Lettre d'information 04 du 23 février 2020



Le 23 février 2020

Dans cette courte lettre d'information… Des jurisprudences relatives à… une faute inexcusable reconnue en l'absence de déclaration d'accident du travail… la contestation d'une expertise pour risque grave et ce qui peut le justifier… et à la reconnaissance d'un harcèlement moral pour lequel le juge doit prendre en compte l'ensemble des faits présentés par le salarié… Une étude sur l'association entre troubles et symptômes psychiques et exposition à des violences et menaces au travail… Un point sur le risque routier professionnel sur un site du ministère du travail…

·     Jurisprudence
La prescription de la déclaration d'une faute inexcusable est interrompue par une action au pénal et n'impose pas la déclaration dans les deux ans de l'accident du travail
Cet arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de cassation du 23 janvier 2020 – Cass. 2e Civ. n° 18-19080 – bénéficie d'une grande publicité puisqu'il est diffusé dans le Bulletin d'information et des arrêts de la Cour de cassation et sur Internet.
Les faits – Un ouvrier est mortellement accidenté, le 27 novembre 2008, alors qu'il effectue des travaux pour un sous-traitant de l'entreprise chargée de la rénovation d'un bâtiment. Ceci, à la suite d'une chute de la toiture du bâtiment sur laquelle il effectuait des travaux. Le 22 février 2012, sa mère, Mme A…, saisit une juridiction de Sécurité sociale afin de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur. Dans les deux ans après la survenue de l'accident, Mme A… avait attrait l'employeur devant le tribunal correctionnel par citation directe.
L'employeur de l'entreprise donneuse d'ordre conteste le fait que la cour d'appel l'a condamné à rembourser, solidairement avec l'entreprise sous-traitante, les frais engagés par la caisse primaire d'Assurance maladie pour indemniser Mme A… du préjudice moral lié à la faute inexcusable de l'employeur.
Le moyen du pourvoi de l'employeur donneur d'ordre repose, d'une part, sur la prescription de la demande de faute inexcusable faite 4 ans après l'accident et, d'autre part, sur l'absence de déclaration de l'accident du travail dans le délai de 2 ans après sa survenue [NDR – Voir l'article L. 431-2 du Code de la Sécurité sociale sur la prescription].
La Cour de cassation ne suit pas cette argumentation : " Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la prescription biennale opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire de la victime ou de ses ayants droit commence à courir à compter de la date de l'accident et se trouve interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, d'autre part, que si elle ne peut être retenue que pour autant que l'accident survenu à la victime revêt le caractère d'un accident du travail, la reconnaissance de la faute inexcusable, qui est indépendante de la prise en charge au titre de la législation professionnelle, n'implique pas que l'accident ait été préalablement déclaré à la caisse par la victime ou ses représentants dans le délai de deux ans prévu au second alinéa de l'article L. 441-2 du même code.
 Et attendu qu'ayant constaté que Mme A.… avait saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, le 22 février 2012, d'une demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur moins de deux ans après le jugement correctionnel du 16 décembre 2010 ayant définitivement condamné MM. Y ... et J.…, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur n'était pas prescrite ".
Le pourvoi de l'employeur est rejeté.

Exemples de faits permettant à un CHS-CT d'obtenir une expertise au titre du risque grave de l'article L. 4614-12 du Code du travail
Il s'agit d'un arrêt inédit de la Cour de cassation du 5 février 2020 – Cass. Soc. n° 18-23753 – consacré à une demande d'expertise au titre de l'article L. 4614-12 du Code du travail. En préambule, il faut préciser que l'article L. 4614-12, qui a été abrogé par l'article 1 de ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017, prévoyait au 1°, qui est évoqué dans l'arrêt, que le CHS-CT pouvait faire appel à un expert " Lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ". A noter que cette expertise est dorénavant prévue à l'article L. 2315-94 pour le comité social et économique.
La société "Pages jaunes" est une spécialiste des réorganisations. Elle est connue pour avoir fait émerger, déjà à l'occasion d'une réorganisation, une jurisprudence de la Cour de cassation permettant des licenciements pour sauvegarder la compétivité de l'entreprise (Cass. Soc. du 11 janvier 2006, 05-40.977, publié au Bulletin) ! Sauvegarde de la compétitivité qui a été ensuite intégrée au Code du travail en 2016, à l'article L. 1233-3, comme l'un des motifs justifiant le licenciement pour motif économique.
Les faits - La société "Pages jaunes" a engagé en février 2018 une procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel pour un projet de réorganisation appelé " Projet de transformation de la société Pages jaunes ". Dans ce cadre, elle a mis en place, au titre de l'article L. 4616-1 du Code du travail, une instance temporaire de coordination des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (ICCHSCT) de ses différentes entités. Cette ICCHSCT a nommé le 2 mars 2018 un expert dont l'une des missions était d'analyser les risques psychosociaux qui pouvaient résulter de la réorganisation de l'entreprise.
Le 19 avril 2018, le CHS-CT de l'entité Sud-Est de "Pages jaunes" vote le recours à une expertise pour risque grave, en application du 1° de l'article L. 4614-12 évoqué ci-dessus.
La société saisit le tribunal de grande instance (TGI) afin de faire annuler la délibération du CHS-CT ayant nommé l'expert au titre de l'article L. 4614-12.
Une ordonnance d'un juge du tribunal de grande instance déboute la société de ses demandes et la condamne au paiement au CHS-CT d'une somme de 6 600 € pour le remboursement de frais et honoraires.
La société se pourvoit en cassation.
L'argumentation du pourvoi de l'entreprise, allant à l'encontre de l'ordonnance du TGI, repose sur les points suivants :
ü il y a déjà une expertise prévue par l'instance de coordination des CHS-CT portant sur les risques psychosociaux susceptibles d'être générés par le projet de réorganisation ;
ü le risque devant donner lieu à l'expertise au titre de l'article L. 4614-12 doit être avéré et identifié par des données objectives ;
ü la nécessité de l'expertise doit être appréciée en tenant compte des mesures prises par l'entreprise pour remédier au risque et de la qualité de l'information fournie à cet égard aux représentants du personnel.
La réponse apportée par la Haute juridiction est la suivante :
" L'ordonnance constate que le CHSCT fait état de la souffrance des salariés du fait notamment d'un nombre important de réorganisations et plus particulièrement, au sein du service force de vente, de la mise en place par les managers "du process sous activité" à l'égard des salariés ayant du retard dans la réalisation de leurs objectifs. Elle relève par ailleurs que le CHSCT a alerté la direction sur un taux élevé d'absentéisme, le désengagement, le stress et l'épuisement des salariés, engendrant des risques routiers augmentés pour la force de vente itinérante ainsi qu'un risque de conflit avec la hiérarchie commerciale, entre services ou avec les clients. L'ordonnance retient en conséquence l'existence de risques avérés et objectivement démontrés que le contexte de mutation de la société, de fermetures d'agences et de suppression d'emplois ne peut qu'aggraver.
Le président du tribunal de grande instance a pu déduire de ces éléments l'existence d'un risque grave spécifique encouru par les salariés des établissements compris dans le périmètre du CHSCT et, plus particulièrement, ceux du service force de vente, justifiant le recours à une expertise sur le fondement de l'article L. 4614-12, 1°, du code du travail indépendamment de l'expertise pour projet important ordonnée par l'instance temporaire de coordination en application de l'article L. 4616-1 du même code. "
La Cour de cassation rejette donc le pourvoi de l'entreprise.
J'avais commenté, dans la lettre d'information du 10 juin 2018, un arrêt allant déjà dans le même sens (Cass. Soc du 9 mai 2018, n° 17-10852, inédit) dans lequel la Haute juridiction avait cassé l'arrêt de la cour d'appel qui considérait que la survenue antérieure de plusieurs accidents du travail ne caractérisait pas le risque grave justifiant l'expertise de l'article L. 4614-12.

Tous les éléments évoqués par un salarié doivent être pris en compte pour apprécier l'existence d''un harcèlement moral
Il s'agit d'un arrêt inédit du 8 janvier 2020 - Cass. Soc. n° 18-22055 - qui traite d'une demande d'une salariée protégée d'annulation d'un licenciement pour inaptitude suite à un harcèlement moral.
Les faits – Une salariée a été embauchée dans une société fabriquant des équipements automobiles et d'aviation en octobre 2001 en tant qu'opératrice. Elle occupait en dernier lieu le poste d'animatrice du secteur montage/démontage des équipements d'aviation. Depuis le mois de mars 2014, elle était titulaire d'un mandat syndical. Le 27 juin 2014, son employeur lui notifie un avertissement. Après plusieurs arrêts de travail le médecin du travail délivre un avis d'inaptitude indiquant que " La salariée est déclarée inapte à tous les postes de l'entreprise. Etant donné l'état de santé de la salariée, il n'y a pas de proposition d'aménagement ou de mutation de poste " Elle est licenciée le 10 février 2016 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, suite à l'obtention de l'autorisation de licenciement de l'inspecteur du travail du 5 février 2016.
Elle saisit la justice prud'homale pour demander l'annulation de son avertissement et des dommages-intérêts pour sanction injustifiée ainsi que l'annulation de son licenciement pour inaptitude, du fait du lien de celle-ci avec un harcèlement moral, et le paiement de diverses sommes au titre du licenciement nul, d'une indemnité compensatrice de préavis et de dommages intérêts pour préjudice moral.
La salariée se pourvoit en cassation après que la cour d'appel l'a déboutée de ses demandes de reconnaissance du harcèlement moral et de ses conséquences sur la rupture du contrat de travail. En revanche, l'avertissement du 27 juin 2014 est annulé.
La salariée soulève trois moyens devant la Cour de cassation. Le premier porte sur le fait que la cour d'appel l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral. Le second moyen porte sur le fait que la cour d'appel n'a pas considéré que son licenciement pour inaptitude est dû au fait que celle-ci est liée au harcèlement moral et, à ce titre, nul. Le troisième moyen porte sur le refus d'indemnité compensatrice de préavis.
L'argumentation de la cour d'appel concernant l'absence de reconnaissance d'un harcèlement moral est que les faits dont se plaint la salariée sont uniquement l'avertissement, reconnu comme injustifié, du 27 juin 2014 et le retrait de fonctions que l'employeur aurait justifié par des éléments objectifs. Ainsi, pour la cour d'appel, un harcèlement moral ne pouvait être justifié uniquement par une sanction injustifiée [NDR – L'article L. 1152-1 du Code du travail faisant référence à des actes répétés].
L'appréciation de la Haute juridiction diffère de celle de la cour d'appel car " en se déterminant ainsi, sans examiner l'ensemble des éléments invoqués par la salariée au titre du harcèlement moral alors que la salariée faisait également valoir dans ses conclusions que le responsable projet avait mis en cause la véracité de son arrêt maladie, avait estimé qu'elle voulait ennuyer ses collègues, que l'organisation avait été modifiée de façon spécifique pour la soumettre à trois supérieurs hiérarchiques, que, de façon humiliante, ses tâches étaient inscrites au jour le jour sur un tableau accessible à tous, que, lorsqu'elle s'est présentée sur son lieu de travail le 18 novembre 2014, tout son matériel et notamment son ordinateur avait été retiré de son bureau, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ".
L'arrêt de la cour d'appel est donc cassé sur ce moyen et cela entraîne, de facto, la cassation sur les deux autres moyens. L'affaire est renvoyée devant une autre cour d'appel.

·     Exposition à des violences et menaces au travail et retentissement psychique (Etude)
Cet article a été publié en ligne en janvier 2020 par le Scandinavian Journal of Work and Environmental Health. Le titre de l'article signé de Rudkjoebing L.A. et al. est " Work-related exposure to violence or threats and risk of mental disorders and symptoms: a systematic review and meta-analysis ". Vous pouvez y accéder par doi:10.5271/sjweh.3877 ou par le lien en fin de commentaire.
Introduction
Dans une étude danoise de 39 000 personnes âgées de 18 à 64 ans sélectionnées par randomisation, 5.8% ont rapporté des violences physiques et 8.4% des menaces de violences physiques au travail.
[NDR – En France, une enquête de l'Ined, menée en 2015, dont les données complètes doivent paraître en mars 2020 a montré que, sur plus de 17 000 personnes interrogées, 17, 9% déclarent avoir subi au moins un fait de violence au cours des douze derniers mois dans le cadre de leur travail. Les femmes sont significativement plus concernées que les hommes : elles sont 20,1% à s’en déclarer victimes, contre 15,5% des hommes.]
Il n'existe pas de définition de la violence unanimement adoptée mais celle de l'Organisation internationale du travail est " Toute action, incident ou comportement qui s'écarte d'une conduite raisonnable durant laquelle une personne est agressée, menacée, a mal, est blessée durant ou du fait de son travail ". La violence peut être physique (coups et blessures) ou psychique (menaces, harcèlement).
Au moins trois méta-analyses ont montré une association entre une exposition aux violences et une augmentation du risque d'atteinte mentale.
Cette étude a pour objectif d'estimer la preuve épidémiologique de la relation entre violences et menaces au travail et la survenue de pathologies psychiques ( dépression et anxiété) et de symptomatologie psychiatrique. Dans cette étude ont été prises en compte les agressions physiques et/ou les menaces survenues dans le contexte du travail.
Méthodologie
Cet article fournit les résultats d'une méta-analyse portant sur 24 études, 10 études de cohortes (ou nichées dans une cohorte) et 14 études transversales.
Les sujets des différentes études étaient interrogés sur le fait qu'ils avaient subi des violences ou des menaces au cours des 12 derniers mois.
Résultats
Dépression et symptomatologie dépressive
Dépression
Quatre études ont porté sur la relation entre les violences et la survenue de dépression (dont une avec des résultats distincts pour hommes et femmes) et une sur les menaces et la survenue d'épisodes dépressifs (une étude donnant des résultats séparés pour hommes et femmes portant sur violences et menaces).
Le résultat global en est une augmentation significative de l'association entre l'exposition à ces violences et menaces et des états dépressifs avec un Risque relatif (RR) de 1.42 et un intervalle de confiance à 95% de [1.31-1.54].
Pour l'ensemble des études prises en compte, l'association est augmentée mais elle n'est pas toujours significative. Lorsque les résultats sont fournis pour hommes et femmes, pour ces dernières l'association est toujours significative entre dépression et violences (pour deux études, avec des RR respectivement de 1.51 [1.03-2.22] et de 1.45 [1.27-1.54]) et les menaces (une étude avec un RR de 1.48 [1.18-1.86]).
Symptomatologie dépressive
Huit études se sont intéressées à la relation entre violences et menaces et symptomatologie dépressive. Le résultat global est une augmentation significative de la symptomatologie dépressive en lien avec violences et menaces avec un RR de 2.33 [1.71-3.17].
Pour les huit études l'association entre symptomatologie dépressive et exposition à des violences ou menaces était augmentée.
L'association étant augmentée significativement, avec violences ou menaces, dans six des huit études.
Anxiété et autres atteintes psychiques
Prise d'anxiolytiques
L'association entre prise d'anxiolytiques et exposition à des violences a été prise en compte dans une seule étude avec exposition à des violences. Le résultat en est une augmentation non significative de l'association avec un RR de 1.05 [0.76-1.45].
Symptômes anxieux
L'association entre symptômes anxieux et menaces a été étudiée dans deux travaux et celle entre violences et anxiété dans une seul étude.
L'association entre menaces et violences dans les trois études est augmentée mais non significativement, avec un RR de 2.40 [0.78-7.36], une seule étude montrant une association significative entre l'exposition à des menaces et la présence de symptômes anxieux avec un RR de 6.72 [4.38-10.30].
Burn out
Cinq études se sont consacrées au burn out et le résultat global indique une augmentation de l'association entre celui-ci et l'exposition à des violences ou des menaces avec un RR de 1.60 [1.25-2.05].
Trois études montrent des résultats significatifs pour l'association du burn out et des violences (deux études avec un RR respectif de 2.02 [1.12-3.63] et 1.90 [1.72-2.11]) et une pour l'association avec des menaces (RR de 1.88 [1.06-3.32]).
Détresse psychologique
La détresse psychologique a fait l'objet de cinq études. Globalement, l'association de cette détresse psychologique avec violences ou menaces est significativement augmentée avec un RR de 1.29 [1.01-1.64].
Seulement deux études portant sur les menaces indiquent une augmentation significative du lien avec la détresse psychologique avec des RR de 1.41 [1.04-1.90] et 1.72 [1.08-2.76].
Troubles du sommeil
Les troubles du sommeil ont été recherchés dans trois études, dont deux consacrées uniquement aux menaces et la troisième prenant en compte violence et menaces. Globalement, il y a augmentation significative de l'association entre troubles du sommeil et violences et menaces avec un RR de 1.49 [1.14-1.96]. Dans trois cas, deux portant sur les menaces et la troisième sur les violences, l'association est significativement augmentée.
Conclusion
Les résultats de cette méta-analyse montrent une association entre les violences et les menaces au travail et des atteintes de la santé mentale. Cependant, la présence de biais et de facteurs confondants dans les études fait que les associations entre menaces et/ou violences et atteintes psychiques mises en évidence dans cette méta-analyse pourraient être plus faibles ou plus fortes.

·     Des informations sur le risque routier professionnel
Vous pourrez accéder sur le site du ministère du travail à des informations sur le risque routier.
En particulier, vous pourrez y trouver un document, que je commente ci-dessous, intitulé "L'essentiel du risque routier". Ce document a été réalisé dans le cadre d'une collaboration du ministère du Travail et du ministère de l’Intérieur, de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), de la Mutualité sociale agricole (MSA), de Santé publique France et de l’Unité Mixte de Recherche Épidémiologique et de Surveillance Transport Travail Environnement (UMRESTTE). Il est important d'indiquer que le risque routier représente la première cause de décès au travail.
Données sur les accidents de la route en lien avec le travail
Plus d'un tiers (38%) des accidents corporels routiers sont liés au travail.
Au total, en 2017, 53 616 personnes ont été victimes d'un accident de la route lié au travail avec au moins 4 jours d'arrêt, 14 040 dans le cadre d'un accident de mission (pendant le travail) et 39 576 dans le cadre d'un accident de trajet (entre domicile et lieu de travail).
Les accidents de la route représentent 10% de l'ensemble des accidents. Les accidents de trajet ou du travail routiers mortels représentent 40% de l'ensemble des accidents du travail mortels en 2017.
Ils ont entraîné, en 2017, 480 décès, 134 (120 hommes et 14 femmes) sont des accidents de mission et 346 des accidents de trajet (283 hommes et 63 femmes). Ainsi, 16% des décès suite à un accident du travail sont des accidents routiers de mission dans les Régimes général et agricole. La majorité des accidents de trajet (90%) ont lieu sur la route. Les décès liés aux accidents routiers (trajet et mission) représentent 40% des décès dus aux accidents de travail.
Les accidents routiers de mission ne sont pas les plus nombreux mais ils sont les plus graves. Ils causent 4.1 millions de journées d'arrêt de travail, soit l'équivalent de 16 000 salariés en arrêt durant une année. En moyenne, l'arrêt d'un salarié victime d'un accident de la route en lien avec le travail est de 77 jours, soit 10 jours de plus que pour les autres victimes d'accident de travail.
Les actions possibles pour les employeur
D'abord, les employeurs doivent évaluer le risque routier comme un risque professionnel à part entière.
Organiser les déplacements en prévoyant les temps nécessaires et en définissant le moyen de transport le plus adapté.
Bien choisir et entretenir les véhicules en fonction de l'activité à laquelle ils sont destinés et les aménager, le cas échéant, pour le transport de charges et d'outils.
Organiser les communications en privilégiant de les établir hors temps de conduite et proscrire l'utilisation du téléphone durant la conduite.
Former tous les acteurs concernés - chef d'entreprise, managers, membres du CSE, responsables du parc automobile et salariés – aux bonnes pratiques de prévention du risque routier;


Jacques Darmon

Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.



Lettre d'information du 9 février 2020



Le 9 février 2020

Au sommaire de cette lettre d'information… Parmi les textes législatifs et les questions parlementaires… un commentaire de l'avis du Conseil d'Etat sur la loi de réforme des retraites et sur certaines dispositions de cette dernière… un projet de loi visant à abroger des textes interdisant certaines activités professionnelles à des patients diabétiques… un arrêté fixant le montant non négligeable, pour 2018, que la Branche AT/MP doit verser à la Cnav pour compenser des départs anticipés à la retraite en lien avec les expositions aux pénibilités… une question sénatoriale relative à la prise en charge des personnes "électro-hypersensibles"… et une autre sur le manque de médecins de prévention dans l'Education nationale… Des jurisprudences relatives… au droit d'un salarié d'un sous-traitant, ayant eu une activité l'exposant à l'amiante dans un port, à bénéficier de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante de droit pour les dockers de ce port… à l'obligation d'obtenir l'autorisation préalable de la Cpam pour pouvoir quitter sa circonscription pendant un arrêt maladie… à la réparation d'une mise à la retraite discriminatoire d'un agent d'un établissement public industriel et commercial… et la dernière sur l'indépendance d'indemnisation d'un harcèlement moral et du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité… Un résumé du rapport annuel 2018 de l'Assurance maladie - Risques professionnels… Une enquête sur l'appréciation d'élus représentants du personnel sur le passage en CSE…

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, questions parlementaires
Avis du Conseil d'Etat et textes de loi sur la réforme des retraites
Deux projets de textes de loi (et de futures ordonnances) sont prévus pour la mise en œuvre d'un système de retraite (dit) universel. Ces textes ont été présentés devant le conseil des ministres le 24 janvier 2020. Les projets de loi ont, ensuite, été transmis à l'Assemblée nationale. Le premier est un projet de loi organique relatif au système universel de retraite qui se verra traité selon une procédure accélérée (n° 2622). Ce texte prévoit un certain nombre de dispositions techniques relatives au passage au système de retraite universel.
Le second projet de loi transmis à l'Assemblée nationale est intitulé " Projet de loi instituant un système universel de retraite " (n° 2623). Il comprend les dispositions pratiques de ce passage au système universel de retraite et j'en commenterai certaines pouvant interférer avec la santé au travail après avoir évoqué les critiques du Conseil d'Etat.
Le Conseil d'Etat a rendu un avis sur le projet de loi organique et le projet de loi instituant un système universel de retraite le 24 janvier 2020.
Cet avis est relativement critique sur ces projets de loi, non sur le fond, mais sur la forme.
D'emblée, il critique l'étude d'impact qui doit accompagner tout projet de loi en considérant qu'elle " est apparue insuffisante au regard des prescriptions de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009. Le Conseil d’Etat rappelle que les documents d’impact doivent répondre aux exigences générales d’objectivité et de sincérité des travaux procédant à leur élaboration et que chaque document élaboré pour un article ou groupe d’articles doit exposer avec précision tous les points énumérés à l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009. " Ainsi, le Conseil d'Etat considère les " projections financières ainsi transmises lacunaires et que, dans certains cas, cette étude reste en deçà de ce qu'elle devrait être, de sorte qu'il incombe au Gouvernement de l'améliorer encore avant le dépôt du projet de loi au Parlement " (p. 4).
Une seconde critique porte sur rapidité avec laquelle le Gouvernement procède au sujet de ces projets de loi, qui a amené le Conseil d'Etat à se prononcer dans un délai de 3 semaines sur des textes conséquents, de même que la saisine des organismes ayant à émettre un avis les a obligés à travailler en urgence (p. 5)
Enfin, le Conseil d'Etat critique le fait que le Gouvernement prévoit dans le projet de loi de prendre 29 ordonnances réparties sur 23 articles portant sur une quarantaine de questions telles que la définition de dérogations à caractère professionnel du système universel de retraite, la définition de régimes d’invalidité, d’inaptitude ou de pénibilité liés à de nouvelles dispositions des droits à pension, la gouvernance du nouveau système de retraites ou les conditions d’entrée en vigueur de la réforme. " Le Conseil d’Etat souligne que le fait, pour le législateur, de s’en remettre à des ordonnances pour la définition d’éléments structurants du nouveau système de retraite fait perdre la visibilité d’ensemble qui est nécessaire à l’appréciation des conséquences de la réforme et, partant, de sa constitutionnalité et de sa conventionnalité. "
Dans ce projet, j'ai relevé quatre thèmes susceptibles de nous intéresser du point de vue de la santé au travail : les dispositions facilitant l'activité des seniors, celles permettant un départ anticipé à la retraite, la prise en compte des expositions à la pénibilité et la mise en place d'une "Caisse nationale de retraite universelle".
Dispositions facilitant l'activité des seniors
Ces dispositions sont prévues aux articles 24 à 26 du projet de loi. Elles visent à favoriser la transition entre l'emploi et la retraite.
La retraite progressive, actuellement réservée aux salariés dépendant du Régime général sera étendue aux salariés des régimes spéciaux, aux mandataires sociaux et aux professions libérales ainsi qu'aux salariés dont la durée du travail est fixée par un forfait jours annuel.
La possibilité d'accès se fera dès lors que l'éventuel bénéficiaire aura atteint l'âge légal de départ à la retraite (aujourd'hui, c'est en fonction d'une durée d'assurance).
Dans le privé, les employeurs ne pourront refuser le temps partiel dans ce domaine que s'il y a incompatibilité avec l'activité économique de l'entreprise.
Relativement au cumul emploi/retraite, il est prévu de rendre le dispositif plus attractif en permettant de continuer à acquérir des droits à la retraite du fait de l'activité professionnelle (à l'heure actuelle, ces sujets en cumul emploi/retraite paient des cotisations retraite mais n'en bénéficient pas).
L'amélioration du cumul emploi/retraite est prévue dès le 1er janvier 2022.
Prise en compte de situations spécifiques
Il est à noter que dans plusieurs de ces dispositifs, un âge d'équilibre est évoqué. Ainsi, l'âge d'équilibre, qui a remplacé la notion d'âge pivot, mais signifie la même chose, est présent dans ces dispositifs de départ anticipé à la retraite.
Carrières longues
Le dispositif de départ anticipé à la retraite pour carrières longues sera maintenu en permettant aux sujets concernés de partir deux ans plus tôt que les autres [NDR – Le dispositif des carrières longues est celui permettant le plus de départs anticipés à la retraite, un peu plus de 150 000 en 2018].
Ainsi, pour ceux ayant commencé à travailler avant 20 ans, le départ à la retraite est possible à 60 ans et en ayant eu la durée d'activité nécessaire pour un départ à taux plein de leur génération. [NDR – Comme vous pourrez le constater sur le site de service public.fr, il est possible, en fonction du dispositif actuel de partir avant 60 ans, à partir de 57 ans et 8 mois, pour ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans, sous réserve d'avoir effectué la durée de cotisation nécessaire pour sa génération plus 8 trimestres. Cela sera-t-il toujours possible ?]
Le montant de la retraite sera calculé avec un âge d'équilibre de deux ans. (Article 28 du projet de loi.)
Retraite anticipée pour handicap
Les assurés ayant eu une activité professionnelle alors qu'ils étaient reconnus travailleurs handicapés pourront partir en retraite à partir de 55 ans. La possibilité de départ sera déterminée par décret en fonction de la durée d'activité accomplie en situation de handicap.
Le dispositif sera simplifié, en ne tenant compte que de la durée d'activité avec le handicap, alors qu'il y a aujourd'hui une double contrainte de durée cotisée et de durée d'assurance validée.
Le taux d'incapacité nécessaire pour bénéficier de ce dispositif est de 50%. Les périodes antérieures à 1976 (où ce taux n'était pas attribué de façon régulière) pourront être prises en compte selon des modalités déterminées par décret.
Afin de compenser l'incidence du handicap sur l'activité professionnelle, des points supplémentaires seront attribués au moment du départ en retraite. (Article 29 du projet de loi.)
Retraite pour inaptitude
Il s'agit a priori du dispositif d'inaptitude reconnue par le médecin conseil de la Sécurité sociale qui existe actuellement, autorisant un départ à la retraite au taux plein de la Sécurité sociale dès que le sujet atteint l'âge légal de départ à la retraite, qui sera reconduit. Il permettra, selon le projet, d'abaisser l'âge d'équilibre (encore !) au niveau de leur âge de départ.
Cela s'applique aussi aux titulaires d'une pension d'invalidité, aux allocataires de l'allocation aux adultes handicapés et aux bénéficiaires de la carte inclusion. (Article 30 du projet de loi.)
Régime d'invalidité pour les fonctionnaires
L'article 31 du projet de loi prévoit l'habilitation du gouvernement à procéder par ordonnances à la mise en place, pour la Fonction publique, de nouveaux régimes d'assurance invalidité d'origine professionnelle et non professionnelle qui ne soient plus considérés comme une mise à la retraite.
Ces régimes permettront de faire bénéficier les fonctionnaires d'une pension d'invalidité, d'origine professionnelle ou non professionnelle, qui conduira à l'acquisition de droits à la retraite au titre des périodes d'interruption d'activité. Cette règle, calquée sur les dispositions de l'invalidité dans le privé, sera donc plus favorable pour les fonctionnaires.
Reconnaissance de la pénibilité et de la dangerosité de certains métiers
Retraite anticipée pour incapacité permanente
L'article 32 du texte de loi prévoit l'extension, à l'ensemble des assurés du système universel de retraite, du dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente, actuellement dédié aux assurés du Régime général et à ceux du Régime agricole et aux agents contractuels.
Ce dispositif permet un départ anticipé à la retraite à partir de 60 ans, ce qui ne sera pas modifié par la loi.
Les modalités actuelles de départ à la retraite anticipée pour incapacité permanente ne seront pas modifiées.
Prise en compte de la pénibilité dans le C2P
La prise en compte de la pénibilité est envisagée à l'article 33 du projet de loi. Le dispositif de compte professionnel de prévention (C2P) sera étendu à l'ensemble des travailleurs exerçant une activité pénible, que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public. Il sera donc ouvert aux agents publics civils et aux assurés des régimes spéciaux, à l'exception des marins et des militaires.
Le dispositif actuel sera assoupli puisque la limite d'acquisition de 100 points [NDR- Par acquisition de 4 ou 8 points par an si l'on est respectivement exposé à une ou plusieurs pénibilités.]
De même, les seuils de prise en compte des pénibilités seront abaissés par décret, ainsi le seuil du travail de nuit sera abaissé de 120 à 110 nuits et celui des équipes successives de 50 à 30 nuits (sic !). [NDR – En revanche, pour l'instant, pas de réintégration envisagée des quatre facteurs de pénibilité qui ont été retirés du C2P, manutention manuelle de charges, postures pénibles définies comme positions forcées des articulations, vibrations mécaniques et exposition à des agents chimiques dangereux.]
Le dispositif pourra permettre un départ anticipé à la retraite à partir de 60 ans au plus tôt en fonction du nombre de points affectés à cette utilisation, avec une diminution à due proportion de l'âge d'équilibre (encore !).
Allocation de cessation d'activité des travailleurs de l'amiante (CAATA)
Selon l'article 35 du projet de loi, l'entrée en vigueur du système universel de retraite ne modifie pas le dispositif de la CAATA. Les conditions d'accès à ce dispositif ainsi que celles de calcul et de versement de l'allocation demeurent inchangées.
En revanche, selon le projet de loi, " Cet article adapte les modalités de transition vers la retraite pour tenir compte des nouvelles règles prévues dans le système universel de retraite. La possibilité d’un passage en retraite dès 60 ans est maintenue tandis que l’âge maximal de bascule vers la retraite est fixé à 64 ans (âge à compter duquel l’assuré peut prétendre au minimum de retraite du système universel). "
Le dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante sera étendu et adapté aux agents publics victimes d'une maladie professionnelle liée à l'amiante (fonctionnaires, agents contractuels, militaires…).
Départs anticipés pour certaines fonctions régaliennes
Ces départs sont prévus à l'article 36 du projet de loi.
Ces mêmes agents bénéficient de points résultant de cotisations spéciales, dues par leurs employeurs, afin de prendre en compte l’incidence sur leur retraite des limites d’âge statuaires qui leur sont applicables. Elles ont vocation à se substituer à l’actuelle bonification du 5ème qui permet l’attribution d’une année de service toutes les cinq années passées en catégorie active et permettent de maintenir un même niveau de retraite qu’aujourd’hui. "

Caisse nationale de retraite universelle
La mise en place de la Caisse nationale de retraite universelle est prévue à l'article 49 du projet de loi et son article 50 " prévoit les modalités d’organisation à mettre en œuvre pour préparer l’entrée en vigueur du système universel de retraite dès la publication de la loi. A cette fin, il prévoit la création de la Caisse nationale de retraite universelle dès le 1er décembre 2020 afin de piloter les chantiers (campagnes de fiabilisation des carrières, projets informatiques, réorganisation du réseau etc.) contenus dans le schéma de transformation qui sera élaboré après la publication de la loi. "
Parmi les missions de cette caisse nationale, celle " De mettre en place un réseau unique composé d’établissements locaux reprenant le personnel des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail intervenant en matière de retraite et celui des institutions de retraite complémentaire mentionnées à l’article L. 921-4 du même code " . Ceci pose donc la question du devenir des Carsat dans leur partie consacrée à la santé au travail dont le Gouvernement décidera par ordonnance : " Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin d’organiser la gestion au niveau local des risques accidents du travail et maladies professionnelles au sein du régime général."
Vous pourrez lire, en pièce jointe, le texte de l'intersyndicale des agents de direction des organismes de Sécurité sociale qui s'inquiète quant au devenir des Carsat.
Projet de loi instituant un système universel de retraite

Proposition de loi " visant l’ouverture du marché du travail aux personnes atteintes
de diabète "
Ce projet de loi a été adopté à l'Assemblée nationale le jeudi 30 janvier 2020 et le texte devra ensuite être discuté et voté au Sénat.
Exposé des motifs
" Mesdames, Messieurs,
4 millions de personnes sont aujourd’hui touchées par les diabètes en France. Cela englobe les différents types de diabète, principalement le type 1 (environ 6 %) et le type 2 (environ 92 %). Parmi elles, beaucoup se voient refuser l’accès à certaines professions et aux écoles associées : hôtesse de l’air, conducteur de train, marin, contrôleur SNCF, militaires, etc
Ces discriminations viennent d’une réglementation obsolète, totalement déconnectée des progrès thérapeutiques et des conditions actuelles de travail. En effet, si par le passé la gestion au quotidien de la maladie a pu justifier des mesures de précaution pour certains corps de métiers, les innovations technologiques et les évolutions thérapeutiques permettent aujourd’hui à la personne diabétique de tenir la plupart des emplois.
L’évolution des médicaments du diabète fait qu’aujourd’hui beaucoup de traitements sont considérés comme anti-hyperglycémiants et non hypoglycémiants avec un risque inexistant d’hypoglycémie. Ces progrès thérapeutiques sont très importants, en particulier, pour les patients exposés au risque d’hypoglycémie dans le cadre de postes de sécurité et plus généralement pour beaucoup d’emplois. De plus, les médicaments hypoglycémiants ont été considérablement améliorés, en particulier, l’insulinothérapie avec l’utilisation des analogues de l’insuline.
Les moyens de l’autosurveillance glycémique et d’injection ont considérablement évolué depuis son apparition au début des années 1980. Auparavant, le patient ne pouvait faire qu’une surveillance urinaire. L’hypoglycémie ne pouvait être constatée que lorsqu’elle se produisait. Il est désormais possible de surveiller sa glycémie grâce aux lecteurs de glycémie qui affichent en quelques secondes les glycémies capillaires. Ils permettent ainsi de prévenir le risque de déséquilibre du diabète avec hyperglycémie, d’une part, et surtout le risque hypoglycémique, d’autre part.
Aujourd’hui, les capteurs de glucose en continu - beaucoup plus simples à utiliser couplés à des modalités de traitement efficaces - permettent de se contrôler, de s’auto-surveiller de façon beaucoup plus précise et efficace qu’avant. Le risque d’hypoglycémie et de complications en général peut de ce fait être mieux maîtrisé. Grâce aux progrès faits en diabétologie, la personne diabétique est capable de tenir la plupart des emplois.
Il ne s’agit pas de prendre des risques ni de mettre des personnes en danger, mais d’être responsable en continuant à préserver la sécurité de ceux qui ont un diabète et des autres. Il faut revoir les textes de loi et les décrets, avec objectivité, avec mesure et sans démagogie, en tenant réellement compte des conditions actuelles d’exercice des métiers, de l’évolution des traitements et des très grands progrès de l’auto-surveillance glycémique.
D’autres pays l’ont fait. Sous certaines conditions, il est possible d’être pilote de ligne et d’être diabétique au Canada. Au Royaume-Uni, depuis 2012, les pilotes qualifiés et les aiguilleurs du ciel atteints de diabète traités avec de l’insuline et d’autres médicaments peuvent effectuer toutes les tâches d’exploitation, y compris les vols d’avions commerciaux. Aux États-Unis, une personne diabétique de type 1 ou 2, sous insuline, peut exercer en tant que pompier à condition de respecter un certain nombre de critères médicaux et de compréhension de la pathologie.
Afin de permettre une révision globale et coordonnée des normes d’aptitude, relevant de plusieurs ministères (ministère de l’intérieur, ministère de l’environnement et solidaire, ministère de l’économie, ministère des armées…), il est nécessaire de créer un comité interministériel évaluant les normes d’aptitude en tenant compte des évolutions médicales et technologiques. "
Voici, ci-dessous, les articles de ce projet de loi (la date de remise du rapport devra être modifiée….).
Article 1er
" Un comité interministériel d’évaluation des textes obsolètes réglementant l’accès au marché du travail, et par conséquent à certaines formations, du fait de problèmes médicaux, est mis en place, tenant compte des évolutions médicales et technologiques.
Ce comité est composé :
– des représentants des administrations en charge de la gestion des professions réglementées concernées ;
– de quatre députés et sénateurs, désignés par leur assemblée respective ;
– des représentants des patients concernés par le diabète telles que définies à l’article L. 1114-1 du code de la santé publique ;
– de représentants du corps médical (médecins diabétologues et médecins du travail). "
Article 2
" Les listes interdisant a priori l’accès des personnes diabétiques aux professions réglementées sont abrogées. L’accès des personnes atteintes de diabète à ces métiers se fait par le biais d’une évaluation au cas par cas par le médecin inspecteur du travail territorialement compétent. "
Article 3
" Avant le 31 décembre 2019, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les progrès réalisés par le comité interministériel d’évaluation des textes obsolètes et proposant, le cas échéant, les modifications législatives ou réglementaires à mettre en place. Ce comité pourra par ailleurs émettre des propositions quant à l’accès à certaines professions aux personnes souffrant de maladies chroniques. "

Arrêté du 19 décembre 2019 fixant au titre de l'exercice 2018 le montant de la contribution mentionnée à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale couvrant les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite à l'âge fixé en application de l'article L. 351-1-4 du même code et les dépenses supplémentaires engendrées par les départs en retraite mentionnées au 3° du I de l'article L. 4163-7 du code du travail
La contribution de la Branche AT/MP pour 2018 au titre de l'article L. 241-3 du Code de la Sécurité sociale est fixée à 74 746 675, 94 €.
Cette contribution versée à la Caisse nationale d'Assurance vieillesse vise à compenser le surcoût qu'entraîne pour celle-ci le départ anticipé à la retraite suite à une incapacité permanente dans le cadre d'une exposition aux pénibilités (article L. 351-1-4 du Code de la Sécurité sociale) et du départ anticipé à la retraite dans le cadre du compte professionnel de prévention (article L. 4163-7, 3°).

Questions parlementaires – 15e législature
Prise en charge des personnes souffrant d'électro-hypersensibilité
Question écrite n° 10752 de M. Michel Dagbert (Pas-de-Calais - SOCR) - publiée dans le JO Sénat du 06/06/2019 - page 2930
" M. Michel Dagbert attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la question de la prise en charge des personnes souffrant d'électro-hypersensibilité.
En effet, l'article 8 de la loi n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques prévoyait que le Gouvernement devait remettre au Parlement, à la fin 2018, un rapport sur l'électro-hypersensibilité.
Celui-ci devait notamment préciser « les mesures concernant la prise en charge des personnes indiquant être hypersensibles aux ondes électromagnétiques ».
Or, il semblerait que ce rapport, très attendu par les près de 2 500 personnes qui souffrent d'électro-hypersensibilité en France, n'ait toujours pas été remis à ce jour.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer dans quel délai le Gouvernement prévoit de rendre ce rapport et de préciser les mesures qu'il entend prendre sur ce sujet. "
Réponse du Ministère des solidarités et de la santé - publiée dans le JO Sénat du 30/01/2020 - page 590
" Le rapport et l'avis de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) relatifs à l'expertise sur « l'hypersensibilité électromagnétique (EHS) ou intolérance environnementale idiopathique attribuée aux champs électromagnétiques (IEI-CEM) » ont été publiés le 2 mars 2018. L'expertise réalisée constitue un travail d'ampleur de revue de la littérature, travail complété par des auditions. L'analyse des études, notamment des études de provocation, a conduit l'agence à conclure que « Au final, en l'état actuel des connaissances, il n'existe pas de preuve expérimentale solide permettant d'établir un lien de causalité entre l'exposition aux champs électromagnétiques et les symptômes décrits par les personnes se déclarant électro-hypersensibles. » Parmi les hypothèses de recherche analysées par l'agence pour interpréter les symptômes des personnes, aucune n'a pu être retenue comme probante. Les personnes concernées se trouvent, pour une grande partie d'entre elles, dans un état de souffrance physique ou psychique, plus ou moins important. L'Anses souligne en particulier l'errance médicale qui caractérise le parcours de ces personnes et formule des recommandations sur leur prise en charge. Conformément à l'article 8 de la loi n° 2015 136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques, le Gouvernement a examiné les suites à donner à ces recommandations et a remis au Parlement, en décembre 2019, un rapport sur l'électro-hypersensibilité qui précise les mesures à mettre en œuvre concernant la prise en charge des personnes indiquant être hypersensibles aux ondes électromagnétiques. Il s'agit en particulier de s'engager dans une démarche d'élaboration d'outils destinés aux professionnels de santé permettant de limiter l'errance médicale de ces personnes. Par ailleurs, depuis 2011, l'Anses a lancé un programme de recherche sur l'impact sur la santé des radiofréquences. Ce programme est doté d'un financement annuel du ministère de la transition écologique et solidaire de 2 millions d'euros. Une dizaine de projets de recherche sur la thématique de l'électro-hypersensibilité ont déjà été financés. En 2017, les Rencontres scientifiques de l'Anses pour la restitution du Programme national de recherche environnement santé travail (PNREST) ont été dédiées au thème Radiofréquences et santé. Lors de ces journées, le Cahier de la recherche réalisé par l'agence « Radiofréquences et santé : comprendre où en est la recherche » a été diffusé. Ce cahier est disponible sur le site internet de l'agence. "

Manque de médecine de prévention pour les enseignants
Question écrite n° 11588 de M. Stéphane Piednoir  (Maine-et-Loire - Les Républicains), publiée dans le JO Sénat du 18/07/2019 - page 3817
" M. Stéphane Piednoir attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le manque de médecine de prévention au sein de l'éducation nationale.
L'employeur public est garant de la santé, du bien-être et de la sécurité au travail de ses agents. Conformément à ce principe, tous les agents de la fonction publique d'État devraient pouvoir bénéficier de visites médicales périodiques auprès d'un médecin de prévention (décret n° 82-453 du 28 mai 1982 modifié).
Cependant, en pratique, rares sont les enseignants qui bénéficient de ces visites médicales périodiques pourtant obligatoires. Après l'examen initial lors de leur prise de poste, certains traversent leur carrière sans même voir un médecin.
Cela est lié au nombre très insuffisant de médecins de prévention, et à un réel manque d'attractivité de cette spécialité auprès des étudiants en médecine. Les médecins du travail, trop peu nombreux, sont malheureusement placés dans l'impossibilité de mener à bien leur rôle préventif essentiel.
Aussi, il lui demande quels leviers pourraient être mis en place pour pallier le manque d'attractivité de cette spécialité et ainsi pouvoir garantir une médecine de prévention effective pour les enseignants, telle qu'elle est inscrite dans les textes.
Transmise au Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse "
Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, publiée dans le JO Sénat du 06/02/2020 - page 702
" La médecine de prévention constitue un sujet de préoccupation constant pour le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse (MENJ), qui a la volonté d'accompagner les académies en matière de surveillance médicale des personnels. Une difficulté majeure tient aux difficultés de recrutements des médecins de prévention rencontrées dans les académies qui s'illustrent par le nombre insuffisant de médecins de prévention (en 2018, 87 médecins de prévention soit 68 équivalents temps plein) eu égard aux effectifs des personnels du ministère. Pour améliorer la couverture en médecins de prévention de toutes les académies et rendre plus attractives les fonctions de médecin de prévention, les recteurs d'académie ont la possibilité de fixer leur rémunération par référence à la grille applicable aux médecins du travail des services interentreprises de médecine du travail, voire de proposer une rémunération supérieure à cette grille de rémunération dans les zones de désert médical ou lorsque le poste de médecin de prévention est resté vacant depuis plus d'un an. De plus, les recteurs d'académies sont encouragés à promouvoir l'accueil, au sein des services de médecine de prévention, de collaborateurs médecins. Une circulaire ministérielle a été adressée aux recteurs d'académie le 11 juillet 2016, qui comporte des préconisations quant à l'organisation des services de médecine de prévention et la constitution, autour du médecin de prévention, d'équipes pluridisciplinaires (collaborateurs médecins, infirmiers en santé au travail, psychologues du travail, …) afin de participer au suivi médical des personnels. Concernant ces différents professionnels, on recense 9 collaborateurs médecins, 24 psychologues du travail et 21 infirmiers en santé au travail. Cette circulaire définit également des priorités pour les personnels les plus exposés ou les plus fragiles à l'égard desquels le médecin de prévention exerce une surveillance médicale particulière. S'il peut définir la fréquence et la nature des visites médicales, il lui est demandé de respecter l'obligation d'une visite annuelle minimum pour ces personnels. De plus, un guide méthodologique dédié aux infirmiers de prévention en santé au travail a été diffusé aux recteurs d'académie le 20 mai 2019. Ce guide doit notamment leur permettre de mettre en place, sous le contrôle des médecins de prévention, des « entretiens infirmiers ». La réalisation de ces entretiens participera directement au renforcement du suivi médical des personnels. En outre, le MENJ engagera dans les toutes prochaines semaines une nouvelle campagne nationale de recrutement des médecins de prévention. Enfin, l'article 40 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique habilite le Gouvernement à prendre, dans un délai de douze ou quinze mois, toutes dispositions relatives à la protection sociale et à la sécurité des agents publics. Plusieurs ordonnances seront préparées par le ministère chargé de la fonction publique et en particulier une ordonnance portant sur la prise en charge des personnels par les instances médicales ainsi que les services de médecine de prévention et les services de santé au travail. "

·     Jurisprudence
Un ouvrier d'un sous-traitant ayant exercé son activité dans un port peut bénéficier de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante des dockers
Il s'agit d'un arrêt du 23 janvier 2020 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation - Cass. 2e Civ. n° 19-11559, publié au Bulletin - qui est dans la ligne d'un arrêt inédit du 15 juin 2017 (pourvoi n°16-20511) dans lequel l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) avait été permise pour un salarié sous-traitant ayant exercé sur un site ouvrant droit à cette retraite anticipée.
Les faits - Un salarié d'une entreprise sous-traitante a demandé à la Carsat de bénéficier de l'Acaata au titre de la période où il a travaillé comme chaudronnier et manutentionnaire sur le port de Rouen. La Cpam ayant refusé le bénéfice de l'Acaata, il saisit une juridiction de Sécurité sociale.
La Cpam se pourvoit en cassation car l'Acaata a été accordée au salarié par la cour d'appel.
L'argumentation de la caisse repose sur le fait que l'article 41 de la loi 98-1194 du 23 décembre 1998 accorde le bénéfice de l'Acaata sous réserve que l'activité invoquée par le salarié ait été celle de docker professionnel, ou de personnel portuaire de manutention, employé par un port figurant sur une liste fixée par arrêté ministériel.
Ce salarié a effectivement exercé une activité au sein du port de Rouen – figurant dans l'arrêté du 7 juillet 2000 et ouvrant droit à l'Acaata pour les salariés y ayant travaillé de 1960 à 1988 – mais il n'en a pas été le salarié.
En effet, ce salarié assurait la réparation, en tant que chaudronnier, ainsi que la manutention et le nettoyage de containers qui pouvaient contenir de l'amiante. Mais cela ne suffisait pas, pour la Cpam, à caractériser une exposition habituelle à l'amiante.
La Cour de cassation conclut que " Que de ces constatations dont elle a fait ressortir que le salarié avait travaillé en qualité de manutentionnaire, au cours de la période considérée, dans un port figurant sur la liste fixée par arrêté et avait été exposé habituellement à l'amiante, la cour d'appel a exactement déduit que M. P... était fondé à bénéficier de l'Acaata au titre de la période litigieuse ;
D'où il suit que le moyen nouveau, mélangé de fait et de droit, et comme tel irrecevable en ses deux dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ".
Le pourvoi de la Cpam est donc rejeté.

Un salarié doit obtenir l'autorisation de la Cpam pour quitter la circonscription de la caisse durant un arrêt maladie, sinon il risque de se voir couper les indemnités journalières
Il s'agit d'un arrêt du 23 janvier 2020 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass. 2e civ. n° 18-26364, non publié au Bulletin – qui a le mérite d'apporter une réponse claire à une question qui se pose assez fréquemment.
Les faits – La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne a suspendu le paiement des indemnités journalières d'une salariée pour la période du 20 mars au 8 avril 2018 car elle a quitté la circonscription de la caisse, pendant un arrêt de travail, sans autorisation préalable de celle-ci mais avec l'accord de son médecin traitant et après en avoir informé la caisse.
La salariée saisit le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass, alors compétent, qui a été depuis remplacé par le Pôle social du tribunal judiciaire) pour obtenir le paiement de ces indemnités journalières. Le Tass fait droit à ses demandes.
La caisse se pourvoit en cassation sur la décision de la juridiction de premier niveau qui jugeait en dernier ressort, sans possibilité d'appel.
La Haute juridiction se prononce au visa des textes suivants : l'article L. 323-6 du Code de la Sécurité sociale en vigueur à ce moment et l'article 37 du règlement intérieur modèle des caisses primaires d'assurance maladie pour le service des prestations, annexé à l'arrêté du 19 juin 1947. Cet article 37 prévoit, au 9e alinéa, que " Durant la maladie, le malade ne doit pas quitter la circonscription de la section ou du correspondant de la caisse à laquelle il est rattaché, sans autorisation préalable de la caisse. La caisse peut autoriser le déplacement du malade, pour une durée indéterminée, si le médecin traitant l'ordonne dans un but thérapeutique ou par convenance personnelle justifiée du malade et après avis du médecin conseil. "
La Cour de cassation conclut ainsi de l'application de ces textes " Attendu que pour condamner la caisse à verser à l'assurée les indemnités journalières litigieuses, le jugement retient qu'au regard de la durée limitée de l'arrêt de travail en cause, du caractère médicalement incontestable de celui-ci, de l'accord substitutivement donné par le médecin traitant à l'absence de l'assurée de son domicile sur une partie de la période d'arrêt de travail considéré, et en outre de l'information relative à cette absence et transmise par l'assurée à la caisse avant même sa mise en oeuvre, le cumul de ces éléments excluant tout risque de fraude, la décision de la caisse apparaît sans fondement ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il résultait de ses constatations que l'assurée avait quitté la circonscription de la caisse sans avoir obtenu l'autorisation préalable de celle-ci, le tribunal a violé les textes susvisés ".
La Haute juridiction casse l'arrêt du Tass sans renvoi.

Un agent mis à la retraite de façon discriminatoire a droit à la réparation intégrale du préjudice et une indemnisation pour mise à la retraite discriminatoire
Il s'agit d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 22 janvier 2020 – Cass. Soc. n° 17-31158, publié dans le Bulletin et les arrêts de la Cour de cassation.
Les faits – Un agent de la Sncf (devenue l'établissement public industriel et commercial Sncf mobilités), M. W…, a été mis à la retraite d'office, le 1er décembre 2005. Cet agent remplissant, à cette date, la double condition de durée d'ancienneté et d'âge prévue à l'article 7 du règlement des retraites.
Le 12 juillet 2010, cet agent saisit la juridiction prud'homale pour faire annuler sa retraite d'office car constituant une discrimination en raison de l'âge.
Un premier pourvoi en cassation rendu le 7 décembre 2016 (Cass. Soc. n° 15-21190) avait conclu que " que si des dispositions réglementaires autorisant, à certaines conditions, la mise à la retraite d'un salarié à un âge donné peuvent ne pas constituer, par elles-mêmes, une discrimination prohibée, il n'en résulte pas que la décision de l'employeur de faire usage de la faculté de mettre à la retraite un salarié déterminé est nécessairement dépourvue de caractère discriminatoire, l'employeur devant justifier que la mesure répond aux exigences de la directive consacrant un principe général du droit de l'Union " et l'affaire avait été renvoyée devant une autre cour d'appel.
Le salarié se pourvoit en cassation sur le jugement de renvoi de la cour d'appel qui a refusé sa réintégration et ne lui a pas accordé une indemnisation réparant intégralement son préjudice.
Le premier moyen de M. W… concerne le rejet de sa demande de réintégration et sa demande de paiement d'une indemnité, arrêtée au 30 septembre 2017, correspondant au différentiel entre la rémunération qu'il aurait dû percevoir depuis son soixante-cinquième anniversaire jusque la date de réintégration et la pension de retraite.
Ceci alors que le 1er article du décret n° 2010-105 du 28 janvier 2010 relatif à la limite d'âge des agents de la Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des transports parisiens, en vigueur à la date à laquelle le salarié a formé sa demande de réintégration, précise que la limite d'âge à laquelle les agents du cadre permanent de la Sncf sont admis à la retraite est fixée à soixante-cinq ans.
Sur ce moyen, la Haute juridiction suit le jugement de la cour d'appel " Attendu que l'arrêt fait ressortir que, le 7 novembre 2017, date où celui-ci est rendu, le salarié, né le [...] , était âgé de soixante-sept ans et retient que la mise à la retraite de ce dernier est discriminatoire en raison de l'âge ;
Qu'il en résulte que, le salarié ayant atteint la limite d'âge de soixante-cinq ans, sa demande en réintégration au sein de l'établissement après annulation de sa mise en retraite d'office ainsi que ses demandes en paiement d'une indemnité arrêtée au 30 septembre 2017 pour perte de revenus correspondant à la différence entre la rémunération qu'il aurait dû percevoir s'il était demeuré dans son emploi et la pension de retraite perçue et d'une indemnité correspondant à cette différence entre le 1er octobre 2017 et la date de réintégration effective n'étaient pas fondées ".
Le second moyen porte sur l'attribution d'une somme de seulement 3000 € au titre de la mise à la retraite discriminatoire.
Sur ce moyen, la Cour de cassation n'approuve pas la cour d'appel : " Attendu que pour limiter à la somme de 3 000 euros l'indemnité allouée au salarié au titre de sa mise à la retraite d'office discriminatoire en raison de son âge, l'arrêt retient que cette décision apparaît comme une mesure individuelle préjudiciable prise exclusivement en violation du principe général du droit de l'Union de non-discrimination en raison de l'âge, et non du code du travail, dans la mesure où il résulte des articles L. 120-1 et L. 200-1 de ce code en vigueur au jour de la mise à la retraite de l'agent, que les dispositions de l'article L. 122-45, reprenant la directive 2000/78 n'étaient pas applicables aux établissements industriels et commerciaux publics jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 applicable à compter du 1er mars 2008, qu'aucune norme n'est utilement invoquée obligeant de prononcer la nullité d'un acte pris en violation d'un principe général du droit communautaire ou d'une norme ou jurisprudence européenne muette sur sa sanction, que M. W... a droit de prétendre à l'indemnisation intégrale du préjudice causé par cette situation, qu'en l'état de l'ensemble des éléments dont il justifie, son préjudice peut être évalué à ladite somme ;
 Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu le caractère discriminatoire en raison de l'âge de la mise à la retraite d'office du salarié, la cour d'appel, qui devait appliquer l'article L. 122-45 du code du travail conformément à l'article 6, § 1, de la directive n° 2000/78/CE, du 27 novembre 2000, qui consacre un principe général du droit de l'Union européenne, a violé les textes susvisés ".
L'arrêt est cassé mais seulement en ce qu'il limite à la somme de 3000 € l'indemnisation de la mise à la retraite discriminatoire de cet agent. L'affaire est renvoyée devant une autre cour d'appel.

L'indemnisation d'un manquement à l'obligation de sécurité est indépendante de celle d'un harcèlement moral
Cet arrêt du 27 novembre 2019 – Cass. Soc. n° 18-10551, publié au Bulletin – indique clairement que le manquement à l'obligation de sécurité, issue de l'article L. 4121-1 du Code du travail, est indépendant de la condamnation pour harcèlement moral.
Les faits – Une salariée a été embauchée par une entreprise pharmaceutique le 1er décembre 2010 en tant que chef de produit export. Alors qu'elle était en arrêt de travail pour maladie, elle écrit à son entreprise, le 14 octobre 2011, pour faire part de problèmes de santé liés à son travail puis, le 12 décembre 2011, en évoquant un harcèlement moral qu'elle subissait de sa supérieure hiérarchique. Elle est licenciée le 31 janvier 2012 pour insuffisance professionnelle. Elle saisit la justice prud'homale afin de faire reconnaître la nullité de son licenciement – reconnu par la cour d'appel mais dont elle conteste le montant de l'indemnisation - suite à la dénonciation du harcèlement moral et d'une demande d'indemnisation pour harcèlement moral et violation de l'obligation de sécurité et de loyauté de son employeur
Sur le premier moyen du pourvoi de la salarié, portant sur l'indemnisation du harcèlement moral, la Haute juridiction le considère comme non fondé car remettant en cause l'appréciation souveraine des juges de la cour d'appel. Celle-ci n'a en effet pas considéré, au visa de l'article L. 1152-1 du Code du travail, que la salariée établissait des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Sur le troisième moyen relatif au montant de l'indemnité pour nullité du licenciement, la Cour de cassation répond que les juges de la cour d'appel l'ont souverainement appréciée.
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi portant sur l'indemnisation du manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques professionnels, la Cour de cassation n'a pas la même appréciation des textes de loi que la cour d'appel. Au visa des articles L. 4121-1 et L. 4121-2, alors applicables, elle conclut que " Attendu que l’obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte des textes susvisés, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l’article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité, l’arrêt retient qu’aucun agissement répété de harcèlement moral n’étant établi, il ne peut être reproché à l’employeur de ne pas avoir diligenté une enquête et par là-même d’avoir manqué à son obligation de sécurité ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ".
L'arrêt de la cour d'appel est cassé, mais seulement en ce qu’il déboute la salariée de sa demande en dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité, et l'affaire est renvoyée devant la même cour d'appel autrement composée.
Voici le résumé de cet arrêt : " L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 et de l'article L. 4121-2 du même code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle. Dès lors, doit être cassé l'arrêt de la cour d'appel qui, pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, retient qu'aucun agissement répété de harcèlement moral n'étant établi, il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas avoir diligenté une enquête et par là-même d'avoir manqué à son obligation de sécurité "

·     Réforme de la santé au travail
J'évoquais dans la lettre d'information précédente la proposition du Medef de lancer une négociation entre les organisations patronales et les organisations syndicales de salariés sur la réforme de la santé au travail.
Une première réunion a eu lieu le 4 février 2020. D'autres dates de réunion sont prévues, les 4 et 24 mars 2020 et les 21 avril et 19 mai 2020.
Il semble que l'ensemble des organisations syndicales de salariés participe à cette négociation, à l'exception de la CGT.
Selon une information de Liaisons sociales, la CGT refuserait de participer à cette négociation car elle ne souhaite pas aborder la question de la santé au travail sans traiter de la question de la pénibilité.
La lettre d'orientation du Gouvernement, qui devait faire suite au rapport de Mme Lecocq sur la réforme de la santé au travail n'a toujours pas été transmise aux partenaires sociaux.

·     Rapport annuel 2018 de l'Assurance maladie- risques professionnels
Vous pourrez accéder à ce rapport sur le site Ameli de la Branche des risques professionnels, à l'adresse figurant en fin de commentaire.
Données financières
Équilibre de la Branche
Les prestations sociales de la Branche AT/MP versées aux victimes représentent 69% des charges de la Branche, soit 8 694 millions (M.) € et elles sont en augmentation de 2.8% par rapport à 2017, les transferts sont aussi en hausse, mais moindre (2 429 M. €, + 1.4%), le poste des autres charges augmentant très fortement (677 M. €, + 13.6%) alors que les frais de fonctionnement sont en baisse (877 M. €, - 1.7%).
Les recettes portant sur les cotisations sociales et les impôts et taxes sont, par rapport à 2017, en baisse de 1.4% avec un montant en 2018 de 12 574 M. €.
Au total, le résultat net de la Branche est positif de 661 M. €, cependant en forte baisse par rapport aux 1 130 M. € de 2017( - 41.5%).
En 2018, la croissance des dépenses pour les indemnités journalières (IJ) a été de 7% et celle des dépenses pour les incapacités permanentes (IP) de 1%.
La baisse des recettes s'explique par la baisse des cotisations sociales due à la réduction de 0.1% du taux net moyen de cotisation dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018, soit un taux net moyen de 2.22%.
Ainsi, du fait de bilans positifs depuis plusieurs années, les capitaux propres de la Branche AT/MP sont de 2 667 M. € avec une prévision de 3 820 M. € pour 2019.
Le taux net moyen national de cotisation AT/MP de 2.32% en 2017 est passé à 2.22% pour les années 2118 et 2019.
Prestations
Reconnaissance des sinistres
En 2018, 69.7% des accidents de travail (AT) déclarés ont été reconnus, soit 892 023, cela a été le cas de 68.5% des accidents de trajet (137 780 reconnus). Pour les maladies professionnelles (MP), le taux de reconnaissance est de 59.1% avec 45 010 MP reconnues.
Pour l'ensemble des sinistres, le taux de reconnaissance est de 68.8% et leur nombre reconnu de 1 064 889.
Le délai moyen de reconnaissance est de 25 jours pour les AT et de 180 jours pour les MP avec des médianes respectives de 8 jours et 144 jours.
Prestations versées
On distingue les prestations en nature correspondant aux dépenses de soins et les prestations en espèces pour les IJ et les IP.
Pour 2018, les dépenses pour les prestations en nature ont été de 992 M. € et celles des prestations en espèces de 7527 M. €, 3191 M. € pour les IJ et 4336 M. € pour les IP.
Le rapport établit une comparaison des prestations en espèces versées par la Branche
AT/MP et par la Branche maladie.
Prestations pour les indemnités journalières (IJ)
En 2018, les IJ pour la Branche AT/MP représentent un coût de 3191 M. € et celui des IJ de la Branche maladie est de 7 736 M. €, soit une hausse respective, par rapport à 2017, de 7% et 4.5%. Tant pour la Branche AT/MP que maladie, les coûts augmentent régulièrement chaque année depuis 2014, d'au moins 3.2% pour la Branche AT/MP et de 3.7% pour la Branche maladie.
Pour la Branche AT/MP, les IJ normales (pour les 29 premiers jours, à 60% du salaire) représentent, en 2018, un coût de 597 M. € (+ 4.8% par rapport à 2017). Les IJ majorées (à partir du 30e jour, à 80% du salaire) représentent un coût de 2485 M. € (+ 7.6% par rapport à 2017). Les coûts du temps partiel thérapeutique représentent 93 M. € et ceux des indemnités temporaires d'inaptitude 16 M. €, respectivement + 6.1% et + 4% par rapport à 2017.
L'augmentation du coût des IJ normales pour les AT a été de 4.4% en 2018 (468 M. €) et celui des IJ normales pour les MP de 3.7% (58 M. €).
Les IJ majorées ont augmenté de 9.7% pour les AT (1672 M. €) et de 10.5% pour les MP (564 M. €).
Tant pour les AT que pour les MP, le nombre de jours moyen d'incapacité temporaire a augmenté régulièrement depuis 2014. Ainsi, en 2018, le nombre de jours d'IJ a augmenté de 4.5% pour les AT et de 6.1% pour les MP.
Prestations pour les incapacités permanentes (IP)
Les prestations pour les IP représentent le premier poste de dépenses de la Branche AT/MP, soit 4.3 milliards (Md) €.
Nous nous intéresserons uniquement aux rentes servies et aux indemnités en capital versées aux victimes.
En 2018, les IP pour les victimes représentent un montant de 4336 M. € et les indemnités en capital un montant de 115 M. €, en hausse respective, par rapport à 2017, de 0.4% et 0.2%.
En 2018, 1 097 295 rentes aux victimes ont été servies par la Branche AT/MP (- 0.5% par rapport à 2017) et 49 952 indemnités en capital ont été versées (+ 4.1% par rapport à 2017).
Données sur les taux d'IP
Les incapacités permanentes les plus graves, au-delà de 80%, représentent 1% des IP mais 12% de leur coût pour la Branche, les IP les plus faibles, taux de moins de 10%, représentent 11% des rentes et 2% des montants et la majorité des rentes servies pour IP, comprises entre 10% et 19% représentent 55% des rentes et 34% de leur coût.
Montant moyen annuel des rentes (nombre entre parenthèses) en fonction du taux de la pension :
ü 10 à 19%, 1505 € (664 714),
ü 20 à 39%, 3023 € (275 386),
ü 40 à 59%, 5955 € (48 198),
ü 60 à 79%, 13 014 € (22 904),
ü 80 à 100%, 23 595 € (14 205).

En 2018, il y a eu 66 664 notifications d'IP : 83% avec une indemnité en capital (taux d'IP compris entre 1 et 9%) et un tiers de rentes viagères avec taux d'IP de 10 à 100%.
Montant moyen des capitaux et rentes versés en 2018 en fonction du taux d'IP :
ü 43 184 indemnités en capital de 1568 € en moyenne,
ü 14 889 rentes de 10 à 19% de 3120 € en moyenne,
ü 5230 rentes de 20 à 39% de 3120 € en moyenne,
ü 714 rentes de 40 à 59% de 6306 € en moyenne,
ü 621 rentes de 60 à 79% de 15 047 € en moyenne,
ü 1204 rentes de 80 à 100% de 24 773 € en moyenne.
Entre 2012 et 2018, le nombre d'IP pour AT/MP a fortement diminué, passant de 82 735 à 68 667.
En 2018, les prestations en termes de rentes d'IP ont coûté 1911 M. € pour les AT et 600 M. € pour les MP.
Pour 2018, un peu plus des trois quarts des coûts des maladies professionnelles sont dues à trois tableaux des maladies : 34.1% des montants des MP (897 M. €) au tableau 57 des MP (les TMS du membre supérieur), 23.8% au tableau 30 bis des cancers bronchopulmonaires liés à l'amiante (627 M. €) et 19% au tableau 30 des affections provoquées par les poussières d'amiante (499 M. €).
Sinistralité
Accidents du travail
En 2018 il y a eu 651 103 AT en premier règlement, soit une hausse de 2.9% par rapport à 2017. Parmi ceux-ci, 588 427 ont entraîné un arrêt de 4 jours ou plus sur l'année (+ 2.7% par rapport à 2017), ceci pour un effectif de 18 878 562 salariés dont l'évolution par rapport à 2017 n'est pas significative.  Ils ont entraîné 33 345 nouvelles IP (+ 0.4% par rapport à 2017) et 551 décès (+ 4% par rapport à 2017). Ces AT ont causé 43 608 278 journées d'incapacité temporaire (+ 4.5% par rapport à 2017).
La fréquence des AT est passée de 45 pour 1000 salariés en 1998 à 34.3 pour 1000 en 2018. Mais il y a eu une hausse depuis un point bas de 33.7 pour 1000 en 2013.
Il existe une certaine disparité régionale en termes d'indices de fréquence avec un plus bas de 22.1 pour 1000 en Ile de France et des plus hauts sur la façade Atlantique, en Bretagne (41.7/1000), Pays de la Loire (42.5/1000), Poitou-Charentes (40.6/1000) et Aquitaine (41.4/1000) ainsi que dans le Languedoc-Roussillon (44.2/1000).
Les risques ayant entraîné un nombre important d'accidents du travail et/ou de décès en 2018 sont :
ü les manutentions manuelles responsables de 50% des AT en 1er règlement, de 44% des nouvelles IP et de 19% des décès ;
ü les chutes de plain-pied, à l'origine de 16% des AT, 17% des nouvelles IP et 6% des décès ;
ü les chutes de hauteur à l'origine de 12% des AT, de 16% des nouvelles IP et de 9% des décès ;
ü le risque routier auquel 3% des AT sont dus, qui a entraîné 4% des nouvelles IP mais 26% des décès.
Les AT augmentent, en 2018, dans tous les secteurs d'activité mais ils augmentent de façon plus importante dans le CTN F (Industries du bois, de l’ameublement, du papier-carton, du textile, du vêtement, des cuirs et des peaux) avec plus 4.5% et dans le CTN I (travail temporaire, action sociale, santé, nettoyage, etc…) avec plus 5% par rapport à 2017.
Accidents de trajet
En 2018, il y a eu 99 183 accidents de trajet en 1er règlement, soit 6.9% de plus qu'en 2017, ayant entraîné 84 543 arrêts de travail de plus de 4 jours (+ 6.6% par rapport à 2017) et 6337 nouvelles IP (- 0.5%). En revanche le nombre de décès a augmenté de 7.2%, soit 283 décès constatés en 2018.
En 2018, le nombre d'accidents de trajet rejoint quasiment le pic de l'année 2010 de 100 018 alors qu'au début des années 2000, on avait assisté à une baisse significative des accidents de trajet avec un point bas de 78 000 en 2004.
Depuis 2016, point bas depuis le début des années 2000, avec 254 décès, le nombre annuel de décès est aussi en hausse, avec un nombre de 283 en 2018.
Les causes les plus importantes de ces accidents de trajet sont la perte totale ou partielle de contrôle d'un moyen de transport avec 36 052 accidents, soit 57%, qui ont entraîné 2659 nouvelles IP (63%) et surtout 199 décès (84%). Ensuite viennent les chutes avec 11 737 accidents de trajet (18%) ayant entraîné 662 nouvelles IP mais aucun décès.
Maladies professionnelles
En 2018, le nombre de maladies professionnelles augmente de 2.1%, de même que le nombre de victimes qui augmente de 1%.
En 2018, il y a eu 49 538 MP en 1er règlement (45 490 victimes) ayant entraîné 24 409 nouvelles IP (+ 1.9% par rapport à 2017) et 296 décès, en baisse importante par rapport à 2017 de 11.9%.
En 2018, les TMS avec 43 506 MP représentent une majorité (87.8%) des 49 538 MP. Les MP pour TMS sont en augmentation de 2.7% par rapport à 2017. Les atteintes liées à l'amiante représentent 2889 MP, en diminution de 8.3% par rapport à 2017 et il y a eu 373 cancers hors amiante, en baisse de 9.9% par rapport à 2017.
Les TMS
Parmi les TMS, la part la plus importante est celle liée au tableau 57 avec 39 742 MP (en hausse de 3% par rapport à 2017) suivi du tableau 98 des atteintes du rachis lombaire dues au port de charges avec 2665 MP (en baisse de 2.1% par rapport à 2017) puis des lésions chroniques du ménisque du tableau 79 avec 559 MP (+ 8.1% par rapport à 2017), des atteintes du rachis du tableau 97 avec 421 MP (- 3% par rapport à 2017) et des affections dues aux vibrations ou aux chocs du tableau 69 avec 119 MP (forte hausse de 22.7% par rapport à 2017).
Les atteintes corporelles des TMS reconnus en MP sont, en 2018,  principalement, les poignet/main doigts (15 369 MP, en baisse de 1.7% par rapport à 2017), les épaules (14 359 MP, en hausse de 8.6%) et le coude (9708 MP, plus 3.2%).
Les femmes sont plus concernées que les hommes par les TMS d'origine professionnelle, 53% versus 47% pour les hommes. Il y a, autant chez les hommes que chez les femmes, une augmentation importante du nombre de cas de MP liées aux TMS à partir de la fin de la quarantaine et du début de la cinquantaine.
Ces TMS sont particulièrement fréquents dans certains secteurs d'activité (entre parenthèses, l'évolution par rapport à 2017) :
ü le CTN D (services, commerces et industries de l’alimentation) avec 9304 MP (+ 4%),
ü le CTN I (travail temporaire, action sociale, santé, nettoyage, etc…) avec 7442 MP (+ 12.4%),
ü le CTN B (BTP) avec 6004 MP (+ 7.2%),
ü le CTN A (métallurgie) avec 4651 MP (- 0.5%).
L'indice de fréquence (nombre de MP/1000 salariés) pour les atteintes du tableau 57 est particulièrement élevé dans le CTN F (industries du bois, de l’ameublement, du papier-carton, du textile, du vêtement, des cuirs, etc…) avec un indice de 5.1 (2062 MP) suivi par le CTN D (services, commerces et industries de l’alimentation) avec un indice de 3.8 (9767 MP) et le CTN B (BTP) avec un indice de 3.3 (5252 MP).
Pathologies liées à l'amiante
Les pathologies liées à l'amiante sont en baisse, en particulier du fait d'une baisse conséquente (10.6%) des atteintes professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante du tableau 30 (2023 MP) et, dans une moindre mesure, des cancers bronchopulmonaires liés à l'amiante du tableau 30 bis (866 MP, moins 2.1% par rapport à 2017). Cependant, dans ce tableau 30 bis, on constate une augmentation de 26.9% (137 MP) d'autres cancers liés à l'amiante dont les mésothéliomes (421 MP, plus 5.5% par rapport à 2017).
Autres tableaux très représentés
Les atteintes auditives du tableau 42 représentent 558 MP (en baisse de 8.2%), les affections consécutives à l'inhalation de poussières minérales hors cancer du tableau 25 sont au nombre de 216 MP (+ 6.4%), les lésions eczématiformes de mécanisme allergique du tableau 65 entraînent 228 MP et les rhinites et asthmes professionnels du tableau 66 sont au nombre de 190 (+ 9.2%).
Points spécifiques
Le système de reconnaissance complémentaire des maladies professionnelles
Ce système complémentaire permet, avec passage devant un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP), la reconnaissance, au titre de l'alinéa 6 de l'article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale, de maladies professionnelles figurant dans un tableau mais dont l'une, ou plusieurs, des conditions de ce tableau n'est pas remplie. Si la maladie ne figure pas dans un tableau des maladies professionnelles, c'est alors l'alinéa 7 de l'article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale qui s'applique avec nécessité d'une incapacité permanente provisoire au moment de la déclaration de la MP d'au moins 25%.
Les avis des CRRMP, au titre de l'alinéa 6 de l'article L. 461-1, sont passés de 9000 à 18 000 au cours de la décennie écoulée, soit une augmentation moyenne de 6.9% par an. Depuis 5 ans, le taux d'avis favorables se situe autour de 40%. En 2018, sur 18 386 demandes en alinéa 6, il y a eu 7354 avis favorables.
Le nombre des avis au titre de l'alinéa 7 de l'article L. 461-1 a aussi augmenté, mais de façon moindre. En 2018, il y a 700 avis rendus de plus qu'en 2017, soit une augmentation de 21%. Parmi les 4000 avis rendu, 49% concernent les pathologies psychiques. Les 1957 demandes d'avis du CRRMP au titre de l'alinéa 7 pour des affections psychiques ont abouti à 990 avis favorables, soit 50.5%.
Le nombre de demandes dans ce domaine a fortement évolué depuis 2012 (205 demandes) car auparavant, pour obtenir le passage en CRRMP, il fallait attendre la consolidation de la maladie pour obtenir le taux définitif d'incapacité permanente alors que depuis 2011/2012, il s'agit, pour le médecin conseil de déterminer un taux prévisible.
Focus sur les arrêts de travail liés à la sinistralité
Un suivi longitudinal des indemnités journalières liées à chaque sinistre survenu depuis 2000 permet de dégager les points suivants :
ü les victimes d'un AT ont en moyenne 99 jours d'incapacité permanente,
ü les victimes d'un accident de trajet ont en moyenne 107 jours d'arrêt,
ü les victimes d'une MP ont 325 jours d'arrêt en moyenne.
L'augmentation de la durée des arrêts depuis 2014 a été de 6 jours en moyenne pour les AT et de 36 jours en moyenne pour les MP.
Focus sur les cancers professionnels
En 2014, il y avait 1685 cancers, dont 1363 liés à l'amiante (81%) et 322 cancers hors amiante. En 2018, on dénombre 1424 cancers dus à l'amiante (79%) et 373 cancers hors amiante.
En moyenne, sur la période 2014-2018, 1774 cancers ont été reconnus en maladie professionnelle au titre des tableaux.
En 2018, les cancers en lien avec une exposition à l'amiante sont en augmentation de 2.3% par rapport à 2017 alors qu'ils étaient en baisse, par rapport à l'année précédente, de 4.1% en 2016 et 1.2% en 2017. En revanche, les cancers hors amiante diminuent de 9.9% en 2018 par rapport à 2017 alors qu'ils avaient augmenté en moyenne de 9.1% par an depuis 2014.
Les cancers dus à l'amiante sont majoritairement reconnus au titre du tableau 30 bis (64.2% sur la période 2014/2018 et 60.8% en 2018) et du tableau 30 du mésothéliome malin primitif de la plèvre ( 27% sur la période 2014/2018 et 28% en 2018).
Les cancers reconnus en MP hors amiante sont répartis sur 15 tableaux de maladies professionnelles. Parmi les plus fréquents, le tableau 15 ter des amines aromatiques (31.4% des MP sur la période 2014/2018 et 40.5% en 2018), le tableau 16 bis de la houille (23.8% des MP sur la période 2014/2018 et 24.7% en 2018) et le tableau 47 des MP liées à l'inhalation de poussières de bois (19.8% des MP sur la période 2014/2018 et 18% en 2018).
En 2018, 149 cancers ont été reconnus au titre de l'alinéa 7 de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale. Il y a eu 74 cancers de la vessie, 21 cancers des organes hématopoïétiques (lymphomes, myélomes), 19 cancers des bronches, du poumon et de la plèvre et 22 autres cancers que ceux-ci-dessus reconnus en MP.
Les âges moyen et médian des victimes au moment de la première indemnisation ou attribution d'un taux d'IP sont de 68 ans.
Les victimes des cancers dus à l'amiante ont un âge plus avancé avec une moyenne de 73.4 ans et une médiane de 74 ans alors que les victimes d'hémopathies dues au benzène du tableau 4 sont les plus jeunes avec 57.7 ans en moyenne et une médiane de 57 ans.
Depuis 2014, une majorité d'environ 90% (88% en 2018) des victimes d'un cancer dû à l'amiante ont subi une exposition de 10 ans ou plus.
Dans la majorité des cas, en 2018, la MP due à un cancer a été imputée à une entreprise (69%, avec environ 30% entre 2014 et 2016) mais 31% ont été imputées au compte spécial car il n'était pas possible de l'affecter à une entreprise.
Les reconnaissances en MP des cancers de la vessie ont fortement augmenté depuis 2007 (31 MP) et 314 MP en 2018. La reconnaissance de ces cancers a augmenté régulièrement depuis 2008 où une expérience de repérage de ces cancers d'origine professionnelle avait été initiée dans les régions Normandie et Nord-Pas-de-Calais, puis étendue à quatre autres régions en 2010-2011 et, enfin, généralisée à la France entière en 2015. En 2018, 50 cancers de la vessie ont été reconnus en Ile de France, 38 en Nord-Picardie, 36 en Alsace-Moselle et 30 en Rhône-Alpes.
Focus sur le risque routier
En 2018, il y a eu 52 132 accidents routiers, en augmentation de 1% par rapport à 2017. Les nouvelles IP liées au risque routier ont aussi augmenté de 1% mais le nombre de décès liés au risque routier a augmenté de façon plus conséquente (+ 7%), les décès par AT routier passent, entre 2017 et 2018, de 76 à 96 (+ 26%) et les décès liés à un accident de trajet sont assez stables, 219 en 2017 et 220 en 2018.
En 2018, les 13 380 AT routiers entraînent 1003 nouvelles IP. Ces AT routiers représentent 2% de l'ensemble des AT en 2018 mais ils représentent 17% des décès dus aux AT.
Ces AT sont dus à 15% à la conduite de véhicules poids lourds (camions, bus, autocars), à 41% à la conduite de véhicules légers (camionnettes, fourgons, tracteurs) et à 15% à la conduite de deux roues.

·     Mise en place des CSE (Sondage Syndex/Ifop)
Je vous présente les données du sondage réalisé par l'Ifop à la demande du cabinet Syndex sur l'appréciation par des représentants du personnel élus de la mise en place du comité social et économique. Cette enquête est intitulée "Mise en place du CSE : bilan et enseignements ".
Syndex est un cabinet d'expertise financière et des conditions de travail pour les CSE et CSSCT (auparavant pour comités d'entreprises et CHS-CT).
Vous pourrez accéder à cette enquête sur le site de Syndex et en pièce jointe.
Méthodologie
L'enquête a recueilli les réponses de 812 représentants du personnel par questionnaire en ligne administré du 24 octobre au 22 novembre 2019.
En outre, 12 entretiens qualitatifs ont été réalisés, 6 concernant des élus dont l'entreprise est passée au CSE depuis moins de trois mois et 6 d'entreprises passées depuis plus de 8 mois au CSE. A chaque fois, il s'agissait de 3 élus d'entreprises de 50 à 300 salariés et de 3 élus d'entreprises de plus de 300 salariés.
Résultats
Qualité du dialogue social
Une majorité de 51% des élus considèrent que la qualité du dialogue social est insatisfaisante (notation de 1 à 5 sur une échelle de 10 allant de 1, le dialogue social est de très mauvaise qualité à 10, le dialogue social est de très bonne qualité). Les répondants sont à 42% passés en CSE depuis plus de 6 mois.
Préparation des élus aux négociations
Une majorité des élus (67%) indiquent qu'ils ont été bien préparés aux négociations pour le passage au CSE, 81% ont été accompagnés par des organisations syndicales, 74% par un cabinet d'avocats et 59% par un cabinet d'expertise.
Capacité d'action suite à la mise en place du CSE
Plus d'un tiers des élus (36%) redoutent une diminution de leurs moyens. Ils sont 39% à craindre un affaiblissement de leur poids face à la direction, la nécessité d'un investissement en temps plus important pour exercer leur fonction et une moins bonne prise en compte des enjeux de santé au travail.
Sujets prioritaires du CSE
Une majorité des élus des CSE considèrent que les sujets prioritaires sont les conditions de travail (63%) et la santé et les risques psychosociaux (62%). Ils sont moins nombreux à indiquer les enjeux économiques et financiers (40%) et les choix stratégiques de l'entreprise (47%).
Gagnants et perdants du passage au CSE
Pour plus de trois quarts (78%) des élus ayant répondu, les directions des entreprises sont perçues comme étant les gagnantes de la mise en place des CSE. Une majorité de 57% de ces élus pense que les salariés de leurs entreprise vont être les perdants de la mise en place des CSE et 44% que les organisations syndicales vont y perdre.
Renouvellement des équipes
Une majorité de 66% des élus indiquent que les équipes nouvellement élues sont mixtes, composées d'anciens et de nouveaux élus et dans 20% des cas, l'équipe d'élus a été fortement renouvelée.
Inquiétude des élus
Une majorité de 65% des élus sont inquiets suite à la mise en place du CSE, 58% se disent déterminés et 48% sont motivés.
Ces élus sont aussi majoritaires à 67% à considérer leur direction comme opportuniste vis à vis de la mise en place du CSE et à 52% ils considèrent leur direction peu ouverte au dialogue.
Besoins en formation des élus
Une grande partie des élus considèrent qu'ils ont des besoins de formation : 68% pour une formation santé, sécurité et conditions de travail, 58% une formation pour maîtriser le fonctionnement du CSE et 45% une formation économique.
Evolution du dialogue social
Une majorité de 55% des élus anticipent une détérioration du dialogue social dans leur entreprise suite au passage en CSE.


Jacques Darmon

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