Lettre d'information du 22 mai 2022

 Téléchargement des fichiers joints


Le 22 mai 2022

 

Au sommaire de la lettre d'information du jour… Une question parlementaire sur les risques psychosociaux dans un grand groupe pharmaceutique français… Une jurisprudence sur les conditions exigées pour la reconnaissance d'un harcèlement moral devant les juridictions pénales dans une affaire dramatique ayant touché une médecin du travail… et, au sujet de deux pourvois, la confirmation par la Cour de cassation du barème des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse… Un commentaire sur le "Questions-Réponses" du ministère du travail sur la prévention de la désinsertion professionnelle… Un document de l'Assurance maladie sur les chutes au travail et leur prévention… Des statistiques de l'Institut syndical européen sur les décès au travail dans les prochaines décennies si les tendances actuelles se poursuivent… Un courrier du Cnom de fin 2020 sur le logiciel Padoa qui est choisi par nombre de services de prévention et de santé au travail interentreprises et qui fournit des limites à ce qui peut être mis en place par un logiciel…

 

Vous pourrez consulter en pièce jointe la 2e Veille juridique de l'année de la Direction interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile de France consacrée aux informations législatives et juridiques du trimestre. Outre un point très complet sur l'ensemble des textes réglementaires, vous pourrez y trouver d'autres informations sur la santé au travail.

 

Les lettres d’information sont accessibles, depuis janvier 2019, sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires, Conseil d'Etat

Question parlementaire

15e législature

Risques psycho-sociaux à Sanofi

Question écrite n° 17058 de Mme Laurence Cohen  (Val-de-Marne - CRCE) - publiée dans le JO Sénat du 02/07/2020 - page 3035

" Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation de Sanofi.

Malgré de très bons résultats économiques, preuve de la bonne santé financière du groupe pharmaceutique en France, la direction de Sanofi mène des plans successifs de suppression d'emplois, notamment en recherche et développement. Ces décisions ont des répercussions sur les salariés encore en poste, qui expriment leur mal-être face à la stratégie du groupe.

Plusieurs suicides ont eu lieu sur différents sites, dont celui d'une salariée à Gentilly (94), le 19 juin 2020. Les élus du comité social et économique (CSE) avec le soutien des cinq organisations syndicales ont voté un droit d'alerte pour « danger grave et imminent ».

Depuis des années, du niveau local au niveau national, les organisations syndicales alertent sur les risques psychosociaux au sein du groupe sans que la direction n'en tienne compte et poursuive au contraire ses « restructurations ».

Parallèlement, et dans un objectif de reconquête de l'industrie pharmaceutique et de relocalisation souhaitées par le Gouvernement, le président de la République a promis une aide de 200 millions d'euros à Sanofi.

Aussi, elle lui demande si cette aide publique est conditionnée à des critères contraignants, notamment concernant le maintien, voire le développement des emplois.

Il ne serait pas acceptable qu'une fois de plus, Sanofi bénéficie de l'argent public sans que la question de la préservation de l'emploi ne soit posée.

Elle lui demande également quelles interventions le gouvernement compte avoir envers la direction de Sanofi pour que les questions de qualité de vie au travail et de dialogue social deviennent enfin une préoccupation de ce groupe pharmaceutique et se traduisent par des actions concrètes.

La souffrance au travail est un enjeu de santé publique qui ne peut plus, après le scandale de France Télécom, être sous-estimé. "

Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance.

Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance - publiée dans le JO Sénat du 05/05/2022 - page 2525

" A l'instar de ses compétiteurs, Sanofi doit se réorganiser en permanence pour se maintenir dans la concurrence internationale. Il se trouve que le laboratoire pharmaceutique a perdu deux places dans le classement mondial en 2019 (rétrogradant de la 5ème à la 7ème place). À l'automne 2019, une profonde réorganisation, simplifiant en 5 branches l'entreprise, a décidé d'un abandon de la recherche dans certains domaines (diabète par exemple) pour se concentrer sur d'autres. L'activité vaccinale a été l'objet récemment de décisions importantes : 610 millions d'euros d'investissement ainsi répartis : à Marcy-l'Etoile pour une ligne de production supplémentaire et une usine nouvelle, première mondiale, Evolutive Vaccine Factory (EVF), à Neuville-sur-Saône. Ce projet fabriquera de manière rapide, digitale, beaucoup plus efficace, tous les vaccins dont le système de santé aura besoin dans l'avenir. Capable de produire de nouveaux vaccins de manière évolutive afin de répondre aux exigences du moment l'usine EVF de Sanofi est donc stratégique pour la France. La crise sanitaire a montré le besoin de ce type de réponse industrielle. Sanofi a de nouveau affirmé sa volonté de s'ancrer durablement en France en commençant un investissement de près d'un milliard d'euros dans les 4 ans à venir pour structurer une filière de l'ARN messager en France. A l'occasion de son déplacement sur le site de Marcy-l'Etoile, le Président de la République avait évoqué le lancement d'un appel à manifestation d'intérêt pour la relocalisation de la production stratégique de principes actifs et de médicaments (dont une liste de produits dont l'approvisionnement a été critique pendant la crise de la Covid-19). Cet appel publié en juin 2020 a permis de financer 180 projets dans les industries de santé et créer près de 7000 emplois. Concernant les risques psycho-sociaux et la qualité de vie au travail, Sanofi avait conclu un accord signé par les organisations syndicales et relatif à la qualité de vie au travail en juin 2017, valable trois ans, il avait été prorogé d'un an, jusqu'en juin 2021. Il prévoyait un ensemble de mesures concrètes pour la reconnaissance des salariés, le développement des compétences, la qualité des relations collectives au travail, la conciliation vie personnelle/vie professionnelle, le droit à la déconnexion, la qualité de l'organisation, du contenu et de l'environnement de travail. Avec la crise sanitaire et la sortie de confinement, une attention plus particulière a été portée par Sanofi aux conditions de retour sur le lieu de travail. Le programme d'accompagnement sur la qualité de vie au travail pour la prévention des risques psycho-sociaux s'est poursuivi dans ce contexte très spécifique. L'engagement de Sanofi dans la crise sanitaire a été très fort et a montré une grande implication des salariés, aussi l'État sera très attentif à ce que l'industriel maintienne ses efforts envers ses personnels. "

 

·         Jurisprudence

 

Pour qu'un harcèlement moral soit reconnu devant la chambre criminelle de la Cour de cassation, il faut que l'intention de l'auteur soit reconnue

Il s'agit d'un arrêt du 22 février 2022 de la chambre criminelle de la Cour de cassation – pourvoi n° 21-82266, inédit – qui traite d'une histoire dramatique d'une médecin du travail et montre la différence d'appréciation du harcèlement moral entre les juridictions civiles et criminelles.

Si la définition du harcèlement moral dans le Code du travail (article L. 1152-1) et dans le Code pénal est très proche (bien que celle de l'article 222-33-2-2 du Code pénal soit plus précis et mentionne les sanctions), la reconnaissance d'un harcèlement moral dans le Code pénal, à la différence de la reconnaissance dans le Code du travail, impose que le présumé auteur ait eu l'intention de le commettre.

Faits et procédure

Une médecin du travail de 59 ans s'est suicidée à son domicile le 28 septembre 2010. Elle a laissé des éléments accusant son employeur, un service de santé au travail, de harcèlement et d'absence de respect de la législation du travail.

Une plainte est déposée, au titre du harcèlement moral et de discrimination auprès du procureur de la République par des membres de sa famille et de plusieurs syndicats professionnels dont celui dont elle était membre, le Syndicat national des professionnels de santé.

Le procureur de la République a pris un réquisitoire introductif des chefs de harcèlement moral et homicide involontaire permettant à un juge d'instruction d'instruire l'affaire. Les membres de la famille se sont constitués partie civile. L'affaire a été confiée à un juge d'instruction qui a considéré qu'il n'y avait pas lieu à poursuite.

Les parties civiles ont interjeté appel. Déboutées par la chambre de l'instruction de la cour d'appel, elles se pourvoient en cassation devant la chambre criminelle.

Moyens soulevés

Ils reposent sur la critique du fait que l'arrêt de la cour d'appel a jugé qu'il n'y avait pas lieu à poursuivre du fait du harcèlement moral et de l'absence de poursuites à l'encontre de l'employeur.

Les parties civiles critiquent le fait que la chambre d'instruction n'ait pas considéré d'une part, qu'il y avait harcèlement moral car l'intention de l'employeur n'était pas prouvée et, d'autre part qu'il n'y avait pas de poursuites à l'égard de l'employeur.

Pour les parties civiles, il paraissait suffisant que par ses agissements, l'attribution d'entreprises en plus alors que cette médecin du travail avait déjà des difficultés à assumer la charge de son effectif, l'employeur participait à entraîner une augmentation de la charge de travail et une dégradation de ses conditions de travail qui ont entraîné la survenue d'une dépression puis du suicide. Ainsi, la chambre de l'instruction aurait violé les articles 222-33-2 et 121-3 du Code pénal.

Réponse de la Cour de cassation

Au visa des articles 222-33-2 et 121-3 du Code pénal. Ce dernier article stipulant, entre autres, que " Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre. " la Haute juridiction écrit :

" Pour dire n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de harcèlement moral, l'arrêt attaqué énonce que les agissements répétés consistant dans l'augmentation des entreprises attribuées à la salariée, ayant pour conséquence le dépassement de la durée légale du travail de cette dernière et pour y remédier le refus des demandes de visites de salariés ou employeurs de son cabinet, étaient susceptibles de caractériser l'élément matériel du délit de harcèlement moral au préjudice de la salariée, dont les conditions de travail avaient été dégradées de ce fait.

Les juges ajoutent que dans les cas où la dégradation des conditions de travail est effective, l'élément moral se limite à la conscience de commettre un harcèlement moral et de contrevenir à la loi [mais pas de l'intention de le commettre !].

Les juges relèvent, d'une part, que bien qu'ayant évoqué un « burn out » dans un courrier adressé à son employeur, la salariée n'a pas fait l'objet d'un avis d'inaptitude, qu'au contraire un avis d'aptitude lui a été délivré lors d'une visite médicale le 23 avril 2010, et que l'expertise de son dossier médical ne permettait de constater aucun symptôme de dépression ou de dangerosité pour elle-même.

Ils relèvent, d'autre part, que son employeur, qui ne pouvait ignorer que les propositions de prise en charge d'effectifs supplémentaires aboutissaient à ce que la salariée ressente une dégradation de ses conditions de travail, avait formulé plusieurs propositions afin de la décharger de certains effectifs dont elle avait le suivi et lui avait demandé de changer sa manière de travailler, mais que la salariée s'y était toujours opposée.

Ils retiennent, enfin, que les attributions de nouvelles entreprises aux autres médecins salariés de l'association n'étaient pas ressenties par ces derniers comme créant une surcharge de travail, que plusieurs collègues de la salariée ont estimé que son cabinet n'était pas plus chargé que le leur, que si la salariée avait une très grande conscience professionnelle et une grande rigueur, certains témoins indiquaient qu'elle avait une personnalité atypique et perfectionniste et s'imposait un rythme de travail très important, alors que la direction de l'association se montrait compréhensive et n'imposait aucune pression particulière à ses médecins, qui dans le cadre de leurs fonctions disposaient d'une large autonomie d'organisation.

Ils en concluent qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que l'AST 67 ou ses dirigeants avaient conscience d'aboutir à la dégradation des conditions de travail de la salariée par l'attribution de nouvelles entreprises à son cabinet.

En l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître aucun des textes visés au moyen. "

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000045267383?dateDecision=&init=true&page=1&query=21-82266&searchField=ALL&tab_selection=juri

 

La Haute juridiction valide le barème Macron

L'application du barème des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de l'article L. 1235-3, dit barème Macron, a été refusée ou critiquée par plusieurs conseils de prud'hommes ou cours d'appel depuis sa publication

La Cour de cassation s'était prononcée en juillet 2019 dans deux arrêts suite à des demandes d'avis de conseils de prud'hommes. Elle avait fait valoir que le barème aurait vocation à s'appliquer quelque soit la situation du salarié et les conditions de son licenciements (voir lettre d'information du 1er septembre 2019 sur le blog).

Le 11 mai 2022, la Cour de cassation devait trancher, dans le cadre de deux pourvois, son applicabilité dans toutes les situations ou s'il était possible, dans certaines situations, où il ne réparait pas le préjudice subi de façon suffisante, de s'abstraire de son application.

La Chambre sociale de la Cour de cassation, en formation plénière de chambre, dans deux arrêts, les pourvois 21-14.490 et n° 21-15247, publiés dans le Bulletin d'information et le rapport annuel de la Cour de cassation.

confirme pleinement la position qu'elle a prise dans cet avis.

Ainsi, elle considère que :

§  " le barème d’indemnisation du salarié licencié sans cause réelle et sérieuse n’est pas contraire à l’article 10 de la convention n°158 de l’Organisation internationale du travail.

§  Le juge français ne peut écarter, même au cas par cas, l’application du barème au regard de cette convention internationale.

§  La loi française ne peut faire l’objet d’un contrôle de conformité à l’article 24 de la Charte sociale européenne, qui n’est pas d’effet direct. "

Voir en pièce jointe le communiqué de presse de la Cour de cassation.

https://www.courdecassation.fr/toutes-les-actualites/2022/05/11/bareme-dindemnisation-du-salarie-licencie-sans-cause-reelle-et

 

·         Questions réponses sur la prévention de la désinsertion professionnelle

Je vous signale, alors que la lutte contre la désinsertion professionnelle devient un objectif très important, que le site du ministère du travail a mis en ligne un " Questions-réponses sur les mesures relatives à la prévention de la désinsertion professionnelle issues de la loi du 2 août 2021 ". Vous pourrez y accéder à l'adresse ci-dessous.

Je vous joins l'instruction commune du directeur général du travail et du directeur général de la Caisse nationale d'Assurance maladie du 26 avril 2022 qui fait le point sur la nouvelle obligation réglementaire pour les services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) de mettre en place une cellule de prévention de la désinsertion professionnelle (PDP). Cette obligation découle de l'article 18 de la loi 2021-1018 du 2 août 2021.

Instruction

Cette instruction précise les points suivants.

La cellule de prévention de la désinsertion professionnelle doit être mise en place dans les SPSTI à compter du 31 mars 2022.

Missions de la cellule de PDP

Ses missions comprennent un accompagnement individuel et collectif.

L'accompagnement individuel peut être mis en œuvre :

ü à la demande d'un salarié ou d'un employeur qui le demande directement ;

ü pour un salarié identifié par la cellule ;

ü pour un salarié orienté par les professionnels du SPSTI, par un partenaire du maintien en emploi ou par l'Assurance maladie.

Dans ce cadre, la cellule de PDP travaille avec les autres acteurs de prévention de la désinsertion, en particulier l'Assurance maladie lorsque le salarié est en arrêt de travail.

L'accompagnement collectif consiste à assurer, à la demande de l'employeur ou à avec son accord, des actions collectives de prévention dans les entreprises dont les salariées sont exposés à un risque de désinsertion professionnelle.

Ces actions peuvent être :

ü des actions d'information et de sensibilisation destinées aux employeurs et aux salariés au sujet des facteurs de risque de désinsertion professionnelle et le rôle des différents acteurs de la PDP ;

ü de la communication sur l'intérêt du rendez-vous de liaison [NDR – Prévu à l'article L. 1226-1-3 du Code du travail] et des visites médicales de mi-carrière, de pré-reprise et de reprise du travail [NDR – Prévues respectivement aux articles L. 4624-2-2, R. 4624-29 et R. 4624-31 du Code du travail]. ;

ü une sensibilisation des entreprises sur le repérage précoce des salariés en risque de désinsertion professionnelle et le rôle que peuvent jouer le salarié et l'employeur.

Composition de la cellule de PDP

Selon l'article L. 4622-8-1 du Code du travail, la cellule est animée et coordonnée par le médecin du travail et sa composition devrait être déterminée par le Contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (Cpom).

Dans l'attente du prochain Cpom, la cellule de PDP pourra être définie par le SPSTI en favorisant la présence des professionnels suivants :

ü médecins et infirmiers du travail ;

ü assistants du service social du SPSTI ;

ü psychologues du travail ;

ü chargés de mission maintien en emploi ;

ü assistant administratif.

Dispositifs mobilisables par la cellule de PDP

La cellule de PDP peut orienter, ou mettre en place, éventuellement en collaboration avec les autres acteurs du maintient en emploi les dispositifs suivants :

ü ceux en matière de reconversion et de formation professionnelle ;

ü les aménagements de poste et de temps de travail, le travail aménagé, l'appui au télétravail pour les personnes en situation de handicap ;

ü l'essai encadré, la convention de rééducation professionnelle (développés dans le "Questions-Réponses"), les actions de remobilisation précoce ;

ü les aides de l'Agefiph pour trouver des solutions pour le maintien, la mobilisation d'inclu'Pro Formation ;

ü les prestations d'appuis spécifiques en cas de handicap ;

ü l'appui par les Cap emploi et leur nouvel accompagnement de veille ;

ü le rendez-vous de liaison, les visites de pré-reprise et de reprise…

Site "Questions-Réponses"

Le site présente des dispositifs destinés au maintien ou au retour en emploi dont :

ü la convention de rééducation professionnelle en entreprise (CRPE) [NDR – La CRPE, mentionnée à l'article L. 323-3-1 (2°) du Code de la Sécurité sociale, a été créée par la loi du 2 août 2021 et est destinée, selon l'article L. 5213-3 du Code du travail, aux travailleurs handicapés reconnus inaptes. Ses modalités sont décrites à l'article L. 5213-3-1 du Code du travail],

ü le projet de transition professionnelle se fait avec une mobilisation du compte personnel de formation,

ü l'essai encadré qui récemment été modifié. Il est mentionné à l'article L. 323-3-1 (1°) du Code de la Sécurité sociale.

https://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/questions-reponses-sur-les-mesures-relatives-a-la-prevention-de-la-desinsertion/

 

·       Les chutes au travail (Assurance maladie – Risques professionnels)

Ce document fait partie de la série " Enjeux et actions ". Il est intitulé " Les chutes au travail – Données statistiques et actions de prévention " et a été publié en mars 2022. Vous pourrez y accéder en pièce jointe et sur le site de l'Assurance maladie à l'adresse en fin de commentaire.

Matériel et méthodes

Lorsque l'on parle de mettre en avant la prévention primaire, celle des différents types de chutes apparaît importante car elles sont fréquentes et entraînent des accidents graves.

Les données présentées dans ce document sont issues des statistiques sur les accidents du travail codifiés depuis 2013 selon une norme européenne d'Eurostat qui permet de mieux distinguer les différents types de chutes génératrices d'accidents du travail : chute de plain-pied, d'escaliers ou de hauteur.

Les accidents du travail pris en compte dans ce document excluent les accidents de trajet mais incluent les accidents avec moins de 4 jours d'arrêt de travail.

Données sur les chutes

Les accidents du travail dus aux chutes

Les accidents dus aux chutes représentent 20% des accidents du travail et occasionnent plus de 1.1 milliard d'euros de dépenses annuelles.

Mais si ces chutes représentent 20% des accidents du travail elles sont génératrices de 24% des jours d'arrêt de travail et de 25% des dépenses liées aux accidents de travail.

La Branche AT/MP prend en charge chaque année environ 126 000 accidents du travail en lien avec une chute. Il y a une certaine stabilité dans le nombre de ces accidents au cours des cinq dernières années.

Répartition des différentes chutes et leurs conséquences

Les chutes les plus fréquentes sont celles survenant de plain-pied (58%). Elles entraînent 54% des arrêts de travail et 51% des dépenses de la Branche pour les chutes..

Les chutes dans les escaliers représentent 18% des chutes, 18% des arrêts de travail et 15% des dépenses de la Branche des risques professionnels.

Enfin, les chutes de hauteur, en lien avec 25% des chutes sont à l'origine de 28% des arrêts de travail et de 34% des dépenses de la Branche AT/MP pour les chutes.

Les chutes de hauteur ont entraîné, en 2019, 95 décès, soit près de deux-tiers des décès liés à une chute et 21% de l'ensemble des décès liés à un accident du travail. Environ un quart des décès sont en lien avec une chute de plain-pied ; les décès suite à une chute dans un escalier sont marginaux.

Poids financier des chutes pour la Branche AT/MP

Comme on l'a vu, les chutes représentent 25% des dépenses de la Branche AT/MP. Le coût moyen d'un arrêt de travail suite à une chute est de 3 700 €, soit plus que la moyenne de 2 900 € pour l'ensemble des accidents du travail.

Ce coût diffère aussi selon le type de chute : 4. 400 pour les chutes de hauteur, 3 .500 € pour les chutes de plain-pied et 3 600 € pour les chutes dans les escaliers.

Facteurs liés aux chutes

Dans la moitié des cas des chutes de plain-pied, les caractéristiques du sol sont à l'origine de la chute, en particulier par sa conformation et ses défauts (trou, bordure de trottoir, marches, verglas, huile répandue).

Secteurs d'activité et entreprises

L'ensemble des secteurs d'activité peut être touché par les chutes mais, en fonction du type de chute, certains secteurs sont plus touchés.

Il est à noter que les secteurs touchés par un nombre de chute important sont aussi des secteurs d'activité accidentogènes

Les secteurs d'activité les plus touchés par les chutes de hauteur sont : les transports routiers de fret et les service de déménagement (11%), les travaux de construction spécialisés en maçonnerie, générale et gros œuvre, couverture (10%), les activités des agences de travail temporaire (8%), les travaux de finition (7%) et les travaux d'installation électrique et de plomberie (6%).

Les secteurs d'activité particulièrement exposés aux chutes de plain-pied sont : le secteur sanitaire et médico-social (14%), les activité des agences de travail temporaire (6%), les commerces de détail des magasins non spécialisés tels que supermarchés et hypermarchés (5%), les restaurants et services de restauration mobile (5%).

Enfin, 20% des chutes d'escalier surviennent pour les secteurs de l'aide à domicile, les activités de nettoyage et les restaurants.

Gravité des chutes

La gravité des accidents du travail se mesure par les taux d'incapacité permanentes qu'ils entraînent.

Globalement, les chutes entraînent plus d'incapacités permanentes que les autres accidents.

Cependant, les taux d'incapacités permanentes varient en fonction du type de chute.

Ainsi, les chutes de plain-pied, représentant 11% des accidents de travail entraînent 15% des incapacités permanentes les plus graves et les chutes de hauteur, représentant 5% des accidents du travail, génèrent 10% des incapacités permanentes les plus graves.

Les chutes dans les escaliers représentent 4% des accidents du travail et 4% des incapacités permanentes les plus graves.

Les actions de prévention de la Branche AT/MP

Au premier plan, la Branche recommande l'évaluation des risques professionnels encourus dans l'entreprise, que ce soit dans ce domaine ou dans d'autres domaines.

Cette évaluation nécessite une analyse des situations de travail.

Pour éviter les chutes de plain-pied, l'entreprise devra repérer les différents facteurs de risque afin de pouvoir agir en termes de prévention avec différentes actions :

ü sur l'espace de travail (circulation, encombrement des sols, etc…) ;

ü sur les sols (nettoyage, mise en place de revêtements anti-dérapants) ;

ü sur l'environnement de travail (éclairage, bruit, température) ;

ü sur l'organisation du travail (planification, analyse des tâches) ;

ü formation et information des salariés.

Il est aussi possible de recourir à des équipements individuels tels que des chaussures anti-dérapantes.

Pour la prévention des chutes de hauteur, la Branche AT/MP recommande de mener une analyse en amont de l'activité, dès la conception d'un ouvrage ou d'un équipement de travail en privilégiant la suppression du risque, c'est à dire du travail en hauteur [NDR – Ce qui apparaît difficilement praticable dans toutes les situations !]

Dans les cas où cela n'est pas possible, une analyse des postes de travail s'impose afin de déterminer s'il faut :

ü prévoir des installations permanentes pour l'accès à la zone de travail ;

ü mettre en œuvre des équipements de protection collective temporaires ;

ü utiliser des équipements de protection individuelle ;

ü former et informer les salariés [NDR - ce qui est indispensable lorsqu'ils sont exposés à de tels risques, voir l’article L. 4121-1 du Code du travail].

La prévention dans le secteur du BTP

Depuis des années, la Branche AT/MP a développé une démarche à destination des entreprises du BTP.

Ains, en 2019, 17 500 interventions sur des chantiers ont été effectuées par les préventeurs des caisses régionales de la Branche AT/MP.

Dans le cadre du programme Risques chutes Pros BTP, les caisses régionales accompagnent plus de 300 maîtres d'ouvrage sur 500 opérations de construction en 2021 et 2022.

Les objectifs sont les suivants :

ü prévoir dès la phase de conception les moyens de prévention des chutes de hauteur et les inclure dans les marchés ;

ü s'assurer lors de la phase des travaux que les entreprises mettent bien en œuvre et utilisent correctement les moyens de sécurité qui ont été prévus.

Les outils facilitant la prévention

Les recommandations sectorielles nationales

Ces recommandations sont élaborées et adoptées par les organisations professionnelles siégeant dans les comités techniques nationaux. Ce sont des textes qui définissent et regroupent de bonnes pratiques de prévention pour un secteur donné. [NDR – Vous pouvez accéder à ces recommandations sur le site Ameli de l'Assurance maladie à l'adresse suivante : https://www.ameli.fr/entreprise/tableau_recommandations.]

Ainsi, pour les activités des services, des commerces et des industries de l'alimentation, une recommandation R 462 a été élaborée sur " Bien choisir les revêtements de sol lors de la conception / rénovation des locaux de fabrication de produits alimentaires ".

C'est particulièrement important car dans ce secteur d'activité, plus de la moitié des 14 000 chutes de plain-pied sont en lien avec une problématique de revêtement de sol.

Les contrats de prévention

Les entreprises de moins de 200 salariés peuvent bénéficier d'un accompagnement dans le cadre d'une convention nationale d'objectifs signée dans leur secteur d'activité. [NDR – Sur les contrats de prévention, voir : https://www.ameli.fr/entreprise/sante-travail/aides-financieres/contrat-prevention.]

Ainsi, depuis 2018, 694 contrats ont été signés avec des entreprises avec des mesures de prévention des chutes.

Les incitations financières ont été d'un montant de 4.6 M. € pour la prévention des chutes de hauteur et de 1.9 M. € pour la prévention des chutes de plain-pied.

Subventions pour les TPE

Les entreprises de moins de 50 salariés peuvent bénéficier de subventions pour prévenir les risques professionnels.

Parmi les dispositifs de subvention en 2021 : Échafaudage +, Bâtir +, Hôtel +, etc… [NDR – Voir la liste des subventions possibles : https://www.ameli.fr/paris/entreprise/sante-travail/aides-financieres/subventions-prevention#text_122290.]

Des sources documentaires

L'Inrs propose de nombreuses brochures et outils qui peuvent aider à la prévention qui sont accessibles sur le site de l'Inrs.

Ainsi, sans prétendre à l'exhaustivité, les brochures ED 6433 sur la démarche de prévention et les grilles d'analyse et d'identification des facteurs de risque et ED 6458 sur les chutes de plain-pied.

Pour les chutes de hauteur, le guide " Prévention des risques de chute de hauteur " (ED 6110).

https://assurance-maladie.ameli.fr/sites/default/files/2022-03_chutes-travail_enjeux-et-actions_assurance-maladie.pdf

 

·     Statistiques sur les décès au travail en Europe (ETUI)

Une analyse de l'Institut syndical européen (ETUI) fournit des statistiques inquiétantes sur le nombre de décès au travail qui pourraient survenir dans les prochaines décennies.

Ce travail s'est basé sur des analyses statistiques obtenues à partir des données de l'évolution des décès au travail de cette dernière décennie. Ces données ont été communiquées lors de la Journée internationale de la santé et de la sécurité au travail qui s'est tenue le 28 avril 2022.

Si on a pu observer une diminution de ces décès cette dernière décennie, il est apparu, par exemple en France, que ces décès ont augmenté en 2019

Vous trouverez en pièce jointe le tableau Excel réalisé par l'ETUI sur l'évolution du nombre d'accidents du travail dans les prochaines décennies si les tendances se confirment.

Pour la France, le total des décès au travail entre 2010 et 2019 est de 6007.

Si la tendance actuelle d'évolution du nombre de décès au travail se perpétuait, il y aurait, entre 2020 et 2029, 7 803 décès supplémentaires.

Pour l'ensemble des pays de l'Union européenne, l'évolution de la tendance actuelle aboutirait à un nombre de 27 041 décès supplémentaires.

https://www.dropbox.com/sh/aqe5aqjtxdshwak/AADFzIZoobmY8nMGv0IfqeY-a?dl=0&preview=Nombre+de+d%C3%A9c%C3%A8s+au+travail+en+Europe+-+avril+2022.pdf

 

·     Le Cnom et Padoa (courrier)

La lettre d'information Santé Paca a ressorti la lettre de 2020 de l'Ordre des médecins qui avait été rédigée suite à certaines difficultés rencontrées lors de la mise en place du logiciel Padoa dans certains services de santé au travail  [Voir le site Santé travail Paca au sujet de Padoa : http://sante.travail.paca.free.fr/letrinfo/2022/letinfo-2022-06.htm.]

Le logiciel Padoa a été mis en place dans plusieurs services de prévention et de santé au travail (SPSTI), dont parmi les plus importants en termes d'effectifs suivis en région parisienne, le Cmie et le Ciamt et a été récemment retenu par l'ACMS pour remplacer son logiciel propriétaire. Le site de Padoa revendique 18 SPST clients.

La diffusion de ce logiciel répondra sans aucun doute à la volonté d'une interopérabilité des logiciels des SPSTI voulue par la loi du 2 août 2021. Encore que interopérabilité technique ne veut pas forcément dire acceptation de travailler ensemble.

Lors de la mise en place de Padoa dans certains services, il y a eu des insatisfactions des médecins vis-à-vis de ce logiciel qui quasiment imposait un questionnaire aux salariés avant la consultation médicale.

Des échanges de courrier avec le Conseil national de l'ordre des médecins datant de 2020 fixent bien les choses quant à ce que les directions des SPSTI peuvent imposer quant à ce logiciel. Ces documents sont un peu anciens mais je pense qu'ils permettent de fixer les choses quant à ce qu'il est possible de mettre en œuvre dans un logiciel de SPSTI et les limites qu'il faut observer.

Le Dr Anne-Michèle Chartier, Présidente CFE-CGC Santé au travail, a écrit un courrier du 19 septembre 2020 au Conseil national de l'Ordre des médecins (voir en pièce jointe) qui faisait remonter certains des points qui pouvaient poser problème pour un certain nombre de médecins de SPSTI dans lesquels le logiciel Padoa avait été mis en place.

Dans sa réponse, en date du 3 décembre 2020, le Dr Simon, Président de la section Exercice professionnel, prend position sur différents points soulevés par le Dr Anne-Michel Chartier. Il écrit que :

ü le choix des dépistages à réaliser ou non en autotest et les questions à poser dans le questionnaire relèvent de la compétence des médecins du service ;

ü tous les éléments de tous les dossiers médicaux ne peuvent être accessibles à tous les médecins, toutes les infirmières en santé au travail du SPSTI ;

ü seuls les professionnels participant à la prise en charge d'un même salarié peuvent avoir accès aux informations du dossier médical et dans la limite de celles strictement nécessaires à leur fonction ;

ü la direction des SPSTI ne peut en aucun cas limiter le temps de consultation d'un médecin au prétexte que les tests et les questions relatives à la santé au travail sont déjà renseignés par le salarié.

Les conditions énoncées ci-dessus sont seules susceptibles de garantir l'indépendance professionnelle du médecin du travail ;

ü  la validation du choix du logiciel Padoa ainsi que du contenu de l'auto-questionnaire doit être faite par la commission médico-technique ;

ü le salarié doit toujours avoir le droit de refuser de répondre au questionnaire ou à certaines de ses questions et il doit être informé de son droit d'accès et de son droit de rectification de ses données personnelles de santé.

Vous pourrez aussi consulter en pièce jointe, le courrier adressé par le directeur général de Padoa au Cnom. 

 

Jacques Darmon