Lettre du 1er septembre 2019



Vous trouverez au sommaire de cette lettre d'information de rentrée… Des textes de loi… certains articles de la loi santé intéressant la santé au travail… un arrêté sur les orientations prioritaires de la formation susceptibles de concerner la santé au travail… Deux avis de la Cour de cassation sur le barème d'indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse… et des jurisprudences, dont la première porte sur la formulation ambiguë d'un avis d'inaptitude, une autre appliquant à la lettre la définition de l'accident du travail pour un infarctus et la dernière appliquant l'article de la Sécurité sociale spécifiant la caisse ou l'organisme devant prendre en charge une pathologie professionnelle… Un commentaire de la circulaire de la Direction des risques professionnels sur la procédure de reconnaissance des maladies professionnelles applicable au 1er décembre 2019… Le rapport 2019 sur les violences en milieu de santé en 2018… Le rapport sur l'évolution de l'incidence et de la mortalité des cancers entre 1990 et 2018…
Je vous joins la plaquette de présentation de la Permanence conditions de travail et santé qui accueille des personnes confrontées à des difficultés liées au travail deux fois par mois (1er vendredi et 3e lundi du mois) à la Bourse du travail de Paris. Les dates des permanences y figurent jusque janvier 2020.
  • Textes de loi, réglementaires, circulaires, questions parlementaires et questions prioritaires de constitutionnalité
Loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé
Vous trouverez, ci-dessous, quelques articles de cette loi santé qui interfèrent avec la santé au travail ou la médecine du travail.

Article 5
Cet article prévoit que le Gouvernement peut prendre par ordonnance toute mesure relative à l'exercice des professions de médecins et d'infirmiers visant à permettre, à échéances régulières de garantir le maintien des compétences, la qualité des pratiques professionnelles et le niveau des connaissances.
Les ordonnances doivent être prises dans un délai d'un an pour les médecins et de deux ans pour les infirmiers.

Article 44
Il comprend un article L. 1110-4-1 qui stipule que " Afin de garantir l’échange, le partage, la sécurité et la confidentialité des données de santé à caractère personnel, doivent être conformes aux référentiels d’interopérabilité et de sécurité élaborés par le groupement d’intérêt public mentionné à l’article L. 1111-24, pour le traitement de ces données, leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie électronique :
 1° Les systèmes d’information ou les services ou outils numériques destinés à être utilisés par les professionnels de santé et les personnes exerçant sous leur autorité, les établissements et services de santé, le service de santé des armées et tout organisme participant à la prévention ou aux soins dont les conditions d’exercice ou les activités sont régies par le présent code…. "

Article 45
L'article L. 1111-13 prévoit qu'un espace numérique de santé est mis à la disposition de chaque personne afin de lui permettre de gérer ses données de santé et de permettre un suivi de son parcours de santé en lien avec les acteurs des secteurs sanitaire, social et médico-social pour favoriser la prévention, la coordination, la qualité et la continuité des soins.
Sur cet espace pourra être inséré son dossier médical partagé.

Article 50
L'article L. 1111-14 du Code de la santé publique indique que l'ensemble des personnes disposent d'un dossier médical partagé numérique.
Le titulaire doit être informé de l'ouverture de ce dossier médical partagé ainsi que de ses conditions de fonctionnement, de même que sur les modalités d'exercice du droit d'opposition à l'ouverture de ce dossier médical partagé et du droit de le clôturer à tout moment (art. L. 1111-21 du Code de la santé publique).
Ce dossier médical partagé sera mis en œuvre par décret en Conseil d'Etat au plus tard le 1er juillet 2021.

Article 51
Cet article modifie, pour le 1er juillet 2021, l'article L. 1111-15 du Code de la santé publique qui indique au 1er alinéa : " chaque professionnel de santé, quels que soient son mode et son lieu d'exercice, reporte dans le dossier médical partagé, à l'occasion de chaque acte ou consultation, à l'exception de ceux réalisés dans le cadre de la médecine du travailles éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins de la personne prise en charge ".
Et le 3e alinéa de l'article L. 1111-18 précise que Dans le cadre de la médecine du travail, le dossier médical partagé est accessible uniquement pour y déposer des documents. "
L'article L. 4624-8 du Code du travail, en vigueur à compter du 1er juillet 2021, stipule que le dossier en santé au travail est intégré au dossier médical partagé évoqué ci-dessus.
Il est en outre indiqué que Ce dossier est accessible aux professionnels de santé mentionnés aux articles L. 1111-15, L. 1111-16 et L. 1111-17 du code de la santé publique, sauf opposition de l'intéressé. En cas de risque pour la santé publique ou à sa demande, le médecin du travail le transmet au médecin inspecteur du travail. Ce dossier peut être communiqué à un autre médecin du travail dans la continuité de la prise en charge, sauf refus du travailleur. Le travailleur, ou en cas de décès de celui-ci toute personne autorisée par les articles L. 1110-4 et L. 1111-7 du même code, peut demander la communication de ce dossier. "

Article 55
Cet article de la loi modifie l'article L. 161-35 du Code de la Sécurité sociale pour au plus tard le 31 décembre 2021. Il est prévu dans l'article modifié que " Les arrêts de travail sont prescrits, sauf exception, de manière dématérialisée par l’intermédiaire d’un service mis à la disposition des professionnels de santé par les organismes d’assurance maladie. "

Article 61
Il modifie l'article L. 142-11 du Code de la Sécurité sociale dont le premier alinéa est ainsi rédigé : " Les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions compétentes en application des articles L. 141-1 et L. 141-2 ainsi que dans le cadre des contentieux mentionnés aux 4°, 5°, 6°, 8° et 9° de l'article L. 142-1 sont pris en charge par l'organisme mentionné à l'article L. 221-1 [La Caisse nationale de l'Assurance maladie]. "'
Ce qui est visé à l’article L. 141-1 : Les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade ou à l'état de la victime, et notamment à la date de consolidation en cas d'accident du travail et de maladie professionnelle et celles relatives à leur prise en charge thérapeutique, à l'exclusion des contestations régies par l'article L. 142-2, donnent lieu à une procédure d'expertise médicale dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. "
Les points concernant la prise en charge de l'expertise médicale pour l'article L. 142-1 sont :
4° A l'état ou au degré d'invalidité, en cas d'accident ou de maladie non régie par le livre IV du présent code, et à l'état d'inaptitude au travail ; 
5° A l'état d'incapacité permanente de travail, notamment au taux de cette incapacité, en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;
6° A l'état ou au degré d'invalidité, en cas d'accidents ou de maladies régies par les titres III, IV et VI du livre VII du code rural et de la pêche maritime, à l'état d'inaptitude au travail ainsi que, en cas d'accidents du travail ou de maladies professionnelles régies par les titres V et VI du même livre VII, à l'état d'incapacité permanente de travail, notamment au taux de cette incapacité ; 
8° Aux décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnées au premier alinéa de l'article L. 241-9 du code de l'action sociale et des familles ; 
9° Aux décisions du président du conseil départemental mentionnées à l'article L. 241-3 du même code relatives aux mentions “ invalidité ” et “ priorité ”.
Ci-dessous, des extraits de cet arrêté pouvant intéresser la santé et la médecine du travail en termes d'orientations pluriannuelle prioritaires de développement professionnel continu.
Médecin spécialisé en médecine et santé au travail :
" orientation no 108 : Prévention et prise en charge du risque de désinsertion professionnelle et maintien dans l’emploi ;
– orientation no 109 : Prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) ;
– orientation no 110 : Expositions professionnelles aux agents chimiques ;
– orientation no 111 : Risques psychosociaux (RPS) des travailleurs "
Infirmier :
orientation no 185 : Gestion de la violence et de l’agressivité des patients et de leur entourage ;
  • orientation no 189 : Soins infirmiers dans la prise en charge des plaies ;
  • orientation no 192 : Promotion et développement d’une culture de santé sur les lieux de travail (infirmiers exerçant en santé au travail) ;
  •  orientation no 193 : Prévention, dépistage et surveillance des pathologies professionnelles en développant la démarche clinique infirmière en santé au travail (infirmiers exerçant en santé au travail) ;
  •  orientation no 194 : Identification des risques professionnels susceptibles de provoquer des atteintes à la santé (infirmiers exerçant en santé au travail) "

Médecin spécialisé en psychiatrie :
  • orientation no 132 : Prévention, repérage et prise en charge des pathologies et des risques psychiatriques liés à l’environnement : familial, social, sociétal, professionnel "
  • Jurisprudence
Attention à la formulation de l'avis d'inaptitude !
Il s'agit d'un arrêt de la Cour de cassation du 10 juillet 2019 - Cass. Soc. n° 18-15081, non publié au Bulletin - que je trouve intéressant de commenter car il a trait à une formulation d'avis faite par de nombreux médecins du travail, le plus souvent pour marquer que l'inaptitude est en lien avec une souffrance au travail ou un harcèlement.
Les faits - La personne objet de l'inaptitude a été engagée le 1er avril 2005 dans un office notarial en qualité de négociatrice, statut conventionnel d'employée de niveau 2. En 2010, elle est promue technicienne au niveau 2. Sa rémunération comportait une part variable déterminée en fonction de ses résultats de négociation. Elle est en arrêt de travail et, à la suite de sa visite de reprise et d'une deuxième visite médicale, elle est déclarée inapte, le 25 mars 2014, par le médecin du travail avec un avis ainsi formulé " inapte à son poste mais apte à un poste similaire dans un environnement de travail différent ".
L'employeur propose à la salariée deux postes de reclassement - un poste de clerc à la rédaction d'actes ou de formaliste chargée des formalités antérieures et postérieures à la rédaction d'actes notariés - qu'elle refuse. La salariée indique qu'elle ne dispose pas des diplômes et des compétences adéquats et qu'elle ne souhaite pas suivre de formation lui permettant d'assumer ces postes.
Elle est licenciée le 3 juin 2014 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Elle saisit le conseil de prud'hommes pour le paiement de diverses sommes et la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La cour d'appel considère le licenciement sans cause réelle et sérieuse, bien que l'employeur ait proposé ces postes et qu'il s'agissait d'une petite étude notariale comprenant peu de salariés, ce que fait valoir l'employeur. Pour la cour d'appel, l'employeur suite aux refus de postes par la salariée, aurait dû de nouveau solliciter le médecin du travail car ces postes étaient incompatibles avec ses préconisations " puisqu'elles s'inscrivaient dans le même environnement professionnel ". Elle en déduit que l'employeur n'aurait pas recherché sérieusement de poste de reclassement. La cour d'appel attribue aussi à la salariée des rappels de salaires.
L'employeur se pourvoit en cassation avec deux moyens, l'un, concernant la contestation du licenciement sans cause réelle et, l'autre, l'attribution de rappels de salaires.
La Cour de cassation a la même appréciation que la cour d'appel sur la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle écrit " Mais attendu que le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, sans dénaturer les termes du refus opposé par la salariée aux postes proposés par l'employeur, ayant relevé que celui-ci n'avait pas sollicité du médecin du travail de précisions sur les possibilités d'aménager ou d'adapter un poste afin qu'il corresponde à « un environnement de travail différent », en a déduit que l'employeur n'avait pas procédé à une recherche sérieuse de reclassement ".
En revanche, elle ne suit pas la cour d'appel sur le rappel de salaires, au visa de l'article 455 du Code de procédure civile car " en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur qui soutenait que la salariée avait perçu dès son embauche une rémunération supérieure à la rémunération minimale due pour un coefficient 146 de sorte qu'aucun rappel n'était dû, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ".
La Cour de cassation casse uniquement l'arrêt sur le moyen concernant le rappel de salaires et renvoie, sur ce point, devant la même cour d'appel autrement composée.

Le barème instauré par les ordonnances Macron toujours contesté !
L'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 (article 2) a instauré un barème pour les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse figurant à l'article L. 1235-3 du Code du travail pour les salariés des entreprises de plus de 10 salariés et avec plus de deux ans d'ancienneté. Auparavant, dès lors que le salarié avait deux ans d'ancienneté, l'indemnité minimale était de 6 mois de salaires.
En 2019, plusieurs décisions de juges des conseils de prud'hommes ont refusé d'appliquer ce barème en indiquant qu'il était contraire à des dispositions internationales et européennes. Plus précisément, l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail et l'article 24 de la Charte sociale européenne.
Au mois de juillet 2019, la Haute juridiction, suite à une demande d'avis de deux conseils de prud'hommes, ceux de Louviers et Toulouse, s'est prononcée, dans des arrêts 15012 et 15013 de l'Assemblée plénière sur la conformité du barème avec les textes cités ci-dessus.
Ces arrêts qui seront publiés dans le Bulletin informatique, le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation, dans son rapport et sur internet indiquent que le barème n'est pas incompatible avec les textes cités ci-dessus.
De façon synthétique, voilà ci-dessous, la position de la Haute juridiction :
1° La compatibilité d’une disposition de droit interne avec les dispositions de normes européennes et internationales peut faire l’objet d’une demande d’avis, dès lors que son examen implique un contrôle abstrait ne nécessitant pas l’analyse d’éléments de fait relevant de l’office du juge du fond.
2° Les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui prévoient notamment, pour un salarié ayant une année complète d’ancienneté dans une entreprise employant au moins onze salariés, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal d’un mois de salaire brut et un montant maximal de deux mois de salaire brut, n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
3° Les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée ne sont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.
4° Les dispositions précitées de l’article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail. "
Depuis la publication des avis de la Cour de cassation, deux conseils de prud'hommes, ceux de Grenoble et de Troyes, dans des jugements rendus fin juillet 2019 ont de nouveau refusé d'appliquer le barème de l'article L. 1235-3. Ce qui est intéressant est que le jugement du conseil de prud'hommes émane d'une formation de départage où la décision est prise par un juge professionnel après avoir entendu les conseillers prud'hommes salariés et employeurs. De plus, le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble fait explicitement référence aux avis de la Cour de cassation en indiquant que " L'avis rendu par la Cour de cassation le 17 juillet 2019 a conclu à la compatibilité des stipulations de l'article L ; 1235-3 du Code dut travail et de l'article 10 de la convention de l'OIT, mais ne constitue pas une décision au fond. " (Voir le jugement en pièce jointe).
Selon Liaisons sociales, les cours d’appel de Paris et de Reims devront se prononcer sur la conventionnalité du barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse le 25 septembre 2019.
Avis de la Cour de cassation en Assemblée plénière n° 15012 et 15013 du 17 juillet 2019.
Un infarctus survenu sur le lieu de travail est présumé constituer un accident du travail, sauf à démontrer qu'il est totalement étranger au travail
Il s'agit d'un arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de cassation du 11 juillet 2019 - Cass. 2e civ. n° 18-19160 - d'une certaine importance jurisprudentielle puisque publié au Bulletin d'information, au Bulletin des arrêts et sur le site internet de la Cour de cassation.
Les faits – Un salarié est décédé sur son lieu de travail suite à une malaise cardiaque. L'employeur établit une déclaration d'accident du travail. La Caisse primaire d'Assurance maladie refuse de prendre en charge le décès au titre de la législation professionnelle. Les ayants droit saisissent une juridiction de Sécurité sociale.
La cour d'appel suit l'argumentation de la Cpam et rejette la demande des ayants droit de reconnaissance de l'accident du travail. Elle appuie son argumentation sur les résultats de l'enquête qui a été diligentée par la Cpam qui indiquait que le salarié était de " nature inquiète " et préoccupé par l'état de santé de son père et par la perspective d'un redressement fiscal analogue à celui vécu par plusieurs de ses collègues. De plus, l'enquête estimait, suite aux témoignages recueillis, que l'environnement professionnel du salarié était correct. La décision de la cour d'appel s'appuyait aussi sur le fait que le médecin conseil et l'expert avaient considéré qu'il n'y avait pas de relation de causalité entre les conditions de travail et le décès. L'expert concluant ainsi : " Je ne pense pas que l'on puisse considérer qu'une réunion mensuelle d'un comité de direction où il ne devait pas y avoir de sujet particulièrement conflictuel à aborder puisse être responsable de stress inhabituel chez un cadre dirigeant, aussi je ne pense pas qu'on puisse retenir les conditions de travail comme ayant pu jouer un rôle de causalité sur la survenue de ce décès ".
L'employeur suit l'argumentation de la Cpam en indiquant que les médecins ont indiqué que le décès était totalement étranger au travail.
Au visa de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, la Haute juridiction écrit : " Attendu que pour approuver la décision de la caisse de ne pas prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'affection et le décès de la victime, l'arrêt retient que l'enquête administrative de la caisse n'avait identifié aucune cause de stress professionnel important ; qu'au contraire, l'ambiance est qualifiée de très bonne, la victime étant décrite comme un homme très engagé professionnellement, très équilibré, chaleureux et souriant, à l'opposé d'une personne stressée ; que la réunion à laquelle la victime devait participer, qui avait à peine commencé, ne présentait aucune difficulté particulière, d'autant moins que les résultats devant y être présentés étaient bons et que rien ne permettait d'envisager que la victime puisse être mise, d'une façon ou d'une autre, en difficulté ; que les relations de la victime avec son nouveau supérieur, arrivé au mois d'août, étaient très constructives et le dialogue très ouvert, le management de ce dernier étant plus en adéquation avec la philosophie de la victime ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'accident survenu au temps et au lieu du travail est présumé être un accident du travail, sauf à établir que la lésion a une cause totalement étrangère au travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ".
L'arrêt de la cour d'appel est cassé et l'affaire renvoyée devant la même cour d'appel autrement composée.
La prise en charge d'une pathologie professionnelle doit être assumée par l'organisme auquel était affilié le travailleur au moment de la première constatation médicale de la maladie
Il s'agit d'un arrêt du 11 juillet 2019 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass. 2e civ. n° 18-16383, publié au Bulletin – qui traite de la prise en charge d'une pathologie professionnelle pour un salarié ayant eu des employeurs successifs.
Les faits – Un travailleur a exercé en qualité d'électricien dans le privé entre 1978 et 2004. A cette date, il est embauché par la mairie de Paris. Le 25 septembre 2008, on lui diagnostique un cancer bronchopulmonaire dont il décédera. Il demande à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (la CNRACL) la reconnaissance de cette pathologie en maladie professionnelle. Malgré un avis positif de la commission de réforme, la CNRACL refuse la prise en charge de cette maladie professionnelle. Après son décès, sa veuve demande à la CNRACL l'attribution d'une pension au titre de la rente d'invalidité. La CNRACL refuse en indiquant que l'exposition au risque professionnel n'était pas effective durant la période d'affiliation de son mari à cet organisme. La veuve du salarié saisit alors la Caisse primaire d'Assurance maladie dont il dépendait alors qu'il était salarié. La Cpam rejette sa demande.
Elle saisit la juridiction de Sécurité sociale. Elle se pourvoit en cassation après que la cour d'appel a rejeté sa demande de prise en charge par la Cpam.
La Haute juridiction écrit " Mais attendu que, selon l'article D. 461-24, devenu D. 461-7 du code de la sécurité sociale, la charge des prestations, indemnités et rentes afférentes à une maladie professionnelle incombe à la caisse d'assurance maladie ou à l'organisation spéciale de sécurité sociale à laquelle la victime est affiliée à la date de la première constatation médicale de la maladie, ou, lorsque la victime n'est plus affiliée à cette date à une caisse primaire ou à une organisation spéciale couvrant les risques mentionnés au livre IV du code de la sécurité sociale, à la caisse ou à l'organisation spéciale à laquelle la victime a été affiliée en dernier lieu, quel que soit l'emploi occupé par elle ; que, selon les articles 36 et 37 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la CNRACL, dans leur rédaction applicable au litige, le fonctionnaire relevant du régime de retraite géré par la CNRACL a droit, lorsqu'il est atteint, notamment, d'une maladie professionnelle reconnue imputable au service, à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension de retraite ; que, selon les articles 40 et 48 du même décret, la moitié de la rente viagère d'invalidité est réversible, en cas de décès du fonctionnaire, au bénéfice de son conjoint dans les conditions et limites qu'il précise ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le régime spécial de retraite géré par la CNRACL revêtant le caractère d'une organisation spéciale de sécurité sociale couvrant pour partie les risques mentionnés au livre IV, la charge de l'indemnisation de l'incapacité permanente de la victime et des ayants droit lui incombe lorsque la victime de la maladie professionnelle était affiliée auprès d'elle en dernier lieu avant la date de la première constatation médicale de la maladie ".
Elle en conclut " qu'ayant constaté qu'au 25 septembre 2008, date de la première constatation médicale de la pathologie, I... G... était affilié à la CNRACL, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux dernières branches du moyen, en a exactement déduit que la charge des prestations, indemnités et rentes incombait à cet organisme, de sorte que Mme G... ne pouvait prétendre à la prise en charge du risque par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis ".
  • Processus de gestion par les Cpam des maladies professionnelles (Circulaire)
Vous pourrez trouver en pièce jointe la circulaire CIR-22/2019 de la Direction des risques professionnels consacrée au traitement des déclarations de maladies professionnelles par les Cpam et les échelons locaux du service médical.
Cette circulaire vise à expliciter la mise en œuvre, au 1er décembre 2019, des dispositions relatives aux maladies professionnelles du décret 2019-356 du 23 avril 2019 que j'avais commenté dans la lettre d'information n° 9 du 28 avril 2019 (je vous mets, en pièce jointe dans un document Word, le commentaire de ce décret).

Rappels sur les maladies professionnelles
Définition
Une maladie est dite d'origine professionnelle si elle résulte des conditions dans lesquelles le salarié exerce de façon habituelle son activité, ainsi que défini aux articles L. 461-1 et L. 461-2 du Code de la Sécurité sociale (CSS).
Les risques susceptibles d'entraîner des maladies professionnelles sont physiques, chimiques, biologiques et psychosociaux.

Différentes modalités de reconnaissance
Si la pathologie est décrite dans un tableau et répond à l'ensemble de ses conditions, elle est présumée d'origine professionnelle (alinéa 5 de l'article L. 461-1).
Dans le cas où la pathologie figure dans un tableau mais n'en respecte pas l'une des conditions (durée d'exposition, délai de prise en charge, liste des travaux limitative), le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) doit se prononcer au titre de l'alinéa 6 de l’article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale et estimer s'il y a un lien direct entre la pathologie et le travail habituel du salarié.
Dans ce cas, le CRRMP, qui comprend normalement trois membres (médecin conseil, ou son représentant, médecin inspecteur régional du travail ou son représentant et praticien hospitalier particulièrement qualifié en pathologie professionnelle), peut statuer avec seulement deux membres présents (article D. 461-27 du CSS). En cas de désaccord, le dossier sera soumis à une formation complète.
Enfin, si la pathologie ne figure pas dans un tableau des maladies professionnelles, sous réserve d'un seuil d'incapacité permanente provisoire de 25%, au moment de la déclaration de maladie professionnelle, le dossier sera soumis au CRRMP au titre de l'alinéa 7 de l'article L. 461-1.

Date de première constatation médicale
Il s'agit de la date à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin, avant même que le diagnostic de la maladie ait été établi.
Cette date est fixée par le médecin conseil selon les dispositions de l'article D. 461-1-1 du CSS. Il doit justifier cette date, notamment si elle est différente de celle figurant sur le certificat médical initial.

Les délais de la procédure
La déclaration de la maladie professionnelle
L'assuré a deux ans, à compter de la date d'établissement du certificat médical initial (CMI) par lequel il est informé du lien entre sa pathologie et son activité professionnelle, pour effectuer la déclaration de maladie professionnelle.
En cas de révision ou d'adjonction d'un nouveau tableau, si l'assuré a eu son CMI depuis plus de 2 ans, il dispose de 3 mois de délai après cette modification de tableau pour faire sa déclaration.
Point de départ du délai d'instruction
Le début du délai d'instruction pour la reconnaissance d'une maladie professionnelle est le moment où la Cpam dispose de l'ensemble des documents : le CMI et la déclaration de maladie professionnelle faite par le salarié et, le cas échéant, le résultat d'un examen complémentaire prévu par le tableau des maladies professionnelles de façon explicite (IRM dans le tableau 57 pour l'épaule) ou implicite (pour la mise en évidence d'une hernie discale pour le tableau 98).
Dans le cas où il y a expertise, les délais d'instruction partent de la décision définitive de l'expert ou de la juridiction en cas de contestation d'un refus d'ordre médical pour désaccord sur le diagnostic ou sur le taux d'incapacité permanente.
Les délais d'instruction
Selon l'article R. 461-9 du CSS, qui entrera en vigueur au 1er décembre 2019, la caisse dispose d'un délai maximum de 120 jours pour statuer sur le caractère professionnel de la pathologie ou saisir un CRRMP. Elle peut notifier un rejet (pour désaccord diagnostic, condition médicale du tableau non remplie ou taux d'incapacité permanente inférieur à 25% pour une pathologie hors tableau), un accord de prise en charge dans le cadre d'un tableau ou transmettre au CRRMP au titre des alinéas 6 ou 7 de l'article L. 461-1.
En cas de transmission du dossier au CRRMP, la caisse en informe les parties et dispose alors d'un délai de quatre mois (120 jours francs) à compter de cette date pour notifier sa décision au demandeur et à l'employeur (article R. 461-10 du CSS).
A défaut de décision dans les deux délais prévus ci-dessus, le caractère professionnel de la maladie est reconnu de façon implicite (article R. 441-18 du CSS).
Instruction par la caisse primaire et le service médical
La caisse primaire doit juger de la recevabilité administrative et médicale des documents.
Recevabilité administrative des documents
Les agents du service administratif de la caisse doivent vérifier le CMI et la déclaration de maladie professionnelle qui doivent répondre à des exigences précises en termes de contenu et de précision.
Recevabilité et caractérisation médicale
Rôle du médecin conseil
Le médecin conseil étudie le dossier de demande de reconnaissance de maladie professionnelle sur pièces. Il doit :
  • vérifier la recevabilité médicale : le CMI doit décrire une affection caractérisée et pas des symptômes isolés. Si ce n'est pas le cas, il prend contact avec le médecin qui a rédigé le CMI ;
  • étudier le diagnostic et vérifier la présence du ou des examens complémentaires si le tableau en prévoit. S'il considère que le diagnostic est erroné, il prend contact avec le rédacteur du CMI pour en parler. Si le désaccord subsiste ou si l'échange a été impossible, il peut notifier un rejet médical ;
  • fixer le tableau des maladies professionnelles au vu du diagnostic. Si aucun tableau ne correspond, il oriente le dossier en maladie professionnelle hors tableau et, si l'incapacité permanente prévisible est supérieure à 25%, il recherche la date de première constatation médicale de la maladie. Selon une jurisprudence du 19 décembre 2013 (pourvoi n° 12-28726), le médecin conseil peut s'exonérer du tableau indiqué sur le CMI. En cas de pluralité de pathologies de différents tableaux, il peut en fixer plusieurs à étudier par la Cpam ;
  • réclamer le ou les examens complémentaires obligatoires pour le tableau (qu'ils soient explicites ou implicites). Puis, en l'absence de nécessité d'examen complémentaire ou s'il dispose de celui-ci, qui confirme le diagnostic, il peut passer à la détermination de la date de première constatation. En cas d'absence de l'examen complémentaire ou d'incompatibilité entre le résultat de l'examen et le diagnostic, il informe le service administratif qui notifie un rejet pour désaccord diagnostique.
S'il y a rejet médical et que l'expert va à l'encontre (son avis s'impose à l'assuré et à la caisse selon l'article L. 141-2 du CSS), l'instruction du dossier reprend, la date de la décision définitive de l'expert marquant le début des délais de traitement du dossier ;
  • fixer la date de première constatation médicale qui correspond, le plus souvent, soit à la date du CMI ou à la date de la première constatation médicale indiquée sur celui-ci [NDR Pour ma part, lorsqu'il y a eu un ou plusieurs arrêts maladie en lien avec la pathologie faisant l'objet de la reconnaissance de maladie professionnelle, j'indique sur le CMI la date du premier arrêt maladie comme date de la première constatation médicale], soit à la date de prescription d'un éventuel examen complémentaire prévu au tableau, soit à la date d'un début d'arrêt de travail en rapport avec la pathologie en cause ou soit à la date de début d'une éventuelle reconnaissance d'une affection de longue durée pour la pathologie en cause dans la déclaration ;
  • enfin, en cas de pathologie ne figurant pas dans un tableau, le médecin conseil doit déterminer si l'incapacité permanente est inférieure à 25% ou supérieure ou égale à 25% au moment de la déclaration en fonction de la gravité de l'atteinte pour déterminer si le dossier doit être transmis au CRRMP.
Le médecin conseil apprécie la gravité de la pathologie à la date de la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle. Si le taux d'incapacité permanente est inférieur à 25%, le médecin conseil en informe le service administratif qui notifie le refus médical.
Délais impartis au service médical
  • Si la pathologie relève d'un tableau des maladies professionnelles, le médecin conseil dispose d'un délai de 10 jours à partir du moment où il est en possession de l'ensemble des éléments du dossier pour fournir aux services administratifs une confirmation du ou des tableaux concernés et la date de la première constatation médicale.
Si l'analyse du dossier ne peut s'effectuer dans les 10 jours, le médecin conseil peut disposer de 30 jours supplémentaires pour convoquer l'assuré ou lui adresser un questionnaire. Si un avis sapiteur est nécessaire, le médecin conseil peut disposer de 60 jours supplémentaires (soit au total 70 jours).
Dans ce cas de délai supplémentaire, la caisse engage en parallèle les investigations nécessaires.
  • Si la pathologie ne relève pas d'un tableau des maladies professionnelles, le médecin conseil dispose d'emblée de 30 jours pour déterminer le taux d'incapacité permanente et fixer la date de première constatation médicale.

La phase d'investigation
Le service administratif doit mener ses investigations au minimum auprès de tous les employeurs mentionnés sur la déclaration de maladie professionnelle précédant la date de première constatation médicale.
Pour les pathologies psychiques relevant de troubles psychosociaux (TPS), les investigations portent en première intention sur les employeurs mentionnés sur la déclaration de maladie professionnelle à la date de la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle et à la date de première constatation médicale.
En cas de maladie figurant dans un tableau, la caisse envoie aux parties un questionnaire correspondant au tableau. Les parties disposent d'un mois maximum (30 jours francs) pour renvoyer les questionnaires. Les questionnaires peuvent aussi être accessibles sur le site Ameli.
Dans le courrier indiquant la mise à disposition des questionnaires sont aussi précisées les dates de la phase contradictoire et de la prise de décision et une copie de la déclaration de maladie professionnelle et du CMI est adressée à l'employeur auquel la décision risque de faire grief.
Au retour des questionnaires, plusieurs situations sont possibles :
  • l'exposition dans les conditions du tableau est établie, le gestionnaire prépare le dossier pour la consultation des parties ;
  • certaines conditions du tableau ne sont pas remplies - délai de prise en charge dépassé, durée minimum d'exposition insuffisante ou emploi ne figurant pas dans la liste limitative du tableau - le gestionnaire commande alors une enquête dite " Tableau complémentaire " qui devra préparer le dossier pour le CRRMP au titre du 6e alinéa de l'article L. 461-1 ;
  • l'assuré n'a jamais été exposé au risque prévu par le titre du tableau, le dossier bascule alors en hors tableau et oriente vers le service médical pour la détermination du taux d'incapacité permanente et il commande une enquête dite " Hors tableau " ;
  • les questionnaires du demandeur et du ou des employeurs sont divergents, le gestionnaire peut, au regard des précisions apportées et des données scientifiques disponibles, accorder la prise en charge de la maladie si celle-ci apparaît évidente. Dans le cas contraire, il engage une enquête dite " Tableau " qui devra être intégrée dans le dossier contradictoire.
Les enquêtes dites " Tableau complémentaire " et " Hors tableau " ne sont pas obligatoirement incluses dans le dossier contradictoire soumis aux parties, celle dite " Hors tableau " peut néanmoins y être incluse.
En cas de dossier transmis par le médecin conseil avec une pathologie caractérisée mais non mentionnée dans un tableau et qu'il a connaissance d'un taux d'incapacité permanente supérieur ou égal à 25%, le gestionnaire commande directement une enquête dite " Hors tableau ", sauf en cas de trouble psychosocial, et il prépare le dossier pour la consultation des parties.
En cas de pathologie liée à un trouble psychosocial, avec incapacité permanente supérieure ou égale à 25%, la caisse adresse un questionnaire qui a pour objet de préparer l'enquête qui est toujours diligentée.

Le recours au médecin du travail
Le médecin conseil peut solliciter l'avis du médecin du travail dès l'étude du dossier au titre des tableaux pour une demande d'information sur le dossier médical en rapport avec la pathologie et les postes de travail occupés et leur exposition au risque considéré.

La phase contradictoire
Elle consiste en la mise à disposition des parties du dossier afin que celles-ci puissent en prendre connaissance et puissent, éventuellement, formuler des observations.
A ce moment, le dossier est figé et aucun élément nouveau n'y sera plus ajouté, à l'exception des observation des parties sur le dossier.
Cette phase débute au plus tard 100 jours après le point de départ du délai d'instruction et elle dure 10 jours francs.
Les parties sont règlementairement informées de cette phase de consultation du dossier au moins 10 jours francs avant son début.
Sont accessibles à la connaissance des parties les éléments suivants :
  • la déclaration de maladie professionnelle,
  • le CMI,
  • le document portant l'avis du médecin conseil sur les tableaux concernés, les examens consultés et leurs caractéristiques au regard des tableaux, la date de première constatation médicale et, si nécessaire, le taux d'incapacité permanente déterminé,
  • l'audiogramme en cas de de demande de reconnaissance d'atteinte de l'audition au titre du tableau 52,
  • les questionnaires,
  • l'enquête réalisée dans le cadre de l'étude des tableaux le cas échéant.
A l'issue de la période de 10 jours du contradictoire, le dossier reste accessible mais il n'est plus possible de formuler des observations.

La transmission du dossier au CRRMP
Si à l'issue de la période contradictoire la caisse primaire considère que le dossier relève du CRRMP, elle en informe les parties et constitue le dossier qui est adressé au secrétariat du CRRMP de façon dématérialisée.
Ce dossier est mis à la disposition des parties pendant un délai de 40 jours francs via le portail " Questionnaire risques professionnels ". Les parties sont informées qu'au cours des 30 premiers jours calendaires elles peuvent apporter tout élément complémentaire ou observations qu'elles jugent pertinentes de porter à la connaissance du CRRMP.
Si cela n'a pas déjà été fait, le médecin conseil demande au médecin du travail son avis sur le lien entre le travail et la pathologie, cet avis étant obligatoire lorsque le dossier est transmis au CRRMP.
Le médecin conseil établit un rapport médical dans lequel il détaille les éléments dont il a connaissance susceptibles d'éclairer la décision du CRRMP.
Le rapport du médecin conseil et l'avis du médecin du travail (ou le courrier de demande de l'avis) sont versés au dossier. Ils ne sont accessibles qu'au CRRMP et au demandeur. L'employeur ne peut accéder à ces éléments que par l'intermédiaire d'un médecin désigné par la victime (article D. 461-29 du CSS).
A l'issue de cette phase de 30 jours calendaires, le dossier est figé.
L'avis du CRRMP
Le CRRMP est réuni après expiration du délai de 40 jours mentionné ci-dessus.
Le secrétariat sollicitera un avis explicite, écrit ou oral, de l'ingénieur conseil sur tous les dossiers concernant un cancer. Le médecin conseil en charge du CRRMP pourra solliciter l'avis de l'ingénieur conseil avant le CRRMP s'il le juge nécessaire. De même, le CRRMP pourra décider en séance de solliciter l'ingénieur conseil, soit directement (téléphone), soit en renvoyant l'affaire à une séance ultérieure.
La caisse doit avoir statué conformément à l'avis motivé du CRRMP dans un délai de 120 jours francs après sa saisine [Selon l'article R. 461-10 du CSS, le CRRMP doit statuer dans un délai de 110 jours après sa saisine].
  • Les violences en milieu de santé en 2018 (Rapport)
Vous pourrez accéder sur le site du ministère au Rapport 2019 de l'Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) portant sur les faits 2018 (je ne peux, sans risque de blocage de nombreux mails, vous joindre ce rapport assez lourd).

Introduction
Ce rapport recense les actes de violence contre les personnes, y compris les incivilités, et les biens signalés par les établissements de soins volontaires sur tout le territoire.
Les auteurs notent que ces violences en milieu de soins s'insèrent dans un contexte global d'extension des incivilités et des violences dans la société.
Je vous signale qu'il y a dans ce rapport de très nombreux verbatim rapportant les différentes types de signalements, en particulier ceux ayant trait aux atteintes des personnes, qui sont très intéressants mais que je ne peux reprendre dans cette synthèse du rapport.

Les données 2018
Données chiffrées sur les signalements
En 2018, 23 360 signalements d'atteintes aux personnes et aux biens ont été effectués par 426 établissements de santé, soit 7.35% de l'ensemble de ces établissements.
La région recensant le plus grand nombre de signalements est l'Ile de France (6079, en hausse de 6% par rapport à 2017) suivie par la Normandie (2792 signalements), la Bretagne (1860 signalements) et l'Occitanie (1828 signalements).
En Ile de France, les signalements ont été réalisés par 72 établissements et ils représentent 26.02% de l'ensemble des signalements. Les signalements en Ile de France proviennent majoritairement de l'Assistance publique des Hôpitaux de Paris (4552, soit 75%).
L'objectif étant d'agir sur les violences, il importe d'en connaître les causes qui sont à rechercher dans :
  • " les facteurs humains : les relations soignants, soignés-entourage ; les relations hiérarchiques ; les relations entre collègues.
  • les facteurs institutionnels et organisationnels : l’organisation du travail, des services, des structures et des unités ; l’affectation des personnels ; leur formation initiale ou continue ; l’organisation de la vie en collectivité pour les patients et les résidents (horaires imposés, activités) ; les structures non adaptées à la pathologie des patients, la coordination des soins, la communication durant les transmissions, etc.
  • les facteurs architecturaux : l’aménagement et la conception des locaux ; la sécurité des lieux et du matériel ; l’accueil et la gestion de la fluidité des patients, etc. "
Parmi les 426 établissements ayant déclaré des signalements :
  • 316 établissements de santé publics (sur 924) ont fait 20 862 signalements,
  • 57 établissements de santé privés à but non lucratif (sur 1533) ont fait 2147 signalements,
  • 53 établissements de santé privés à but lucratif (sur 1314) ont fait 351 signalements.
Ainsi, 74% des signalements proviennent du secteur public et, respectivement 13% et 12% des établissements à but non lucratif et lucratif.

Les évènements signalés
Atteintes aux personnes et aux biens
Au total, 25 414 atteintes aux personnes et aux biens ont été signalées, 20 330 atteintes aux personnes (dont 18% du fait de personnes présentant des troubles neuro-psychiatriques) et 5084 atteintes aux biens.
Les atteintes simultanées aux personnes et aux biens concernaient 2056 signalements.
Structures et lieux concernés
Les structures les plus concernées par les signalements sont les services de psychiatrie (18%, 4229 signalements), les urgences (15%, 3614 signalements), les unités de soin de longue durée et les EHPAD (11%, 2602 signalements), les unités de soins (9%, 2137 signalements) et la médecine (8%, 1959 signalements).
Les signalements dus à des personnes présentant des troubles neuro-psychiatriques représentent une proportion de 39% dans les unités de soins de longue durée et les EHPAD, de 35% dans les services de soins de suite et de réadaptation, de 30% dans les services de psychiatrie et de 29% dans les unités de soins.
Pour les services présentant les nombres les plus importants de signalements, ceux concernant les atteintes aux personnes sont les plus nombreux, 3931 pour les services de psychiatrie, 3450 pour les urgences, 2510 dans les unités de soins de longue durée et les EHPAD et 1796 dans les unités de soins.

Les différentes atteintes
Les atteintes aux personnes
Les 20 330 signalements d'atteintes aux personnes (correspondant à 34 194 différents actes) sont ainsi répartis :
  • niveau de gravité 1, insultes et injures, 6586 (32%),
  • niveau de gravité 2, menaces d'atteinte à l'intégrité physique, 3453 (17%),
  • niveau de gravité 3, violences physiques, 9937 (49%),
  • niveau de gravité 4, violences avec armes par nature ou par destination, 354 (2%).
Les violences verbales prédominent et représentent 50.77% des atteintes aux personnes.
Les actes d'atteinte aux personnes les plus fréquents sont les injures, insultes et provocations sans menace (12 290, soit 35.9% des actes), les violences volontaires (9623, 28.1% des actes), les chahuts et occupations de locaux (5138, 15% des actes), les menaces physiques (3393, 9.9% des actes) et les menaces de mort (1221, 3.6% des actes).
Les actes de violence verbale sont les plus fréquents aux urgences (5800 actes) et en psychiatrie (3861 actes) et les actes de violence physique en psychiatrie (2915 actes), en unités de soins de longue durée et en EHPAD (1955 actes) et aux urgences (1362 actes).
Les atteintes aux biens
Il y a eu, en 2018, 5084 signalements d'atteinte aux biens déclarés à l'ONVS, dont, principalement, 2188 vols avec effraction (39%), 1768 dégradations légères (31%), 956 dégradations des locaux (17%).

Analyse des violences envers les personnes
Les victimes des violences
En 2018, l'ONVS recense 33 431 victimes d'atteintes aux personnes. Ces atteintes touchent 27 289 membres du personnel (82%), 3462 patients (10%), 1650 agents de sécurité (5%), 665 autres personnes (2%), 354 visiteurs (1%) et un détenu.
Si l'on prend en compte les victimes du personnel de soins, il s'agit à 47% d'infirmières, à 44% d'autres personnels de soins et à 9% de médecins.
Les femmes sont majoritairement touchées parmi les infirmiers (78%) et les autres personnels soignants (81%) et les hommes sont majoritairement victimes chez les médecins (55%).
Au total, ces atteintes ont entraîné pour les victimes 2897 jours d'arrêt de travail sur les 2663 signalements en faisant mention et 500 jours d'incapacité totale de travail sur les 2175 signalements en faisant mention.
Les auteurs des violences
Les signalements ont concerné 21 944 auteurs de violences aux personnes en 2018. Dans 90% des cas il s'agit de patients (15 496, 71%) ou de visiteurs ou d'accompagnateurs (4105, 19%). Parmi les patients, 20% ont commis une atteinte en raison d'une pathologie (28% des patients auteurs d'acte de violence présentent une atteinte neuro-psychiatrique). Les personnels sont auteurs de 3% des violences et il s'agit à 50.4% de femmes.
Ces auteurs des violences sont des médecins (170 hommes et 57 femmes), des infirmiers (34 hommes et 99 femmes), d'autres personnels soignants (92 hommes et 135 femmes et des agents de sécurité (25 hommes et 1 femme).
" Les violences signalées ayant pour auteurs des médecins hommes ou femmes, sont des violences soit entre médecins, soit avec d’autres personnels et sont essentiellement des violences verbales : critiques incessantes et reproches sur l’inaptitude professionnelle réelle ou supposée des pairs ou des collaborateurs, attitude hostile, propos grossiers, dénigrement permanent en privé ou devant le public et les patients du travail effectué avec d’autres professionnels ou personnels de santé. Désaccord et mésentente sur des règles de fonctionnement du service, des méthodes de soins, des protocoles. Ces violences peuvent s’orienter vers du harcèlement moral. Les conflits de personnalité, de pouvoir et de rivalité exacerbent ces violences. Toutes les catégories de personnels sont touchées. "
Les motifs des violences
Le motif des violences a été renseigné dans 45.5% des cas. Le motif majoritaire (59.1%) concerne un reproche relatif à une prise en charge mais aussi un temps d'attente excessif (13.3%), l'alcoolisation (11.6%) et un règlement de comptes (6.5%).
Gestion des évènements de violence
Concernant les atteintes aux personnes, les principaux intervenants sont le personnel hospitalier qui a été majoritaire à intervenir (53%), puis ensuite, les services de sécurité (26%) et les forces de l'ordre (6%).
Pour le personnel de soins, " L’épuisement professionnel et la lassitude face à des comportements violents touchent de plein fouet les personnels qui font part d’un découragement dans les signalements. Un sentiment d’impuissance est révélé et donc un sentiment d’échec face à la mission de soin. Une des réponses dans ce soutien, comme l’ONVS a pu le constater dans certains établissements, consiste aussi pour la DRH à proposer une mobilité au sein des diverses structures de leur établissement avec parfois une formation à la clé. Cela évite que le professionnel reste toujours au même endroit avec les risques inhérents que cela peut engendrer (dont de la maltraitance involontaire) et la démotivation qui peut s’ensuivre. Cela permet à l’agent d’envisager de nouvelles perspectives professionnelles. "
Les suites données aux signalements de violences
Dans 76% des cas, aucune suite n'est donnée à un acte de violence, dans 22% une plainte est déposée et dans 3% une main courante.
Les plaintes liées à des actes d'atteinte à la personne (902) sont pour 170 cas des faits de gravité de niveau 1 (injures, insultes, etc…), 216 pour des faits de niveau 2 (menaces, etc…), 466 pour des faits de gravité de niveau 3 (violences volontaires, etc…) et 50 pour des faits de niveau 4 (violences avec armes, etc…).
Sur 160 plaintes dont les suites sont connues, 22 ont donné lieu à des peines d'emprisonnement, 5 à des amendes et 8 à des rappels à la loi.
Les auteurs du rapport indiquent à ce sujet : " Il importe que les personnels déposent plainte afin qu’ils soient restaurés dans leurs droits mais aussi dans leur dignité car l’humiliation et l’injustice subies par une agression génèrent souvent des sentiments de honte, et de résignation chez la victime. Il est fréquent qu’elle ressente également une impression de solitude, d’où l’importance pour les établissements de rappeler et d’expliquer à leurs personnels l’existence de la protection fonctionnelle (fonction publique) ou de la protection juridique (secteur privé), dispositifs de soutien encadrés, qui sont de droit. Dans une circulaire de décembre 2000, la DGOS [Direction générale de l'offre de soins] en rappelait déjà l’importante et l’information qui devait être faite pour la porter à la connaissance des personnels. Il revient ensuite à la victime de la demander.
Ce soutien est d’autant plus important que le temps de la justice répond à des spécificités qui sont propres à son fonctionnement. Ce processus, parfois très long si l’affaire est complexe (expertises, contre-expertises, etc.), peut déconcerter, voire décourager sur le long terme les victimes à s’engager ou à poursuivre un processus de réparation judiciaire, et risquer de faire alors perdurer chez elles ce sentiment d’injustice. Les établissements pourraient utilement se rapprocher d’avocats spécialisés en droit pénal pour les aider dans ces affaires. "
Focus sur des aspects spécifiques
Services de psychiatrie
Les services de psychiatrie signalent 19.3% de l'ensemble des atteintes aux personnes dont 57% sont des violences verbales et 43% des violences physiques. Le personnel hospitalier est victime de ces violences dans plus de 8 cas sur 10. Dans ce secteur de la psychiatrie, le personnel est particulièrement exposé aux agressions physiques, avec ou sans armes, aux menaces, aux violences verbales et aux dégradations de biens. Ces actes sont le plus souvent liés à la pathologie des patients
En 2018, 3991 atteintes aux personnes ont été recensées parmi les signalements pour les services de psychiatrie.
Services des urgences
Les services des urgences sont des lieux où les manifestations de violence sont de nature et de gravité différentes avec des agressions verbales qui y sont quotidiennes (83%) et des agressions physiques nombreuses (14%). Il s'agit parfois de scènes très violentes et traumatisantes pour les personnels (bandes rivales qui se retrouvent aux urgences et s'y affrontent, intrusion de personnes venant rechercher une personne blessée par balle, personnes alcoolisées violentes, etc…).
[NDR – Il apparaît intéressant de rappeler qu'une grève du service des urgences de l'Hôpital Saint-Antoine a débuté en mars 2019 suite à des agressions du personnel de ce service dont plusieurs personnels avaient été agressés en janvier 2019, entraînant des incapacités temporaires totales. Ce mouvement a pris une grande ampleur et, à la fin août 2019, la moitié des services des urgences des hôpitaux publics sont en grève].
Les signalements d'actes de violence varient en fonction des jours et des heures de la semaine. La soirée et la nuit sont des moments particulièrement propices aux atteintes aux personnes et aux biens dans les services des urgences, en particulier celles des samedis et dimanches. Durant les nuits du week-end, il apparaît une surreprésentation des patients alcoolisés et utilisant des produits stupéfiants. Ces caractéristiques sont bien connues des soignants et des mesures particulières sont souvent prises, comme le renforcement des équipes, le recrutement de médiateurs, d'agents de sécurité ou de maîtres-chiens.
L'impact des atteintes aux personnes et aux biens
L'impact négatif des violences sur les témoins
Les violences verbales (propos violents, insultes, outrages, menaces physiques, menaces de mort), parfois répétitives, les violences physiques et psychologiques ainsi que les destructions importantes de biens, outre l'impact qu'elles produisent sur les victimes, ont aussi un impact négatif sur les témoins, qu'ils soient patients ou résidents, personnels des établissements, famille, entourage. Cet impact entraîne :
  • " un sentiment d’insécurité, de peur parfois extrême, ne serait-ce qu’en raison d’un seul incident particulièrement violent ou choquant,
  • des difficultés à retrouver la sérénité qui convient dans un lieu de soins dans une résidence pour personnes âgées ou en psychiatrie. Le grand âge, le jeune âge, le handicap mental et les TPN [troubles neuro-psychiques] fragilisent d’autant plus et rendent encore plus difficile le retour à cette sérénité.
  • un moral de l’équipe soignante atteint par le fait qu’un des leurs ou un patient a été agressé de façon violente,
  • une dégradation des conditions de travail,
  • une perturbation du travail dans le service et désorganisation. "
La répétition des actes de violence dans un établissement peut aussi retentir sur son image de marque et la qualité du service.
L'impact positif de la présence des forces de l'ordre
La présence des forces de l'ordre de l'ordre dans un établissement pour une autre cause que les violences en son sein (examen d'un gardé à vue, détenu hospitalisé, accompagnement d'une personne en état d'ivresse) représente un facteur déterminant pour mettre fin à des situations conflictuelles, des situations de menaces ou de violences que ne pouvaient plus ou pas gérer les personnels hospitaliers et les agents de sécurité.
La présence des forces de l'ordre a un impact positif rassurant, tant pour les victimes directes que pour les témoins des faits.
Conclusion
Je reprends complètement la conclusion des auteurs du rapport qui m'apparaît tout à fait intéressante puisqu'elle préconise un certain nombre de mesures pouvant permettre de mieux prévenir et gérer les violences [NDR – Sans néanmoins aller jusqu'à écrire qu'il faudrait prendre en compte les problématiques d'insuffisance de personnels qui remontent fortement des revendications des personnels des urgences en grève].
" La prévention et la lutte contre les atteintes aux personnes et aux biens est un enjeu capital pour les établissements de santé et de soins, tant ces atteintes affectent la sérénité des conditions de travail et par contre coup la mission de soin. Comme cela a été indiqué en introduction, on peut considérer à juste titre qu’elle demande aux directeurs d’établissements d’acquérir une nouvelle compétence de « sécurité », qui originellement ne faisait pas partie de leur coeur de métier. Cette compétence est assurée de la meilleure façon dans le cadre d’un projet de service global.
Au-delà des divers aspects entrant en ligne de compte pour développer ce projet de service, c’est aussi le développement d’un état d’esprit positif et d’implication de l’ensemble des personnels de l’établissement qu’il convient de générer – dont la communauté médicale qui, en tant que chef de pôle, d’unité et de service, joue un rôle essentiel d’impulsion – pour obtenir le succès escompté et restaurer ainsi le respect dû aux professionnels de santé et aux personnels des établissements, ainsi que les règles élémentaires de civisme et de vie en société.
Ce projet de service peut se décliner en trois axes (prévention primaire, secondaire, tertiaire). Il permet de mettre en oeuvre une palette d’outils capable de répondre de la meilleure façon possible à cet enjeu, associant étroitement par ailleurs, au niveau local, les institutions partenaires en charge de la sécurité et de la justice. Ce qu’évoque l’ONVS ci-après est le fruit de ses nombreux échanges et rencontres sur site, conférences-débats, qu’il peut avoir avec l’ensemble des acteurs, et d’un travail d’analyse et de réponses aux diverses problématiques en matière de sécurité et de sûreté qui lui sont soumises.
Prévention primaire : prévenir la violence
Les formations
  • Apprendre aux personnels au plus tôt, y compris au corps médical, par des formations pratiques et adaptées au contexte de travail à gérer les situations d’agressivité verbales et physiques. Diverses méthodes existent qui font leur preuve. Ce sont des méthodes faites par des soignants pour des soignants, respectant particulièrement la déontologie de la santé. Elles intègrent également la communication auprès des patients, résidents et accompagnants, source de tensions et de violences lorsqu’elle est mal maitrisée. Ces formations permettent d’assurer ainsi une cohésion indispensable de l’équipe, du pôle ou de l’unité, face à un phénomène que tôt ou tard les personnels rencontreront. L’adage « mieux vaut prévenir que guérir » devrait prendre tout son sens en santé.
  • Approfondir davantage les formations d’acquisition des connaissances de certaines pathologies notamment en psychiatrie, en gériatrie, en établissement d’accueil spécialisé (ex : soudaineté et imprévisibilité de la violence) et du contexte spécifique de ces spécialités. Le but est aussi d’arriver à développer une vigilance accrue des personnels.
  • Intégrer dans les formations initiales (médecine, IFSI [Institut de formation en soins infirmiers], IFAS [Institut de formation d'aides-soignants]) ces formations à l’agressivité verbales et physiques. Les étudiants sont parfois confrontés dès leur premier stage à cette violence sans y être préparés.
  • Développer davantage l’accompagnement des jeunes professionnels pour transmettre les savoir-faire et savoir-être, évitant les erreurs de début de carrière par manque d’expérience. On pourrait parler de « compagnonnage ».
  • Savoir détecter, notamment via les fiches d’événements indésirables, un soignant qui finirait par saturer dans un poste et risquer de subir de la violence dans cette perspective ou de devenir maltraitant. Envisager avec lui une formation complémentaire, une sorte de remise à niveau, voire envisager une mobilité dans une autre unité.
  • Former spécifiquement les agents de sûreté et de sécurité incendie. Des établissements ont mis en place diverses formations adaptées à la spécificité de la santé (TPN [trouble psychique ou neuro-psychique], incendie, NRBC [Nucléaires, Radiologiques, Biologiques, Chimiques], violence), font suivre également des formations de médiation, de techniques concernant les moyens de protection (vidéo, etc.), la formation CQP-APS [Certificat de qualification professionnelle d’agent de prévention et sécurité], travaillent sur la cohésion avec les équipes de soignants.
  • Proposer des demi-journées d’information sur site concernant des thématiques comme la laïcité, la radicalisation, les enjeux de cyber sécurité (il s’agit d’une violence qui peut mettre gravement en péril l’établissement par rapport à la confidentialité des données ou encore au fait de ne plus pouvoir assurer la continuité des soins), le fonctionnement de la justice (principes élémentaires de l’action pénale, droits dont disposent les personnels de santé), la menace terroriste.
Le pouvoir de police du directeur
  • Actualiser le règlement intérieur (art. L 6143-7, 13° du CSP) en particulier face aux nouvelles problématiques qui pourraient être constatées en matière d’atteintes aux personnes et aux biens.
  • Le code de la santé publique développe notamment dans le volet des « conditions de séjour » (art. R 1112-40 à R 1112-55) une palette d’outils permettant au directeur d’établissement d’assurer son rôle de régulateur de la vie au sein de l’établissement. Cette mise en oeuvre est très utile.
L’analyse des fiches d’événements indésirables
Des établissements ont mis en place, dans le cadre de cette analyse, des « comités violences », issus parfois du CHSCT, associant des personnels volontaires et investis et associant également divers cadres de l’établissement (RH, psychologue, formation, sécurité-sûreté, logistique, médecine de travail). Comme il est évoqué en pages 10 et 11, cette analyse est indispensable et permet de présenter toutes les mesures mises en oeuvre auprès de l’ensemble des personnels.
Prévention secondaire : faire face à la violence
  • Travailler l’esprit de groupe et de cohésion au sein des unités, car face aux violences, c’est en groupe que les personnels peuvent être le mieux à même d’intervenir et de calmer la situation, dans l’attente parfois des agents de sûreté et des forces de l’ordre. Les nombreux signalements évoqués dans ce rapport 2019 montrent tout l’intérêt de cette cohésion.
  • Proposer des outils adaptés de sécurité et de protection des personnels (DATI [Dispositif d’alerte du travailleur isolé], PTI [Protection du travailleur isolé], manchons anti-morsure des avant-bras, masque de protection, etc.) aidant à faire face à l’événement.
  • Cultiver une relation de proximité avec la police et la gendarmerie pour une intervention dans les meilleurs délais et conditions (rappel de la nécessité de conclure et d’entretenir la convention « santé-sécurité-justice » - appel aux « référents sûreté pour des conseils par rapport à toutes les problématiques concernant les atteintes aux personnes et aux biens). Faire que les uns et les autres découvrent leur milieu et leurs impératifs.
Prévention tertiaire : soutenir la victime et lui donner les moyens de se reconstruire
  • Il s’agit dans cette phase de développer le soutien médical, psychologique, juridique et administratif pour aider la victime à se reconstruire, notamment à la suite du stress post-traumatique. Diverses méthodes de soutien psychologique existent. Des établissements proposent aussi du soutien psychologique à leurs patients victimes.
  • L’utilisation de lettres de mises en garde, appelées souvent en santé « rappel à la loi », permet de mettre fin à des comportements inciviques qui ne seront pas portés à la connaissance des forces de l’ordre et de la justice. Dans le même ordre d’idée, une lettre de soutien au personnel victime est très appréciée avec le rappel des démarches mises en place à son attention par l’établissement.
  • Aider la victime dans son dépôt de plainte (accompagnement au service judiciaire, prise de rendez-vous, constitution de partie civile de l’établissement si préjudice direct avéré). Au besoin, l’ordre professionnel de santé, pour un de ses adhérents qui n’exercerait pas en milieu libéral, peut être sollicité pour se constituer partie civile et soutenir ainsi l’action en justice de la victime avec l’établissement. Il est rappelé que le fait de déposer plainte est une façon d’être restauré dans ses droits et dans sa dignité face à l’injustice et à l’humiliation que représente la violence subie.
  • Mettre en oeuvre la « protection fonctionnelle » pour le secteur public ou « protection juridique » pour le secteur privé, cette dernière s’alignant de plus en plus sur celle des fonctionnaires.
  • Faire des CREX [compte-rendu d'expérience] à la suite d’événements ayant eu des conséquences physiques ou psychiques importantes (en équipe de soins, au sein du « comité violence »). "
  • Incidence et mortalité par cancer entre 1990 et 2018 (Rapport)
Vous pourrez accéder à ce rapport en pièce jointe et sur le site internet de l'Institut national du cancer à l'adresse figurant à la fin du commentaire.
Ce document est signé de G. Defossez et al. et il est intitulé " Estimations nationales de l'incidence et de la mortalité par cancer en France métropolitaine entre 1990 et 2018 – Etude à partir des cancers du réseau Francim ".
Introduction
La rédaction de ce document s'inscrit dans le cadre du Plan cancer 2014-2019 afin de contribuer à apprécier les actions préventives et curatives menées depuis plusieurs années.
Ce document présente les résultats des tendances nationales d'évolution, entre 1990 et 2018 des tumeurs solides et des hémopathies, sachant que pour les années 2016 à 2018, il s'agit de projections.
Les données d'incidence présentées dans ce document proviennent des registres des cancers métropolitains qui couvrent entre 19 et 22 départements selon le type de cancer étudié. Les données de mortalité sont issues du CépiDc, le Centre d'épidémiologie sur les causes de décès, géré par l'Inserm.
Pour les tumeurs solides, l'analyse a porté sur 27 cancers, soit 8 nouveaux par rapport à la précédente édition de ce rapport. De plus, pour la première fois, une analyse par sous-sites topographiques a été réalisée pour certains cancers.
La mortalité a été analysée pour 19 principaux cancers solides.
A total, l'étude a porté sur 74 types ou sous-types de cancers. Les mélanomes sont les seuls cancers cutanés pris en compte.
L'incidence et la mortalité sont standardisées selon la structure d'âge de la population mondiale, en nombre de cas pour 100 000 personnes-années.
Principaux résultats
Incidence et mortalité en 2018
En 2018, l'incidence des cancers toutes localisations confondues est estimée à 382 000 (204 600 chez les hommes et 177 400 chez les femmes). Les taux d'incidence standardisés sont respectivement de 330.2 et 274 pour 100 000 personnes-années. Le sex-ratio est de 1.2.
Le nombre de décès par cancer est estimé à 157 400 au total, soit 89 600 pour les hommes et 67 800 chez les femmes.
Les taux de mortalité standardisés sont de respectivement 123.8 et 72.2 pour 100 000 personnes-années pour respectivement hommes et femmes. Le sex-ratio pour la mortalité est de 1.7.
Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l'homme (50 430 nouveaux cas en 2018), devant le cancer du poumon et le cancer colorectal, avec respectivement 31 231 et 23 216 cas estimés pour 2018.
Chez les femmes, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers (58 459 cas estimés en 2018), devant le cancer colorectal (20 120 cas estimés) et le cancer du poumon (15 132 cas estimés).
En 2018, en termes de mortalité, le cancer du poumon occupe le premier rang avec, chez l'homme 22 761 décès estimés en 2018, suivi par le cancer colorectal (9 209 décès estimés) et le cancer de la prostate ((8 115 décès estimés).
Chez les femmes, le cancer du sein représente la première cause de décès avec 12 146 décès estimés pour 2018, devant le cancer du poumon (10 356 décès) et le cancer colorectal (7 908 décès estimés).
Tendances entre 1990 et 2018
Chez les hommes
Entre 1990 et 2018, le nombre de nouveaux cas a augmenté de 65%, passant de 124 000 cas à 204 000 cas estimés.
L'augmentation du nombre de cas chez les hommes est surtout liée à l'augmentation de la population (20%) et à son vieillissement (39%) sur cette période. Alors que la part attribuable à l'augmentation du risque de cancer est de 6%.
Sur la période, l'augmentation de nombre de décès dus au cancer est de 6% (passant de 84 400 à 89 6000) qui s'explique pour 12% par l'augmentation de la population et pour 48% par son vieillissement. La part des décès attribuables au cancer est en diminution de 56%.
Le taux d'incidence du cancer entre 1990 et 2018 est resté relativement stable avec une variation annuelle moyenne de plus 0.1%. Cependant cette relative stabilité peut se décomposer en une phase d'augmentation entre 1990 et 2005, avec un passage d'un taux standardisé d'incidence de 320.7 à 402.1 cas pour 100 000 personnes-années puis, ensuite, d'une inversion de tendance à partir de 2005 aboutissant au taux standardisé d'incidence 2018 de 330.2. Il y a eu une diminution moyenne annuelle de ce taux d'incidence de 1.4% sur la période 2010-2018.
Cette évolution est due à la forte augmentation de l'incidence du cancer de la prostate jusque 2005 qui a diminué ensuite. Hors cancer de la prostate, l'évolution est stable et linéaire sur la période 1990-2018, avec une diminution de 0.1% par an.
Le taux de mortalité standardisé a diminué de 1.8% par an en moyenne entre 1990 et 2018.
Chez les femmes
L'augmentation du nombre de nouveaux cas entre 1990 et 2018 a été de 93%, le nombre de nouveaux cancers passant de 91 800 cas à 177 400 cas estimés.
Pour les femmes, l'augmentation de 93% du nombre de cas de cancers est liée, pour 45%, à l'augmentation du risque de cancer et, respectivement, pour 25% et 23% à l'augmentation et au vieillissement de la population.
L'augmentation du nombre de décès entre 1990 et 2018 a été de 26% (passant de 54 000 à 67 800 décès), s'expliquant à 17% et 24% respectivement par l'augmentation et le vieillissement de la population.
La part des décès par cancer dans l'ensemble des décès est en recul de 25% sur la période considérée.
Sur la période 1990-2018, l'évolution du taux d'incidence annuel moyen du cancer chez les femmes a été de plus 1.1% avec un ralentissement de l'augmentation sur la période 2010-2018 puisqu'elle s'est établie à 0.7% en moyenne annuelle.
Cette augmentation reflète l'augmentation de l'incidence du cancer du poumon chez les femmes (9% des cancers féminins) dont le taux d'incidence a augmenté en moyenne annuelle de 5.3% et, dans une moindre mesure, de l'augmentation de l'incidence du cancer du sein (33% des cancers féminins) dont le taux d'incidence a augmenté de 1.1% par an en moyenne entre 1990 et 2018.
Le taux de mortalité standardisé a diminué de 0.8% par an en moyenne entre 1990 et 2018.
Tumeurs solides
L'évolution de l'incidence et de la mortalité par cancer peuvent s'expliquer de plusieurs façons. Ainsi, une augmentation du taux d'incidence peut marquer un plus fort risque d'être atteint du cancer mais aussi résulter d'un meilleur dépistage qui augmente le nombre de cancers dépistés alors que le risque de cancer peut avoir diminué. Une augmentation du taux d'incidence avec une augmentation du taux de mortalité s'explique généralement par des progrès thérapeutiques limités et/ou une proportion importante de cas diagnostiqués à un stade avancé. En revanche, une augmentation du taux d'incidence avec une diminution de la mortalités peut être associée à des progrès thérapeutiques et à des diagnostics précoces de meilleur pronostic.
Augmentation de l'incidence et de la mortalité par cancer du poumon chez la femme
Le cancer du poumon chez les femmes fait partie des évolutions les plus négatives avec une augmentation du taux d'incidence et de mortalité alors que chez les hommes, le taux d'incidence est stable et la mortalité en diminution. Ainsi, l'écart entre les taux d'incidence chez les hommes et chez les femmes s'est considérablement réduit, le sex-ratio d'incidence est passé, pour le cancer du poumon, de 9.6 en 1990 à 2.2 en 2018. Cette augmentation de l'incidence du cancer du poumon est en lien avec l'augmentation du tabagisme chez les femmes.
Augmentation de l'incidence associée à une mortalité stable ou progressant peu
Quatre cancers dans cette situation sont fréquents, il s'agit des mélanomes et des cancers du pancréas, du foie et du rein.
Le mélanome cutané est le cancer dont l'incidence augmente le plus parmi les tumeurs solides chez l'homme, plus 3.4% en moyenne annuelle sur la période 2010-2018, ce qui est un peu moins que son évolution de 4% par an sur la période 1990-2018.
L'évolution est moins marquée chez la femme avec néanmoins une évolution de l'incidence supérieure à 2% par an en moyenne.
L'augmentation de l'incidence de ce cancer cutané serait liée à une plus forte exposition aux UV naturels ou artificiels.
L'incidence du cancer du pancréas a aussi augmenté, 2.7% par an en moyenne pour l'homme et, de façon plus marquée chez la femme, de 3.8% par an. Ceci pourrait s'expliquer par une modification de l'alimentation, une augmentation de la consommation d'alcool et de tabac et une prévalence croissante de l'obésité.
L'incidence du cancer du foie, aussi plus marquée chez la femme, tend à ralentir sur la période la plus récente mais a été de plus 1.6% chez l'homme et plus 3.5% chez la femme par an en moyenne sur la période 1990-2018.
L'explication en serait une augmentation des pathologies chroniques du foie liées à l'alcool, aux virus des hépatites B et C, aux atteintes du foie d'origine métabolique et par une meilleure prise en charge de la cirrhose. L'amélioration de la prise en charge de la cirrhose, en augmentant l'espérance de vie, serait susceptible de favoriser la survenue d'un cancer du foie.
Le pronostic de ces deux cancers reste sombre, ce qui explique l'évolution négative de la mortalité.
L'incidence du cancer du rein a augmenté de 1.7% par an en moyenne chez l'homme et de 1.4% chez la femme. Les principales causes incriminées pour cette augmentation sont le tabac, la prévalence croissante de l'obésité et le manque d'amélioration du contrôle de l'hypertension artérielle.
L'augmentation de l'incidence du cancer associée à une diminution de la mortalité s'observe pour le cancer du sein chez la femme, le cancer du testicule et le cancer de la thyroïde.
Concernant le cancer du sein chez la femmes, au premier rang des cancers les plus fréquents, on assisté à une stagnation entre 2003 et 2010 mais l'incidence est de nouveau en augmentation sur la période 2010-2018 à un taux moyen annuel de plus 0.6%.
Cette augmentation récente concerne les femmes de toutes les classes d'âge, à l'exception de celles de 60 à 70 ans pour lesquelles il a commencé à baisser après une acmé dans les années 2000.
Cette baisse de l'incidence des cancers du sein chez les femmes dans la tranche d'âge des 55-64 ans dans les années 2000 pourrait être attribuée au recul rapide de la prescription des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause après 2003 ainsi qu'à un effet lié à la saturation du système de dépistage après qu'il a fait augmenter l'incidence lors de son instauration [NDR - Le dépistage organisé du cancer du sein a été généralisé en France en 2004].
Sur la période 1990-2018, la diminution de la mortalité est constante avec une diminution annuelle moyenne du taux de 1.3%. Cette diminution de la mortalité par cancer du sein est en relation avec des avancées thérapeutiques très importantes et des diagnostics réalisés à des stades plus précoces du cancer du sein permettant de meilleurs résultats de la thérapeutique.
Le cancer du sein est une maladie plurifactorielle, parmi les facteurs de risque des facteurs hormonaux et reproductifs ainsi que la prévalence de l'obésité ont joué un rôle délétère en termes d'incidence du cancer du sein au fil des générations. D'autres facteurs de risque du cancer du sein sont suspectés comme le travail de nuit, les perturbateurs endocriniens ou certaines expositions professionnelles qui pourraient jouer un rôle dans la poursuite de l'augmentation de l'incidence du cancer du sein.
L'alcool serait responsable de la survenue de 15% des cancers du sein en 2015, ce qui devrait inciter à lutter davantage contre sa consommation.
La mortalité du cancer du testicule reste très faible.
Pour le cancer de la thyroïde dont la mortalité était déjà très faible, on constate que celle-ci continue de diminuer de 1.9% pour l'homme et 3.4% chez la femme par an. L'évolution du taux d'incidence en augmentation sur la période 1990-2018 est majoritairement expliquée par l'amélioration des pratiques médicales, en particulier diagnostiques, qui tendent un induire un sur-diagnostic de ces cancers évalué entre 70 et 80% sur la période 2003-2007. Le rôle des expositions aux rayonnements ionisants et de la carence en iode est plus difficile à analyser.
Evolution favorable de l'incidence et de la mortalité
Ce type d'évolution concerne principalement chez l'homme le cancer de la prostate, colorectal, les cancers de la lèvre, de la bouche, du pharynx, du larynx et le cancer de l'œsophage. Chez la femme, les cancers concernés sont le cancer du col de l'utérus et le cancer de l'ovaire. C'est aussi le cas du cancer de l'estomac dans les deux sexes.
Le cancer de la prostate, le plus fréquent chez l'homme, a vu son incidence diminuer de 3.5% par an sur la période 1990-2018. De même, sa mortalité a diminué de 2.8% par an grâce au dépistage individuel par le dosage du PSA permettant un diagnostic plus précoce.
Concernant le cancer colorectal qui représente la troisième cause de cancer chez l'homme et la deuxième cause de décès, la baisse de l'incidence a commencé à partir de 1995 pour le rectum et de 2005 pour le colon. La mise en place du dépistage organisé, avec résection des lésions précancéreuses, pourrait expliquer en partie la diminution de l'incidence du cancer colorectal et de sa mortalité. Cependant, l'absence de diminution de l'incidence du cancer colorectal chez la femme est difficile à expliquer.
Incidence stable pour certains cancers
Durant la période 1990-2018, aucune évolution notable n'a été notée pour les sarcomes, le cancer de la vessie, le mélanome de l'uvée, les cancers des fosses nasales et les tumeurs malignes du système nerveux central dans les deux sexes. Ainsi que, selon le sexe, les cancers du pénis, du corps de l'utérus et de la vulve.
Hémopathies malignes
Incidence en 2018
En 2018, le nombre de nouveaux cas d'hémopathies malignes en France métropolitaine est estimé à 45 000, 25 000 chez l'homme et 20 000 chez la femme. Elles représentent 12% de l'ensemble des nouveaux cas de cancers.
Environ les deux tiers de ces hémopathies sont des hémopathies lymphoïdes, lymphome hodgkinien et non hodgkinien.
Les hémopathies malignes sont plus fréquentes chez l'homme, à l'exception de la thrombocytémie essentielle. Le sex-ratio varie de 0.9 pour la thrombocytémie essentielle à 5 pour le lymphome à cellules du manteau ou la leucémie à tricholeucocytes.
Les 5 entités les plus fréquentes sont le myélome multiple/plasmocytome (5442 nouveaux cas), le lymphome diffus à grandes cellules (5 071 nouveaux cas), les syndromes myélodysplasiques (4 674) et les leucémies aigues myéloïdes (3 428 nouveaux cas) qui représentent 53% de la totalité des nouveaux cas d'hémopathies.
Tendance entre 1990 et 2018
Parmi les hémopathies qui ont augmenté de plus de 1% sur la période 1990-2018, on recense le lymphome de Hodgkin et les leucémies aigues myéloïdes mais aussi le lymphome folliculaire, le lymphome diffus à grandes cellules B et le myélome multiple. Pour ces cinq localisations, l'incidence de nouveaux cas a augmenté, entre 1990 et 2018, respectivement chez l'homme et la femme de 50% et 64% pour le lymphome de Hodgkin, de 114% et 115% pour les leucémies aigues myéloïdes. Sur la période 1995-2018, l'augmentation de l'incidence a été, respectivement pour hommes et femmes, de 181% et 122% pour le lymphome folliculaire, de 86% et 82% pour le lymphome diffus à grandes cellules B et de 96% et 74% pour le myélome multiple.
Pour ces 5 localisations, 30 à 60% de la hausse du taux d'incidence est liée au vieillissement de la population et 40 à 70% à une augmentation du risque de survenue de ces pathologies pour des causes à étudier.
Conclusion
" Ces estimations actualisées d’incidence et de mortalité portant sur la période 19902018 bénéficient d’une révision majeure de la méthode, qui permet de publier pour la première fois en France métropolitaine les données d’incidence par soustype, que ce soit histologique ou topographique, pour 74 types ou sous types de cancers (49 tumeurs solides, 24 hémopathies malignes et une entité « Tous cancers ») selon la même méthodologie. Cette mise à jour est portée par l’évolution des connaissances et l’intérêt de dissocier les tendances pour des localisations cancéreuses (entités) aux modalités thérapeutiques et aux pronostics souvent très différents.
Ces résultats préliminaires décrivent une situation plutôt encourageante chez l’homme, pour lequel on observe une diminution de l’incidence et de la mortalité pour deux des trois cancers les plus fréquents (cancer de la prostate et cancer colorectal), et une diminution de l’incidence et de la mortalité de plusieurs cancers liés à l’alcool et au tabac (lèvrebouchepharynx, larynx, œsophage, estomac). Ces résultats montrent en revanche une stabilité de l’incidence du cancer du poumon chez l’homme et son évolution préoccupante chez la femme, pour laquelle les écarts avec les hommes se sont considérablement réduits depuis 1990, en relation avec l’augmentation de la consommation de tabac chez ces dernières.
L’analyse des tendances par type histologique montre une hausse de l’incidence des adénocarcinomes du poumon dans les deux sexes, en lien vraisemblablement avec les modifications de composition et de structure des cigarettes apportées par l’industrie du tabac depuis plusieurs décennies.
Cette hausse, plus modérée que celle observée dans les années 1990, est décrite pour toutes les classes d’âge, excepté pour les femmes âgées de 55 à 64 ans. L’analyse des tendances par âge soulève également pour les cancers du col de l’utérus et les cancers de l’anus chez les femmes l’hypothèse d’une augmentation récente des cancers imputables à l’infection persistante par le
Papillomavirus Humain (HPV [le papillomavirus humain]).
Ces premiers résultats soulignent l’intérêt de maintenir et renforcer les efforts de prévention pour parvenir à une éviction des principaux facteurs de risque connus pour les cancers évitables (le tabagisme pour le cancer du poumon, la consommation d’alcool pour le cancer du sein, l’infection au HPV pour le cancer du col de l’utérus ainsi que le cancer de l’anus, ou encore les expositions aux ultraviolets naturels ou artificiels pour le mélanome cutané).
Concernant les hémopathies malignes, le fait de distinguer l’incidence selon les principaux types histologiques améliore également considérablement la connaissance de ces maladies et permet non seulement de suivre les tendances de chaque type d’hémopathie maligne dans le temps mais également de générer des hypothèses étiologiques ou d’apporter des possibilités de comparaisons sur le plan diagnostique et thérapeutique.
Certaines hémopathies malignes ont aujourd’hui une incidence en augmentation dont l’origine ne relèverait ni d’un artéfact d’enregistrement, ni de modifications démographiques. C’est le cas de plusieurs hémopathies lymphoïdes pour lesquelles des travaux récents issus du consortium InterLymph ont montré une hétérogénéité des facteurs de risque selon leur sous type histologique sur un fond étiologique commun. En effet, certains sous types de lymphomes sont associés à des facteurs de risque en lien avec l’immunité (antécédents de maladies autoimmunes par exemple) comme le lymphome diffus à grandes cellules B ou le lymphome du MALT (ce qui est concordant avec les résultats obtenus dans le domaine de l’épidémiologie du VIH/Sida ou des greffes d’organes) alors que d’autres ont peu d’associations avec des facteurs de risque connus mais ont davantage une origine génétique comme le démontrent les résultats des études d’associations
pangénomiques récentes sur la leucémie lymphoïde chronique ou le lymphome folliculaire. Ces éléments montrent qu’il reste une large place pour la recherche étiologique sur ces maladies et les interactions entre facteurs environnementaux et génétiques.
Cette publication quinquennale sera disponible prochainement sous la forme d’un rapport complet. Ce rapport disposera de l’analyse des tendances d’incidence et/ou de mortalité actualisée pour 74 localisations et contribuera à dresser un panorama précis et détaillé de la situation sanitaire du cancer en France métropolitaine.
Cette publication est le fruit d’un partenariat entre le réseau français des Registres du cancer Francim, le service de biostatistique/bioinformatique des Hospices civils de Lyon (HCL), Santé publique France et l’Institut national du cancer (INCa). "
Les vacances sont passées pour quasiment tout le monde… la vie au travail reprend… Une nouvelle lettre bien fournie pour cette rentrée ! Et toujours l'attente de l'évolution de la santé au travail préconisée déjà il y a un an par le rapport présenté par Mme Lecocq…
Jacques Darmon


Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.

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