Lettre d'information du 25 décembre 2022

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Le 25 décembre 2022

 Au sommaire de cette lettre… Un retour sur la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 et la décision du Conseil constitutionnel… Deux jurisprudences… L’une relative au délai prévu pour la contestation de la procédure d’inaptitudeL’autre relative à l’absence de réalisation de l’étude de poste et des conditions de travail avant l’avis d’inaptitudeLes résultats des élections des comités sociaux dans les trois versants de la fonction publiqueQuinzaine des maladies à caractère professionnelle en Bretagne en 2021... Une étude sur l’espérance de vie à 65 ans dans les fonctions publiques territoriale et hospitalièreUn Baromètre sur les Français et la réforme des retraites…

 

Les lettres d’information sont accessibles, depuis janvier 2019, sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires, Conseil d'État

 

Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 et Décision n° 2022-845 DC du 20 décembre 2022 du Conseil constitutionnel

J’avais commenté dans la lettre d’information précédente le texte de loi qui avait été transmis au Conseil constitutionnel (voir sur le blog) en indiquant que je vous informerai en cas d’abrogation de certains articles que j’ai cités.

Vous trouverez le texte de loi en pièce jointe et à l’adresse en fin de commentaire.

Parmi les articles de loi que j’avais retenus, seules certaines dispositions de l’article 101 de la loi ont été abrogées. Elles créaient un article L. 321-1-1 du Code de la Sécurité sociale visant à ne pas indemniser les arrêts maladie prescrits en téléconsultation par un médecin autre que le médecin traitant ou un médecin vu dans les douze mois précédents.

Voici ci-dessous l’argumentation du Conseil constitutionnel au sujet de certaines dispositions de cet article 101 :

« 67. L'article 101 insère notamment au sein du code de la sécurité sociale un nouvel article L. 321-1-1 afin de prévoir les conditions dans lesquelles un arrêt de travail prescrit à l'occasion d'une téléconsultation donne lieu au versement d'indemnités journalières.

68. Les députés auteurs de la deuxième saisine reprochent à ces dispositions de priver d'indemnités journalières les assurés sociaux qui se sont vu prescrire un arrêt de travail dans le cadre d'une téléconsultation, au seul motif que cette prescription n'aurait pas été délivrée par leur médecin traitant ou par un médecin consulté dans l'année précédant cet arrêt de travail. Il en résulterait une méconnaissance des exigences découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.

69. Aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».

70. L'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale prévoit le versement d'indemnités journalières à l'assuré dont l'incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail a été constatée par un médecin.

71. Les dispositions contestées prévoient que, lorsqu'un tel arrêt de travail est prescrit à l'occasion d'une téléconsultation, l'assuré ne bénéficie pas du versement d'indemnités journalières si son incapacité physique n'a pas été constatée par son médecin traitant ou un médecin l'ayant déjà reçu en consultation depuis moins d'un an.

72. En adoptant ces dispositions, le législateur a souhaité prévenir les risques d'abus liés à la prescription d'arrêts de travail dans le cadre d'une consultation à distance. Il a ainsi entendu poursuivre l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude en matière de protection sociale.

73. Toutefois, les dispositions contestées peuvent avoir pour effet de priver l'assuré social ayant eu recours à la téléconsultation du versement des indemnités journalières alors même qu'un médecin a constaté son incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail.

74. Or, d'une part, la seule circonstance que cette incapacité a été constatée à l'occasion d'une téléconsultation par un médecin autre que le médecin traitant de l'assuré ou qu'un médecin l'ayant reçu en consultation depuis moins d'un an ne permet pas d'établir que l'arrêt de travail aurait été indûment prescrit. D'autre part, la règle du non-versement de ces indemnités s'applique quand bien même l'assuré, tenu de transmettre à la caisse primaire d'assurance maladie un avis d'arrêt de travail dans un délai déterminé, se trouverait dans l'impossibilité d'obtenir dans ce délai une téléconsultation avec son médecin traitant ou un médecin l'ayant déjà reçu en consultation depuis moins d'un an.

75. Il résulte de ce qui précède que le 2° du paragraphe I de l'article 101 de la loi déférée méconnaît les exigences constitutionnelles précitées et doit, par suite, être déclaré contraire à la Constitution.

76. Il en va de même, par voie de conséquence, des dispositions du 3° du paragraphe I du même article, qui en sont inséparables. [Il s’agit de l’information que devaient faire les plateformes de consultation à distance aux patients au sujet de cette disposition]. »

 

·     Jurisprudence

 

Lors de la procédure d’inaptitude, l’étude de poste ne s’impose pas toujours (mais il vaut mieux la faire !)

Il s’agit d’un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 7 décembre 2022 – Cass. soc. pourvoi n° 21-17927, publié au Bulletin d’information de la Cour de cassation – qui aborde une absence d’étude de poste lors d’une procédure d’inaptitude.

Faits et procédure – Un salarié a été embauché en avril 2004 par une société en tant qu’agent d’entretien.

Le 25 février 2019, l’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail indique « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Le 7 mars 2019, l’employeur saisit le conseil de prud’hommes, selon la procédure accélérée de fond (référé), pour contester l’avis d’inaptitude et demander une expertise médicale. Le conseil de prud’hommes désigne, le 26 avril 2019, par ordonnance, l’inspecteur médical du travail pour réaliser l’expertise.

L’employeur se pourvoit en cassation contre le jugement de la cour d’appel qui a confirmé l’inaptitude.

Moyen de l’employeur

L’employeur fait grief au jugement de la cour d’appel d’avoir confirmé l’inaptitude du salarié à tout poste au sein de l’entreprise alors que selon l’article R. 4624-42 du Code du travail, une inaptitude ne peut être déclarée par le médecin du travail que sous certaines conditions. Ces conditions sont d’avoir réalisé un examen médical du salarié, avoir réalisé ou fait réaliser une étude de poste ainsi que des conditions de travail. Et procédé à un échange avec l’employeur. Or, pour rendre leurs avis, le médecin du travail et l’inspecteur médical du travail n’avaient pas rempli ces conditions.

L’employeur reproche à la cour d’appel d’avoir confirmé l’inaptitude en indiquant que l’absence de l’observation de ces conditions était sans influence car l’altération de l’état de santé du salarié n’était pas en lien avec une dégradation des conditions de travail mais avec une dégradation des relations entre les parties au cours de l’arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en ont résulté.

À ce titre, la cour d’appel aurait violé l’article R. 4624-42.

Réponse de la Cour de cassation

« Selon l'article L. 4624-7 du code du travail [Lien avec la version en vigueur au moment des faits], dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, modifiée par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, le salarié ou l'employeur peut saisir le conseil de prud'hommes en la forme des référés d'une contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4.

Ce texte ajoute que le conseil de prud'hommes peut confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence et que sa décision se substitue aux avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestées.

Selon l'article R. 4624-42 du code du travail dans ses dispositions issues du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que s'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste, s'il a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste et une étude des conditions de travail dans l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée et enfin s'il a procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur.

Il en résulte que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction.

La cour d'appel, qui a procédé à l'examen de la procédure suivie par le médecin du travail et relevé que l'inaptitude de l'intéressé ne résultait pas des conditions de travail mais d'une dégradation des relations entre les parties pendant l'arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en sont résultées, a pu en déduire que l'absence d'études récentes était sans influence sur les conclusions du médecin du travail qui concernaient une période postérieure à l'arrêt de travail et décider que le salarié était inapte au poste d'agent d'entretien ainsi qu'à tout autre poste au sein de la société.

Le moyen n'est donc pas fondé. »

Le pourvoi de l’employeur est donc rejeté.

https://www.courdecassation.fr/decision/63903c8e0f8a5205d45d7c95?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B%5D=soc&judilibre_publication%5B%5D=b&op=Rechercher+sur+judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=2&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=4

 

La contestation d’une irrégularité de la procédure d’inaptitude doit être faite dans les 15 jours suivant l’avis du médecin du travail

Cet arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 7 décembre 2022 – Cass. soc. pourvoi n° 21-23662, publié au Bulletin d’information de la Cour de cassation – indique que la contestation d’une irrégularité de la procédure, en particulier l’absence de réalisation de l’étude de poste, doit être faite au plus tard 15 jours après la notification de l’avis d’inaptitude [A propos du début du délai de 15 jours, voir l’arrêt de la Cour de cassation n° 20-14552 commenté dans la lettre d’information du 27 juin 2021 sur le blog.]

Faits et procédure – Un salarié a été embauché en tant que maçon par une entreprise de maçonnerie et taille de pierre en mai 2004. À l’issue d’un arrêt de travail, le médecin du travail le déclare « inapte total » dans un avis du 11 avril 2017 en précisant que « son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans l’entreprise ». Le salarié est licencié le 10 mai 2017 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Il saisit le conseil de prud’hommes pour contester son licenciement et en demander la nullité du fait d’une procédure d’inaptitude n’ayant pas inclus une étude de poste. La cour d’appel ayant confirmé le jugement du conseil de prud’hommes, il se pourvoit en cassation.

Moyen du salarié

L’argumentation du salarié repose sur le fait qu’une procédure d’inaptitude réalisée sans étude de poste est irrégulière et que le licenciement prononcé selon cette inaptitude l’est pour une raison de santé et encourt donc la nullité.

En outre, le salarié critique dans ce cas l’obligation de contester dans les 15 jours l’avis du médecin du travail car pour lui cela ne s’applique pas à la contestation de la procédure d’inaptitude mais seulement aux avis de nature médicale du médecin du travail.

Ainsi, le salarié considère que la cour d’appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1132-4, L. 4624-4 et R. 4624-42 du Code du travail ainsi que les articles L. 4624-7 et R. 4624-45 de ce code.

Réponse de la Cour de cassation

« Aux termes de l'article L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des experts près la cour d'appel. L'affaire est directement portée devant la formation de référé.

L'article R. 4624-45 du même code, dans ses dispositions issues du décret n° 2017-1008 du 10 mai 2017, énonce qu'en cas de contestation portant sur les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, la formation de référé est saisie dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. La décision de la formation des référés se substitue aux éléments de nature médicale mentionnés au premier alinéa qui ont justifié les avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés.

Il en résulte que l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant la formation de référé du conseil de prud'hommes qui peut examiner les éléments de toute nature ayant conduit au prononcé de l'avis. En l'absence d'un tel recours, cet avis s'impose aux parties. La cour d'appel, après avoir constaté que l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail le 11 avril 2017 mentionnait les voies et délais de recours et n'avait fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de 15 jours, en a exactement déduit que la régularité de l'avis ne pouvait plus être contestée et que cet avis s'imposait aux parties comme au juge, que la contestation concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de poste.

Le moyen n'est donc pas fondé. »

Le pourvoi du salarié est rejeté.

https://www.courdecassation.fr/decision/63903c900f8a5205d45d7c97?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B%5D=soc&judilibre_publication%5B%5D=b&op=Rechercher+sur+judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=3&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=5

 

·       Résultats des élections dans les fonctions publiques (DGAFP)

Du 1er au 8 décembre 2022 ont eu lieu les élections simultanées dans les trois versants de la fonction publique, ainsi qu’auprès des fonctionnaires de La Poste, d’Orange et des agents publics d’autres organismes, pour l’élection des représentants du personnel dans les comités sociaux. Ces élections permettent de déterminer la représentativité des différentes organisations syndicales dans la fonction publique. Vous pourrez accéder à ces résultats dans un document en pièce jointe et sur le site de la DGAFP à l’adresse en fin de commentaire.

Les comités sociaux, qu’ils soient d’administration, territoriaux ou d’établissement, ont été créés dans la fonction publique par la loi n° 2019-828 du 6 août 2019. Ces comités sociaux deviennent l’instance représentative du personnel de la fonction publique remplaçant à la fois les comités techniques et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (voir dans la lettre d’information du 29 septembre 2019 le commentaire de cette loi sur le blog).

Il y avait 5 111 141 agents inscrits sur les listes électorales dont 2 234 999 se sont exprimés, soit 43.7%, en baisse de 6.1% par rapport à 2018. Les taux des votants sont de 44.9% pour la fonction publique de l’État (FPE), de 45.6% pour la fonction publique territoriale (FPT) et de 37.8% pour la fonction publique hospitalière (FPH).

Résultats des élections 2022 pour les principaux syndicats (entre parenthèses ceux des précédentes élections en 2018) :

ü CFDT, 18.6% (19%) dont 24% dans la FPH et 22.6% dans la FPT ;

ü CGT, 20.9% (21.8%) dont 30.3% dans la FPH et 27.9% dans la FPT ;

ü Force Ouvrière, 18.7% (18.1%) dont 26.6% dans la FPH, 16% dans la FPT et 17% dans la FPE ;

ü UNSA (Union nationale des syndicats autonomes), 11.7% (11.2%) dont 16.4% dans la fonction publique de l’État, 6.5% dans la FPH et 8.6% dans la FPT.

La CFTC obtient 2.7% des voix et la CFE-CGC 3.9% (+ 0.4% par rapport à 2018). La FSU (Fédération syndicale unitaire) augmente le pourcentage de ses voix : 9.2% en 2022 versus 8.6% en 2018.

https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/stats-rapides/resultats-elections-ensFPp_2022.pdf


 

·     Quinzaine des maladies à caractère professionnel en Bretagne en 2021

Vous pourrez accéder au document intitulé « Les maladies à caractère professionnel en région Bretagne – Résultats des quinzaines 2021 » en pièce jointe et sur le site du préfet de la région Bretagne, à l’adresse en fin de commentaire.

Ce document a été publié en novembre 2022 et il est signé par Mme Patricia Bédague et al.

Introduction

Les quinzaines des maladies à caractère professionnel (MCP) réalisées en région depuis les années 2000 (2012 en Bretagne) reposent sur la participation de médecins du travail (mais aussi maintenant des infirmiers en santé au travail) qui signalent, lors des consultations des salariés, les pathologies qu’ils rencontrent dont ils estiment qu’elles sont en lien avec le travail. Il s’agit de pathologies qui ne figurent pas dans les tableaux de maladies professionnelles ou y figurent mais n’ont pas été déclarées ou sont en cours de déclaration mais pas encore reconnues.

Ces quinzaines d’une durée de deux semaines ont lieu deux fois par an.

En Bretagne, les médecins du travail qui ont participé à ces quinzaines exercent dans les services de prévention et de santé au travail, dans des services autonomes (SNCF, Orange, La Poste), dans le Régime agricole ou dans des établissements de la fonction publique hospitalière.

Il est à noter que l’article L. 461-6 du Code de la Sécurité sociale dispose que tout médecin qui aurait à connaître une atteinte qui pourrait être d’origine professionnelle devrait la déclarer.

Matériel et méthodes

Pour les quinzaines des MCP 2021 en Bretagne, 25 médecins du travail ont participé, à au moins l’une des deux quinzaines, sur les 257 médecins du travail exerçant dans la région.

La participation a varié selon les départements, 13% en Ille-et-Vilaine (12 médecins), 11% dans le Morbihan (6 médecins), 9% dans les Côtes-d’Armor (3 médecins) et 5% dans le Finistère (4 médecins).

Selon le type d’exercice des médecins du travail, la participation a été la suivante : 19% à la Mutualité sociale agricole, 10% dans les services autonomes, 9% dans les services de prévention et de santé au travail et 8% dans la fonction publique hospitalière.

Durant ces quinzaines des maladies à caractère professionnel, près de 2000 salariés ont été vus en consultation par un médecin du travail ou une infirmière en santé au travail.

Pour obtenir des données représentatives, les données de l’échantillon ont été redressées sur les critères suivants : le secteur d’activité, la catégorie socio-professionnelle, l’âge et le sexe des salariés.

Les données redressées sont fournies avec un intervalle de confiance à 95% dont je n’ai pas repris les chiffres de l’intervalle.

Résultats

Contexte des consultations

Au total, 1 911 salariés ont été vus en consultation lors des deux quinzaines 2021, dont un peu plus d’un quart par des infirmiers.

Les visites réalisées par les médecins et les infirmiers impliqués dans ces quinzaines des maladies à caractère professionnel sont ainsi réparties : 23.2% de visites d’information et de prévention d’embauche, 17.5% de visites à la demande du salarié, 17.3% de visites de reprise du travail après un arrêt maladie et 13.7% de visites d’information et de prévention périodiques. Nous verrons plus loin les taux de celles qui ont donné lieu à signalement.

Données sur les salariés et les secteurs d’activité

Du point de vu contractuel, 81.4% des salariés vus sont en contrat à durée indéterminée et 84.5% travaillent dans le privé.

Les salariés vus lors de ces quinzaines des MCP 2021 en Bretagne sont âgés de 17 à 72 ans avec une moyenne d’âge de 40.1 ans. La moyenne d’âge est un peu plus élevée chez les femmes (40.8 ans) que chez les hommes (39.6 ans).

Les secteurs d’activité les plus représentés sont ceux de la santé humaine et de l’action sociale (18%), de l’industrie (16%), du commerce et des activités spécialisées des sciences et des techniques (chacun 14%), de l’administration publique (8%) et de la construction (7%).

Caractéristiques des salariés ayant donné lieu à signalement de MCP

Un taux de 10.9% de salariés ont fait l’objet d’un signalement de MCP au cours des deux quinzaines 2021, soit 217 salariés.

Presque la moitié des salariés (103/217) pour lesquels il y a eu un signalement sont des ouvriers et il y a eu 251 pathologies signalées.

Les signalements proviennent à 15.7% des services de santé au travail autonomes, 13.5% de la MSA  et 9.5% des services de prévention et de santé au travail.

Les taux de signalements varient selon les départements, 14.6% dans le Morbihan où il est le plus élevé, 9% dans le Finistère, 8.5% en Ille-et-Vilaine.

Le taux moyen de signalements est de 9% pour les hommes et de 13% pour les femmes.

Chez les femmes, le taux le plus important de signalements se trouve chez celles de 45-54 ans (18.3%) puis il décroit à partir de 55 ans (16%). Chez les hommes, le taux le plus élevé de signalements se retrouve pour les sujets de 55 ans et plus (16.8%).

Pour les catégories d’âges de moins de 34 ans, les hommes sont plus fréquemment l’objet d’un signalement mais pour les âges compris entre 35 et 54 ans il y a de plus forts taux de signalements pour les femmes que pour les hommes.

Les salariés du secteur de la santé humaine et de l’action sociale sont ceux pour lesquels il y a le plus de signalements de MCP (16.5%), suivis par ceux des industries manufacturières extractives et autres (13.8%) et de la construction (10.8%).

Circonstances des signalements

Les signalements de MCP sont plus fréquents au cours des visites de pré-reprise (32%), puis des visites à la demande du salarié ou de l’employeur (19.3%). En revanche, ils sont nettement plus rares lors des visites d’embauche (1.5%).

MCP signalées et maladies professionnelles

Selon les médecins du travail qui ont signalé des MCP, pour 78 d’entre elles (26%), il existe un tableau de maladie professionnelle et pour 173 (74%)  pathologies, il n’existe pas de tableau.

Parmi les pathologies figurant dans un tableau de maladie professionnelle, une majorité de 63 (87%) n’a pas fait l’objet d’une déclaration de maladie professionnelle. Il y a donc une sous-déclaration importante. L’absence de déclaration résulte du fait que le bilan diagnostique est insuffisant au jour de la consultation (18 cas), les critères du tableau ne sont pas remplis (18 cas), la méconnaissance du salarié de la possibilité de déclarer une MP (21 cas), un refus du salarié de déclarer une maladie professionnelle en particulier du fait de la complexité de la demande de reconnaissance (13 cas) et une autre raison (4 cas).

Dans 15 cas, la pathologie a fait l’objet d’une déclaration de maladie professionnelle mais la reconnaissance a été refusée par l’organisme de Sécurité sociale.

Relativement aux pathologies ne figurant pas dans un tableau de maladie professionnelle, 73% concernent la souffrance psychique au travail et 15% des troubles musculo-squelettiques, essentiellement des lombalgies.

Répartition des cas de signalements

La répartition des taux de signalements selon la pathologie et le sexe est la suivante :

ü la souffrance psychique (6.5% au total), 3.4% chez les hommes et 9.7% pour les femmes ;

ü les affections de l’appareil locomoteur (3.8% au total), 4.2% chez les hommes et 3.8% chez les femmes dont des TMS pour 3.4% au total, avec le même pourcentage de 3.4% pour les hommes et les femmes ;

ü les troubles de l’audition, 0.1% uniquement chez les hommes.

La répartition des deux principales pathologies signalées varie selon l’âge :

ü pour les affections de l’appareil locomoteur, on constate un gradient croissant avec l’âge qui fait passer de 1.5% de signalements chez les 25-34 ans à 7.3% chez les 55 ans et plus ;

ü pour la souffrance psychique, le maximum de taux de signalements se retrouve entre 35 et 44 ans (8.5%) et il diminue ensuite pour les 45-54 ans (8.1%) et les 55 ans et plus (8%). Le taux de signalements est beaucoup plus faible pour les 25-34 ans (3.3%).

Zoom sur les affections de l’appareil locomoteur

Ces affections font le plus l’objet d’un signalement chez les hommes de 55 ans et plus (8.6%) alors que chez les femmes il est plus faible (6.1%). Dans la tranche des 45-54 ans, le taux de signalements est plus élevé pour les femmes (5.5%) que pour les hommes (4.4%).

Les taux de signalements sont plus élevés pour les ouvriers (7.4%) que pour les autres catégories socio-professionnelles, employés (3.5%) et professions intermédiaires (2%).

Pour un taux moyen dans la région de 3.8%, c’est dans le secteur de la construction que le taux de signalements est le plus élevé (8.4%), suivi par le secteur des industries manufacturières, extractives et autres (5.2%), le secteur des activités spécialisées scientifiques et techniques (4%) et de la santé humaine et de l’action sociale (3.8%).

Pour les femmes, les deux secteurs les plus touchés sont la santé et l’action sociale (4.5%) et l’industrie (6.8%) alors que chez les hommes il s’agit du secteur de la construction (8.8%) et des activités spécialisées scientifiques et techniques (5.5%).

Parmi les facteurs indiqués par les médecins du travail comme étant à l’origine de ces affections de l’appareil locomoteur, on retrouve les postures (51%), le travail de force, incluant le port de charges (44%) et les mouvements répétitifs (34%).

Dans 22% des situations, des nuisances organisationnelles et relationnelles sont évoquées, essentiellement en lien avec les exigences inhérentes à l’activité (9%).

Les localisations les plus touchées, tant pour les hommes que pour les femmes, sont les membres supérieurs (dont l’épaule, 24% chez les hommes et 46% chez les femmes et de façon moindre mains et poignets avec 11% chez les hommes et 17% chez les femmes) et le rachis (majoritairement lombaire, 38% chez les hommes et 13% chez les femmes).

Zoom sur la souffrance psychique

La souffrance psychique regroupe un grand nombre de pathologies et symptômes : dépression, anxiété, burn out, addiction, état de stress post-traumatique, somatisation, trouble de l’appétit ou du sommeil.

Parmi ces atteintes, les plus fréquentes sont la dépression (38.5%) et l’épuisement professionnel ou burn out (38.4%) suivis par les états anxieux (15.2%).

Les femmes sont nettement plus concernées par la souffrance psychique que les hommes, 9.7% versus 3.4% et il s’agit plus particulièrement des tranches d’âges à partir de 35 ans (8.5% chez les 35-44 ans, 8.1% chez les 45-54 ans et 8% chez les 55 ans et plus).

En termes de catégories socio-professionnelles, les professions intermédiaires (8.8%) et les cadres (8.2%) sont les plus touchés.

Selon la taille des entreprises, c’est dans celles de 250 salariés et plus que le taux de signalements de souffrance psychique est le plus important (10.3%). Ce taux de signalements est plus faible pour les entreprises de moins de 10 salariés (6.1%), de 10 à 49 salariés (5.8%) et celles de 50 à 249 salariés (5%).

Le secteur de l’industrie est celui dans lequel le plus fort taux de souffrance psychique est signalé (6.3%) suivi par celui des activités spécialisées (5.4%).

https://bretagne.dreets.gouv.fr/sites/bretagne.dreets.gouv.fr/IMG/pdf/20221108_mcp_bretagne-2021.pdf

 

·     Espérance de vie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers

Il s’agit du n° 39 de décembre 2022 de Questions politiques sociales de la Caisse des dépôts. Ce document est intitulé « Espérance de vie des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers : un regard sur des emplois spécifiques ». L’étude est signée par Mme Marion Bulcourt et al. Vous pourrez y accéder en pièce jointe et sur le site de la Caisse des dépôts à l’adresse en fin de commentaire.

Introduction

Il est important pour un régime de retraite, en l’occurrence la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriale (CNRACL), de disposer d’éléments d’information relatifs à l’espérance de vie afin de pouvoir anticiper ses engagements financiers. [NDR – En 2020, la CNRACL gère 1.4 million de pensionnés et a 2.4 millions de cotisants dont 63% d’agents territoriaux et 37% d’agents hospitaliers.]

L’espérance de vie est aussi un indicateur qui peut permettre de guider la mise en œuvre d’une politique de prévention. Une mortalité plus précoce étant susceptible de constituer une alerte quant à l’existence de risques spécifiques en termes de santé au travail.

L’espérance de vie est liée à de multiples facteurs dont les comportements individuels à risque (tabagisme, alcoolisme, obésité, etc…) mais aussi des déterminants économiques et sociaux (niveau de formation, activité professionnelle, conditions de travail - telles que le travail de nuit, le travail en équipe alternante), les conditions de fin de carrière et l’exposition à l’environnement.

Les différences d’espérance de vie sont marquées entre hommes et femmes – celle des femmes étant plus importante que celle des hommes – ainsi qu’entre catégories socio-professionnelles (CSP) avec une espérance de vie plus importante pour les cadres que pour les ouvriers.

Cette étude a pour objet d’évaluer l’espérance de vie des agents territoriaux et hospitaliers affiliés à la CNRACL par rapport à celle de l’ensemble de la population française à 65 ans en 2017 et entre les différentes catégories d’agents de ces fonctions publiques.

Matériel et méthodes

Afin de disposer d’un échantillon suffisant, la mortalité des agents, d’au moins 40 ans, nés au plus tard en 1979, affiliés à la CNRACL ou pensionnés, a été prise en compte sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2019.

La population retenue est donc de 2.807 millions d’individus en vie au 31 décembre 2019 (dont 57% en activité et 43% retraités ou en invalidité). Le nombre de décès entre 2015 et 2019 est de 124 364, 68 939 pour les femmes et 55 425 pour les hommes. Le taux des décès est d’environ 0.9% par an en moyenne, 0.7% pour les femmes et 1.2% pour les hommes.

Résultats

Caractéristiques de la population étudiée

Les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers sont majoritairement des femmes, 67% pour l’ensemble de la population étudiée, 81% pour la fonction publique hospitalière (FPH) et 52% dans la fonction publique territoriale (FPT).

L’échantillon de la CNRACL est composé aux 2/3 d’agents de catégorie C. Les catégories A et B représentent 18% et 16% des effectifs. Le taux des hommes en catégorie C est encore plus élevé chez les hommes (73%) que chez les femmes (63%).

A contrario, dans la fonction publique d’État, la population des agents de catégorie A est majoritaire (56%).

Dans l’échantillon de la CNRACL, 10% des agents occupent depuis 17 ans des emplois relevant de la catégorie active exposant à des risques spécifiques ou à une fatigue exceptionnelle.

Cette part des agents en catégorie active est plus importante dans la FPH (30%) que dans la FPT (4%). Il s’agit, dans la FPH des emplois d’infirmiers, d’aides-soignants et d’auxiliaires de puériculture.

Au sein de la FPT ces emplois de catégorie active concernent les sapeurs-pompiers, les policiers municipaux, les fossoyeurs, les agents travaillant dans les égouts, etc…

Ces agents en catégorie active, ayant eu une activité de 15 ans puis de 17 ans après la réforme des retraites de 2010, pouvaient partir 5 ans avant l’âge légal de départ à la retraite. Cette disposition concerne 37% des femmes et 23% des hommes pensionnés.

Un pourcentage de 11% des agents de l’échantillon a liquidé sa pension de retraite au titre de l’invalidité, à peu près équivalent chez les hommes et les femmes.

Espérance de vie à 65 ans des agents territoriaux et hospitaliers

En 2017, l’espérance de vie à 65 ans des agentes des deux fonctions publiques est de 23 ans et 4 mois, soit 2 mois de plus que celle de la population féminine française (moyenne de 23 ans et 2 mois).

En revanche, l’espérance de vie à 65 ans des agents territoriaux et hospitaliers, de 18 ans et 9 mois, est inférieure à celle des hommes de la population française, de 19 ans et 3 mois.

Classiquement, l’espérance de vie à 65 ans des hommes est inférieure à celle des femmes. L’écart d’espérance de vie entre les deux sexes dans ces deux fonctions publiques est plus important que celui de la population française, respectivement 4 ans et 7 mois et 3 ans et 11 mois.

Espérance de vie des sujets reconnus en invalidité

Les sujets reconnus en invalidité représentent 11% de la population pensionnée des affiliés à la CNRACL, taux équivalent pour les hommes et les femmes.

Le risque de mortalité des agents territoriaux et hospitaliers invalides affiliés à la CNRACL est plus élevé que celui des autres agents. L’espérance de vie à 65 ans des femmes reconnues en invalidité est de 20.1 ans et celle des hommes de 14.2 ans par rapport à une moyenne respective dans la population générale de 23.2 ans et 19.3 ans.

Ainsi, leur espérance de vie à 65 ans est diminuée de 5 ans pour les hommes et de 3 ans et 8 mois pour les femmes par rapport aux sujets qui ne sont pas en invalidité.

Cette diminution non négligeable de l’espérance de vie des sujets invalides retentit sur celle de l’ensemble de l’échantillon retenu.

Cependant, même en excluant les sujets invalides, l’espérance de vie dans les deux fonctions publiques est inférieure à celle de la population française.

[NDR – Par comparaison, une étude de l’Agirc-Arrco sur la situation des sujets un an avant leur retraite en 2018 retrouvait dans l’ensemble de la population concernée un taux de 6.5% de sujets en invalidité ou en maladie. voir dans la lettre d’information du 31 octobre 2021 sur le blog].

Différence d’espérance de vie entre les catégories de fonctionnaires et les fonctions publiques

L’espérance de vie des agents territoriaux est inférieure de 7 mois à celle des agents hospitaliers pour les hommes alors qu’elle est sensiblement la même pour les femmes.

L’espérance de vie à 65 ans des agents de catégorie C est plus faible que celle des agents de catégorie B qui est, elle-même, plus faible que celle des agents de catégorie A.

Il y a une différence d’espérance de vie de presque 3 ans entre les agents de catégorie C et A.

Ceci est compatible avec les données en population générale qui montrent une différence d’espérance de vie de 2.3 ans chez les hommes et de 1.4 an chez les femmes entre cadres et employés. Cette différence est encore plus marquée entre cadre et ouvriers, 3.7 années pour les hommes et 2.2 années pour les femmes.

Chez les femmes de catégorie C, l’espérance de vie à 65 ans est de 23 ans versus 23.2 ans pour les femmes dans la population générale. La différence est plus marquée pour les hommes de catégorie C, leur espérance de vie à 65 ans est de 18.1 ans alors que celle des hommes dans la population générale est de 19.3 ans.

Les espérances de vie à 65 ans sont, respectivement pour les femmes et les hommes, pour les catégories B de 23.8 ans et 20.1 ans et pour les catégories A de 24.4 ans et 21 ans. Soient, pour ces deux catégories, des espérances de vie plus élevées que celles de la population générale.

Espérance de vie dans certains métiers

Afin de prendre en compte le retentissement de l’exposition à certains risques professionnels sur l’espérance de vie, l’étude s’est intéressée à certains métiers dans les FPT et FPH. Pour la FPT et la FPH, il s’agit des adjoints techniques territoriaux et pour la FPH des infirmiers, des aides-soignants et des auxiliaires de puériculture.

Les adjoints techniques territoriaux de la FPT

Les adjoints techniques territoriaux exercent des activités d’ouvriers dans différents domaines : le bâtiment, les travaux publics, la voirie, les espaces verts, la restauration scolaire. Certaines des fonctions entraînent une exposition à des conditions de travail physiquement exigeantes telles que celles des égoutiers, des éboueurs, des fossoyeurs, des agents de désinfection.

Ces métiers représentent 37% des hommes de la FPT et de la FPH, soit 63% des sujets de catégorie C et 48% des hommes de la FPT.

L’espérance de vie à 65 ans des adjoints techniques territoriaux masculins est inférieure de 1 an et 11 mois à celle de la population générale.

De plus, cette population est surreprésentée en termes de sujets reconnus en invalidité (17% versus 11% pour l’ensemble des fonctionnaires de ces deux fonctions publiques et 14% des hommes de catégorie C). Après exclusion des calculs des sujets en invalidité, l’espérance de vie à 65 ans des adjoints techniques territoriaux reste inférieure, en 2017, de 1 an et 3 mois à celle des hommes de la population générale.

Les femmes adjointes techniques territoriales ont aussi une espérance de vie à 65 ans inférieure de 3 mois à celle des femmes de la population générale alors que les femmes affiliées à la CNRACL ont une espérance de vie supérieure à celle des femmes de la population générale.

On dénombre, dans cette population des femmes adjointes techniques territoriales, 18% de pensionnées en invalidité.

Si l’on exclue les femmes reconnues en invalidité, l’espérance de vie à 65 ans de cette population est alors supérieure de 2 mois à celle de l’ensemble de la population féminine française.

Espérance de vie dans les métiers du soin de la FPH

La population des infirmières et des aides-soignantes représente 27% des femmes de cette étude. Au sein de la FPH, 31% des femmes sont aides-soignantes et 26% infirmières. En général, ces femmes, à la différence des adjointes techniques territoriales, sont classées en catégorie active avec la possibilité d’un départ anticipé à la retraite à 57 ans au lieu de 62 ans si elles ont eu une activité en catégorie active d’au moins 17 ans. Parmi les pensionnées, 14% des infirmières et 18% des aides-soignantes n’ont pas eu recours à cette possibilité de départ anticipé à la retraite.

L’espérance de vie à 65 ans des infirmières est supérieure de 3 mois et celle des aides-soignantes est supérieure de 2 mois à la moyenne de celle de la population féminine française.

De même, l’espérance de vie à 65 ans des infirmières est supérieure de 2 mois à celle de l’ensemble des femmes des FPH et FPT et elles présentent un taux d’invalidité de 6.6% versus 9.5% pour les femmes de la FPH. Le taux de femmes invalides parmi les aides-soignantes, de 9.8%, est un peu supérieur à celui de la moyenne des femmes de la FPH.

Une explication à ce constat d’une espérance de vie plus élevée dans ces métiers pourrait être que le classement en catégorie active, limite la durée d’exposition à des conditions de travail difficiles et leur retentissement sur la santé.

Synthèse

« En 2017, l’espérance de vie à 65 ans des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, affiliés à la CNRACL, s’élevait à 23 ans et 4 mois pour les femmes, soit 2 mois de plus que celle de l’ensemble des femmes de la population française. Quant à celle des hommes, elle était de 18 ans et 9 mois : si elle est plus faible que celle des femmes (de 4 ans et 7 mois), l’espérance de vie des hommes fonctionnaires territoriaux et hospitaliers est surtout inférieure de 6 mois à celle de l’ensemble des hommes de la population française. Parmi ces fonctionnaires, ceux qui perçoivent une pension d’invalidité ont une espérance de vie à 65 ans nettement plus réduite que celle des non invalides : de 3 ans et 8 mois pour les femmes, de 5 ans pour les hommes. En revanche, le fait d’avoir exercé des emplois de catégorie active n’apparaît guère discriminant : chez les hommes comme chez les femmes, l’espérance de vie à 65 ans des fonctionnaires positionnés sur des emplois de catégorie active est très similaire à celle des sédentaires. Par contre, l’espérance de vie des fonctionnaires augmente avec le niveau de qualification. Les fonctionnaires relevant de la catégorie hiérarchique A ont une espérance de vie à 65 ans supérieure de 8 mois (pour les femmes) et de 11 mois (pour les hommes) aux fonctionnaires relevant de la catégorie hiérarchique B, qui eux-mêmes ont une espérance de vie supérieure à celle des agents de catégorie hiérarchique C (de 9 mois pour les femmes et de 2 ans et 1 mois pour les hommes). L’espérance de vie à 65 ans des hommes de catégorie C de la fonction publique territoriale et hospitalière est également inférieure d’1 an et 2 mois à celle de l’ensemble des hommes de la population française. Ce dernier résultat explique en grande partie l’espérance de vie relativement faible de l’ensemble des hommes de la fonction publique territoriale et hospitalière, dont 72% relèvent de la catégorie C.

Un coup de projecteur sur les principaux corps et cadres d’emplois met en évidence l’espérance de vie à 65 ans particulièrement faible des adjoints techniques territoriaux qui représentent 37% des hommes fonctionnaires territoriaux et hospitaliers : seulement 17 ans et 4 mois, contre 19 ans et 4 mois pour l’ensemble de la population masculine française. À contrario, l’espérance de vie des femmes adjointes techniques territoriales est très similaire à celle de l’ensemble de la population féminine française avec un écart de seulement 3 mois. Les femmes relevant des corps d’aides-soignants et auxiliaires de puériculture (15% des femmes) et des infirmières de soins généraux et spécialisés (12 % des femmes) bénéficient quant à elles d’une espérance de vie légèrement supérieure à l’ensemble de la population féminine française (respectivement de +2 mois et de +4 mois), bien qu’elles exercent des emplois identifiés comme présentant « un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » et bénéficient, ou ont pu bénéficier, à ce titre, sous réserve de certaines conditions, d’une possibilité de départ anticipé en retraite au titre de la catégorie « active ».

https://politiques-sociales.caissedesdepots.fr/qps-les-etudes-ndeg39

 

·       Les Français et la réforme des retraites (BVA / RTL)

En cette période où se pose la question du rallongement de la durée de vie au travail, il est intéressant de voir comment la réforme visant à porter l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans ou 65 ans est perçue par les Français.

Il s’agit d’un sondage auquel vous pouvez accéder en pièce jointe et sur le site de BVA à l’adresse en fin de commentaire.

Cette réforme des retraites a réussi à fédérer l’ensemble des organisations syndicales, ce qui est assez peu fréquent. Vous trouverez, en pièce jointe, un communiqué commun des organisations syndicales de salariés, d’étudiants et de lycéens.

Matériel et méthodes

Ce sondage a été réalisé les 13 et 14 décembre 2022 auprès d’un échantillon, représentatif de la population âgée de 18 ans et plus, de 1003 personnes. La représentativité a été assurée par la méthode des quotas portant sur le sexe, l’âge, la profession de la personne de référence du foyer, la région et la catégorie d’agglomération.

Résultats

Position des Français vis-à-vis de la réforme des retraites

Une majorité de 57% des répondants indiquent qu’il ne faut pas mettre en œuvre cette réforme. Cette réponse est plus fréquente chez les femmes (62%) que chez les hommes (51%)

Cette réponse est aussi plus fréquente dans les tranches d’âges en dessous de 65 ans : 59% pour les 18-24 ans, 67% pour les 25-34 ans, 64% pour les 35-49 ans, 62% pour les 50-64 ans. Pour les 65 ans et plus, ce taux est de 34%.

Le statut socio-professionnel joue aussi, 60% pour les CSP + et 71% pour les CSP – mais le statut de retraité entraîne une faible opposition à cette réforme (34%).

Les partisans des partis de gauche sont plus opposés à cette réforme (78% pour la France insoumise (LFI), 66% pour les verts, 72% pour le PS) de même que ceux du Rassemblement national (RN) (75%) et ceux qui ne sont partisans d’aucun parti (65%). En revanche, les partisans de Renaissance / La République en marche et des Républicains sont nettement moins opposés à cette réforme, respectivement 10% et 21%.

Attitude vis-à-vis du report de présentation de la réforme

La présentation de la réforme des retraites qui devait avoir lieu le 15 décembre 2022 a été repoussée au 10 janvier 2023 afin que les Français passent des fêtes non perturbées par ce projet !

L’attitude vis-à-vis de ce choix de repousser la présentation des retraites a été très partagée, 50% des répondants estiment qu’il s’agit d’une bonne chose, la période des fêtes de fin d’année n’étant pas propice à ce genre d’annonce. Cette opinion est très présente chez les partisans de Renaissance (82%) et, dans une moindre mesure, chez les verts (59%).

Pour 49%, il s’agit d’une mauvaise chose car le pouvoir essaye de gagner du temps mais cela ne fait que retarder l’annonce. Parmi ceux qui voient de façon plus négative que la moyenne ce report : les femmes (53%), toutes les tranches d’âges de moins de 65 ans (51% ou 52%), les CSP – (59%), les partisans de LFI (67%), du PS (60%), du RN (60%) et des Républicains (50%).

Approbation du mouvement de protestation contre la réforme des retraites

Face à l’annonce par plusieurs organisations syndicales d’une mobilisation pour protester contre la réforme des retraites, il est demandé si les personnes interrogées approuvent ce mouvement.

La réponse est majoritairement « Oui » à 63% (38% tout à fait et 25% plutôt) et 36% « Non » (16% pas du tout et 20% plutôt pas). Ce qui est plus que les réponses « Oui » en 2019 (55%). Le « Oui » est plus présent que la moyenne pour les 18-24 ans (68%), les 25-34 ans (78%), les 35-49 ans (69%) et les 50-64 ans (65%). Le « Oui » est aussi beaucoup plus fréquent pour les CSP – (78%) que pour les CSP + (65%) mais très faible chez les retraités (41%).

Intention de manifester

La position vis-à-vis de l’intention de manifester est répartie entre 45% qui n’envisagent pas de manifester, 38% qui soutiennent le mouvement sans penser manifester et 16% qui pensent manifester. Le fait de penser manifester est plus fréquent que la moyenne chez les hommes (20%), les 25-34 ans (19%), les 50-64 ans (27%), les CSP + et CSP – (respectivement 20% et 22%), chez les partisans de LFI (36%), des verts (22%), du PS (30%) et du RN (21%).

Inquiétude vis-à-vis de la situation actuelle de la France

Une majorité des répondants (58%) se disent inquiets de la situation actuelle, 36% se disent en colère, 16% sont résignés, 10% confiants, 7% indifférents et 2% enthousiastes.

Parmi les sujets plus inquiets que la moyenne, les femmes (60%), les sujets de 25 à 64 ans (entre 55% et 62%), les CSP – (60%) et même les retraités (59%). De même que tous les partisans des partis politiques, à l’exception de ceux du PS et de Renaissance (respectivement 49% et 43%).

Enseignements tirés du sondage par les auteurs

« Les Français sont de plus en plus opposés au projet de réforme des retraites qui se précise

La majorité des Français est opposée à la réforme des retraites envisagée par Emmanuel Macron, et alors que le projet se précise, cette opposition tend à se renforcer. 57% des Français souhaitent désormais que le projet de réforme des retraites ne soit pas mis en œuvre, une progression de 4 points depuis septembre. 23% estiment qu’il est urgent de faire cette réforme (-2 depuis septembre), 19% qu’il faudra la mettre en œuvre mais que ce n’est pas urgent (-2). Si les retraités expriment toujours très largement leur soutien (64%), les actifs, directement concernés par la réforme, demeurent nettement plus défiants (65% y sont opposés ; +3). Politiquement, la réforme est toujours largement soutenue par les sympathisants LREM/Renaissance et les sympathisants LR qui la jugement urgente à mettre en œuvre (respectivement 55% et 58%). Les sympathisants de gauche (69%) et les sympathisants RN (75%) se montrent, pour leur part, plus hostiles à ce projet. Le report de la présentation de ce projet de réforme des retraites laisse les Français assez dubitatifs. Ils sont en effet très partagés sur le bien-fondé de ce report : 50% estiment que c’est une bonne chose de laisser passer les fêtes de fin, en particulier les personnes favorables à ce projet ; à l’inverse 49% des Français considèrent que ce report est une mauvaise chose et que le gouvernement ne cherche qu’à gagner du temps. Cette position est majoritaire parmi les populations les plus réfractaires à cette réforme : les ouvriers et employés (59%) et les sympathisants RN (60%) et LFI (67%).

La mobilisation des organisations syndicales est largement approuvée par les Français Alors que plusieurs organisations syndicales ont annoncé vouloir se mobiliser pour protester contre la réforme des retraites, la majorité des Français approuve ce mouvement. Sans grande surprise, les populations les plus opposées à la réforme sont celles qui approuvent le plus cette mobilisation : les moins de 50 ans (72%), les employés et ouvriers (78%), les sympathisants de gauche (78%) et les sympathisants RN (77%). Un Français sur six (16%) indique même envisager de manifester, ce qui est loin d’être négligeable. Les plus motivés pour faire barrage à cette réforme sont les 50-64 ans (27%) et les sympathisants de gauche (29%), populations culturellement plus mobilisées et plus coutumières des grands mouvements sociaux. La plupart des opposants à ce projet de réforme sont dans un soutien au mouvement plus passif : les moins de 50 ans (45%) et les sympathisants RN (51%), qui approuvent pourtant fortement la mobilisation syndicale, n’envisagent pas de traduire leur soutien en manifestant.

L’inquiétude et la colère dominent chez les Français

Alors que la guerre en Ukraine et ses conséquences, notamment sur le prix de l’énergie et le pouvoir d’achat, sont durement ressenties par les Français, les fêtes de fin d’année et l’engouement suscité par le beau parcours des Bleus à la coupe du monde du football ne semblent pas infléchir leur état d’esprit. 58% des Français se disent inquiets, et ce sentiment domine auprès de toutes les tranches de la population, quel que soit l’âge, le milieu social ou la sensibilité politique. Plus inquiétant, plus d’un tiers des Français se disent en colère, en particulier les populations qui se sentent délaissés par le gouvernement et lui sont le plus opposées : les ouvriers et employés (48%), les sympathisants LFI (55%) et RN (59%). Au global, seuls 10% des Français se disent actuellement confiants. Ce sentiment est plus fort auprès des 65 ans et plus (20%) et des sympathisants LREM/Renaissance (37%)… mais il reste également minoritaire. »

https://www.bva-group.com/sondages/francais-reforme-retraites/

 

A l’occasion de cette dernière lettre d’information de l’année 2022, je vous souhaite à toutes et tous une excellente année 2023 qui je l’espère verra revenir la sérénité dans ce monde troublé…

 

Jacques Darmon