Lettre d'information du 28 mars 2021

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Le 28 mars 2021

 

Au sommaire de cette lettre d'information… Une question parlementaire sur la protection fonctionnelle et les prérogatives possibles pour les employeurs de la fonction publique territoriale pour défendre leurs agents… Des jurisprudences… deux consacrées à l'inaptitude, la première incitant à faire attention à l'avis rédigé et la seconde à l'obligation pour l'employeur de notifier un motif pour le non-reclassement alors qu'un poste a été refusé par le salarié… et une autre jurisprudence affirmant que l'exposition à des conditions générales de travail difficile peut justifier la reconnaissance d'un harcèlement moral… Une étude clinique rapportant une augmentation de la mortalité associée au variant anglais du Sars-CoV-2… Et une étude sur les aspects sociodémographiques et les comportements de sujets contaminés par le Sars-CoV-2…

 

Je vous rappelle que vous pouvez accéder à mes lettres d’information depuis un an sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires, Conseil d'Etat

 

Question parlementaire

 

Question écrite n° 18799 de M. Olivier Rietmann (Haute-Saône - Les Républicains) - publiée dans le JO Sénat du 12/11/2020 - page 5250

" M. Olivier Rietmann interroge Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques sur les agressions verbales ou physiques dont les agents des services publics des collectivités territoriales sont victimes.

Afin de sanctionner les auteurs des faits, il lui demande de préciser si les collectivités, en leur qualité d'employeur, sont encore légalement en capacité de déposer plainte en lieu et place des agents victimes, en particulier dans un souci de protection de ces derniers. "

Réponse du Ministère de la transformation et de la fonction publiques - publiée dans le JO Sénat du 18/03/2021 - page 1847

" Principe général du droit repris à l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la protection fonctionnelle oblige l'administration à protéger les agents qu'elle emploie contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont ils pourraient être victimes dans le cadre, ou à l'occasion de l'exercice de leur fonction. En outre, lorsqu'un agent a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d'attribution n'a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions ne lui est pas imputable, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui. À ce titre, lorsqu'elle accorde la protection fonctionnelle à un agent, l'administration doit apporter une réponse par tout moyen approprié pour éviter, ou faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, et assurer la juste réparation du préjudice subi par l'agent dans le cadre de ses fonctions. Dans ce cadre, si l'agent décide d'ester en justice, la collectivité publique peut le soutenir financièrement, en prenant en charge l'ensemble des frais occasionnés, conformément aux modalités fixées par le décret n° 2017-97 du 26 janvier 2017 relatif aux conditions et aux limites de la prise en charge des frais exposés dans le cadre d'instances civiles ou pénales par l'agent public ou ses ayants droit. L'administration peut se constituer partie civile devant les juridictions de jugement si elle-même a subi un préjudice directement causé par l'infraction poursuivie (C. cassation 2 sept. 2014 n° 13-84663) mais l'employeur ne peut déposer plainte en lieu et place de ses agents victimes. Néanmoins, dans le cadre du projet de loi confortant le respect des principes républicains une disposition, ayant reçu l'avis favorable du gouvernement, prévoit la possibilité pour l'administration de porter plainte pour les actes commis à l'encontre de leurs agents, après recueil du consentement de l'agent. En outre, conformément aux priorités de la ministre en matière de renforcement de la protection fonctionnelle des agents, l'article 5 du projet de loi confortant le respect des principes républicains vise à élargir le dispositif de signalement à la disposition des agents publics qui s'estiment victimes d'un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel ou d'agissements sexistes, prévu par l'article 6 quater A de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, aux actes constitutifs d'atteinte à l'intégrité physique des agents ou aux menaces dont ils peuvent faire l'objet dans l'exercice de leurs fonctions. "

 

·     Jurisprudence

 

Si un avis du médecin du travail mentionne dans un même avis une inaptitude et un aménagement de poste, c'est ce dernier qui doit être pris en compte

Il s'agit d'un arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation du 24 mars 2021 – Cass. Soc. pourvoi n° 19-16558 – publié sur le site Internet et le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation.

Les faits – Une salariée a été embauchée le 2 novembre 2007 dans un casino en tant que changeur / traiteur de monnaie.

Le 1er octobre 2018, le médecin du travail a émis un avis rédigé dans les termes suivants : " conformément à l’article R. 4624-42 du code du travail, confirmation de l’inaptitude au poste de travail de caissier. Contre-indication à tout travail de nuit après 22 h ; possibilité de tout autre poste de travail respectant cette contre-indication ; capacité à bénéficier d’une formation "

La salariée saisit le conseil de prud'hommes selon la procédure accélérée au fond (ex référé) de l'article L. 4624-7.

L'employeur se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel qui a considéré qu'il n'y avait pas d'inaptitude mais un aménagement du poste de travail, ceci d'autant plus que, depuis le mois d'août 2018, les horaires de la salariée avaient été aménagés pour qu'elle ne travaille pas au-delà de 22 heures.

L'employeur fait grief à l'arrêt de la cour d'appel d'avoir substitué à l'avis d'inaptitude un aménagement horaire du poste de travail de la salariée. Pour lui, une demande d'affectation à un poste de travail qui n'est pas de nuit d'un salarié travaillant de nuit constitue forcément une inaptitude.

La réponse de la Haute juridiction est la suivante : " Il résulte des articles L. 4624-3 et L. 4624-4 du code du travail, d’une part, que le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échange avec le salarié et l’employeur, des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l’état de santé physique et mental du travailleur, d’autre part, que ce n’est que s’il constate, après avoir procédé ou fait procéder à une étude de poste et avoir échangé avec le salarié et l’employeur, qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste, que le médecin du travail déclare le travailleur inapte à son poste de travail. Il s’ensuit que la circonstance que les mesures d’aménagement préconisées entraînent une modification du contrat de travail du salarié n’implique pas, en elle-même, la formulation d’un avis d’inaptitude.

Ayant relevé que les restrictions émises par le médecin du travail concernaient le travail de nuit après 22 heures, et constaté que la salariée pouvait occuper son poste, avec des horaires de jour, l’employeur ayant d’ores et déjà aménagé ses horaires de travail depuis le mois d’août 2018, la cour d’appel en a exactement déduit que la salariée était apte à son poste de travail, avec réserves concernant le travail de nuit effectué après 22 heures, et a ainsi légalement justifié sa décision.

Le moyen n’est donc pas fondé. "

Le pourvoi de l'employeur est rejeté.

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/369_24_46702.html

 

La proposition d'un emploi conforme aux préconisations du médecin du travail, refusée par le salarié, après une inaptitude, exonère l'employeur de l'obligation de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement

Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 24 mars 2021 – Cass. Soc. pourvoi n° 19-21263, publié sur le site internet et dans le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation.

Les faits – Un salarié a été engagé en avril 1990 par une entreprise, puis le 1er octobre 2010 par une autre société faisant partie du même groupe, en qualité de dépanneur / installateur.

Ce salarié a été victime d'un accident du travail le 7 avril 2015. Il est déclaré inapte à son poste de travail suite à deux examens du médecin du travail les 6 et 21 février 2017. Le 24 avril 2017, il est licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié saisit le conseil de prud'hommes relativement à la rupture de son contrat de travail. Il se pourvoit en cassation, entre autres, sur le refus de l'indemnisation du manquement de l'employeur à l'obligation de fournir les motifs qui s'opposent à son reclassement, ce qui constitue, à ses yeux, une violation de l'article L. 1226-12 du Code du travail.

La réponse de la Haute juridiction est la suivante : " Aux termes de l’article L. 1226-12 du code du travail, lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement. L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi. L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.

Il en résulte que l’employeur a l’obligation de faire connaître au salarié, par écrit, les motifs qui s’opposent au reclassement, lorsqu’il est dans l’impossibilité de lui proposer un autre emploi. Il n’est pas tenu de cette obligation lorsqu’il a proposé au salarié, qui l’a refusé, un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10 du code du travail.

La cour d’appel, qui a retenu que l’employeur avait proposé au salarié des offres de reclassement conformes aux exigences de l’article L. 1226-10 du code du travail, que le médecin du travail avait validé leur compatibilité avec l’aptitude résiduelle du salarié, qui les avait refusées, a exactement décidé que la demande de dommages-intérêts pour non-information des motifs de l’impossibilité de reclassement devait être rejetée.

Le moyen n’est donc pas fondé. "

Le pourvoi du salarié est rejeté.

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/373_24_46707.html

 

Des conditions générales de travail peuvent justifier la reconnaissance d'un harcèlement moral et la prise d'acte de la rupture du contrat de travail

Il s'agit d'un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 4 mars 2021 – Cass. Soc. n° pourvoi 19-24232, inédit.

Les faits – Un salarié a été embauché en 2007 dans une société de centre d'appel localisée en Normandie en tant que superviseur.

Le 6 avril 2010, il prend acte de la rupture de son contrat de travail (selon la jurisprudence, si les griefs exprimés constituent un manquement grave de l'employeur ne permettant pas la poursuite du contrat de travail, la prise d'acte de la rupture est requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou, éventuellement, en licenciement nul, et, dans le cas contraire, la prise d'acte est considérée comme un démission. Avec le risque, dans ce dernier cas, d'avoir à rembourser à l'employeur le montant du préavis s'il le demande).

Le salarié saisit le conseil de prud'hommes et, suite à l'arrêt de la cour d'appel qui l'a débouté, il se pourvoit en cassation.

En effet, la cour d'appel n'a pas retenu les griefs du salarié, portant sur le fonctionnement du centre d'appel dénoncés dans de nombreux témoignages : " Modification régulière des superviseurs et équipes créant un climat d'instabilité et de stress, - Mutation des salariés entre différentes opérations, à titre de sanction, - Ecoute permanente des salariés par casque pendant leur appel, - Notation constante par leur supérieur, sans explication sur la méthodologie appliquée, - Convocation à des "briefs" s'apparentant en pratique à des entretiens disciplinaires, desquels les salariés ressortaient régulièrement en pleurs, - Chronométrage des pauses systématiques, - Interdiction de s'absenter pour aller aux toilettes, hors temps de pause, ou alors en restant connecté, impactant dès lors sur leur statistiques d'appel et leur prime, - Mise en absence injustifiée, y compris pour un retard de quelques minutes en raison d'un rendez-vous médical dûment justifié, - Refus de prise en compte des problématiques médicales des salariés (ex : claustrophobie ...), - Critiques permanentes, injures et menaces de licenciement de la part des supérieurs… "

L'un des témoignages rapportant des faits précis concernant le salarié.

En outre, le salarié fait part d'une tentative de suicide sur le lieu de travail, de son hospitalisation et de ses arrêts de travail.

Le salarié se pourvoit donc en cassation avec deux moyens, le premier est de faire reconnaître le harcèlement moral dont il a été débouté et, le second, d'obtenir une indemnisation pour un manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur.

Sur le premier moyen, au visa des articles L. 1152-1 et L. 1154.1 du Code du travail, la réponse de la Haute juridiction est la suivante : " Pour débouter le salarié de ses demandes au titre du harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que les éléments apportés par ce dernier portaient sur des considérations trop générales concernant les méthodes de gestion du centre d'appel dirigé par la société et que les agissements de harcèlement moral collectif dénoncés ne s'étaient pas manifestés personnellement pour le salarié déterminé qui s'en prévalait.

En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'elle avait relevé que plusieurs salariés témoignaient, d'une part, de pressions en matière d'objectifs, imposées aux directeurs de projets, aux responsables de projets, aux chargés de terrain, aux superviseurs et aux téléconseillers par une organisation très hiérarchisée du directeur de site et qui se traduisaient par une surveillance des prestations décrite comme du "flicage" et, d'autre part, d'une analyse de leurs prestations qu'ils ressentaient comme une souffrance au travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. "

Et la réponse de la Haute juridiction sur le 2e moyen est la suivante : " La cassation sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, emporte cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué par le second moyen en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité "

L'arrêt de la cour d'appel est cassé et l'affaire renvoyée devant une autre cour d'appel.

Arrêt de la Cour de cassation du 4 mars 2021 n° 19-24232

 

·       Risque de mortalité associée au variant anglais (Etude)

Il s'agit d'une étude publiée sur le site du British Medical Journal le 10 mars 2021, signée par Robert Challen et al. dont le titre est " Risk of mortality in patients infected with SARS-CoV-2 variant of concern 202012/1: matched cohort study " signée par Robert Challen et al. (doi.org/10.1136/bmj.n579).

Introduction

Un mutant du Sars-CoV-2 virus a été identifié dans le Sud est de l'Angleterre en septembre 2020 qui été dénommé " Variant of concern 202012/1 " (VOC-202012/1). Ce variant a diffusé dans toute l'Angleterre pour, finalement, être à la source de ¾ des infections au 31 décembre 2021.

Les tests RT-PCR ne détectaient plus la protéine Spike du COV-202012/1 (celle permettant la pénétration dans les cellules humaines) mais, en revanche, pouvaient détecter la protéine N (d'enveloppe).

Le but de cette étude était de déterminer s'il y avait une différence de mortalité entre l'infection par le Sars-CoV-2 et son variant, le VOC-202012/1 (dit "variant anglais").

Matériel et méthode

L'étude a pris en compte les patients de plus de 30 ans qui ont présenté un test positif à la Covid-19 du 1er octobre 2020 au 29 janvier 2021. Les tests permettaient de distinguer le Sars-CoV-2 par une détection des gènes S et N et le VOC-202012/1 par une absence de détection du gène S et une positivité de la présence du gène N.

Les patients ont été suivis durant 28 jours après le début de l'infection ou jusqu'au 12 février 2021.

Dans cette étude, plus de la moitié des décès liés à la Covid-19 ont eu lieu dans les trois jours de l'infection et plus de 85% dans les 14 jours qui ont suivi l'infection.

Résultats

Durant la période de l'étude, 941 518 patients ont eu un résultat biologique positif. Parmi ceux-ci, 214 082 ont été appariés avec au moins un autre individu sur l'âge, la date de recueil du prélèvement, le sexe, l'ethnicité, le lieu d'habitation et l'index de désavantage social et ne différaient que par la réponse au test de recherche de la protéine S.

Ont donc été pris en compte 54 906 patients infectés par le Sars-CoV-2 et le même nombre infectés par le variant anglais (VOC-202012/1).

Chaque individu a été suivi au moins pendant 14 jours et 85% l'ont été durant les 28 jours du suivi.

Parmi ces 109 812 patients, 367 décès ont été à déplorer.

Les patients décédés étaient en moyenne plus âgés que l'ensemble de la population (66.9 ans versus 46.3 ans) et il y avait une plus forte représentation des hommes que de femmes (61.7% versus 38.3%) alors que la proportion était inversée pour les sujets infectés, respectivement, pour hommes et femmes, 46.5% et 53.5% pour le Sars-CoV-2 et pour le virus mutant.

La catégorie des âges la plus représentée chez les sujets infectés était celle des 30-59 ans (88.3%) alors que, parmi les sujets décédés, la répartition était plus homogène avec 31% pour les 30-59 ans, 26.1% pour les 60-69 ans, 24.2% pour les 70-79 ans et 18.8% pour les 80 ans et plus.

Parmi les 54 906 sujets avec recherche du gène S négative, le VOC-202112/1, les auteurs ont constaté 227 décès contre 141 décès dans le groupe atteint par le Sars-CoV-2 non mutant. Ce qui représente, pour le VOC-202012/1, une augmentation du risque de décès avec un Hazard ratio de 1.64 et un intervalle de confiance à 95% de [1.32-2.04] et un p<0.001.

Conclusion

Les auteurs concluent que le variant VOC-202012/1 est non seulement plus transmissible mais il semble aussi plus létal (plus 64%) que le Sars-CoV-2 initial. Ceci est associé à des propriétés phénotypiques liées à de multiples mutations génétiques et ils ne voient aucune raison à ce que cette caractéristique soit limitée au Royaume-Uni. Cette évolution implique que le taux de patients avec des infections graves avec nécessité d'une hospitalisation va augmenter.

https://www.bmj.com/content/bmj/372/bmj.n579.full.pdf

 

·       Facteurs sociodémographiques, comportements et pratiques et Covid-19 (Etude)

Ce document a été publié sur le site de la HAL Archives ouvertes, plateforme développée par le CNRS, permettant la diffusion d'articles scientifiques publiés ou non publiés.

Vous pourrez accéder à ce document en pièce jointe et sur le site de l'Institut Pasteur à l'adresse figurant en fin de commentaire.

Le document est intitulé " Etude des facteurs sociodémographiques, comportementaux et pratiques associés à l'infection par le Sars-CoV-2 (ComCor) " et il est signé par Simon Galmiche et al. (il s'agit d'un rapport de recherche auquel ont participé des membres de l'Institut Pasteur, de la Caisse nationale d'Assurance maladie, de l'Institut Pierre Louis d'épidémiologie et de santé publique et de Santé publique France. Ipsos a réalisé l'enquête.).

Cette étude comporte deux parties, l'une descriptive portant sur les circonstances des contaminations et l'autre, basée sur une étude cas-témoins, sur les facteurs associés à l'infection aiguë par le Sars-CoV-2 pendant la période du couvre-feu et du confinement.

Analyse des circonstances de contamination à partir de la base des cas index

Cette étude a été réalisée en recensant les cas index en adressant 1 192 000 mails aux personnes recensées dans la base Contact-Covid depuis le 28 octobre 2020.

Au total, 77 208 cas ont été recensés durant quatre périodes distinctes :

ü pré-confinement et couvre-feu, 29 504 contaminations,

ü confinement du 31 octobre au 5 décembre 2020, 18 381 contaminations,

ü déconfinement progressif avec réouverture des commerces en fin d'année, du 6 décembre 2020 au 5 janvier 2021, 15 181 contaminations,

ü rentrée du 6 janvier au 31 janvier 2021.

Il faut noter que ces résultats ne sont pas extrapolables à l'ensemble de la population sur le territoire français. En particulier, il existe un biais car toutes les personnes infectées ne se font pas tester.

Caractéristiques sociodémographiques

Sexe

Pour toutes les périodes envisagées, les femmes sont nettement plus contaminées que les hommes, avec des taux, par exemple pour la dernière période, de 61.8% de femmes pour 38.2% d'hommes.

Tranches d'âge

Sur l'ensemble des périodes, la tranche d'âge la plus contaminée a été celle des 39-48 ans (26.3% pour la dernière période) suivie, de façon très proche, des tranches des 29-38 ans (maximum de 23.2% pour la dernière période) et des 49-58 ans (21.5% pour la dernière période).

Densité de population et régions

Les villes de 200 000 habitants et plus sont nettement plus touchées avec, pour la dernière période, 29.1% des sujets contaminés y résidant. Les communes rurales présentent, ensuite, les taux les plus importants (20.7% sur la dernière période). L'agglomération parisienne est aussi une zone avec de nombreux sujets contaminés (17.2% pour la dernière période).

Les régions les plus touchées ont été l'Ile de France qui l'est restée au fil du temps (20.7% au cours de la première période et 19% lors de la dernière) et la région Auvergne-Rhône-Alpes dans laquelle les taux de sujets contaminés ont diminué (22.4% lors de la première période et 15% lors de la dernière).

Catégories socioprofessionnelles (CSP)

La CSP la plus touchée a été celle des cadres supérieurs, même si les taux de sujets contaminés ont bien diminué, passant de 38.1% lors de la première période à 26.8% lors de la dernière.

La CSP des employés a vu ses taux de sujets contaminés augmenter au fil du temps, de 17.2% de sujets contaminés lors de la période du pré-confinement et du couvre-feu, on est passé à un taux de 23.7% lors de la dernière période.

Les professions intermédiaires, avec un taux de 17.1% à la première période ont présenté un pic à 19.9% lors de la 2e période puis sont redescendues à 18.5% lors de la dernière période.

Les raisons du test

Lors de la première période, la raison du test était majoritairement la présence de symptômes évocateurs de la Covid-19 (71.8%), puis ce taux a baissé à respectivement 55.8% et 53.8% lors des deux périodes intermédiaires pour finalement s'établir à 57.1% lors de la dernière période.

Le contact avec un cas confirmé est passé de 40.9% lors de la première période à 50.9% lors de la dernière période.

Enfin, les contacts avec un cas suspect ont été à 8.4% la raison du test lors de la première période et de 6.2% lors de la dernière.

Observation des mesures de prévention

Port du masque

A l'extérieur du domicile

Lors de l'ensemble des périodes, le port du masque tout le temps a été respecté par environ 80% des sujets, 83.6% des sujets contaminés lors de la dernière période (croissance régulière depuis les 78.6% de la première période).

Ceux qui le portaient régulièrement et au moins la moitié du temps sont passés de 17.2% lors de la première période à 13.3%.

Les sujets qui le portaient régulièrement mais moins de la moitié du temps sont très minoritaires (2.5% lors de la dernière période). Enfin, les taux de ceux qui ne le portaient que rarement ou jamais sont très faibles, respectivement 0.4% et 0.2% sur la dernière période.

Dans le cercle amical et familial

Dans ce cadre, les sujets contaminés qui ne portaient jamais le masque ou rarement étaient majoritaires avec des taux respectifs, lors de la dernière période, de 27.4% et 32.2%.

On retrouve néanmoins, lors de la dernière période, 15.5% des sujets contaminés qui portaient régulièrement et plus de la moitié du temps leur masque et 10.6% qui le portaient tout le temps à domicile.

Lavage des mains

Lors de la dernière période, 49.8% des sujets contaminés se lavaient régulièrement les mains 8 à 10 fois par jour et 33.7% plus de 10 fois par jour. Le taux de ceux qui se les lavaient de 1 à 4 fois par jour était, sur la dernière période, de 18.3%.

Source de contamination

Les sources de contamination

Quelle que soit la période, la source de la contamination est le plus souvent inconnue, avec un taux, lors de la dernière période, de 37.4% de cause inconnue. Ensuite viennent, en moyenne de façon à peu près semblable, les événements suspects (21.6% en première période et 15.4% lors de la dernière période) et une source intra-domiciliaire (passée de 15.2% en première période à un pic de 24% en 2e période pour s'établir à 20.9% en dernière période).

Les autres sources de contamination lors de la dernière période sont nettement moins fréquentes : sources professionnelle (8%), extra-domiciliaire familiale (9%), extra-domiciliaire amicale (5.3%) et autre source extra-domiciliaire (4%).

Contamination intra-domiciliaire

Pour les sources intra-domiciliaires, lors de la dernière période, les sources de contamination les plus importantes sont le conjoint/la conjointe, majoritairement en cause (55.3%), puis les enfants (33.2%) et les parents (5.7%). Les autres sources de contamination sont nettement moins fréquentes, frère/sœur (1.5%), ami (0.8%), colocataire (1%) et autre (2.5%).

Il y a, suite à une contamination intra-domiciliaire, lors de la dernière période, majoritairement mise à l'isolement avec la source intra-domiciliaire (63%) avec néanmoins absence d'isolement dans 37% des cas. L'isolement du cas index intra-domiciliaire a commencé, pour la dernière période, majoritairement le jour de l'apparition des symptômes (71.5%), en forte augmentation par rapport à la première période (52.4%), dans les 2 jours suivant l'apparition des symptômes (10.7%) et 3 jours et plus après l'apparition des symptômes (17.5%).

Contamination en milieu professionnel

En milieu professionnel, lors de la dernière période, la contamination a eu lieu dans 26.7% des cas dans un bureau de 2 à 5 personnes, dans 10.5% dans un bureau de plus de 5 personnes, dans 9.3% à la cafétéria du personnel, dans 4.1% des cas dans un atelier, dans 5.1% dans le logement, dans 3.5% dans un lieu de restauration et dans 23.8% des cas dans un autre lieu.

Les principales activité à la source de contamination sont les activités de bureau (33.2%), les réunions de travail (19.1%), le service à des clients (6.4%) et d'autres activités (33.2%).

Dans 44.9% des cas, la source professionnelle était symptomatique et dans 64.9% des cas les contacts ont été répétés plusieurs jours. Dans un peu moins d'un tiers des cas, le contact a duré plus de 15 minutes (31%).

Le contact a eu lieu majoritairement dans un local sans fenêtre ou avec les fenêtres fermées (85.5%) et, de façon moins importante, dans un local avec fenêtres ouvertes (12%).

Dans 38.1% des cas, personne ne portait de masque et dans 40.4% la personne source et la personne contaminée en portaient un. Dans 2.8% des cas seulement la personne source portait un masque et, dans 18.8% des contaminations, seule la personne contaminée en portait un.

Contamination familiale extra-domiciliaire

Les événements les plus nombreux à l'origine d'une contamination familiale, en dehors du domicile, lors de la dernière période, sont un repas sans raison particulière (38.2%), un anniversaire, une fête, un pot (10.7%) et un autre événement (47.2%). Lors de la dernière période, la contamination familiale hors du domicile a eu lieu avec moins de 5 personnes réunies dans 73.9% des cas et entre 5 et 20 dans 26%.

Lorsque l'origine est un contact amical, on retrouve le poids important d'un repas sans raison particulière (46%), d'un anniversaire, d'une fête, d'un pot (15.1%) et d'un autre type d'événement (36.5%).

Etude cas-témoins sur les facteurs associés à l'infection aiguë par le Sars-CoV-2

Cette étude a porté sur 8 702 cas et 4 351 témoins répartis sur les quatre périodes du confinement et du couvre-feu appariés sur les caractéristiques suivantes : âge, sexe, région, densité de la population et période. Ces résultats qui peuvent être biaisés par le fait que les personnes avaient à répondre à un long questionnaire sont susceptibles de ne pas être représentatifs de l'ensemble de la population.

Caractéristiques sociodémographiques de la population contaminée

Les cas contaminés étaient à 65.1% des femmes et 34.9% des hommes.

Les tranches d'âge (prises par 3 ans) les plus représentées étaient les 36-39 ans (7.3%), les 39-42 ans (7.8%), les 42-44 ans (7.5%), les 45-47 ans (7.7%) et les 48-50 ans (7.9%).

Ainsi, les 36-50 ans représentaient 38.2% des sujets contaminés, les 18-36 ans 31.6% des suets contaminés, les 51-62 ans 20.8% des sujets contaminés et les 63 ans et plus, 9.1% des sujets contaminés.

Les régions les plus touchées en termes de contamination sont la région Auvergne-Rhône-Alpes (16.5%), l'Ile de France (15.6%) et le Grand Est (14.6%).

Résultats globaux pour les quatre périodes

Catégorie socioprofessionnelle (CSP)

Les résultats présentés sont ceux en analyse multivariée avec Odds ratio (OR) et intervalle de confiance à 95%.

Les artisans et ouvriers artisans ont été pris en référence.

On trouve une surreprésentation des sujets contaminés statistiquement significative parmi les CSP suivantes :

ü les cadres de la fonction publique avec OR de 1.35 [1.07-1.75] ;

ü les chefs d'entreprise de 10 salariés et plus avec OR de 1.78 [1.30-2.38] ;

ü les cadres administratifs et commerciaux d'entreprise avec OR de 1.65 [1.36-2.02] ;

ü les ingénieurs et cadres techniques d'entreprise avec OR de 1.46 [1.26-1.76] ;

ü les professions intermédiaires de la santé et du travail social avec OR de 1.99 [1.55-2.46] ;

ü les chauffeurs avec un OR de 2.08 [1.45-2.71].

En revanche, les CSP suivantes étaient, de façon statistiquement significative, moins contaminés :

ü les professeurs et les professions scientifiques avec OR de 0.50 [0.37-0.67] ;

ü les professeurs des écoles, instituteurs et assimilés avec OR de 0.51 [0.39-0.66] ;

ü les professions intermédiaires administratives de la fonction publique avec OR de 0.63 [0.49-0.84] ;

ü les professions intermédiaires administratives et commerciales des entreprises avec 0.50 [0.39-0.62] ;

ü les employés civils et agents de service de la fonction publique avec OR de 0.72 [0.59-0.87] ;

ü les policiers et militaires avec OR de 0.58 [0.45-0.79] ;

ü les employés administratifs d'entreprise avec OR de 0.70 [0.57-0.87] ;

ü les personnels des services directs aux particuliers avec OR de 0.59 [0.49-0.72] ;

ü les retraités avec OR de 0.64 [0.51-0.79].

Autres caractéristiques

Indice de masse corporelle

Les auteurs de l'étude retrouvent une surreprésentation des sujets en surpoids statistiquement significative avec un OR de 1.07 [1.01-1.13] mais cette surreprésentation n'est pas présente pour les sujets obèses, l'OR étant de 1.04 [0.97-1.12].

En revanche, la dénutrition et la maigreur semblent protectrices (OR de 0.74 [0.63-0.81]).

Lieu d'habitation

Le fait de demeurer dans une maison étant la référence, la vie en appartement est significativement moins en lien avec la contamination (OR de 0.91 [0.85-0.96]) alors que demeurer en foyer ou en Ehpad est statistiquement associé à un surrisque de contamination (OR de 1.75 [1.35-2.30]).

Nombre de personnes vivant dans le foyer

La présence d'une seule personne au foyer servant de référence, on observe un gradient croissant du risque de contamination avec l'augmentation du nombre de personnes vivant au foyer avec les OR suivants : 1.11 [1.03-1.20] pour 2 personnes, 1.33 [1.21-1.47] pour 3 personnes, 1.46 [1.32-1.62] pour 4 personnes, 1.95 [1.68-2.26] pour 5 personnes et 2.22 [1.84-2.65] pour 6 personnes et plus.

Garde des enfants et scolarisation

Il existe une association significative entre la garde d'enfants par une assistante maternelle et le risque de contamination avec un OR de 1.39 [1.22-1.58] alors que cette association est augmentée, mais non significativement, en cas d'enfants dans une crèche (OR de 1.13 [0.97-1.29]).

Certains modes de scolarisation sont associés à un risque augmenté de contamination. Voici les scolarisations des enfants augmentant l'association avec le risque de contamination :

ü école maternelle, OR de 1.15 [1.05-1.24] ;

ü collège, OR de 1.27 [1.18-1.37] ;

ü lycée, OR de 1.29 [1.19-1.40].

Seule la formation à l'université diminue de façon statistiquement significative l'association avec la contamination par le Sars-CoV-2 avec un OR de 0.83 [0.76-0.91].

Déplacements

Les déplacements en co-voiturage (OR de 1.58 [1.44-1.74]) et à l'étranger (OR de 1.53 [1.32-1.77]) augmentent l'association avec une contamination par le Sars-CoV-2.

Ce qui n'est pas le cas des trajets en bus (OR de 0.62 [0.57-0.68]), en tramway (OR de 0.71 [0.62-0.80) ou en train (OR de 0.78 [0.70-0.88]). Les trajets en métro diminuent de façon non significative l'association avec la contamination (OR de 0.99 [0.89-1.10]).

Conditions de travail

La référence est celle de sujets en activité professionnelle sur leur lieu de travail.

Voici les effets de plusieurs options d'activité sur l'association avec la contamination par le Sars-CoV-2 :

ü pas de travail, OR de 0.75 [0.68-0.84] ;

ü travail de bureau partiellement en télétravail, OR de 0.76 [0.70-0.83] ;

ü travail de bureau complétement en télétravail, OR de 0.70 [0.64-0.77].

Les réunions professionnelles physiques augmentent de façon non significative l'association avec la contamination par le Sars-CoV-2 avec un OR de 1.04 [0.98-1.10].

Résultats par période

Je me limite à certains résultats estimés par période que je considère comme les plus intéressants.

Ceux qui s'intéresseraient à l'ensemble de ces résultats pourront les consulter dans le document original.

Sexe

Les hommes servant de référence, on constate que lors des 2e période (pré-confinement/couvre-feu), 3e période (déconfinement et Noël 2020) et dernière période (post-noël et couvre-feu) les femmes sont plus contaminées que les hommes avec des OR respectifs de 1.14 [1.06-1.23], 1.16 [1.07-1.25] et 1.13 [1.07-1.20].

Tranches d'âge

On observe une augmentation significative de l'association des tranches d'âge suivantes avec la contamination lors des quatre périodes, les 18-28 ans étant pris en référence :

ü 29-38 ans, OR de 1.74 [1.45-2.05] lors de la première période, 1.23 [1.07-1.42] lors de la seconde période, 1.36 [1.15-1.63] lors de la troisième période et 1.16 [1.01-1.33] lors de la dernière période ;

ü 59-68 ans avec des OR de 3.30 [2.62-4.21] pour la première période, de 1.74 [1.43-2.12] pour la deuxième période, de 2.09 [1.59-2.83] pour la troisième période et 1.77 [1.45-2.15] pour la dernière période.

Pour toutes les autres tranches d'âge, 30-48 ans, 49-58 ans, 60 ans et plus, l'association avec la contamination est soit diminuée de façon statistiquement significative– et c'est la majorité des cas – soit diminuée de façon non significative (cas des 49-58 ans lors des troisième et dernière périodes).

Type de logement

Par rapport au fait de loger dans une maison, seule la résidence dans un foyer ou un Ehpad augmente l'association de façon significative avec la contamination par le Sars-CoV-2 pour les deuxième période (OR de 2.41 [1.24-4.02]) et dernière période (OR de 1.66 [1.09-2.37]). En revanche le fait d'habiter en appartement ne réduit le risque de contamination de façon significative que durant la dernière période après Noël et pendant le couvre-feu, avec un OR de 0.84 [0.75-0.93].

Diplôme

Par rapport aux diplômes inférieurs au bac et l'absence de diplôme pris en référence, les auteurs constatent une diminution significative de l'association avec la contamination par le Sars-CoV-2 :

ü pour le bac et la capacité lors du déconfinement et de Noël et de la période après Noël et du couvre-feu avec des OR respectifs de 0.82 [0.68-0.97] et 0.71 [0.63 [0.80] ;

ü les bacs +2 à +4 avec, au cours de ces mêmes deux périodes, des OR de 0.78 [0.66-0.93] et 0.75 [0.66-85].

https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-03155847/document

 

A bientôt !

 

Jacques Darmon

 

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