147 et 36 et 5 138 et 1 375.

Les effets attribuables au job strain relatifs à la dépression concernent 238 409 sujets, on en estime les décès à 932 et à 81 503 DALY. Ces valeurs sont respectivement pour hommes et femmes de 81 004 et 161 538, 673 et 215 et 43 247 et 37 040.

Insécurité de l’emploi

Les effets attribuables à une insécurité de l’emploi aux atteintes coronariennes en France en 2015 sont, pour l’ensemble de la population de 13 868 sujets touchés, 196 décès et 6 956 DALY. Ils sont respectivement pour hommes et femmes de 9 205 et 4 548, de 158 et 34 décès et de 5 544 et 1 306 DALY.

Les effets globaux attribuables à l’insécurité de l’emploi sur la dépression sont de 113 283 sujets atteints, 443 décès et 38 727 DALY. Ils se répartissent ainsi respectivement pour hommes et femmes, 40 874 et 73 189, 340 et 97 et 21 822 et 16 782.

En guise de conclusion

Cette étude montre le fardeau important des atteintes ischémiques coronariennes et de la dépression attribuables aux cinq facteurs de risque psychosociaux pris en compte dans les 28 pays européens en 2015.

Des différences significatives en termes de taux de DALY pour 100 000 sujets entre hommes et femmes ont pu être constatées dans tous les pays pour les atteintes ischémiques coronariennes  attribuables au job strain et à l’insécurité de l’emploi, les hommes étant plus atteints.

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35726873/

 

·     Évolutions dans le guide pour les CRRMP

Introduction

Les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) ont été créés en 1993, dans le cadre d’un système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles, afin de permettre la reconnaissance de pathologies qui ne respectaient pas l’ensemble des conditions d’un tableau ou qui n’y figuraient pas. Ceci, respectivement au titre des alinéas 6 et 7 de l’article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale [NDR – Pour information, dans la lettre du 9 octobre 2022 j’ai commenté le bilan d’activité des CRRMP en 2021, voir le blog.]

Le Guide pour les CRRMP est réalisé par des experts, à la demande de la direction générale du travail et des directions de la Sécurité sociale et de la Caisse nationale d’Assurance maladie. Ainsi, il y a eu à ce jour quatre versions du Guide pour l’ensemble des pathologies et un guide spécifique pour les atteintes liées au Sars-CoV-2 (https://www.inrs.fr/media.html?refINRS=TM%2070).

Ces guides sont destinés à aider les membres des CRRMP à prendre leurs décisions quant à la reconnaissance des pathologies mais ils présentent aussi une partie procédurale spécifiant les obligations des caisses en termes de préparation des dossiers pour les CRRMP.

L’avant dernier guide, datant de 2013 a été publié dans la revue Référence en santé au travail n° 137, voir en pièce jointe. Il introduisait la notion d’incapacité permanente prévisible qui permettait, principalement pour les risques psychosociaux et les cancers, le passage au CRRMP au titre de l’alinéa 7 sans avoir besoin d’attendre la consolidation et la détermination d’un taux d’incapacité permanente définitive. Ce guide introduisait aussi la reconnaissance des pathologies psychiques liées à des risques psychosociaux sur lesquelles nous reviendrons.

Enfin, voici un nouveau guide, publié dans la revue Références en santé au travail n° 171. Vous pourrez y accéder en pièce jointe et sur le site de l’Inrs à l’adresse en fin de commentaire.

Je présente les éléments nouveaux apparus dans ce guide, en particulier la possibilité de reconnaissance en maladie professionnelle de pathologies coronariennes en lien avec des expositions à des risques psychosociaux, et ce qui m’apparaît intéressant.

Les informations intéressantes dans ce guide

Partie procédurale

Procédure de reconnaissance des maladies professionnelle

Le décret n° 2019-356 du 23 avril 2019 relatif à la procédure d'instruction des déclarations d'accidents du travail et de maladies professionnelles du Régime général a modifié la procédure de traitement des demandes de reconnaissance des maladies professionnelles. Ce décret a fixé de nouveaux délais aux caisses primaires d’Assurance maladie pour répondre aux demandes de reconnaissance de maladies professionnelles.

Ces délais sont de 120 jours maximum pour une pathologie reconnue au titre d’un tableau et d’un délai supplémentaire de 120 jours lorsque le CRRMP doit se prononcer au titre des alinéas 6 et 7 de l’article L. 461-1 [NDR – Ces délais sont mentionnées au articles R. 461-9 et R. 461-10 du Code de la Sécurité sociale. En outre, l’article R. 441-18 précise qu’il y aura reconnaissance implicite si ces délais ne sont pas respectés].

Ce décret indique aussi les obligations de la caisse primaire en termes de communication et d’information des parties.

Rôle et compétence des CRRMP

« La mission de chaque CRRMP consiste à élaborer un  avis motivé permettant à l’organisme de Sécurité sociale de statuer sur l’origine professionnelle de la maladie déclarée par la victime lorsque celle-ci relève du système complémentaire instauré par les alinéas 6 et 7 de l’article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale et ne peut bénéficier de la présomption d’origine. »

Les compétences des CRRMP concernent majoritairement les salariés du privé dépendant du Régime général. Mais d’autres travailleurs y sont soumis, comme les travailleurs et employeurs du Régime agricole, les agents des entreprises à statut (RATP, SNCF, industries électriques et gazières, etc...), les agents de droit privé de la fonction publique et les expatriés ayant contracté une assurance AT/MP volontaire.

Un CRRMP spécifique pour les atteintes liées aux pesticides a été créé par le décret n° 2020-1463 du 27 novembre 2020 qui est adossé à la Caisse centrale de la MSA.

Composition des comités

Initialement, les CRRMP comprenaient trois membres : un médecin conseil (de la MSA lorsqu’il s’agit d’une demande dans le cadre du Régime agricole), un médecin inspecteur du travail et un professeur des universités ou un praticien hospitalier.

Puis, le nombre de sollicitations des CRRMP augmentant alors que le nombre de médecins susceptibles d’y participer diminuait, plusieurs modifications ont été apportées.

Le décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 relatif à l'amélioration de la reconnaissance des pathologies psychiques comme maladies professionnelles et du fonctionnement des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles

permet, pour les alinéas 6, que seulement deux médecins siègent (en cas de désaccord, le dossier est examiné par un CRRMP avec trois membres) et, lorsqu’il s’agit d’un problème psychique, un professeur de psychiatrie ou un praticien hospitalier psychiatre peut remplacer le professeur des universités.

Enfin, le décret n° 2022-374 du 16 mars 2022 relatif à la composition et au fonctionnement des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (commenté dans la lettre d’information du 20 mars 2022, voir le blog) permet de faire appel, pour remplacer les médecins inspecteurs du travail, à des médecins du travail en activité ou à la retraite. Le médecin conseil peut aussi être remplacé par un médecin conseil retraité.

Enfin, ce décret permet aussi, à titre dérogatoire et pour une durée maximale de six mois, éventuellement renouvelable, que le directeur général de la Cnam puisse confier à un autre CRRMP que celui du ressort du lieu où habitent les salariés, le traitement des demandes. Ceci dans le cas où un CRRMP aurait trop de retard dans le traitement de ses dossiers.

Rôle de la Cpam

Dossier à transmettre

Le service administratif de la Cpam, suite à une déclaration de maladie professionnelle, doit préparer le dossier dont les pièces sont mentionnées à l’article R. 441-14. Et lorsqu’un passage devant le CRRMP s’impose, la caisse doit transmettre les documents prévus à l’article D. 441-29 qui comprennent, outre ceux prévus à l’article R. 441-14, les éléments d’investigation recueillis par la caisse (questionnaire et enquête éventuelle), les observations éventuelles de la victime – éventuellement, de ses représentants - ou de l’employeur et un avis motivé du médecin du travail. Le guide précise que « la demande effectuée auprès du médecin du travail doit être suffisamment précise pour lui permettre d’apporter une réponse adaptée aux attentes du comité (par exemple concernant les délais et les expositions ».

Détermination de l’incapacité permanente prévisible

Dès lors que la procédure concerne l’alinéa 7 de l’article L. 461-1, le médecin conseil doit estimer un taux d’incapacité permanente prévisible au moment de la déclaration de la maladie professionnelle. Cette détermination doit se faire selon l’arrêt du 17 janvier 2017 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass. 2e civ., pourvoi n° 15-26655 qui stipule que relativement à la saisine d’un CRRMP « le taux d'incapacité permanente à retenir pour l'instruction d'une demande de prise en charge d'une maladie non désignée dans un tableau des maladies professionnelles est celui évalué par le service du contrôle médical dans le dossier constitué pour la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, et non le taux d'incapacité permanente partielle fixé après consolidation de l'état de la victime pour l'indemnisation des conséquences de la maladie ». Plus loin, le Guide précise que l’incapacité permanente prévisible « doit être appréciée à la date de la demande, d’au moins 25% ».

[NDR - Cette notion d’incapacité permanente prévisible au moment de la déclaration de la maladie est bien prise en compte par les médecins conseils du Régime général. Elle semble moins bien prise en compte par les médecins conseils de la MSA – j’y suis confronté dans un dossier que je suis – et aussi pour la fonction publique pour laquelle, concernant la détermination de l’incapacité permanente prévisible, il est fait référence à l’article R. 461-8 du Code de la Sécurité sociale mais aucun texte, ni jurisprudence, ne précise que cette incapacité permanente prévisible est déterminée au moment de la déclaration de maladie professionnelle – là aussi, j’ai été confronté à cette difficulté dans un dossier.]

Partie médicale

Troubles musculo-squelettiques (TMS)

Le Guide a rajouté ces informations relatives aux TMS du membre supérieur :

ü plusieurs revues systématiques et méta-analyses récentes montrent l’absence d’excès de risque de syndrome du canal carpien chez les administratifs effectuant des tâches de bureautique sur informatique (sauf cas particuliers) ;

ü il existe un excès de risque de douleurs des épaules et du cou dans certaines études ;

ü le risque de ténosynovite de de Quervain n’est pas établi en cas de tâches bureautiques ne nécessitant pas d’effort important de la pince de la main.

Atteintes du rachis lombaire

Lors de demande d’avis au titre de l’alinéa 6 de l’article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale - pour dépassement du délai de prise en charge, de la durée d’exposition ou d’activité ne figurant pas dans la liste limitative - l’existence d’affections associées (spondylolisthésis, canal lombaire étroit, arthrose) n’est pas une condition suffisante pour en récuser le caractère professionnel.

Les auteurs soulèvent la question des premiers signes cliniques qui sont souvent très antérieurs à la date de réalisation d’une imagerie médicale prouvant les lésions. Ainsi, il ne faudrait pas se focaliser sur la date de cette imagerie comme début du délai de prise en charge (ce qui est aussi valable pour d’autres pathologies musculo-squelettiques).

Bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)

Cinq tableaux concernent la BPCO, les tableaux n° 44 et 44 bis, n° 90, n° 91 et n° 94. Pour le traitement de cas de déclarations ne respectant pas toutes les conditions de l’un de ces tableaux, la présence très fréquente du « co-facteur tabagique ne saurait remettre en cause la reconnaissance d’une BPCI instruite dans le cadre de l’alinéa 6 de l’article L. 461-1 : la relation directe que doit établir les CRRMP n’est conditionnée que par le caractère significatif ou non de l’exposition au facteur de risque professionnel. »

En revanche, dès lors que l’on passe en alinéa 7 de l’article L. 461-1, il en va autrement puisque le tabac est connu comme étant le principal facteur à prendre en compte dans la survenue d’une BPCO. « Il importe alors d’établir que le risque relatif au(x) facteur(s) professionnels est prépondérant par rapport à celui du facteur risque lié au tabac. L’évaluation du tabagisme (quantité cumulée, durée, date de début et date de fin du tabagisme [NDR – Ces mots en gras rajoutés dans la version 2022 du Guide] de l’assuré doit donc être minutieuse pour permettre d’estimer le risque susceptible de lui être attribuable ».

Cancers

Pour les cancers figurant dans les tableaux, lors d’examen par le CRRMP au titre de l’alinéa 6, les questions qui se posent sont les mêmes que pour les autres pathologies : discuter du délai de prise en charge - le Guide indique que « Compte tenu de l’incertitude scientifique attachée au délai d’apparition des cancers, la compatibilité avec une relation directe devrait pouvoir être considérée comme légitime même en cas de dépassement du délai de prise en charge, au moins pour les tumeurs solides, dès lors que l’exposition au cancérogène est bien documentée, avec une durée et/ou un niveau jugés suffisant » -, une durée d’exposition inférieure à la durée minimale exigée et une activité professionnelle ne figurant pas dans la liste limitative.

Ainsi, un tabagisme « ne saurait remette en cause la reconnaissance d’un cancer bronchopulmonaire instruit dans le cadre de l’alinéa 6. »

Pour les cancers ne figurant pas dans un tableau, au titre de l’alinéa 7, il faudra établir s’il existe une relation directe et essentielle entre l’exposition à une ou plusieurs nuisances et le cancer.

Plusieurs situations peuvent se rencontrer :

ü la nuisance appartient aux agents et procédés reconnus cancérogènes pour l’homme (catégorie 1A ou 1B de la classification européenne et/ou groupe 1 ou 2 A du Circ. Dans ce cas, si l’exposition est prouvée, il existe une forte suspicion de lien essentiel et direct [NDR – L’Anses, maintenant chargée de l’expertise scientifique dans le cadre de la création ou de la modification de tableaux de maladies professionnelles dans sa démarche part des liens établis entre l’exposition à un facteur et le risque cancérogène tel qu’il apparaît dans des documents institutionnels tels que ceux du Circ – voir le Rapport de l’Anses sur le Guide méthodologique de l’expertise par l’Anses (en particulier, page 66)] ;

ü l’agent professionnel est mentionné dans un tableau mais pas le cancer incriminé. Il faudra alors vérifier la plausibilité de la relation entre le facteur professionnel cancérogène et la survenue d’un cancer selon les critères de causalité de Bradford et Hill à l’aide de la littérature médicale ;

ü il en est de même si la nuisance appartient aux agents et procédés de la catégorie 2 de la classification européenne ou au groupe 2 B du Circ : il faudra vérifier les critères en faveur d’un lien de causalité et qu’il y a eu une exposition professionnelle significative au(x) cancérogène(s) en termes de durée et d’intensité ;

ü si la nuisance n’appartient à aucun agent reconnu comme cancérogène institutionnellement, le lien essentiel et direct ne pourrait être retenu que si les conditions suivantes sont remplies : la confirmation scientifique d’une relation significative entre le cancérogène suspecté et le cancer déclaré, ce qui suppose un mécanisme physiopathologique cohérent, le caractère reproductible de la relation dans un faisceau d’études épidémiologiques, une association statistiques de niveau fort avec, si possible, un effet dose / effet significatif, la démonstration chez l’assuré d’une exposition significative, un temps de latence compatible avec les connaissances acquises et le caractère prépondérant des facteurs de risque professionnels par rapport à d’autres facteurs de risque.

Le Guide pour les CRRMP évoque les cancers de l’ovaire et du larynx liés à l’amiante qui ont fait récemment l’objet d’une expertise de l’Anses (voir sur le blog le commentaire de ce rapport dans la lettre du 9 octobre 2022) reconnaissant le lien entre l’exposition et ces cancers et qui recommande soit leur intégration dans des tableaux, soit, pour le moins des recommandations pour les CRRMP. L’intégration dans un tableau est en cours de négociation au sein de la commission spécialisée des pathologies professionnelles (CS 4) du Coct.

Cas des lymphomes non hodgkiniens associés à l’exposition au trichloroéthylène

Cette partie du Guide est complètement nouvelle.

Il existe de forts arguments en faveur d’un lien causal entre un excès de risque de lymphome non hodgkinien (LNH) et l’exposition au trichloréthylène [NDR – Le tableau des maladies professionnelles n° 101 a été créé en 2021 pour le cancer du rein lié à une exposition au trichloroéthylène]. Ces arguments reposent sur une vingtaine d’études qui ont été menées dans des populations et des pays différents. Des méta-analyses vont aussi dans ce sens, montrant que le risque de LNH augmente avec l’intensité des expositions.

Aussi, les auteurs du Guide recommandent l’indemnisation des salariés ayant été exposés au trichloroéthylène.

Les professions pour lesquelles le risque est le plus fort sont celles dans lesquelles les travailleurs ont été exposés de façon intense et prolongée aux vapeurs de trichloroéthylène pour le dégraissage et le nettoyage de l’outillage, des appareillages mécaniques ou électrique et des pièces mécaniques.

Les lymphomes les plus fréquemment rencontrés sont les lymphomes folliculaires, les lymphomes diffus à grandes cellules B et les leucémies lymphoïdes chroniques.

Les facteurs d’exclusion de la reconnaissance d’une maladie professionnelle sont ceux pour lesquels le risque de LNH est plus important que celui lié à l’exposition au trichloroéthylène :

ü l’immunodépression ;

ü  les maladies auto-immunes, en particulier le syndrome de Sjögren, la polyarthrite rhumatoïde, le lupus érythémateux disséminé et la maladie cœliaque ;

ü certaines infections (Helicobacter pylori pour le lymphome gastrique, Campylobacter jejuni pour les lymphomes intestinaux, le virus d’Epstein Barr pour le lymphome de Burkitt et le HTLV-1 pour les lymphomes T) ;

ü des antécédents de LNH dans la famille de 1er degré qui devraient être pris en compte mais de devraient pas conduire à une exclusion systématique car leur niveau de risque est voisin de celui de l’exposition au trichloroéthylène.

Il est indiqué que le tableau n° 59 du Régime agricole, consacré aux LNH liés aux pesticides, a été modifié en 2019 en indiquant qu’il s’agit des LNH « dont la leucémie lymphoïde chronique et le myélome multiple ».

Maladie de Parkinson

Ce qui traite de la maladie de parkinson a été rajouté dans la version 2022 du Guide pour les CRRMP.

La maladie de Parkinson est la plus fréquente des maladies neuro-dégénératives après la maladie d’Alzheimer. Le sex ratio est de 1.5 homme pour 1 femme.

Des études épidémiologiques ont montré une association positive entre les activités agricoles utilisant des produits phytopharmaceutiques et l’apparition d’une maladie de Parkinson. Un tableau n° 58 du Régime agricole a été créé en 2012 dont le titre est « Maladie de Parkinson provoquée par les pesticides ». il n’existe pas de tel tableau pour le Régime général.

On distingue dans la famille des pesticides les produits à usage professionnel agricole et non agricole domestique et les biocides.

L’enquête Sumer 2009/2010 permet d’estimer à 115 000 le nombre de travailleurs exposés aux pesticides.

Dans le Régime général de Sécurité sociale, les activités susceptibles d’exposer aux pesticides sont très variées et les expositions irrégulières, ce qui rend difficile le ciblage des sujets exposés et de quantifier le risque d’exposition. Certains secteurs ou activités où il y a des expositions aux pesticides sont : le traitement antiparasitaire des charpentes, le traitement désherbant de certains espaces (golfs, cimetières) et les traitements insecticides et fongicides de certains lieux (logements insalubres, lieu de stockage de denrées alimentaires).

Les collectivités territoriales et les établissements hospitaliers emploient parfois des agents contractuels, relevant du Régime général, en charge de certaines tâches telles que l’entretien des voiries ou des jardins publics qui seraient susceptibles d’exposer aux pesticides, même si les collectivités ont tendance à limiter l’utilisation des pesticides.

Pour le dossier du CRRMP, il importe de disposer des informations suivantes :

ü une confirmation du diagnostic de maladie de Parkinson par un neurologue ;

ü la date de première constatation médicale de la maladie ;

ü le curriculum laboris du travailleur et la réalité d’une exposition aux pesticides entre le début de l’activité et les premiers signes de la maladie (il s’écoule en moyenne 7 ans entre les premiers signes de la maladie et le diagnostic de maladie de Parkinson) ;

ü connaître les molécules utilisées, leurs quantités et concentrations ;

ü le nombre d’années d’exposition qui devrait être d’au moins 10 ans par analogie avec le tableau n° 58 du Régime agricole qui prévoit cette durée minimale d’exposition ;

ü l’âge de début de l’exposition, la fréquence et la durée des applications du ou des produits ;

ü le temps écoulé entre le début de l’exposition et la première constatation médicale de la maladie ;

ü le mode opératoire de préparation et d’application des produits ;

ü la présence d’équipements de protection collective et individuelle ;

ü les voies de pénétration possibles, la voie cutanée étant presque toujours prédominante.

L’aide des services de prévention et de santé au travail pourra s’avérer utile pour fournir les données nécessaires à l’évaluation rétrospective des expositions.

Affections d’origine psychique liées aux risques psychosociaux

Les informations relatives aux pathologies psychiques en lien avec les risques psychosociaux sont apparues dans la version 2013 du Guide pour les CRRMP. Il m’apparaît tout de même intéressant d’en rappeler les grands principes. Leur prise en compte a résulté d’un groupe de travail du Coct qui a émis des recommandations qui figurent dans le document paru dans le n° 133 des Références en santé au travail (conférer sur le site de l’Inrs et en pièce jointe).

Les pathologies psychiques liées aux risques psychosociaux sont hors tableau et donc traitées au titre de l’alinéa 7 de l’article L. 461-1 du Code du travail avec la nécessité de présenter une incapacité permanente prévisible d’au moins 25%. Le rôle du CRRMP étant de déterminer s’il existe un lien « direct et essentiel » entre la pathologie et l’activité professionnelle.

Les facteurs de risque, qui concernent tout un ensemble de professions, proviennent des conditions de travail dans un environnement professionnel délétère dans lequel le sujet peut être exposé à des comportements agressifs avec violences verbales, voire physiques, humiliations, brimades, sanctions injustifiées de la part de la hiérarchie ou de collègues. Peut aussi être invoqué le manque de ressources pour accomplir sa tâche.

Dans ce domaine, la qualité du dossier est essentielle, en particulier le rapport des agents enquêteurs et du médecin du travail.

L’absence d’antécédents psychiatriques est aussi un élément important à prendre en compte, des antécédents lointains ne permettant cependant pas d’éliminer le lien essentiel et direct.

Les atteintes psychiques susceptibles d’être prises en compte

Trois pathologies sont présentes de façon importante dans les études épidémiologiques : la dépression, le trouble anxieux généralisé et les états de stress post-traumatiques (dont ceux liés à des expositions à des facteurs de risque d’un niveau moins important mais répétitifs, les états de stress post-traumatiques liés à un traumatisme psychique important - agression importante, vol à main armée, attentat - étant plutôt pris en charge au titre d’un accident du travail).

Les tentatives de suicide ou les suicides peuvent être des conséquences ou complications de l’une des pathologies évoquées ci-dessus mais devraient plutôt être pris en charge au titre d’un accident du travail.

Le burn out et le harcèlement moral ont été exclus en tant que tels des recommandations pour le premier parce qu’il n’y a pas de définition consensuelle et que la définition du second est juridique.

[NDR - Il semble que la situation ait évolué puisque, dans le bilan 2021 des CRRMP d’Ile de France, il est indiqué que la désignation dans un certificat médical initial de maladie professionnel d’un épuisement professionnel puisse être traité en maladie professionnelle (du fait que cela figure dans la CIM 11 en tant que « phénomène lié au travail »].

Le dossier transmis au CRRMP doit lui permettre de statuer : rapport du médecin conseil, rapport du médecin du travail, avis de l’employeur et propos du salarié, fiches d’entreprises, alertes écrites, rapport annuel du médecin du travail et faits recueillis par les agents des organismes de Sécurité sociale chargés des enquêtes.

Les facteurs essentiels à prendre en compte pour établir un lien essentiel et direct entre une dépression et un trouble anxieux généralisé sont :

ü une exposition à des violences (agressions verbales, humiliations, brimades, sanctions manifestement injustifiées) ;

ü une demande élevée (charge de travail excessive, pression du temps, demandes contradictoires, demande psychologique élevée).

Maladies cardiovasculaires liées aux facteurs de risque psychosociaux

Les recommandations relatives à la prise en compte des pathologies coronariennes sont une nouveauté apparue dans l’édition 2022 du Guide pour les CRRMP.

Elles s’appuient sur les travaux du groupe de travail de la commission des pathologies professionnelles conduits entre juin 2017 et décembre 2019 [NDR – Ce groupe de travail a fait suite à celui qui a émis les recommandations sur les psychopathologies en 2013].

Les affections retenues

Les recommandations concernent le syndrome coronarien aigu (SCA) et la nécrose myocardique.

Les atteintes neuro-cardio-vasculaires comprennent tout un ensemble de pathologies, les cardiopathies coronariennes, les maladies cérébro-vasculaires, les artériopathies périphériques, les cardiopathies rhumatismales et congénitales, les thromboses veineuses profondes et les embolies pulmonaires.

L’origine des cardiopathies coronariennes et des maladies cérébro-vasculaires est la maladie athéromateuse pour laquelle on dispose de données scientifiques solides depuis les années 1970.

Du fait du taux d’incapacité permanente prévisible d’au moins 25% indispensable pour accéder au CRRMP au titre de l’alinéa 7 de l’article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale, le groupe de travail a retenu deux pathologies, l’infarctus du myocarde et le SCA [NDR – Il est dommage qu’il n’ait pas retenu l’AVC dont le mécanisme physiopathologique est identique et dont il a été montré qu’il peut être en lien avec une exposition à des facteurs psychosociaux, en particulier de longues heures de travail. Ainsi une étude portant sur une large cohorte a montré un excès de 33% de risque d’AVC pour une durée de travail d’au moins 55 heures de travail – Il s’agit d’une étude publiée dans le Lancet].

Facteurs de risque

Dans les années 1970, l’étude Framingham a permis d’identifier les principaux facteurs de risque cardiovasculaire pour lesquels il existe une association statistique avec la survenue d’une pathologie athéromateuse : l’âge, le sexe masculin, l’hérédité, une dyslipidémie, un tabagisme actif, de l’hypertension artérielle, un diabète et une hypertrophie ventriculaire gauche.

Puis sont apparus d’autres facteurs de risque tels que l’obésité abdominale ou le stress psychosocial (ce dernier inclus comme facteur de risque en 2004 par l’OMS, à la suite de l’étude Interheart). Plusieurs études convergentes démontrent que le stress professionnel pouvait constituer un facteur de risque à prendre en compte.

La plupart des études associant les risques psychosociaux avec les atteintes cardiovasculaires s’appuient sur la notion de stress apprécié sur la théorie de la demande psychologique et de la latitude décisionnelle (Karasek et Theorell).

Ce modèle mettant en évidence le stress professionnel - le job strain - a été enrichi en prenant en compte l’absence de soutien social menant à l’iso-strain. Ensuite, d’autres facteurs de risque psychosociaux ont été pris en compte : l’insécurité de l’emploi et le déséquilibre efforts / récompense de Siegrist.

Exposition aux risques psychosociaux (RPS)

Les RPS à prendre en compte pour les atteintes coronariennes sont les mêmes que celles qui ont été soulevés pour les recommandations relatives aux psychopathologies.

On y retrouve une charge de travail élevée, une faible latitude décisionnelle, un faible soutien social ainsi que d’autres facteurs de risque que l’on qualifie de stresseurs professionnels.

Critères d’inclusion et d’exclusion de la pathologie

Pour déterminer si la pathologie ressort d’une maladie professionnelle hors tableau, le CRRMP doit considérer qu’il existe un lien « essentiel et direct» avec l’activité professionnelle.

À cet effet, les auteurs des recommandations préconisent de s’appuyer sur l’outil SCORE 2016 (voir sur internet) qui permet d’apprécier le risque cardiovasculaire en fonction de différents paramètres. Afin de pouvoir considérer l’atteinte cardiovasculaire d’origine professionnelle, le salarié devra présenter un score inférieur à 5% signant un risque intrinsèque d’atteinte coronarienne à 10 ans faible ou modéré.

Après cette première étape, le CRRMP devra rechercher les éléments professionnels en cause puis statuer sur le lien essentiel et direct.

Afin de statuer sur ce lien essentiel et direct, il conviendra aussi d’éliminer les sujets ayant présenté des antécédents d’atteinte coronarienne, telle que l’angine de poitrine, de même que ceux présentant un diabète ou dans la famille desquels il y a un antécédent de maladie cardiovasculaire précoce avant 55 ans pour le père et/ou 65 ans pour la mère (angine de poitrine, SCA, nécrose myocardique ou cérébrale).

En revanche, l’HTA, les dyslipidémies, le syndrome métabolique ou le tabagisme ne constituent pas à eux seuls un motif d’exclusion dans la mesure où ils sont pris en compte dans le score de risque cardiovasculaire. Cependant, pour les dyslipidémies, le seul taux du cholestérol total n’est pas suffisant, il faudra apprécier les taux défavorables de cholestérol LDL et favorables de cholestérol HDL.

Appréciation de la gravité

Elle est basée sur le barème indicatif des maladies professionnelles qui prévoit des stades de gravité légère, moyenne et grave pour les complications en rapport avec la nécrose myocardique : insuffisance ventriculaire gauche, ischémie cardiaque et troubles du rythme. Ne pourront être retenues par les médecins conseils que les formes modérées ou graves de chacune des complications mentionnées ci-dessus.

Pour apprécier l’insuffisance cardiaque, il faudra s’appuyer sur les données cliniques symptomatiques, la fraction d’éjection ventriculaire (inférieure à 40%) et la présence de marqueurs biologiques positifs (BNP supérieur à 100 pg/ml ou NT-proBNP supérieur à 400 pg/ml).

Synthèse

Pour l’inclusion, il faut retenir un diagnostic initial d’infarctus du myocarde ou de SCA avec élévation de la troponine. Puis établir un diagnostic positif relatif à la gravité des complications à type d’insuffisance cardiaque chronique, de troubles du rythme ou d’ischémie chronique. Enfin, le score calculé selon l’outil SCORE devra être compris entre 1 et 4%.

Les éléments devant exclure la prise en compte sont un infarctus du myocarde de type 2, un infarctus ancien, un diabète, une hérédité familiale précoce (55 ans pour le père et 65 ans pour la mère), une insuffisance rénale chronique et une durée de l’exposition au stress inférieure à 5 ans.

Éléments nécessaires au CRRMP pour statuer

Il est essentiel d’obtenir une documentation sur le sexe, l’âge, la taille, le poids, la présence d’une HTA, la notion de tabagisme ainsi que la notion de stress perçu au travail telle qu’elle peut apparaître dans le dossier médical de santé au travail à l’aide d’une échelle visuelle analogique. Il importe aussi de savoir s’il existe des facteurs de stress extra-professionnel, familial ou financier par exemple. Il faut aussi disposer, en termes de résultats d’examens biologiques des éléments suivants : un bilan lipidique, une glycémie à jeun et une hémoglobine glyquée.

Relativement au travail, il faudra apprécier l’exposition aux stresseurs professionnels, notamment la durée de travail hebdomadaire, la notion de travail de nuit, les stresseurs selon les modèles de Karasek ou de Siegrist et la durée de l’exposition en années.

Conclusion

Si un lien a été établi entre l’exposition au stress psychosocial et la survenue d’infarctus du myocarde, la part du risque professionnel est difficile à établir. Il y a un nombre faible de demandes de reconnaissance de ces atteintes en maladie professionnelle.

Ces recommandations visant à favoriser une reconnaissance en risque professionnel d’une maladie dite ubiquitaire devront faire l’objet d’une large diffusion pour atteindre cet objectif et vraisemblablement d’adaptations ultérieures. Il ne s’agit pas d’attribuer au travail tous les infarctus idiopathiques du sujet jeune mais d’identifier, en leur sein, ceux qui relèvent d’une exposition caractérisée et prolongée à des facteurs de risque psychosociaux au travail.

https://www.rst-sante-travail.fr/rst/pages-article/ArticleRST.html?ref=RST.TM%2073

 

·     Bilan du CRRMP Covid-19

Le bilan du comité régional de reconnaissances des maladies professionnelles d’Ile de France 2021 m’a été fort gentiment communiqué. Comme ce CRRMP assure, au niveau national, la prise en compte des atteintes liées à la Covid-19 suite à l’article 3 du décret n° 2020-1131 du 14 septembre 2020, le bilan 2021 du CRRMP d’Ile de France nous en fournit les résultats.

Rappelons que les tableaux de maladie professionnelles n° 100 du Régime général et n° 60 du Régime agricole ont été créés en 2020 pour prendre en compte les infections par le Sars-CoV-2. Cependant, ces tableaux sont assez restrictifs, tant en termes de pathologies (seulement les atteintes pulmonaires « ayant nécessité une oxygénothérapie ou toute autre forme d'assistance ventilatoire, attestée par des comptes rendus médicaux, ou ayant entraîné le décès’ ») qu’en termes de liste limitative centrée sur les professionnels du secteur médico-social alors que l’on a pu rapidement constater que nombre d’autres professionnels, en particulier dans le commerce et les services, étaient exposés et payaient un lourd tribut à cette infection. De plus, ils ne prennent pas en compte les formes longues de la Covid-19 qui ont été mises en évidence plus récemment.

Ainsi, tous régimes de Sécurité sociale confondus, 640 dossiers ont été traités, dont 422 au titre de l’alinéa 6 et 218 au titre de l’alinéa 7. Parmi ces demandes, de saisine, 10 avis simples (qui renvoient à une reconnaissance au titre du tableau). Pour l’alinéa 6, il y a eu 5 annulations et le CRRMP a émis 63 avis défavorables et 344 avis favorables (81.5%). Pour l’alinéa 7, il y a eu 4 annulations de saisine, 18 avis défavorables et 196 avis favorables (89.9%).

Pour le Régime général, 601 dossiers ont été soumis au CRRMP, 403 au titre de l’alinéa 6 et 198 au titre de l’alinéa 7. Parmi les dossiers soumis au CRRMP au titre de l’alinéa 6, il y a eu annulation de la saisine dans 4 cas, 10 avis simples, 61 avis défavorables et 325 avis favorables. Pour l’alinéa 7, le bilan rapporte 3 annulations de saisine, 15 avis défavorables et 180 avis favorables (90.9%).

Le deuxième nombre le plus important de saisines du CRRMP concerne les professionnels de santé libéraux pour lesquels il a eu 30 dossiers soumis au comité, 10 au titre de l’alinéa 6 et 20 au titre de l’alinéa 7. Pour l’alinéa 6, il y a eu une annulation de saisine et 9 avis favorables. Pour l’alinéa 7, il y a eu 1 annulation de saisine, 3 avis défavorables et 16 avis favorables (53.3%).

La MSA a présenté 7 dossiers au CRRMP, tous au titre de l’alinéa 6, qui ont recueilli 2 avis défavorables et 5 avis favorables.

 

Jacques Darmon

 

Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.


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