Lettre d'information du 25 octobre 2020

 

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Le 25 octobre 2020

 

Au sommaire de cette lettre d'information… Un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire… Deux arrêts… l'un du, Conseil d'Etat annulant, dans le décret du 29 août 2020, la nouvelle liste des pathologies susceptibles de permettre la reconnaissance vulnérabilité des salariés et supprimant le chômage partiel pour les personnes vivant dans le même domicile… et l'autre, où l'absence de consultation des délégués du personnel pour le reclassement rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse… Un commentaire d'un document de la Dares sur des statistiques de facteurs de risque psychosociaux que j'ai associés à leur effet sur la santé estimés dans des études… La reprise d'éléments d'un communiqué de l'Ordre des infirmiers sur les difficultés que traversent ces professionnels suite à l'épidémie de la Covid-19… Et un commentaire d'une étude Malakoff-Humanis sur santé au travail et Covid-19…

 

Vous pourrez consulter, en pièce jointe; la 2e Veille juridique 2020 de l'Inspection médicale du travail d'Ile de France qui s'intéresse aux textes de loi publiés, aux jurisprudences et à des informations relatives à la santé au travail.

 

Information importante - Il faut transférer, avant le 31 décembre 2020, les heures obtenues sur son DIF (le Droit individuel à la formation) sur son compte personnel de formation (CPF : https://www.moncompteformation.gouv.fr/espace-prive/html/#/) où elles seront transformées en montant monétaire utilisable pour sa formation. Sinon, vous les perdrez. Vous pouvez trouver le nombre total d'heures de DIF obtenues sur votre dernière fiche de paye de 2014.

 

Je vous rappelle que vous pouvez accéder à mes lettres d’information depuis un an sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires

 

Décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l'état d'urgence sanitaire

Ce décret stipule que " L’état d’urgence sanitaire est déclaré à compter du 17 octobre 2020 à 0 heure sur l’ensemble du territoire de la République. "

L'état d'urgence sanitaire est déclaré en vertu de l'article L. 3131-13 du Code e la santé publique créé par l'article 2 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020.

Les dispositions de l'article L. 3131-13 : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques.

L'Assemblée nationale et le Sénat sont informés sans délai des mesures prises par le Gouvernement au titre de l'état d'urgence sanitaire. L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures.

La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà d'un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19. "

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042424377

 

·     Jurisprudence

Suspension par le Conseil d'Etat dans une ordonnance 15 octobre 2020 de dispositions du décret 2020-1098 du 29 août 2020 relativement à la définition des cas de vulnérabilité et de la prise en charge par chômage partiel

J'ai commenté le décret 2020-1098 du 29 août 2020 dans la lettre d'information du 6 septembre 2020 que vous pourrez consulter sur le blog. Ce décret comprenait deux points importants :

ü d'une part, une liste restrictive, par rapport à celle du décret 2020-521 du 5 mai 2020, des personnes considérées comme vulnérables qui pouvaient être placées en chômage partiel ;

ü d'autre part, la fin du chômage partiel pour des personnes vivant dans le même domicile que des sujets dits vulnérables.

Cette décision du Conseil d'Etat fait suite à cinq requêtes, demandant la suspension de dispositions du décret du 29 août 2020. Ces requêtes sous les n° 444425, 444916, 444919, 445029 et 445030 ont été faites au titre de l'article L. 521-2 du Code de la justice administrative pour les deux premiers et au titre de l'article L. 521-1 du même code pour les trois autres.

Les requêtes soulèvent sensiblement les mêmes moyens, outre la recevabilité par le juge des référés, dont les plus importants sont :

" - la condition d’urgence est remplie eu égard au risque de développement d’une forme grave de covid-19 par les personnes vulnérables au sens du décret du 5 mai 2020 qui ont dû reprendre leur activité le 31 août 2020 ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit à la santé et au droit à la vie ;

- le décret litigieux méconnaît l’article 20 de la loi du 25 avril 2020 en ce qu’il limite indûment la liste des personnes vulnérables présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 et est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il ne qualifie pas certaines catégories de personnes comme vulnérables ;

- il est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il met fin dès le 31 août 2020 au chômage partiel des salariés du secteur privé qui partagent le domicile d’une personne vulnérable ;

- il méconnaît les articles 221-6 et 222-19 du code pénal réprimant respectivement l’homicide involontaire et les blessures involontaires graves ;

- il méconnaît le principe de sécurité juridique en ce qu’il impose un retour au travail à de nombreux salariés vulnérables ou partageant le domicile de personnes vulnérables dès le 31 août 2020, sans prévoir de délai d’adaptation suffisant. "

Cadre juridique du litige

La loi 2020-473 du 25 avril 2020 (article 20) a permis de placer en activité partielle des personnes définies comme vulnérables ainsi que des personnes vivant au domicile de ces sujets. Un décret du 5 mai 2020 a permis de définir les personnes vulnérables présentant un risque de développer une forme grave de la Covid-19. Les critères de vulnérabilité ont été modifiés à compter du 1er septembre par le décret du 29 août 2020 dont les requérants demandent la suspension.

Sur le référé suspension

La suspension du décret du 29 août 2020 a été demandée, dans la requête 445030, au titre de l'article L. 521-1 du Code de la justice administrative qui stipule que « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ».

Sur l'urgence de la suspension

" L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que l’exécution de la décision soit suspendue, sans attendre le jugement de la requête au fond lorsque le requérant présente sa demande sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative. L’urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l’ensemble des circonstances de l'affaire "

Du fait du décret du 29 août 2020, de nombreuses personnes qui pouvaient auparavant bénéficier de l'activité partielle, tant parce qu'ils étaient considérés comme personnes vulnérables ou parce qu'elles vivaient dans le même domicile qu'une personne vulnérable, vont être obligées de retourner travailler, ce qui les expose, malgré les mesures de précaution prises, lors des trajets ou lors de leur activité professionnelle à un risque de contamination par le sars-CoV-2 et à un risque de forme grave de la Covid-19.

Le ministre a indiqué que ces personnes pourraient bénéficier d'arrêts maladie, ce qui ne s'est accompagné d'aucune information ni d'aucun rappel, et ce qui est en contradiction avec ce qui a figuré sur le site Ameli.fr qui indiquait que seuls les assurés répondant à la liste des pathologies permettant de les déclarer vulnérables pourraient être indemnisées. Ainsi, l'urgence est justifiée car des personnes dont l'état de santé justifierait une activité partielle ne seraient plus protégées.

Un doute sérieux sur la légalité du décret du 29 août 2020

La loi du 25 avril 2020 permettait au Premier ministre un large pouvoir d'appréciation pour définir les critères réglementaires de vulnérabilité, cependant ces critères doivent être pertinents et cohérents entre eux.

La situation de la pandémie ayant, au mois de juin et de juillet, évolué positivement avec une moindre circulation du virus, cela pouvait justifier une liste plus restreinte de pathologies déclarées comme augmentant la vulnérabilité vis-à-vis du Sars-CoV-2. Néanmoins, il ne pouvait en exclure des pathologies exposant, en l'état des connaissances scientifiques, au risque de forme grave de la Covid-19, au même titre que certaines des pathologies retenues.

Or, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) n'a pas modifié la liste des pathologies présentant un risque de forme grave de Covid-19 de son avis du 20 avril 2020 pages 5 et 6 qui avait servi pour rédiger le décret du 5 mai 2020.

Le ministre s'est appuyé, pour justifier ses choix de restreindre la liste des pathologies exposant à un risque accru de formes graves sur une étude anglaise, déjà prise en compte par le HCSP, sans que cette étude apparaisse clairement de nature à expliquer l'ensemble des choix effectués, notamment que le diabète ou l'obésité n'aient été retenus que chez les sujets âgés de plus de 65 ans. Il s'est aussi appuyé sur une étude française, "Coronado" publiée en ligne le 26 août 2020 qui ne formule que des hypothèses renvoyant à des études ultérieures.

" Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le décret litigieux serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation dans le choix des critères de vulnérabilité apparaît propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à sa légalité. "

Aussi, le Conseil d'Etat ordonne que " L’exécution des articles 2, 3 et 4 du décret du 29 août 2020 est suspendue jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur leur légalité. "

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Un licenciement pour inaptitude, à la suite d'une maladie non professionnelle, sans consultation des délégués du personnel / du CSE, rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse

Il s'agit d'arrêt de la Cour de cassation en date du 30 septembre 2020 - Cass. Soc. n° 19-11974 - appelé à une grande diffusion puisque publié dans le Bulletin d'information et le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation ainsi que sur le site internet de la Cour de cassation. Ce pourvoi a entraîné une cassation partielle.

Les faits – Un salarié, a été embauché le 18 novembre 1991 en qualité de conducteur longue distance. A partir du 10 mai 2015, le salarié se voit prescrire un arrêt de travail.

Le 14 septembre 2015, il saisit le conseil de prud'hommes du paiement de diverses sommes au titre de l'exécution de son contrat de travail.

Le 10 mars 2017, il est déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail en un examen et est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Il demande alors des indemnités au titre de la rupture de son contrat de travail.

Le salarié saisit la Cour de cassation d'un pourvoi car il a été débouté de ses demandes de paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et paiement d'une indemnité compensatrice de préavis. Ceci car, " en cas d'inaptitude d'origine non professionnelle, l'employeur doit consulter les délégués du personnel pour recueillir leur avis avant la proposition d'un poste adapté aux capacités du salarié, qu'à défaut du recueil de cet avis, l'obligation de reclassement n'est pas satisfaite et le licenciement qui s'ensuit est sans cause réelle et sérieuse ".

Or la cour d'appel, malgré l'absence de consultation des délégués du personnel [NDR – Depuis le 1er janvier 2018, dans l'article L. 1226-2, la consultation des délégués du personnel a été remplacée par celle du CSE, suite à l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, article 4], a considéré que ce licenciement n'était pas dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Au visa des articles L. 1226-2 et L. 1226-2-1, alinéas 2 et 3 du Code du travail dans leur rédaction suite à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, la Haute juridiction écrit : " Aux termes du premier de ces textes, lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L. 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu’ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté. L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Aux termes du second de ces textes, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.

Il résulte de ces textes que la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l’employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Pour rejeter les demandes du salarié au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt, après avoir relevé que l’obligation de consultation des délégués n’avait pas été respectée, retient que ce manquement n’a pas pour effet de rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu’au surplus, le salarié n’a pas formé de demande distincte de celle présentée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, étant observé que l’article L. 1226-15 du code du travail issu de la loi du 8 août 2016 ne sanctionne le défaut d’avis des délégués du personnel que lorsqu’il intervient dans le cadre d’une inaptitude professionnelle.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés "

Ainsi, la Haute juridiction casse et annule l'arrêt de la cour d'appel seulement en ce qu'il a rejeté le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents.

L'affaire est renvoyée devant une autre cour d'appel dans l'état où elle se trouvait avant l'arrêt ayant fait l'objet de ce pourvoi.

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/819_30_45527.html

 

·     Expositions aux risques psychosociaux (Dares)

Il s'agit d'un document de la série Synthèse.stat' (n° 36) publié en septembre 2020 sous le titre " Les expositions aux risques professionnels – Les risques psychosociaux " signé de B. Matinet et al.

Matériel et méthode

Les données présentées dans ce document proviennent de l'étude Sumer 2016/2017 réalisée par des médecins du travail et gérée par la Direction générale du travail (DGT et inspection médicale du travail), la Dares et l'inspection médicale du travail. Cette enquête couvre maintenant le privé et la plus grande partie de la fonction publique (les enseignants du 1er et du 2e degré ont été intégrés dans l'enquête à titre expérimental). Ainsi, cette enquête qui a pris en compte 26 500 travailleurs lors des visites médicales en santé au travail est représentative de 24.8 millions de salariés et d'agents.

Plusieurs outils ont été utilisés dans le cadre de cette enquête permettant de fournir des statistiques sur les différents items reconnus.

Le questionnaire de Karasek permettant de définir quatre situations de travail, en fonction de la demande psychologique et de la latitude décisionnelle, comme ci-dessous (en rouge sur abscisse et ordonnée, la médiane du score).

le job strain avec une forte demande psychologique et une faible latitude décisionnelle, les actifs avec une forte demande psychologique et une forte latitude décisionnelle, les détendus avec une faible demande psychologique et une forte latitude décisionnelle et les passifs avec faibles demande psychologique et latitude décisionnelle.




 

Le modèle de Siegrist teste la reconnaissance au travail selon le modèle du "déséquilibre efforts / récompense ".

Les items sur les comportements hostiles sont issus d'un questionnaire de Franz Leymann sur le mobbing qui distingue trois types de situations pouvant participer au mobbing (aussi appelé persécution au travail – Voir, dans un document Word joint, Les 45 agissements constitutifs du mobbing) :

ü " Les situations dégradantes (on laisse entendre que vous êtes dérangé, on vous dit des choses obscènes ou dégradantes, on vous fait des propositions à caractère sexuel de façon insistante).

ü  - Les dénis de reconnaissance (on critique injustement votre travail, on vous charge de tâches inutiles ou dégradantes, on sabote votre travail, on vous empêche de travailler correctement).

ü  - Les comportements méprisants (on vous ignore, on fait comme si vous n’étiez pas là, on vous empêche de vous exprimer, on tient sur vous des propos désobligeants). "

Les agressions : il est demandé dans l'auto-questionnaire si le travailleur a été victime au moins d'une agression au cours des 12 derniers mois. Cette agression pouvant être verbale, physique ou sexuelle.

Pour exprimer les résultats, 38 secteurs d'activité ont été retenus et 87 postes de familles professionnelles.

Note : Comme dans le texte de Synthèse.stat', je parlerai de "salariés" couvrant l''ensemble des travailleurs, salariés du privé et agents des trois fonctions publiques.

Résultats

Ce qui m'intéresse particulièrement dans ces statistiques, c'est leur lien avec l'altération de l'état de santé que peuvent générer ces différents facteurs de risques psychosociaux et l'utilisation que l'on peut en faire dans le cadre de la prévention.

Dans cette optique, je ne me suis pas intéressé aux données concernant les travailleurs détendus (21.7%) pour lesquels il y a une faible demande psychologique et une forte latitude décisionnelle dont l'impact sur la santé est nul ou positif. Ni les actifs exposés à une forte demande psychologique qui s'accompagne d'une forte latitude décisionnelle.

Situation de job strain

Un peu plus d'un quart des travailleurs sont en situation de job strain (26.9%), ce qui représente 5 574 400 salariés et agents.

Exposition selon le profil du salarié

Catégorie socio-professionnelle

Le job strain est le plus fréquent parmi les professions intermédiaires : employés administratifs du public et du privé (35.%) et du commerce et ses services (31%), les ouvriers non qualifiés et agricoles (30%) et les ouvriers qualifiés (28.1%).

Sexe

Le job strain apparaît plus fréquent chez les femmes (29.3%), particulièrement chez les femmes de 25 à 29 ans (32.7%), de 30 à 39 ans (30.3%), de 40 à 49 ans (29.5%) et de 50 à 59 ans (29.1%).

Les hommes sont globalement sous-représentés en termes de job strain à l'exception des tranches des moins de 25 ans (30.1%) et de 25 à 29 ans (28.6%).

Les tranches d'âge

Le job strain apparaît plus fréquent que dans l'ensemble de la population dans la tranches des 25 à 29 ans (30.5%), des moins de 25 ans (28% ) et des 30-39 ans (27.2%).

Type d'employeur et sexe

Parmi les quatre types d'employeurs – le secteur privé et les trois fonctions publiques –les agents de la Fonction publique hospitalière (35.3%) et les salariés du secteur privé (27.2%), quoique de façon moindre, sont plus exposés au job strain que l'ensemble des travailleurs.

Pour les hommes, il y a une surreprésentation du job strain uniquement dans la Fonction publique territoriale avec un taux de 28.6% (soit 193 100 salariés concernés) alors que chez les femmes, il y a une surreprésentation du job strain dans le secteur privé avec un taux de 30.2% et, surtout, dans la Fonction publique hospitalière avec un taux de 39.8%, soit respectivement des effectifs concernés de 2 197 000 salariés et 293 900 agents.

Taille de l'entreprise

Le job strain est le plus fréquent dans les entreprises de 50 à 249 salariés (29.8%) et de 250 à 499 salariés (29.9%) et, de façon moindre, dans les entreprises de 10 à 49 salariés (27.2%) et de 500 salariés et plus (27.8%).

Seule la population travaillant dans les entreprises de moins de 10 salariés est moins exposée au job strain que l'ensemble de la population avec un taux de 21.8%.

Exposition selon le secteur d'activité de l'établissement

Les secteurs d'activité ayant les plus forts taux de salariés présentant un job strain sont :

ü l'hébergement et la restauration (39.1%),

ü les activités financières et d'assurance (36.1%),

ü les activités pour la santé humaine (35.9%),

ü la fabrication de textiles, les industries de l'habillement, du cuir et de la chaussure (34.9%),

ü les activités de services administratifs et de soutien (33.7%).

Parmi les secteurs d'activité ayant le plus grand nombre de salariés ou d'agents concernés par le job strain, on peut citer (entre parenthèses, nombre de salariés/agents du secteur et taux) :

ü l'administration publique (681 800, 28%),

ü les services administratifs et de soutien (513 200, 33.7%),

ü l'activité pour la santé humaine (512 700, 35.9%),

ü le transport et l'entreposage (345 400, 29.6%),

ü l'hébergement médico-social et social et l'action sociale sans hébergement (339 300, 27.5%),

ü les activités financières et d'assurance (314 700, 36.1%).

Exposition selon la famille professionnelle des salariés

Un grand nombre de familles professionnelles présentent des taux de salariés en job strain. Parmi celles présentant des taux supérieurs ou égaux à 40%, on trouve :

ü les employés des banques et des assurances (52.2%),

ü les techniciens de la banque et des assurances (51.4%),

ü les ouvriers non qualifiés de la mécanique (50.5%),

ü les agents administratifs et commerciaux du transport et du tourisme (45.4%),

ü les employés et agents de maîtrise de l'hôtellerie et de la restauration (45.4%),

ü les aides-soignants (42.6%),

ü les ouvriers non qualifiés des industries de process (42.1%),

ü les ouvriers non qualifiés de la manutention (40.3%).

Parmi les familles professionnelles ayant de forts effectifs concernés, celles aux plus forts taux de job strain (entre parenthèses, l'effectif et le taux) :

ü les aides-soignants (294 200, 42.6%),

ü les agents d'entretien (274 700, 27.4%),

ü les secrétaires (258 700, 39.1%),

ü les employés administratifs de la fonction publique (254 700, 38.4%),

ü les caissiers et les employés de libre-service ((164 900, 36.3%),

ü les ouvriers qualifiés de la manutention (153 900, 34.8%),

ü les infirmiers et sages-femmes (136 500, 38.6%),

ü les employés et agents de maîtrise de l'hôtellerie et de la restauration (128 800, 45.4%),

ü les employés de la banque et des assurances (116 900, 52.2%),

ü les techniciens de la banque et des assurances (116 900, 51.4%),

ü les ouvriers non qualifiés de la mécanique (31 200, 50.5%).

Exposition selon le sexe et la catégorie socioprofessionnelle (CSP)

Les plus forts effectifs concernés par le job strain selon la CSP, avec un taux au-delà de l'ensemble de la population, sont chez les hommes (entre parenthèses l'effectif et le taux) :

ü les employés de commerce et de service (443 400, 30.2%),

ü les employés administratifs du public et du privé (180 600, 31.5%),

ü les ouvriers qualifiés (927 300, 27.8%),

ü les ouvriers non qualifiés et agricoles (353 500, 32.1%).

Chez les femmes, les CSP avec les effectifs et les taux de salariés concernés les plus élevés, on trouve (entre parenthèses l'effectif et le taux) :

ü les employées administratives du public et du privé (827 700, 36.2%),

ü les employées de commerce et de service (903 800, 31.4%),

ü les ouvriers qualifiés (127 400, 30.7%),

ü les professions intermédiaires (631 800, 27.5%).

[NDR – L'exposition à cette situation de job strain est susceptible d'être associée à l'augmentation de pathologies psychiques, physiques et de mortalité.

Job strain et pathologies psychiques

Selon l'enquête Sumer 2010, reprise dans le document Dares Analyses n° 4 de janvier 2016, le job strain est associé à une augmentation des symptômes dépressifs avec OR (Odds Ratio) de 1.92 chez les hommes et de 1.91 chez les femmes ainsi que des symptômes anxieux avec OR de 1.88 chez les hommes et 2.04 chez les femmes.

Une méta-analyse publiée en 2017 a montré une association entre une augmentation de dépression clinique et l'exposition professionnelle au job strain.

L'analyse de 7 études publiées portant sur 27 461 salariés a montré un OR de 1.77 [1.47-2.13]. Celle de 14 études non publiées, portant sur 120 211 salariés, a montré une augmentation de l'association de la dépression avec le stress, avec un OR de 1.27 [1.04-1.55]. (" Job strain as a risk factor for clinical depression: systematic review and meta-analysis with additional individual participant data " I.E.H Madsen et al. - Psychological Medicine (2017), 47, 1342–1356. - doi:10.1017/S003329171600355X).

Job strain et-mortalité cardiovasculaire

L'étude publiée en 2020 de I. Niedhammer et al. " Psychosocial work exposures of the job strain model and cardiodiovascular mortality in France: results from the STRESSJEM prospective study " (doi:10.5271/sjweh.3902) s'est intéressée à la relation des facteurs de stress professionnels et du risque de mortalité cardiovaculaire dans une étude de cohorte.

L'association entre l'exposition cumulée au job strain pendant l'étude est associée avec une augmentation :

ü  de la mortalités cardiovaculaire – coronarienne et par accident vasculaire cérébral – avec un OR de 1.28 [1.22-1.34] chez les hommes et de 1.32 [1.21-1.43] chez les femmes ;

ü de la mortalité par maladie cardiaque ischémique avec un OR de 1.17 [1.94-1.26] pour les hommes et un OR, non significatif, pour les femmes de 1.09 [0.96-1.24] ;

ü de la mortalité par accident vasculaire cérébral avec OR de 1.29 [1.16-1.44] et un OR, non significatif, de 1.10 [0.97-1.24] chez les femmes.]

Situation de passif (faibles demande psychologique et latitude décisionnelle)

Les salaries en situation de passivité sont au nombre de 4 680 900, soit 22.6% de la population.

Exposition selon le profil du salarié

Catégorie socioprofessionnelle

Hors les cadres (6.2%) et les professions intermédiaires (14.4%), les autres CSP sont surreprésentées en termes d'exposition à la situation de passivité (entre parenthèses, le nombre d'exposés) :

ü 25.6% pour les employés administratifs du public et du privé (731 000),

ü 31.5% pour les employés de commerce et de services (1 369 900),

ü 28.3% pour les ouvriers qualifiés (1 062 700),

ü 39.8% pour les ouvriers non qualifiés et agricoles (6947 100).

Sexe

Le taux de femmes exposées à la situation de passivité 23.6% est plus important que celui des hommes (21.6%) avec des effectifs respectifs de 2 328 200 et 2 352 700.

Chez les hommes, les tranches d'âge plus touchées que l'ensemble des salariés sont celles des 25 à 29 ans (24.6%), des 30 à 29 ans (33.9%), des 40 à 49 ans (34.5%), des 50 à 59 ans (30.6%) et des 60 ans et plus (23.5%).

Chez les femmes, les tranches d'âge présentant un taux plus fort de passives sont les 25 à 29 ans (22.8%), les 30 à 39 ans, (30.5%), de ans (28.5%), les 40-49 ans (28.9%), les 50-59 ans(26.3%) et les 50-29 ans (27.1%).

Tranches d'âge

Les tranches d'âge présentant un taux de salariés exposés à la situation de passivité plus important que l'ensemble de la population sont celles des moins de 25 ans (28.3%), des 50-59 ans (23.5%) et, surtout, celle des plus de 60 ans (29.4%).

Statut

Les sujets en formation ou embauchés dans le cadre de mesures pour l'emploi (26.7%) et les travailleurs précaires (34.6%) sont plus exposés à une situation de passif que l'ensemble de la population (22.6%).

Type d'employeur

Les salariés des employeurs du privé (23.7%) et les agents de la Fonction publique territoriale (23.9%) présentent des taux de sujets passifs plus important que ceux de la Fonction publique d'Etat (15.5%) et la Fonction publique hospitalière (15.2%).

Taille de l'établissement

Le taux de sujets passifs est plus important que pour l'ensemble de la population dans les établissements de moins de 10 salariés (23.9%), de 50 à 249 salariés (24.6%) et de 250 à 499 salariés (25%).

Exposition selon le secteur d'activité

Les activités économiques dans lesquelles on retrouve au moins 30% de sujets en situation passive sont :

ü l'agriculture, la sylviculture et la pêche (39.7%),

ü l'industrie chimique (33.7%),

ü les autres activités spécialisées scientifiques et techniques (32.9%),

ü le travail du bois, les industries du papier et de l'imprimerie (32.9%),

ü les activités de services administratifs et de soutien (32.5%),

ü le transport et l'entreposage (31.8%),

ü la production et distribution d'eau, l'assainissement, la gestion des déchets et la dépollution (31.8%).

Parmi les activités économiques ayant le plus grand nombre de salariés concernés par la situation de passivité, on peut citer (entre parenthèses, nombre de salariés/agents du secteur et taux) :

ü le commerce, la réparation automobile et de motocycles (707 800, 24.8%),

ü les activités de services administratifs et de soutien (495 900, 32.5%),

ü le transport et l'entreposage (370 200, 31.8%),

ü l'hébergement médico-social et social et l'action sociale sans hébergement (308 200, 25%).

Exposition selon la famille professionnelle

De nombreuses familles professionnelles présentent des taux de sujets en situation de passivité au-delà de 25%. Nous prendrons en compte celles pour lesquelles ce taux est supérieur à 30% :

ü les agents de gardiennage et de sécurité (47.7%),

ü les agents d'entretien (46.6%),

ü les conducteurs de véhicules (39.8%),

ü les caissiers et employés de libre-service (39.1%),

ü les agriculteurs, éleveurs, et bûcherons (37.8%),

ü les ouvriers qualifiés des industries de process (36.9%),

ü les ouvriers qualifiés travaillant par enlèvement de métal (35.6%),

ü les ouvriers qualifiés de l'électricité et de l'électronique (34.7%),

ü les ouvriers qualifiés de la mécaniques (32.2%),

ü les ouvriers non qualifiés de la manutention (32.2%),

ü les ouvriers non qualifiés du gros œuvre du bâtiment, des travaux publics, du béton et de l'extraction (30.4%).

Parmi les familles professionnelles, celles qui ont les nombres les plus importants de sujets concernés et/ou de forts taux de sujets en situation passive (entre parenthèses, nombre de salariés / agents du secteur et taux) :

ü les agents d'entretien (467 500, 46.6%),

ü les conducteurs de véhicules (266 300, 39.8%),

ü les vendeurs (224 000, 27.1%),

ü les employés administratifs d'entreprise (184 000, 29.7%),

ü les caissiers et les employés de libre-service (177 700, 39.1%),

ü les ouvriers qualifiés des industries de process (124 900, 36.9%),

ü les ouvriers non qualifiés de la manutention (124 900, 36.9%).

Exposition selon le sexe et le type d'employeurs

Chez les hommes, seule la Fonction publique territoriale présente un taux de sujets en situation de passivité (23%) allant au-delà de celui de l'ensemble de la population (22.6%), celui de la Fonction publique hospitalière étant le plus faible avec 15.2% de sujets passifs.

Chez les femmes, seules les salariées du privé (25.6%) et les agents de la Fonction publique territoriale (24.5%) présentent des taux de sujets passifs allant au-delà de celui de l'ensemble de la population.

Exposition selon le sexe et la CSP

Les expositions à des situations de passivité sont supérieures à celle de l'ensemble de la population pour les CSP suivantes (entre parenthèses, respectivement pour hommes et femmes) :

ü  les employés administratifs du public et du privé (25.7% et 25.5%),

ü  les employés de commerce et de service (31.3% et 31.6%),

ü  les ouvriers qualifiés (27% et 38.8%),

ü  les ouvriers non qualifiés et agricoles (38.2% et 43.2%).

[NDR – Une étude publiée récemment Niedhammer I, et al (voir la référence plus haut à la fin du chapitre sur le job strain) s'est intéressée à l'association entre situation de passif, selon le modèle de Karasek, et mortalité cardiovasculaire (par maladie coronarienne et accident vasculaire cérébral).

Elle a pris en compte globalement la situation de passif et a trouvé pour une exposition cumulée à cette situation une augmentation de l'association avec la mortalité avec des HR de 1.23 [1.18-1.29] chez les hommes et de 1.44 [1.33-1.57] chez les femmes.

Mais, prise en compte séparément, l'exposition cumulée à une faible latitude décisionnelle est aussi associée à une augmentation de la mortalité cardiovasculaire avec des HR de 1.19 [1.16-1.19] pour les hommes et de 1.35 [1.26-1.44] pour les femmes.] (Table 2, p. 5).

Une autre étude récente a aussi montré qu'une faible latitude décisionnelle est, en elle-même, un facteur de risque professionnel associé à un risque accru de de mortalité toutes causes et cardiovasculaire. La mortalité est la suivante :

ü toutes causes confondues avec ajustement sur toutes les variables (HR de 1.05 IC à 95% de [1.01-1.10] :

ü par maladie coronarienne avec HR de 1.23 [1.17-1.3] après ajustement sur toutes les variables.

(" Psychosocial work stressors and risk of all-cause and coronary heart disease mortality: A systematic review and meta-analysis " Taouk et al. – doi:10.5271/sjweh.3854).

Une faible latitude décisionnelle peut aussi être associée à une augmentation des atteintes psychiques : une augmentation de la présence de symptômes dépressifs (respectivement de 1.24 et 1.32 pour hommes et femmes). (" L’organisation du travail à l’épreuve des RPS "

Dares Analyses n° 004 – Janvier 2016.)

Salariés en manque de reconnaissance

l’étude Sumer a permis de mettre en évidence qu'une majorité des salariés / agents (50.6%, soit un effectif de 11 409 900) ressentent un manque de reconnaissance de leur implication dans leur travail.

Exposition selon le profil du salarié

Catégorie socioprofessionnelle

Deux CSP sont surreprésentées en termes de salariés exposés à un manque de reconnaissance : les professions intermédiaires (56.1%) et les employés administratifs du public et du privé (56.3%).

Sexe et l'âge

Les hommes sont modérément sous-exposés au manque de reconnaissance (50%) alors que les femmes le sont un peu plus (51.3%°).

Chez les hommes, les tranches d'âge exposées au-delà du taux de l'ensemble de la population sont les 30 à 39 ans (51.4%), les 40 à 49 ans (53.3%) et les 50 à 59 ans (51.9%).

Ce sont les mêmes tranches d'âge qui sont surexposées au manque de reconnaissance chez les femmes avec des taux de 52.5% pour les 30 à 39 ans, de 56.8% pour les 40 à 49 ans et de 52.6% pour les 50-59 ans.

Statut

Seuls les salariés en CDI ou les fonctionnaires indiquent qu'ils sont plus exposés (51.6%) que l'ensemble de la population (50.6%).

Type d'employeurs

Les salariés du privé et les agents de la Fonction publique d'Etat sont nettement plus exposés que l'ensemble de la population au manque de reconnaissance avec des taux respectifs de 61.1% et 57.7%.

Taille de l'établissement

On retrouve un taux de manque de reconnaissance allant au-delà de celui de l'ensemble de la population dans les établissements de 50 salariés / agents et plus : 55.3% pour ceux de 50 à 249 et de 250 à 499 salariés et 54.9% dans ceux de 500 salariés et plus.

Exposition selon les secteur d'activité

Les activités ayant la plus grande proportion de salariés concernés par le manque de reconnaissance et les effectifs de salariés concernés les plus importants sont (entre parenthèses leur effectif et le taux de salariés faisant état d'un manque de reconnaissance) :

ü l'enseignement (828 800, 65.3%),

ü les télécommunications (58 300, 64.3%),

ü le travail du bois, les industries du papier et l'imprimerie (130 700, 58.4%),

ü la fabrication de textiles, les industries de l'habillement, du cuir et de la chaussure (66 700, 59%),

ü l'industrie chimique (81 700, 56.4%).

Exposition selon la famille professionnelle du salarié

On distingue quatre familles professionnelles présentant des taux importants de salariés indiquant un manque de reconnaissance (entre parenthèses, leur effectif et le taux) :

ü les enseignants (575 100, 71.7%),

ü les ouvriers qualifiés de la mécanique (67 300, 69.1%),

ü les techniciens et agents de maîtrise de l'électricité et de l'électronique (42 200, 67.6%),

ü les ouvriers qualifiés de l'électricité et de l'électronique (47 400, 67.5%).

Exposition selon le sexe et l'employeur

Tant chez les hommes que chez les femmes, les salariés des mêmes deux types d'employeurs présentent un taux de manque de reconnaissance nettement plus élevé que l'ensemble de la population. Il s'agit de la Fonction publique de l'Etat avec respectivement pour hommes et femmes des taux de 56.1% et 65.7% et de la Fonction publique hospitalière avec des taux respectifs de 56.2% et 58.1%.

Exposition selon le sexe et la CSP

Là aussi les hommes et les femmes des mêmes CSP présentent des taux plus importants de déni de reconnaissance : les professions intermédiaires avec des taux respectifs de 54.1% et 58% et les employés administratifs du public et du privé avec des taux respectifs de 57.8% et 55.9%.

[NDR – Le manque de reconnaissance peut retentir de manière importante sur le mental. Ainsi dans le document de la Dares Analyses n° 4 de janvier 2016, le manque de reconnaissance est associé à quasi un doublement des symptômes dépressifs (2.08 pour les hommes et 1.94 pour les femmes) et des symptômes anxieux (1.91 pour les hommes et 2.06 pour les femme).

Dans son document, basé sur l'enquête Conditions de travail et RPS 2016, Thomas Coutrot, indique, au contraire, l'effet bénéfique de la reconnaissance au travail. Ainsi, page 49, un travail reconnu diminue la présence de symptômes dépressifs (OR de 0.69), la santé altérée (0.82) et les absences maladie de plus de 10 jours par an (OR de 0.81). (" Travail et bien-être psychologique " – Dares 2018 - Documents d'études).]

Agressions verbales ou physiques / sexuelles

Les agressions verbales, physiques / sexuelles concernent 18.3% de la population, soit un effectif de 4 527 200 salariés.

Exposition selon le profil du salarié

Catégorie socioprofessionnelle

Les CSP dans lesquelles on retrouve un taux de salariés ayant subi des agressions au cours des 12 derniers mois - qu'elle soit due au public, à un ou des collègues ou des à des supérieurs hiérarchiques – supérieur à celui de l'ensemble des salariés sont les suivantes :

ü les professions intermédiaires (23%),

ü les employés administratifs du public et du privé (21.3%),

ü les employés de commerce et de service (22%).

Sexe et âge

Les femmes sont plus concernées par les violences (20.9%) que les hommes (15.7%).

Des tranches d'âge les plus concernées par une surreprésentation du taux de salariés concernés par les violences ne sont présentes que chez les femmes : les 25-29 ans (23.2%), les 30-39 ans (22.7%), les 40-49 ans 22.6%) et les 50-59 ans (19.8%).

Tranches d'âge

Pour les deux sexes, seules les tranches d'âge des 30-39 ans et des 40-49 ans présentent un taux plus élevé que celui de l'ensemble de la population avec des taux respectifs de 20.2% et 19.2%).

Selon le statut

Un taux plus élevé de sujets concernés par les violences que dans l'ensemble de la population ne se retrouve que pour les salariés du privé en CDI et les agents de la fonction publique avec u taux de 19.7%.

Type d'employeurs

Les trois fonctions publiques sont particulièrement concernées par les violences avec des taux de 30.3% pour la Fonction publique d'Etat, de 21.2% pour la Fonction publique territoriale et de 33.7% pour la Fonction publique hospitalière.

Taille d'établissement

Des taux plus élevés de salariés concernés par les violences que celui de l'ensemble de la population se retrouvent dans les établissements de :

ü 10 à 49 salariés (18.8%),

ü 50 à 249 salariés (19.9%),

ü 500 salariés et plus (21.7%).

Exposition selon le secteur d'activité et son effectif

De nombreux secteurs d'activité sont concernés par un taux plus important de salariés sujets à des violence que l'ensemble de la population (avec entre parenthèses leur effectif si celui-ci est important et leurs taux et, sinon, que leur taux) :

ü l'enseignement (447 500, 32.6%),

ü les activités de la santé humaine (558 800, 31%),

ü la production et distribution d'eau, assainissement, gestion des déchets et dépollution (24.5%),

ü l'administration publique (683 800, 23.9%),

ü l'hébergement médico-social et social et l'action sociale sans hébergement (356 000, 23%),

ü les activités immobilières (22.6%),

ü les activités financières et d'assurance (21.8%),

ü le transport et l'entreposage (291 000, 21.2%),

Exposition selon la famille professionnelle des salariés

De nombreuses familles professionnelles présentent des taux de salariés exposés aux violences plus importants que l'ensemble de la population. Je retiens celles pour lesquelles ce taux est supérieur ou égal à 30% :

ü les professionnels de l'action sociale et de l'orientation (42.7%),

ü les infirmiers et les sages-femmes (42.4%),

ü l'armée, la police et les pompiers (42%),

ü les médecins et assimilés (38.5%),

ü les enseignants (38.4%),

ü les employés de banque et des assurances (34.7%),

ü les agents de gardiennage et de sécurité (33.6%),

ü les professions intermédiaires administratives de la fonction publique de catégorie B et assimilés (32.4%),

ü les professions paramédicales (30.6%).

Parmi les familles professionnelles, celles qui ont le plus grand nombre de salariés exposés aux violence sont (entre parenthèses, leur effectif et leur taux) :

ü les enseignants (332 100, 38.4%),

ü les aides-soignants (244 900, 28.8%),

ü les vendeurs (213 700, 21%),

ü les employés administratifs de la fonction publique de catégorie C et assimilés (194 400, 24.6%),

ü les infirmiers et les sages-femmes (178 500, 42.4%),

ü les conducteurs de véhicules (178 500, 22.6%),

ü les secrétaires (171 000, 21.5%),

ü les employés administratifs d'entreprises (165 200, 23.4%),

ü l'armée, la police et les pompiers (152 500, 42%),

ü les agents de gardiennage et de sécurité (149 300, 33.6%),

ü les professionnels de l'action sociale et de l'orientation (132 000, 42.7%).

Exposition selon le sexe et le type d'employeur

Chez les hommes, on trouve un excès de sujets concernés par les violences dans la Fonction publique d'Etat (29.4%) et la Fonction publique hospitalière (29.3%).

Chez les femmes, outre ces deux types d'employeurs avec des taux respectifs de sujets exposés aux violences de 31.2% et 34.9%, la Fonction publique territoriale est aussi concernée avec un taux de 23.3%.

Exposition selon le sexe et la CSP

Chez les hommes, les employés de commerce et de service sont plus sujets aux violences que l'ensemble de la population avec un taux de 29.9% ainsi que les employés administratifs du public et du prive avec un taux de 21.3%.

Chez les femmes, des excès de salariées exposées aux violences se retrouvent chez les cadres et professions intellectuelles supérieures (22.7%), les professions intermédiaires (27.6%) et les employés administratifs du public et du prive avec un taux de 21.3%.

[NDR – Une méta-analyse récente s'est intéressée aux effets de la violence et des menaces de violence dans le monde du travail.

Cette étude montre que l'exposition à des violences est associée à une augmentation de dépressions, avec des OR de 1.48 [1.18-1.86] chez les hommes et de 1.45 [1.27-1.65] chez les femmes. L'exposition à des violences et à des menaces de violences augmente globalement l'association avec la dépression pour hommes et femmes avec un OR de 1.42 [1.31-1.54] ainsi que la présence de symptômes dépressifs avec un OR de 2.33 [1.71-3.17] et le risque de burn out avec un OR de1.60 [1.25-2.05]. (" Work-related exposure to violence or threats and risk of mental disorders and symptoms: a systematic review and meta-analysis " L.A. Rudkjoebing et al – DOI:10.5271/sjweh.3877.]

https://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/dares_risques-psychosociaux.pdf

 

·     Les infirmiers et la crise sanitaire (Ordre National des infirmiers)

Les données présentées figurent dans le communiqué de l'Ordre National des infirmiers daté du 11 octobre 2020 auquel vous pourrez accéder en pièce jointe et sur le site de l'Ordre des infirmiers à l'adresse en fin de commentaire.

L'Ordre National des infirmiers a réalisé entre le 2 et le 7 octobre 2020 une enquête auprès des 700 000 infirmiers qui y sont inscrits. Près de 60 000 infirmiers ont répondu à cette enquête.

Points de fragilité

Alors que l'on constate une recrudescence de l'épidémie, l'enquête a mis en évidence certains points de fragilité :

ü les effectifs sont sous tension : parmi les infirmiers exerçant en établissement de soins, 33% indiquent être moins nombreux que d'habitude avec un risque de rupture dans la mesure où 57% des répondants déclarent ne pas disposer du temps nécessaire pour prendre en charge les patients ;

ü les enseignements de la première vague ne semblent pas suffisamment pris en compte, 43% des infirmiers mais 46% des libéraux considèrent qu'on ne se repose pas suffisamment en ville pour lutter contre la Covid-19, par exemple pour réaliser les tests de dépistage, poursuivre les soins des patients chroniques ou pour le suivi à domicile des patients contaminés ;

ü les équipements de protection se révèlent de nouveau insuffisants pour 44% des infirmiers et 68% chez les infirmiers libéraux.

Evolution des conditions de travail

Les infirmiers déclarent des conditions de travail dégradées ;

ü 59% des infirmiers répondants déclarent que leur charge de travail a augmenté depuis le début de la crise. Ils sont 75% parmi ceux exerçant dans des établissements ;

ü près de 2/3 des infirmiers déclarent que leurs conditions de travail se sont détériorées depuis le début de la crise mais il s'agit de 64% des infirmiers exerçant en établissements ;

ü près de 20% des infirmiers n'ont pas pu prendre de congés depuis mars 2020, 29% parmi les libéraux.

Les infirmiers se sentent aussi confrontés à une insécurité réglementaire. En effet, 30% des répondants disent exercer des tâches qui sortent de leur champ de compétences réglementaires pour faire face au surcroît d'activité général lié à la Covid-19, aussi bien en ville que dans les établissements.

Ainsi, 3.5% des infirmiers déclarent avoir été invités à travailler alors qu'ils avaient été testés positifs et 20% des infirmiers ont constaté qu'il a été demandé à l'un de leurs collègues de travailler alors qu'il était positif à la Covid-19. Ce sont 27% des infirmiers travaillant dans des établissements de santé qui ont constaté ce phénomène;

Conséquences de ces conditions de travail

La dégradation des conditions de travail des infirmiers a des conséquences graves sur leur état de santé et sur leur motivation :

ü 57% des infirmiers déclarent être en situation d'épuisement professionnel au moment de l'enquête alors qu'ils étaient 33% à le faire avant la crise ;

ü cette situation risque d'avoir un impact sur la qualité des soins pour 48% des répondants ;

ü 37% des infirmiers estiment que la crise leur a donné envie de changer de métier et 43% ne savent pas s'ils exerceront le même métier dans 5 ans. Ceci alors que déjà 34 000 postes d'infirmiers sont vacants et qu'il faut en créer plus pour répondre aux besoins du terrain.

Conclusion du Président de l'Ordre national des infirmiers

" Les infirmiers doivent aujourd’hui de nouveau faire face à la recrudescence des cas de Covid-19 et se sentent désarmés pour y parvenir, au point de se demander s’ils vont continuer à exercer leurs fonctions à l’avenir. Nous ne pouvons pas accepter cela. Les infirmiers sont indispensables au fonctionnement du système de soins. Au-delà des considérations de court terme et de gestion de crise, nous devons à tout prix revaloriser la profession infirmière, certes financièrement, mais aussi et surtout la rendre plus attractive, par exemple en permettant aux infirmiers d’évoluer tout au long de leur carrière, en reconnaissant leur contribution réelle à l’offre de soins, en leur permettant d’avancer vers davantage d’autonomie… J’en appelle également à la responsabilité de chacun. Il est essentiel que les Françaises et les Français respectent scrupuleusement les gestes-barrières (distanciation physique, port du masque, lavage des mains régulier…) pour que nous puissions vaincre collectivement l’épidémie. "

https://www.ordre-infirmiers.fr/assets/files/000/pdf/CP%20Consultation%20COVID%2060%20000%20r%C3%A9pondants%20Ordre%20National%20des%20Infirmiers.pdf

 

·     Enquête santé au travail et Covid-19 (Malakoff Humanis / Ifop)

Matériel et méthode

Cette étude intitulée " La santé au travail à l'épreuve du Covid " a été réalisée par l'Ifop pour Malakoff Humanisa. Elle a été réalisée par recueil des données su Internet du 19 juin au 15 juillet 2020 auprès d'un échantillon représentatif de 2504 salariés du secteur privé dont 2917 ont travaillé durant la crise sanitaire.

Résultats

Impact de la crise

Les salariés sont 12% à déclarer que leur santé s'est dégradée pendant la crise contre 8% qui indiquent une amélioration.

Les salariés aidants et les salariés malades (maladie chronique ou maladie grave ou handicap) sont plus concernés par la dégradation de leur état de santé.

La crise a engendré une amplification des risques psychologiques avec 45% des répondants qui se sentent plus fatigués psychologiquement.

Cependant, chez une majorité de salariés (52%) la crise a eu un effet positif puisqu'ils ont cherché à avoir un mode de vie plus sain relatif aux comportements alimentaires, à l'activité physique, à la consommation d'alcool ou de tabac. Et 70% de ces sujets déclerent vouloir maintenir ces nouvelles habitudes.

Fragilités accentuées et inégalités renforcées

L'étude constate de fortes disparités de vécu de la crise selon le profil socio-démographique des salariés, leur secteur d'activité et la taille de l'entreprise mais aussi selon les situations de travail vécues et le contexte personnel.

Par exemple, la crise a impacté le rythme de travail de 62% des salariés. Dans 40% des cas, ce rythme de travail a augmenté, pour 33% avec un travail plus intense, 22% une surcharge de travail et 23% qui estimaient que le travail empiétait sur leur vie personnelle. Il s'agit plus fréquemment les aidants, les jeunes; les cadres, les managers et les personnes ayant des enfants à charge.

Une moindre partie des salariés a vécu un ralentissement de leur rythme de travail (22%) avec une sous-charge de travail (16%), une diminution de l'intensité de travail (12%), une diminution de la pression (12%) et des relations vie professionnelle / vie personnelle qui se sont améliorées (13%). Ces situations concernent davantage les ouvriers, les salariés travaillant dans les petites entreprises de moins de 10 salariés ainsi que celles ayant vécu une période chômage partiel.

Retentissement sur le plan familial

Pour 33% des répondants, la santé des proches a représenté une source d''inquiétude ou de stress durant la crise sanitaire.

Il s'agit de façon plus importante des aidants. Leur situation financière a été dégradée pour 16% des répondants, en particulier les salariés touchés par le chômage partiel. Enfin, 6% des salariés ont été touchés par un deuil lié directement à la Covid-19.

Augmentation des risques psychosociaux (RPS)

Trois facteurs de RPS se sont dégradés durant la crise sanitaire : l'intensité du travail, l'insécurité de la situation professionnelle et la qualité des rapports sociaux au travail. En effet, 33% des salariés estiment que leur travail est plus intense qu'avant la crise alors qu'ils sont 12% à estimer qu'il l'est moins, 23% considèrent qu'il empiète davantage sur leur vie personnelle versus 13% qui pensent le contraire, 14% des salariés déclarent subir plus de tensions au travail contre 3% qui pensent l'inverse et 20% des salariés indiquent avoir peur de perdre leur emploi depuis la crise contre 3% qui indiquent le contraire.

L'isolement professionnel a aussi été mal ressenti par 20% des salariés, taux qui est plus important pour les salariés en télétravail à 100%, les salariés qui ont été alternativement au chômage partiel et en télétravail, les salariés des grandes entreprises et les salariés qui ont gardé leurs enfants à domicile.

Appréciation de l'action des entreprises

Une majorité de 80% des salariés estiment que leur entreprise s'est bien adaptée à la crise. Ils sont plus de 65% à estimer que leur entreprise a mené des actions positives dans les domaines de maintien des emplois, de continuité d'activité, de communication, de capacité à innover et maintien du lien social.

Une majorité de 85% des salariés indiquent que leur entreprise a été fortement mobilisée pour la santé au travail et qu'elle a protégé leur santé. En tête des aspects positifs avec les mesures prises pour sauver l'emploi. Les répondants sont 78% à estimer que leur entreprise a adapté l'organisation du travail aux enjeux de ka protection de leur santé mais 57% des salariés indiquent ne pas avoir été suffisamment accompagnés sur le plan psychologique.

Les managers et la crise sanitaire

Une majorité de 60% des répondants indiquent que leur manager a cherché à maintenir l'esprit d'équipe.

Pour 50% des répondants, leur manager a adapté ses pratiques managériales et, pour 48% d'entre eux, il a été plus à leur écoute.

Les attentes vis-à-vis de la santé au travail

La crise sanitaire a généré des attentes fortes d'actions de la part des entreprises dans les domaines de la prévention pour la santé et de l'accompagnement des salariés les plus fragilisés.

Ainsi, 86% des répondants attendent de leur entreprise qu'elle intègre durablement la prévention et la santé dans sa stratégie mais seulement 53% sont persuadés qu'elle le fera.

Une majorité de 85% des répondants souhaitent que l'humain soit plus intégré dans la démarche de l'entreprise relativement à la qualité des conditions de travail et d'emploi ainsi que du climat social. Ils souhaitent aussi un engagement environnemental plus fort mais moins de la moitié y croit.

https://lecomptoirdelanouvelleentreprise.com/la-sante-au-travail-a-lepreuve-du-covid/

 

 

Jacques Darmon

 

Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.