Téléchargement des fichiers joints
Le 8 octobre 2023
Au sommaire de
cette lettre… Parmi les textes de loi… Le suivi de demandes d’adaptations
législatives ou réglementaires préconisées dans le Rapport annuel 2022 de la
Cour de cassation… Des dispositions du projet de loi de financement de la
Sécurité sociale pour 2024 qui risquent d’impacter certains domaines de la
santé au travail… >En termes de jurisprudence…Un arrêt de la Cour de cassation
relatif au déficit fonctionnel permanent lors d’une faute inexcusable… et une
jurisprudence relative à la formulation de l’impossibilité de reclassement dans
un avis d’inaptitude du médecin du travail… Une campagne du ministère du
travail sur la prévention des accidents graves et mortels… Une étude sur la
qualité de vie et les conditions de travail des personnels hospitaliers de
l’AP-HP travaillant de nuit… Des données sur l’évolution entre 1990 et 2019 des
cancers chez les sujets de moins de 50 ans… Un baromètre santé et qualité de
vie au travail en 2023…
Vous pourrez
accéder en pièce jointe à la veille juridique, jurisprudentielle et relative à
la santé au travail de l’Inspection médicale du travail de la Drieest Ile de France.
Les lettres
d’information sont accessibles, depuis janvier 2019, sur un blog à l’adresse
suivante : https ://bloglettreinfo.blogspot.com/.
·
Textes de
loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires,
Conseil d’État
Rapport annuel
2022 de la Cour de cassation
Dans son rapport annuel, la Haute juridiction préconise des adaptations
législatives ou réglementaires visant à s’adapter à l’évolution de la
jurisprudence, qu’elle soit française ou européenne.
Dans le rapport annuel 2022, on peut relever le suivi des préconisations
suivantes.
Au
sujet de la faute inexcusable de l’article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale
« Réparation des conséquences de la faute inexcusable :
modification de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale Depuis 2010, le
Rapport suggère une modification des dispositions de l’article L. 452-3 du code
de la sécurité sociale dès lors que celles-ci, telles
qu’interprétées par le Conseil constitutionnel, ne permettent pas une
indemnisation intégrale des victimes d’accidents du travail dus à la faute
inexcusable de leur employeur. Les normes européennes ne peuvent pas
davantage être sollicitées à cette fin.
Les Rapports depuis 2013 ont exposé combien l’évolution de
l’indemnisation des victimes d’accidents du travail liés à une faute
inexcusable de l’employeur témoigne de l’acuité du sujet et de l’intérêt de
maintenir la proposition précédemment développée. La Cour de cassation
maintient donc sa proposition au moyen d’une formulation qu’elle souhaite
dénuée de toute ambiguïté sur le caractère intégral de la réparation et propose
la modification suivante de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale :
« Article unique I. – Les dispositions du premier alinéa de l’article
L. 452-3 du code de la sécurité sociale sont abrogées et remplacées par les
dispositions suivantes : “Indépendamment de la majoration de rente qu’elle
reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à
l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation de
l’ensemble des préjudices qui ne sont pas indemnisés pour l’intégralité de leur
montant par les prestations, majorations et indemnités prévues par le présent
livre.”
II. – La branche accidents du travail du régime général et celle du
régime des salariés agricoles supportent définitivement, chacune en ce qui la
concerne, la charge imputable à la modification de l’étendue de la réparation,
résultant du I du présent article, des accidents du travail survenus et des
maladies professionnelles constatées antérieurement à la publication de la
présente loi. »
La direction de la sécurité sociale a adopté une position défavorable à
l’égard d’une telle évolution de la réparation des victimes d’une faute
inexcusable de l’employeur, pour les raisons déjà évoquées les années précédentes, sur la base des
éléments suivants : Le Conseil constitutionnel, dans sa décision no 2010-8 QPC du 18 juin 2010, a admis le caractère forfaitaire de la réparation
des accidents du travail et des maladies professionnelles, rappelant toutefois que, en cas de faute
inexcusable de l’employeur, les dispositions de l’article L. 452-3 du code de
la sécurité sociale ne sauraient faire obstacle à ce que les victimes d’un
accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou leurs ayants droit
puissent, devant les juridictions, demander à l’employeur réparation non
seulement des chefs de préjudice énumérés par cet article, mais aussi de
l’ensemble des autres dommages non couverts par le livre IV du code de la
sécurité sociale.
La Cour de cassation a précisé dans ce cadre que les dispositions du
dernier alinéa de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale prévoyant
l’avance par les caisses primaires d’assurance maladie des indemnités
afférentes à ces préjudices s’appliquaient identiquement pour les deux types de
préjudice, ce qui préserve la victime de tout risque d’insolvabilité de l’employeur.
Dans son arrêt du 12 janvier 2017, la Cour européenne des droits de l’homme a,
quant à elle, jugé conforme aux stipulations de la Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales le régime de réparation
forfaitaire du préjudice du salarié à raison de la faute inexcusable de
l’employeur en considérant que cette réparation vient en complément de
dédommagements automatiquement perçus par le salarié, ce qui singularise sa
situation par rapport à la situation de droit commun.
Elle en déduit qu’il existe une différence de situation ne permettant pas
l’application de l’article 14 de la Convention précitée relatif à la
prohibition des discriminations. La direction de la sécurité sociale a
considéré que l’articulation de ces jurisprudences permet de préserver le
caractère forfaitaire de droit commun de la réparation des accidents du travail
et des maladies professionnelles avec la nécessité de la réparation des
préjudices non indemnisés par ailleurs en cas de faute inexcusable. En
conséquence, l’état actuel de la jurisprudence offre, à ses yeux, aux
victimes de sinistres d’origine professionnelle un niveau élevé de réparation
de leurs préjudices en cas de faute inexcusable de l’employeur. La
direction de la sécurité sociale a, en outre, estimé que la proposition de la
Cour de cassation en faveur d’une réparation intégrale des préjudices, qu’ils
soient ou non déjà partiellement indemnisés au sein du livre IV du code de la
sécurité sociale, va au-delà de la jurisprudence du Conseil constitutionnel,
qui mentionne uniquement les dommages non couverts par la législation au titre
des accidents du travail et des maladies professionnelles. Elle aurait pour
caractéristique de supprimer la distinction en vigueur entre la réparation de
la faute inexcusable et celle de la faute intentionnelle prévue par l’article L. 452-5 du même code. Elle élargirait les cas dans
lesquels la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles
avance, sans assurance de récupération, des sommes pour le compte des
employeurs, à des situations dans lesquelles elle assure déjà, sous les règles
prévues par le code de la sécurité sociale, la réparation des sinistres.
Enfin,
elle a émis l’avis qu’une telle proposition comporterait ainsi des risques
financiers importants pour l’équilibre de la branche, qui est au cœur de son
fonctionnement. Il n’en apparaît
pas moins que cette importante
suggestion de réforme, dont les motifs exposés conservent toute leur pertinence, présente un
caractère essentiel au regard de ses enjeux et de ses conséquences et en considération
de l’équilibre qu’elle recherche quant à l’étendue de la réparation assurée aux
victimes. Elle ne
peut qu’être maintenue. La DACS [Direction des affaires civiles et du sceau] n’émet pas d'avis sur les évolutions de fond
concernant le droit de la sécurité sociale, l’initiative appartenant aux
ministères sociaux. »
Allaitement
d’un enfant sur le lieu de travail
« La partie législative du code du travail comprend une sous-section
spécifique consacrée à l’allaitement, qui compte quatre articles,
complétés par plusieurs dispositions réglementaires : – Article L. 1225-30 – Pendant une année à compter du jour de la
naissance, la salariée allaitant son enfant dispose à cet effet
d’une heure par jour durant les heures de travail. – Article L. 1225-31 – La salariée peut allaiter son enfant dans
l’établissement. – Article L. 1225-32 – Tout employeur employant plus de cent salariées
peut être mis en demeure d’installer dans son établissement ou à proximité des
locaux dédiés à l’allaitement. – Article L. 1225-33 – Un décret en Conseil d’État détermine, suivant
l’importance et la nature des établissements, les conditions d’application de
la présente sous-section.
Ces articles sont issus d’une loi adoptée le 5 août 1917. Ils n’ont pas été modifiés depuis et l’affaire qui
a donné lieu à l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation montre qu’ils
ne sont plus adaptés et qu’ils sont susceptibles de poser des difficultés
d’application. Ce sont notamment les articles L. 1225-32 et R. 4152-13 à R. 4152-28 du code du travail qui posent des
difficultés d’application. D’une part, ces articles laissent entière la
question des modalités de l’allaitement en direct d’un enfant sur le lieu de
travail, s’agissant des entreprises employant moins de cent salariées. D’autre
part, dans les entreprises employant plus de cent salariées, c’est une
véritable crèche d’entreprise qui est décrite par les articles R. 4152-13 et
suivants du code du travail (l’employeur doit fournir un berceau pour
chaque enfant, le local ne peut pas contenir plus de douze enfants,
l’employeur doit fournir du linge en quantité suffisante pour que les enfants
puissent être changés aussi souvent que nécessaire ; en prévoyant que
« personne ne doit passer la nuit dans le local dédié à l’allaitement où
les enfants passent la journée », l’article R. 4152-26 présuppose que les
enfants pourraient séjourner dans ce local). Mais ces dispositions comportent
une contradiction. Ainsi, l’article R. 4152-15 du code du travail dispose que
les enfants ne peuvent séjourner dans le local destiné à l’allaitement que le
temps de celui-ci. Pourtant la question de l’allaitement au travail n’est en
rien obsolète et la possibilité de concilier allaitement et travail s’inscrit
aujourd’hui dans l’objectif recherché d’une égalité professionnelle entre les
femmes et les hommes.
La chambre sociale suggère donc l’abrogation des articles L. 1225-32 et
R. 4152- 13 à R. 4152-28 du code du travail et l’adoption de dispositions réglementaires
visant à mettre en œuvre l’article L. 1225-31 du code du travail, permettant
aux femmes qui le souhaitent de pouvoir allaiter leur enfant dans un local ou
de tirer leur lait. La chambre sociale suggère également de profiter de la
révision de ces articles pour assurer la conformité du droit français à la
Charte sociale européenne. En effet, si le droit à une pause pour allaiter est
bien reconnu par l’article L. 1225-30 du code du travail, conformément à
l’article 8, § 3, de la Charte, cette pause n’est pas rémunérée. Or selon
le Comité européen des droits sociaux, « les pauses d’allaitement doivent
en principe intervenir pendant le temps de travail et par conséquent, être
considérées comme des heures de travail et rémunérées comme telles »
(conclusions XIII-4 [1996], Pays-Bas). En conséquence, le Comité européen des
droits sociaux a conclu en 2011 que la situation de la France n’était pas
conforme à l’article 8, § 3, de la Charte sociale européenne révisée au
motif que la rémunération des pauses d’allaitement n’est pas garantie aux
salariées couvertes par le code du travail. Cette suggestion proposée aux
Rapports annuels 2020 et 2021 n’ayant pas été suivie d’effet, il convient de la
maintenir. La DACS n’émet pas d’avis sur les évolutions de fond concernant le
droit du travail, l’initiative appartenant aux ministères sociaux. »
Projet de loi de financement de la
Sécurité sociale pour 2024
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 a été
transmis à l’Assemblée nationale le 27 septembre. Il comprend certaines
dispositions relatives à la santé au travail figurant dans des articles du
texte de loi que j’ai relevés en indiquant l’exposé des motifs ayant conduit à
leur proposition.
Article 26
Il envisage à l’article L. 717-1 du Code rural et de la pêche maritime, pour le renouvellement de
l’examen médical d’aptitude de l’article L. 4624-2 relatif aux salariés en
surveillance individuelle renforcée (SIR), que certains actes puissent être
réalisés par un infirmier.
Voilà l’alinéa qui devrait être rajouté à cet article :
« Pour
le renouvellement périodique de l’examen médical d’aptitude mentionné au II de l’article L. 4624‑2 du code du travail, certains actes de cet examen, préalables à la
délivrance par le médecin du travail d’un avis d’aptitude, peuvent
être délégués à un infirmier en santé au travail dans
le cadre d’un protocole écrit et dans les conditions prévues par les articles L 4622‑8 et L. 4623‑9 du code du travail. Lorsque l’infirmier en santé au travail constate des
éléments pouvant justifier une inaptitude au poste de travail ou la nécessité
de proposer l’une des mesures prévues à l’article L. 4624‑3 du code du
travail, il oriente sans délai le travailleur vers le médecin du travail pour qu’il réalise tous les actes de l’examen médical
d’aptitude. »
Exposé
des motifs
« La présente mesure vise à prévoir la possibilité pour les médecins
du travail de déléguer aux infirmiers qualifiés en santé au travail la
réalisation de certains actes pour le renouvellement périodique de l’examen médical
d’aptitude des salariés agricoles bénéficiaires du suivi individuel renforcé.
Il s’agit de s’inspirer de l’expérimentation prévue par l’article 66 de la loi n° 2020‑1576 du 14 décembre
2020 de financement
de la sécurité sociale pour 2021, menée dans quatre caisses de mutualité
sociale agricole (MSA) et qui a permis d’améliorer le suivi individuel des
salariés agricoles. L’objectif de cette mesure est d’améliorer, sur tout le
territoire, le suivi individuel des salariés agricoles et la prévention contre
les expositions professionnelles aux risques. »
Article 27
Cet article 27 a pour objet, pour diminuer les arrêts maladie ou en réduire
la durée, d’une part, d’établir un contrôle sur les centres de santé et les
organismes de téléconsultation et, d’autre part, de renforcer des mesures
visant à interrompre les indemnités journalières en cas d’intervention d’un
médecin contrôleur adressé à la demande de l’employeur.
Dispositions envisagées vis-à-vis des centres de santé et des organismes
de téléconsultation
Il est envisagé une modification de l’article L. 162-1-15 du Code de la Sécurité sociale avec l’introduction de , l’alinéa
suivant :
« Le
directeur de l’organisme local d’assurance maladie peut également, après que le centre de santé ou la
société de téléconsultation mentionnée à l’article L. 4081‑1 du code de la santé publique a été mis en mesure de
présenter ses observations, subordonner
à l’accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant
excéder six mois, le versement des indemnités journalières mentionnées à
l’article L. 321‑1 et au 2° de
l’article L. 431‑1 du présent code
[NDR –
Respectivement les indemnités journalières pour maladie d’origine non
professionnelle et des accidents du travail et des maladies professionnelles],
prescrites
par les professionnels de santé exerçant au sein de ces structures en cas de
constatation par ce service :
1°Du non‑respect
des conditions prévues, respectivement, à l’article L. 321‑1 et au 2° de
l’article L. 431-1 ;
2 Ou d’un
nombre ou d’une durée d’arrêts de travail prescrits par les professionnels
exerçant au sein du centre de santé ou de la société de téléconsultation et donnant lieu au versement d’indemnités
journalières ou d’un nombre de tels arrêts de travail rapporté au nombre de
patients pour lesquels au moins un acte ou une consultation a été facturé au
cours de la période considérée significativement
supérieurs aux données moyennes constatées pour les centres de santé ou
sociétés de téléconsultation ayant une activité comparable dans le ressort
de
la même agence régionale de santé ou au niveau national.
Toutefois, en cas d’urgence attestée par le professionnel de santé
prescripteur, l’accord préalable de l’organisme débiteur des prestations n’est
pas requis pour le versement des indemnités journalières ».
Dispositions envisagées relatives au contrôle des arrêts maladie
Il est envisagé une modification de l’article L. 315-1 du Code de la Sécurité sociale avec l’introduction des alinéas
suivants :
« Lorsqu’un
contrôle effectué par un médecin à la demande de l’employeur, en application de l’article L. 1226‑1 du code du travail, conclut à l’absence de justification d’un arrêt de
travail ou de sa durée, ou fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen
de l’assuré, ce médecin transmet son rapport au service du contrôle médical de
la caisse dans un délai maximal de soixante‑douze heures. Ce rapport précise si le médecin diligenté par
l’employeur a ou non procédé à un examen médical de l’assuré.
Si
ce rapport conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail ou de sa
durée, le médecin en informe également, dans le même délai, l’organisme local
d’assurance maladie, qui suspend le versement des indemnités journalières. Cette suspension prend effet à compter de la date
à laquelle l’assuré a été informé de cette décision. Toutefois, dans le cas où
le médecin diligenté par l’employeur a estimé que l’arrêt de travail est justifié pour
une durée inférieure à celle fixée par le médecin prescripteur, la suspension
prend effet à l’échéance de la durée retenue par le médecin diligenté par
l’employeur.
Le
service du contrôle médical peut, au vu du rapport, décider
de procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré. S’il décide de
procéder à cet examen, il n’est pas fait application de la suspension du
versement des indemnités journalières jusqu’à ce que ce service ait statué.
Le
service du contrôle médical peut en outre être saisi par l’assuré, sur demande de celui‑ci, formulée auprès
de son organisme de prise en charge. Le délai dans lequel cette demande est effectuée
ainsi que le délai dans lequel intervient le nouvel examen de la situation de
l’assuré sont fixés par décret en Conseil d’État.
Lorsque le rapport fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de
l’assuré, le service du contrôle médical ne peut demander la suspension du
versement des indemnités journalières qu’après un nouvel examen de la situation
de l’assuré. »
Il est aussi envisagé de rajouter cet alinéa à l’article L. 315-1 :
« Les missions du service du contrôle médical sont exercées par les
praticiens conseils mentionnés à l’article L. 224‑7. Ceux‑ci peuvent déléguer, sous leur
responsabilité, la réalisation de certains actes et activités au personnel des
échelons régionaux et locaux du contrôle médical disposant de la qualification
nécessaire. Lorsque ces délégations concernent des auxiliaires médicaux,
lesdites missions sont exercées dans la limite de leurs compétences prévues par
le code de la santé publique. Lorsque, dans le cadre de ces délégations, des
auxiliaires médicaux sont conduits à rendre des avis qui commandent
l’attribution et le service de prestations, elles s’exercent dans un cadre d’un
protocole écrit. »
À l’article L. 315-2, le III est modifié. L’alinéa actuel suivant « Lorsque le
praticien-conseil procède à l’examen du patient et qu’à l’issue de celui-ci il
estime qu’une prescription d’arrêt de travail n’est pas ou n’est plus
médicalement justifiée, il en informe directement l’intéressé. Sauf si le
praticien-conseil en décide autrement, la suspension prononcée par la caisse
prend effet à compter de la date à laquelle le patient a été informé »
est remplacé par « Lorsque le service du contrôle médical estime
qu’une prescription d’arrêt de travail n’est pas ou n’est plus médicalement
justifiée à l’issue de l’examen d’un assuré, l’intéressé en est directement
informé. Sauf si le service du contrôle médical en décide autrement, la
suspension prononcée par la caisse prend effet à compter de la date à laquelle
le patient a été informé ».
Exposé des
motifs
« La
très forte dynamique de la dépense d’indemnités journalières observée
actuellement rend nécessaire des mesures de responsabilisation collective des
professionnels prescripteurs et des assurés bénéficiaires d’arrêts maladie,
afin de garantir la soutenabilité des comptes sociaux et d’assurer la pérennité
de notre modèle protecteur d’indemnisation des arrêts de travail, pour garantir
à chacun un revenu de remplacement lorsque sa santé lui impose de cesser
momentanément son activité professionnelle.
L’augmentation de la population active, le vieillissement de la
population ou encore l’augmentation du montant de l’indemnité moyenne en raison
de la hausse des salaires et de la hausse de l’activité portée par un marché de
l’emploi dynamique, sont autant de facteurs importants à prendre en compte,
mais qui ne permettent pas à eux seuls d’expliquer l’augmentation de la dépense
d’indemnités journalières.
L’assurance maladie conduit déjà un certain nombre de contrôles et
d’accompagnement concernant les prescripteurs, les assurés et les entreprises [NDR - Je demande à voir pour les entreprises !],
pour limiter les abus, responsabiliser chacun et renforcer les bonnes
pratiques. La
présente mesure propose de renforcer les capacités de contrôle des caisses
primaires d’assurance maladie et des employeurs, et
d’accentuer les sanctions en cas d’arrêt de travail indu. Le
versement des indemnités journalières pourrait être suspendu à compter du
rapport du médecin contrôleur délégué par l’employeur et concluant au caractère
injustifié de l’arrêt. La mesure prévoit également d’intensifier et de simplifier
l’accompagnement des médecins présentant un taux important de prescription
d’arrêts. Elle vise de plus à permettre la délégation de compétences au sein du
service de contrôle médical pour libérer du temps médical qui pourrait être
dédié au contrôle des arrêts de travail. Ces mesures seront complétées par des dispositions
réglementaires pour notamment fixer les modalités de la contre‑visite employeur. »
La proposition
de cette disposition a entraîné un communiqué du syndicat de médecins
généralistes, MG France :
« Contrôles des arrêts maladie
par le patronat : communiqué de presse MG France
MG France refuse
que le médecin de l’employeur censure la prescription du médecin traitant.
MG France alerte
au sujet d’une disposition introduite dans le PLFSS 2024 concernant le contrôle
des arrêts de travail : les salariés arrêtés pourront être contrôlés par un
médecin mandaté (et rémunéré) par l’employeur.
Médecin
contrôleur qui aura le pouvoir d’interrompre l’arrêt de travail séance tenante.
Les droits de
recours du patient auprès de l’Assurance Maladie, eux, ne seraient pas
immédiats.
Les délais administratifs et les difficultés de certains de nos patients à les
mobiliser priveront d’indemnités journalières les plus fragiles d’entre eux.
MG France alerte
les parlementaires sur le danger que recèle cette disposition, qui doit être
supprimée.
Les médecins
généralistes traitants continueront demain de soigner les patients malades,
même si cela suppose de les arrêter.
Si ce texte
vient à être appliqué, chaque médecin généraliste tiendra à disposition de ses
patients le courrier de contestation auprès des caisses et la procédure à
suivre.
Si la lutte
contre la fraude est indispensable, la casse sociale n’est pas une option. »
Article 28
Cet article, qui vise aussi à limiter la prescription des arrêts maladie
envisage de modifier l’article L. 6316-1 du Code de la santé publique. Il rajoute à cet article l’alinéa
suivant :
« Lors
d’un acte de télémédecine, la prescription ou le renouvellement d’un arrêt de
travail ne peut porter sur plus de trois jours ni avoir pour effet de porter à
plus de trois jours la durée d’un arrêt de travail déjà en cours. Il n’y est fait exception que lorsque l’arrêt de
travail est prescrit ou renouvelé par le médecin traitant, ou en cas
d’impossibilité, dûment justifiée par le patient, de consulter un médecin pour
obtenir, par une prescription réalisée en sa présence, une prolongation de
l’arrêt de travail. »
L’article L. 160-8 du Code de la Sécurité sociale devrait être modifié dans le sens suivant
« Les produits, prestations et actes prescrits à l’occasion d’un acte
de téléconsultation réalisé en application de l’article L. 6316‑1 du code de la santé publique ainsi que les
prescriptions réalisées lors des télésoins mentionnés à l’article L. 6316‑2 du même code ne sont couverts qu’à la condition
d’avoir fait l’objet d’un échange oral, en vidéotransmission ou téléphonique,
entre le prescripteur et le patient. »
Pour compléter le dispositif, l’article L. 433‑1 du Code de la Sécurité sociale devrait être complété par un alinéa ainsi
rédigé : « Les arrêts de travail prescrits en méconnaissance du
troisième alinéa de l’article L. 6316‑1 du code de la santé publique ne peuvent
ouvrir droit au versement de l’indemnité journalière au‑delà des trois premiers
jours ».
Exposé des
motifs
« Le
développement de la téléconsultation constitue l’une des réponses aux enjeux
actuels d’accès aux soins. Toutefois, l’élargissement du cadre de sa prise en
charge doit s’accompagner d’une vigilance sur la qualité des pratiques et la
bonne prise en compte des besoins des patients.
La
mesure limite à trois le nombre de jours d’indemnités journalières pouvant être
prescrits en téléconsultation quand elle n’a pas lieu avec son médecin traitant, car si l’état de santé de l’assuré ne s’améliore
pas, voire s’aggrave au‑delà d’une période de trois jours, il est nécessaire
que celui‑ci puisse être examiné physiquement par un médecin pour permettre la
prise en charge d’une éventuelle pathologie plus lourde qu’initialement
diagnostiquée en l’absence d’examen physique. Des exceptions sont prévues pour
prendre en compte les difficultés d’accès au médecin. Par ailleurs, la mesure
impose une obligation de vidéotransmission pour permettre le remboursement de
la prescription, car certaines plateformes en ligne permettent aujourd’hui de
prescrire aux patients des produits, prestations et actes, pris en charge par
l’assurance maladie obligatoire, après des réponses données à un simple
questionnaire ou par un outil de conversation en ligne (chat, sms) sans que le
patient n’ait été vu par un professionnel de santé par vidéotransmission ni eu
un contact téléphonique avec ce dernier garantissant la qualité de la prise en
charge. »
Article 39
Cet article a trait à l’indemnisation des accidents du travail et des
maladies professionnelles et fait suite au revirement de l’Assemblée plénière
de la Cour de cassation au sujet de l’indemnisation du déficit fonctionnel
permanente (DFP) qu’avant les deux arrêts du 20 janvier 2023 elle considérait
indemnisé par la rente allouée pour l’incapacité permanente (voir des
explications détaillées dans la lettre d’information du 5 février 2023, sur le blog). A priori, c’est celui qui est le plus susceptible d’entraîner des
polémiques car il peut retentir sur un grand nombre de salariés (en 2021, il y
a eu 67 082 incapacités permanentes reconnues dont 24 045 de 10% et
plus, selon le rapport annuel 2021 de la Branche AT-MP, page 4).
Voici la définition que donne le rapport du groupe de travail présidé par M.
Dintilhac du déficit
fonctionnel permanent (p. 38/39) : « Ce poste de
préjudice cherche à indemniser un préjudice extra-patrimonial découlant d’une
incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une
incidence sur les fonctions du corps humain de la victime. Il s’agit ici de réparer
les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de
la victime. Il convient d’indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes
aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente
qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les
conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation.
Ce poste peut
être défini, selon la Commission européenne à la suite des travaux de Trèves de
juin 2000, comme correspondant à “la réduction définitive du potentiel
physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l’atteinte à
l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable donc appréciable par
un examen clinique approprié complété par l’étude des examens complémentaires
produits, à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions
psychologiques, normalement liées à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que
les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la
vie de tous les jours”. En outre, ce poste de préjudice doit réparer la perte
d’autonomie personnelle que vit la victime dans ses activités journalières,
ainsi que tous les déficits fonctionnels spécifiques qui demeurent même après
la consolidation. En raison de son caractère général, ce déficit fonctionnel
permanent ne se confond pas avec le préjudice d’agrément, lequel a pour sa part
un objet spécifique en ce qu’il porte sur la privation d’une activité
déterminée de loisirs. »
Cet article 39 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale
pour 2024 envisage donc de modifier l’article L. 434-2 du Code de la Sécurité sociale relatif à l’indemnisation de l’incapacité
permanente (IP) par une rente lorsque son taux est supérieur ou égal à 10%.
Le deuxième alinéa actuel est ainsi rédigé : « Lorsque
l'incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum [NDR –
Qui devrait a priori rester le même, soit 10%], la victime a droit à une
rente égale au salaire annuel multiplié par le taux d'incapacité qui peut être
réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci. »
Il est envisagé remplacer cet alinéa par les dispositions suivantes qui
introduisent une part de l’indemnisation en termes de déficit fonctionnel
permanent. Le 1° correspond à ce qu’indemnise actuellement le médecin conseil
en fixant le taux d’incapacité permanente [NDR - Auquel la Caisse peut rajouter
un coefficient professionnel de quelques pourcents s’il y a eu, par exemple,
inaptitude et licenciement] :
« Lorsque l’incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux
minimum, la victime a droit à une rente forfaitaire composée de deux parts :
1° Une
part, dite professionnelle, correspondant à la perte de gains professionnels et
à l’incidence professionnelle de l’incapacité. Elle est égale au salaire annuel modulé, multiplié
par le taux d’incapacité. Le salaire annuel modulé est égal à une fraction du
salaire annuel de la victime ou du salaire annuel minimum mentionné à l’article
L. 434‑16, dégressive
en fonction du niveau de ce salaire. Le taux d’incapacité peut être réduit ou augmenté
en fonction de la gravité des lésions et de l’atteinte portée aux perspectives
de la victime sur le marché du travail ;
2° Une
part, dite fonctionnelle, correspondant au déficit fonctionnel permanent de la
victime. Elle est
égale à une fraction du taux d’incapacité multipliée par une valeur de point
d’incapacité fixée par un
barème qui tient compte de l’âge de la victime.
Les règles de modulation du salaire annuel et du taux d’incapacité
mentionnées au 1° sont fixées par décret en Conseil d’État. La fraction et le
barème mentionnés au 2° sont fixés par arrêté des ministres chargés du travail
et de la santé. »
Une modification de l’article L. 452-2 relatif à l’indemnisation de la faute inexcusable de l’employeur est
aussi envisagée. Le troisième alinéa de l’article deviendrait : « Lorsqu’une
rente a été attribuée à la victime, la part professionnelle et la part
fonctionnelle mentionnées respectivement aux 1° et 2° du I de l’article L. 434‑2 sont majorées. Le montant de la majoration de la
part professionnelle est fixé de telle sorte que la part professionnelle de la
rente majorée ne puisse excéder la fraction du salaire annuel correspondant à
la réduction de capacité, ou, dans le cas d’incapacité totale, le montant de ce
salaire. Le montant de la majoration de la part fonctionnelle est fixé de telle
sorte que la part fonctionnelle de la rente majorée ne puisse excéder le
produit du taux d’incapacité par la valeur de point d’incapacité fixée par le
barème mentionné au 2° du I de l’article L. 434‑2. ».
Ces dispositions devraient s’appliquer au plus tard le 31 décembre 2024
pour les victimes dont l’état a été consolidé ou qui sont décédées à compter de
cette date.
Exposé des
motifs
« La réparation des accidents du travail et maladies
professionnelles (AT‑MP) repose sur des principes de réparation forfaitaire
rapide et automatique, décorrélée de la notion de faute. Les partenaires
sociaux ont réaffirmé leur attachement à ces principes dans l’accord national
interprofessionnel (ANI) du 15 mai 2023. Dans cet accord, les partenaires
sociaux insistent sur l’impératif d’apporter des évolutions à la réparation
pour « y apporter des améliorations, lui rendre sa robustesse et assurer
ainsi sa pérennité » et « appellent le législateur à prendre toutes
les mesures nécessaires afin de garantir que la nature duale de la rente AT/MP
ne soit pas remise en cause. »
La présente mesure concrétise cette demande et transpose ainsi cette
disposition de l’ANI qui relève du champ des lois de financement de la
sécurité sociale. Elle précise et améliore le régime d’indemnisation AT‑MP en
garantissant la nature duale de la rente AT‑MP, qui doit couvrir à la fois le
préjudice économique et une part des préjudices extra‑professionnels de la
victime. Ainsi, les victimes AT‑MP de droit commun percevront une rente
couvrant de manière certaine ces deux types de préjudices, et en cas de faute
inexcusable de l’employeur, l’employeur ne sera pas seul à supporter la charge
financière d’un préjudice fonctionnel déjà en partie couvert par la rente AT‑MP.
Ce faisant, la mesure tire les conséquences d’une jurisprudence récente de la
Cour de cassation en redéfinissant le caractère dual de la rente et l’évolution
du calcul de cette dernière. La présente mesure s’appliquera aux assurés dont
le taux d’incapacité permanent sera consolidé dès le 1er janvier
2025. »
Le gouvernent semble prendre plus de temps à mettre en œuvre la
disposition de cet ANI qui prévoyait le passage de 25% à 20% du taux
d’incapacité permanente prévisible ouvrant la possibilité de saisir le Comité
régional de reconnaissance des maladies professionnelles.
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b1682_projet-loi.pdf
Les dispositions
relatives à la modification du taux d’incapacité permanente ont entraîné des
réactions d’organismes impliquées dans la défense des victimes d’accidents du
travail et de maladies professionnelles. Vous trouverez en pièce jointe un
communiqué de l’ANDEVA, l’Association nationale des victimes de l’amiante.
· Jurisprudence
Le
taux d’incapacité permanente n’indemnise pas le déficit fonctionnel permanent
C’est un arrêt de la 2e chambre civile de la Cour de cassation
– pourvoi n° 21-25690, publié au Bulletin d’information de la Cour de cassation
– qui explique la modification envisagée par le projet de loi de financement de
la Sécurité sociale pour 2024 du taux d’incapacité permanente en y introduisant
une partie d’estimation du déficit fonctionnel permanent (DFP). (Voir
ci-dessus, le commentaire de l’article 39 du projet de loi de financement de la
Sécurité sociale.)
Dans le sommaire de cette jurisprudence, la Haute juridiction rappelle
que « Par deux arrêts d'assemblée
plénière rendus le 20 janvier 2023 (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvois n°
20-236.73 et n° 21-239.47), la Cour de cassation, revenant sur sa
jurisprudence, juge désormais que la rente ou l'indemnité en capital versée
à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne
répare pas le déficit fonctionnel permanent. Il en résulte que la victime
d'une faute inexcusable peut prétendre à la réparation du préjudice causé par
les souffrances physiques et morales endurées que la rente ou l'indemnité en
capital n'ont pas pour objet d'indemniser. » (Voir le
commentaire de ces arrêts sur le blog.)
Faits
et procédure – Une salariée
a été employée en qualité de piqueuse de 1964 à 1991. Cette salariée fait une
déclaration au titre du tableau 30 bis des maladies professionnelles (cancer
broncho-pulmonaire provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante). Elle
décède des suites de ce cancer le 23 janvier 2017.
L’ayant droit de
la victime saisit une juridiction du contentieux de la Sécurité sociale afin de
faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur et d’en demander
l’indemnisation.
L’employeur se pourvoit en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel
qui a fait droit à la demande de l’ayant droit de la victime.
Moyen
de l’employeur
L’employeur fait grief à l’arrêt d’avoir indemnisé les préjudices
personnels de la victime alors que « en l’absence de perte de gains
professionnels ou d’incidence professionnelle [NDR – Qui sont indemnisés
par le taux d’incapacité permanente au titre de l’article L. 434-2 du Code de la Sécurité sociale] la rente majorée versée par la Cpam à
la victime d’une maladie professionnelle en application des articles L. 431-1
et L. 452-2 du Code de la Sécurité sociale indemnise le déficit fonctionnel
permanent ; que l’indemnisation de ce poste de préjudice comprend les atteintes
aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi les douleurs physiques et
morales endurées par elle après la consolidation ; que dès lors, en
l’absence de préjudice professionnel, le salarié peut uniquement réclamer, au
titre de la faute inexcusable, la réparation des préjudices personnels qui
n’ont pas été indemnisées par le capital qu’il a perçu ». Pour
l’employeur, dans le cas présent, la victime était à la retraite depuis
plusieurs années lors de l’apparition de sa maladie et celle-ci n’avait donc eu
aucune incidence professionnelle. Le taux d’incapacité permanente indemnisait
donc le déficit fonctionnel permanent. En indemnisant les souffrances endurées
par la victime, sans démontrer qu’elles étaient au moins partiellement,
distinctes du déficit fonctionnel permanent, déjà réparé par la majoration du
taux d’incapacité permanente, la cour d’appel aurait violé les L. 431-1, L.
434-1, L. 434-2, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.
Réponse
de la Cour de cassation
« Il résulte des articles L. 434-1 et L. 434-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée
à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle atteinte
d'une incapacité permanente égale ou supérieure au taux de 10 % prévu par
l'article R. 434-1 du même code est égale au salaire annuel multiplié
par le taux d'incapacité qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la
gravité de celle-ci.
Selon l'article L. 452-3 du même code, indépendamment de la majoration de la
rente qu'elle reçoit en vertu de l'article L. 452-2, en cas de reconnaissance de la faute inexcusable
de l'employeur, la
victime a le droit de demander à celui-ci devant la juridiction de sécurité
sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et
morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du
préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion
professionnelle.
La
Cour de cassation jugeait depuis 2009 que la rente ou l'indemnité en capital
versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle
indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle
de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent (Crim., 19 mai 2009, pourvois n° 08-86.050 et
08-86.485, Bull. Crim. 2009, n° 97 ; 2e Civ., 11 juin 2009, pourvois n°
08-17.581, Bull. 2009, II, n° 155 ; pourvoi n° 07-21.768, Bull. 2009, II, n°
153 ; pourvoi n° 08-16.089, Bull. 2009, II, n° 154). Elle n'admettait
que la victime d'une
faute inexcusable percevant une rente ou une indemnité en capital d'accident du
travail ou de maladie professionnelle puisse obtenir une réparation distincte des
souffrances physiques et morales qu'à la condition qu'il soit démontré que
celles-ci n'ont pas été indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent (2e Civ., 28 février 2013, pourvoi n° 11-21.015,
Bull. 2013, II, n° 48).
Par
deux arrêts d'assemblée plénière rendus le 20 janvier 2023 (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvois n° 20-23.673
et 21-23.947),
la Cour de cassation, revenant sur sa jurisprudence, juge désormais que la
rente ou l'indemnité en capital versée à la victime d'un accident du travail ou
d'une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.
Il en résulte que la
victime d'une faute inexcusable peut prétendre à la réparation du préjudice
causé par les souffrances physiques et morales endurées que la rente ou
l'indemnité en capital n'ont pas pour objet d'indemniser.
L'arrêt relève que la victime était consciente de sa perte totale
d'autonomie jusqu'à son décès prématuré dont elle a redouté la survenue et
ressentait un sentiment d'injustice en raison du lien entre la maladie et
l'activité professionnelle. Il en déduit l'existence de souffrances morales. Il
ajoute que la nature de la pathologie, particulièrement douloureuse, les soins
chimiothérapiques, les hospitalisations subies, la dyspnée sévère et l'altération
de l'état général de la victime justifient l'indemnisation accordée au titre
des préjudices physiques. »
Le pourvoi de l’employeur est rejeté.
Cet arrêt du 13 septembre 2013 de la chambre sociale de la Cour de
cassation – Cass. soc. pourvoi n° 22-12970, publié au Bulletin d’information –
montre l’effet que peut avoir une mauvaise formulation de l’indication de l’absence
de reclassement dans un avis d’inaptitude. D’où l’intérêt pour le médecin du
travail de cocher l’une des deux cases indiquant l’impossibilité de
reclassement dans le modèle d’avis d’inaptitude figurant dans l’annexe 3 de l’arrêté du 16 octobre 2017.
Faits
et procédure – Un salarié a
été embauché en avril 2011 par l’Établissement public de sécurité ferroviaire
en tant qu’administrateur de la base de données incidents.
Il est en arrêt pour une maladie professionnelle à compter du 5 janvier
2015. Le 23 août 2017, le médecin du travail rédige un avis d’inaptitude en ces
termes « Inapte. Étude de poste, étude des conditions de travail et
échanges entre le médecin du travail et l’employeur réalisés le 16 août 2017. Tout maintien du
salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à
sa santé. ».
Le salarié est licencié par l’employeur pour inaptitude et impossibilité
de reclassement le 18 septembre 2017.
Le salarié saisit le conseil de prud’hommes pour diverses demandes
relatives à la rupture de son contrat de travail. Le licenciement sera
considéré sans cause réelle et sérieuse par la cour d’appel.
L’employeur se pourvoit en cassation.
Moyen
de l’employeur
L’employeur fait grief à l’arrêt de la cour d’appel de l’avoir condamné à
payer au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse. En effet, au terme de l’article L. 1226-2-1 [NDR – Il est
étonnant que l’employeur fasse référence à cet article relatif à l’inaptitude
d’origine professionnelle alors qu’il est indiqué que l’inaptitude fait suite à
une maladie professionnelle qui ressortirait plutôt de l’article L. 1226-12],
l’employeur peut rompre le contrat d’un salarié déclaré inapte sans recherche
et proposition de reclassement si l’avis d’inaptitude mentionne que tout
maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.
Ce texte concerne l’impossibilité de maintien dans un emploi au sein de
l’entreprise et non pas un emploi quel qu’il soit, même en dehors de
l’entreprise. Or l’avis du médecin du travail indiquait que « tout
maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement
préjudiciable à sa santé' ». Aussi, la cour d’appel, en jugeant que le
licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse a violé l’article L.
1226-2-1 du Code du travail.
Réponse
de la Cour de cassation
« Il résulte de l'article L. 1226-2-1 du code du travail dans sa
rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 que l'employeur ne peut
rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de
proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé
dans ces conditions, soit
de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du
salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état
de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi [NDR – La formulation exacte de ce qui figure sur la fiche d’inaptitude
de l’arrêté de 2017].
Il s'ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément
dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement
préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout
reclassement dans un emploi, l'employeur n'est pas tenu de rechercher un
reclassement.
L'arrêt constate que l'avis d'inaptitude du médecin du travail mentionne
que tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait
gravement préjudiciable à sa santé et non pas que tout maintien dans un emploi
serait gravement préjudiciable à santé.
La
cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur n'était pas dispensé de
procéder à des recherches de reclassement et de consulter les délégués du
personnel et qu'il avait ainsi manqué à son obligation de reclassement. »
Le pourvoi de l’employeur est rejeté.
https://www.courdecassation.fr/decision/65015d51ee1a2205e658164e
·
Campagne contre
les accidents graves et mortels (Ministère du travail)
Le 4e
Plan santé au travail 2021-2025, publié en décembre 2021, prévoyait des actions
contre les accidents graves et mortels, un axe transversal était consacré à « La
lutte contre les accidents graves et mortels ». (Ce plan Santé au
travail a été commenté dans la lettre d’information du 16 janvier 2022, voir
sur le blog.)
En 2022, un
Plan 2022-2025 pour la prévention des accidents graves et mortels
a été publié. Ce plan mettait en avant la prévention primaire pour les sujets
les plus exposés à ces accidents graves et mortels, les sujets jeunes et les
nouveaux embauchés, les travailleurs précaires et les travailleurs détachés et
les petites entreprises les plus démunies vis-à-vis de ce risque. (Voir le
livre de Mathieu Lépine, « L’hécatombe invisible – Enquête sur les morts
au travail » dont j’ai parlé dans la lettre du 26 mars 2023, sur le blog).
En septembre
2023, le Ministère du travail lance une campagne consacrée au thème de la
prévention des accidents graves et mortels dont la présentation figure
ci-dessous.
« Stop aux
accidents du travail graves et mortels : une campagne pour la sécurité au
travail
Chaque jour,
deux personnes meurent au travail et plus de cent sont blessées gravement.
Même si le risque zéro n’existe pas, les accidents graves et mortels au travail
sont inacceptables. Derrière les chiffres encore trop élevés, ce sont des
milliers de personnes, victimes et proches, qui voient leur vie bouleversée.
Afin de
sensibiliser les entreprises, les salariés et le grand public, le gouvernement
engage, en septembre 2023, une grande campagne de communication avec,
pour mot d’ordre Sécurité au travail : responsabilité de
l’entreprise, vigilance de tous. Elle réaffirme l’existence de mesures légales,
de prévention et de protection, pour prévenir les accidents du travail et
la nécessité de les mettre en œuvre.
Outre le film
publicitaire de 30 secondes, le communiqué de presse et
le dossier de presse, la campagne se décline également autour de
spots radio, de chroniques radio, d’un flyer, d’affiches adaptées à des
secteurs particulièrement accidentogènes, et de contenus pour les réseaux
sociaux.
Vous pouvez
accéder au kit de communication sur le site du ministère du travail,
du plein emploi et de l’insertion à partir du lien ci-dessous :
https://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/stop-aux-accidents-du-travail-graves-et-mortels »
Cette campagne
rappelle la responsabilité des employeurs et leur obligation de mettre en œuvre
les dispositions de l’article L. 4121-1 du Code du travail en réalisant
ü des actions de
prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;
ü des actions
d'information et de formation ;
ü la mise en place d'une
organisation et de moyens adaptés.
Vous pourrez
consulter le site
du ministère du travail consacré aux accidents du travail
qui liste les principaux risques professionnels à l’origine d’accidents graves
et mortels :
ü le
risque routier,
ü le
risque de chute de hauteur,
ü la
manutention manuelle de charges,
ü le
risque lié à l’utilisation des machines,
ü le
risque électrique,
ü le
risque lié au travail à la chaleur.
· Qualité de vie
au travail du personnel hospitalier de nuit (Étude)
Ce document a
été publié dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) n° 18 du 19
septembre 2023 sous le titre « Qualité de vie au travail du personnel
hospitalier de nuit : des enjeux spécifiques pour les infirmiers et
sages-femmes, enquête AP-HP ALADDIN, 15 juin-15 septembre 2020 ». L’article
est signé par Martin Durincinsky et al.
Vous pourrez
accéder à l’article en pièce jointe et sur le site du BEH à l’adresse en fin de
commentaire.
Introduction
La prévalence du
travail de nuit a fortement augmenté ces dernières décennies, avec un
doublement du nombre de travailleurs de nuit réguliers entre 1990 et 2013. Le
secteur de la santé est particulièrement concerné par le travail de nuit.
Le travail de
nuit est susceptible d’entraîner des répercussions sur la santé des salariés
(troubles du sommeil, anxiété, augmentation du risque de maladies
cardio-vasculaires, de troubles métaboliques et de certains cancers tels que
les cancers du sein [NDR – Dont certains commencent à être reconnus en tant que
maladie d’origine professionnelle], cancer de la prostate et cancer
colo-rectal. De plus, le travail de nuit peut retentir sur la vie sociale et
familiale des salariés.
L’Accord
national interprofessionnel sur la santé au travail du 9 décembre 2020 a acté
la notion de qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) qui va au-delà
des conditions de travail et de leurs contraintes [NDR – Selon l’accord, « La
notion de QVT présente de multiples dimensions : les conditions de travail,
l’environnement et les relations de travail, la conciliation des temps de vie
privée et professionnelle, les conditions d’accès à la mobilité, la
reconnaissance du travail, le climat social, l’égalité professionnelle,
etc. ».]
Matériel et
méthodes
Une enquête a
été menée dans les 39 établissements de l’Assistance publique des Hôpitaux de
Paris (AP-HP). Cette enquête Aladdin a été réalisée entre le 15 juin et le 15
septembre 2022 auprès des travailleurs exerçant uniquement la nuit ou ayant une
activité alternant entre travail de jour et travail de nuit. L’enquête se
faisait par un questionnaire en ligne permettant d’évaluer leur QVCT à partir
de l’échelle WRQoL en 24 questions. Les 23
premières questions permettent d’explorer les dimensions suivantes de la QVCT,
le bien-être général, l’équilibre entre vie privée et vie personnelle, la
satisfaction au travail et vis-à-vis de la carrière professionnelle, le
contrôle du travailleur sur son activité, les conditions de travail, le stress
au travail et la 24e question évalue la satisfaction de la personne
par rapport à la qualité générale de sa vie professionnelle. La cotation des
réponses se faisait sur 5 modalités, « pas du tout d’accord »,
« pas d’accord », neutre, « d’accord » et « fortement
ou tout à fait d’accord » (je n’ai repris que les taux d’accords et de désaccords).
Les données
suivantes ont été collectées : le sexe, l’âge, la catégorie
professionnelle (infirmiers, aides-soignants et techniciens, sages-femmes,
cadres et autres catégories de personnel), le type de poste, le type de service
dans lequel travaille la personne, son ancienneté en termes d’activité de nuit
en années, la durée de travail quotidienne et si la personne travaille à temps
plein ou à temps partiel.
Sur les
12 000 travailleurs de nuit de
l’AP-HP, 1 387 ont complété le formulaire WRQoL et constituent la
population de l’étude.
Résultats
Caractéristiques
de la population de l’étude
L’échantillon de
l’étude est à 77.5% féminin. L’âge moyen est de 39 ans. Du point de vue de la
catégorie professionnelle, il est constitué à 52.3% d’infirmiers, 38.2%
d’aides-soignants ou de techniciens, 4.2% de sages-femmes, 0.8% de cadres et
4.6% appartiennent à d’autres catégories professionnelles.
Une majorité de
75.8% des répondants occupent un poste fixe de nuit, 61.2% travaillent dans un
service de soins pour adultes, 15.1% en pédiatrie, une majorité de 96.1% des
agents ont un temps de travail quotidien de 10 à 12 heures et 5.2% ont un
emploi à temps partiel.
Réponses aux
items du questionnaire
Pour certains
des différent items des dimensions du questionnaire, j’indique, d’une part les
réponses « d’accord » et « fortement ou tout à fait
d’accord » et, d’autre part, « pas du tout d’accord » et
« pas d’accord ». Le delta entre les d’accord et pas d’accord par
rapport au total des 100% étant constitué par les réponses neutres.
Bien être
général
« Je me
sens bien en ce moment », 35.2% et 8.9% et 6.5% 22.3%.
« Ces
derniers temps, je me suis senti malheureux(se), déprimé(e) », 31.9% et
9.1% et 12.6% et 22%.
« Je suis satisfait(e)
de ma vie », 44.5% et 10.9% et 2.9% et 11.4%.
« En règle
générale, les choses se passent bien pour moi au travail », 67% et 6.6% et
1.4% et 16.2%.
« Ces
derniers temps, tout bien considéré, je me sens heureux(se) au travail »,
37.1% et 5.2% et 3.7% et 16.2%.
Satisfaction au
travail et vis-à-vis de la carrière professionnelle
« J’ai un
ensemble d’objectifs clairs à atteindre pour pouvoir faire mon travail »,
52.1% et 13.4% et 2.5% et 5.4%.
« J’ai
l’opportunité d’utiliser mes compétences au travail », 63.5% et 22.5% et
2% et 2.8%.
« Quand
j’ai fait un bon travail, il est reconnu par mon supérieur hiérarchique »,
15.2% et 2.1% et 24.5% et 29.4% (soit un faible taux de reconnaissance du
travail bien fait).
« Au
travail, on m’encourage à développer de nouvelles compétences », 26.6% et
4% et 14.3% et 26.3%.
« Je suis
satisfait(e) des opportunités de carrière disponibles pour moi », 23% et
2.6% et 14.6% et 23.8%.
« Je suis
satisfait(e) du niveau de formation que j’ai reçu pour réaliser mon travail
actuel », 44.% et 6.1% et 8.9% et 21.1%.
Conditions de
travail
« Mon
employeur me fournit ce dont j’ai besoin pour faire mon travail efficacement »,
27.5% et 1.9% et 12.2% et 32.2%.
« Je
travaille dans un environnement sécurisé, sûr », 31.1% et 2.4% et 10.9% et
31%.
« Les
conditions de travail sont satisfaisantes », 24.2% et 1.4% et 13.2% et
35.3%.
Équilibre entre
vie professionnelle et vie personnelle
« Mon
employeur me fournit une infrastructure adaptée et une flexibilité adéquate
pour que mon travail s’accorde avec ma vie de famille », 28.1% et 3.9% et
11.3% et 21.2%.
« Mes
horaires de travail actuels sont adaptés à ma situation personnelle »,
50.5% et 15.4% (une majorité des travailleurs de nuit ayant répondu) et 4.7% et
10.6%.
Contrôle au
travail
« Je me
sens capable d’exprimer mes opinions et d’avoir une influence sur les
changements dans mon domaine professionnel », 41% et 8.1% (soit près de
50% des répondants d’accord, ce qui est un bon résultat pour un aspect
important du contrôle au travail), 7.9% et 19.2%.
« Je suis
impliqué(e) dans les décisions qui me touchent dans mon domaine de travail »,
34.3% et 6.2% et 12.4% et 20.3%.
« Je me
sens capable d’exprimer mes opinions et d’avoir une influence sur les
changements dans mon domaine professionnel », 38.2% et 5.6% et 9.8% et
23.1%.
Stress au
travail
« Je me
sens souvent sous pression au travail », 34.1% et 10% et 4.6% et 23.2%.
« Je
ressens souvent un niveau excessif de stress au travail », 31.3% et 6.8%
et 6.7% et 25.9%.
Comparaisons
entre catégories professionnelles
Pour la
comparaison entre les différentes catégories de personnel, sont pris en compte
globalement les taux de réponses d’accord (d’accord et fortement d’accord) et
de pas d’accord (pas d’accord et pas du tout d’accord).
Les infirmiers
(dont on a écrit qu’ils étaient les plus nombreux, 725, soit 52.3%) sont les
moins nombreux (34.7%) à être tout à fait d’accord ou d’accord avec le fait de
se dire satisfaits de la qualité générale de leur vie professionnelle, suivis
par les cadres (37.2%) et par les aides-soignants et techniciens (42.1%) (2e
population de l’échantillon au nombre de 530, soit 38.2%). Les plus nombreux à
être satisfait sont les autres catégories de personnel (50.5%).
Ces infirmiers
sont aussi les plus nombreux (43.2%) à se déclarer malheureux ou déprimés ces
derniers temps, suivis par les aides-soignants et les techniciens (39.3%).
Les infirmiers
sont, après les autres catégories de personnel (77.3%), les plus nombreux
(75.3%) à indiquer que les choses se passent bien pour eux au travail.
En revanche,
relativement à l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, qui est le
moins présent chez les sages-femmes (13.1%), les infirmiers sont les suivants,
avec seulement 27.5% de sujets d’accord, puis on retrouve 39.8% de sujets
d’accord parmi les aides-soignants et les techniciens, les plus satisfaits
étant les cadres (39.9%).
Les infirmiers
reconnaissant majoritairement (88.6%) pouvoir mettre en œuvre leurs compétences
dans leur travail, comme les sages-femmes (88.6%) et les cadres (88.9%) mais un
peu moins les aides-soignants et les techniciens (82.9%) et surtout les autres
catégories de personnel (78%).
En revanche, avec
les sages-femmes (10.3%), les infirmiers (14%) sont les moins nombreux à
indiquer que leur hiérarchie le reconnaît lorsqu’ils font du bon travail, ce
qui est un peu plus reconnu pour les aides-soignants (21.7%) et, surtout, les
cadres (30.3%) mais juste à un peu moins d’un tiers !
A l’exception
des autres catégories de personnel (21.5%), les infirmiers sont les moins
nombreux à être d’accord ou tout à fait d’accord avec le fait de disposer
d’opportunités de carrière. Les aides-soignants et les techniciens sont un peu
plus nombreux (26.3%), les cadres étant les plus nombreux (27.1%).
En termes de
contrôle au travail, les infirmiers sont 46.5% à indiquer qu’ils sont d’accord
ou tout à fait d’accord avec la capacité d’exprimer leur opinion et d’avoir une
influence sur les changements dans leur domaine professionnel. Seules les
autres catégories de personnel sont moins nombreuses (43.8%) et les aides-soignants
et les cadres les plus nombreux avec respectivement 52.5% et 61.8% de sujets
d’accord.
Relativement à
l’implication dans les décisions qui les touchent dans leur domaine de travail,
les infirmiers (39.4%) et les autres catégories de personnel (34.5%) sont les
moins nombreux à être impliqués, les sages-femmes (57.2%) étant les plus
nombreuses. Étonnamment, les cadres ne sont que 40.5% à être impliqués dans les
domaines qui touchent leur travail.
Concernant
l’implication dans les décisions qui touchent les patients, les infirmiers sont
nettement moins nombreux (41.8%) que les sages-femmes (75.2%) à être impliqués,
les aides-soignants et les techniciens ne l’étant guère plus (43.8%).
En termes de
conditions de travail, 27.3% des infirmiers déclarent que l’employeur leur
fournit ce dont ils ont besoin pour faire leur travail efficacement, ce qui est
encore moins pour les sages-femmes (15.9%) mais plus pour les aides-soignants
(33%) et les cadres (29.8%).
Environ un tiers
des infirmiers (33.2%) et 27.7% des autres catégories de personnel considèrent
qu’ils travaillent dans un environnement sécurisé, sûr. C’est un peu plus le
cas pour les autres professions, 34.2% pour les aides-soignants et les
techniciens, 38.1% pour les sages-femmes et 35% pour les cadres.
Un taux de 24.6%
des infirmiers considèrent que leurs conditions de travail sont satisfaisantes,
soit nettement plus que les sages-femmes (6.8%) mais moins que les autres
catégories de personnel (27.7%), les aides-soignants (28.7%) et les cadres
(30.9%).
Les infirmiers
sont 46.9% à se sentir souvent sous pression au travail, soit plus que les
aides-soignants (37.3%) mais nettement moins que les sages-femmes (73%) et les
cadres (61.4%).
De même, les
infirmiers (38.7%) sont parmi les moins nombreux à ressentir un niveau excessif
de stress au travail avec les aides-soignants et les techniciens (36.4%) et les
autres catégories de personnel (31.4%) alors que cela est ressenti de façon
plus importante chez les sages-femmes (50.2%) et les cadres (46.7%).
Conclusion
« En
conclusion, basés sur une enquête représentative, les résultats de cette étude
mettent en avant plusieurs leviers potentiels d’action pour améliorer la QVCT
des THN au sein de l’AP-HP, tout en tenant compte des différences entre catégories
professionnelles.
Au-delà de la
satisfaction des demandes de moyens, une meilleure valorisation et une
reconnaissance du travail effectué, l’accès a la formation tout au long
de la carrière, l’amélioration des possibilités d’évolution
professionnelle et la mise en place d’une organisation du travail
permettant un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle
sont autant de pistes d’amélioration de la QVCT des THN, pouvant être
prises en compte dans la gestion des ressources humaines a l’hôpital. Les résultats
d’Aladdin pourront servir de référence pour orienter et renforcer les
dynamiques
d’amélioration de
la QVCT déjà engagées dans plusieurs établissements de l’AP-HP. »
https://www.santepubliquefrance.fr/docs/bulletin-epidemiologique-hebdomadaire-19-septembre-2023-n-18
· Tendance au
rajeunissement des victimes du cancer (Étude)
Vous
pourrez consulter cet article sur le site du journal, à l’adresse en fin de
commentaire, et en pièce jointe (seulement sur le blog car le fichier est trop
important pour que la lettre puisse passer pour de nombreux destinataires).
Introduction
Le
cancer est une cause significative de morbidité et de mortalité représentant une
lourde charge en termes de maladies. Ainsi, dans le monde, le cancer du sein
touche, en 2020, 2.3 millions de femmes et représente 11.7% des cancers, suivi
par le cancer du poumon (11.4% des cancers, le cancer colorectal (10%). Le
cancer du poumon entraîne le plus de décès (1.8 million, soit 18%), suivi par
le cancer colorectal (9.4%) et du foie (8.3%).
En
général, le cancer survient plus fréquemment chez les sujets de plus de 50 ans
mais, dans le monde entier, l’incidence des cancers précoces, chez des sujets
de moins de 50 ans a augmenté. Ce qui a des conséquences en termes de fardeau
pour de plus nombreuses années.
Matériel
et méthodes
Les
données présentées dans cette étude ont été obtenues à partir d’une base de
données GBD 2019 (Global Burden of Disease Study). Cette base de données
concerne 150 pays.
Les
tendances ont été estimées en termes de taux d’incidence et de décès pour 29
cancers (nous ne nous intéresserons qu’à certains). Les taux d’incidence et de
décès fournis sont standardisés sur l’âge pour 100 000 personnes.
Résultats
En
2019, le nombre incident de cancers précoces était de 3.26 millions, en hausse
de 79.1% par rapport aux 1.82 million de 1990.
Incidence
et décès des cancers précoces en 1990 et 2019
Parmi
les cancers précoces les plus fréquents, en termes d’incidence, on retrouvait
en 1990 les cancers digestifs incluant le cancer du côlon et du rectum, de
l’œsophage, de la vésicule biliaire, du foie, du pancréas et de l’estomac (22.35%),
les cancers de la peau (15.21%), les cancers du système reproducteur comprenant
le cancer du col de l’utérus et de l’utérus, de l’ovaire, du testicule (14.56%),
le cancer du sein (14.32%) et les cancers hématologiques (10.64%). Le taux
d’incidence des cancers précoces les plus fréquents en 2019 est devenu 18.83
pour les cancers digestifs, 17.16% pour les cancers cutanés, 16.50% pour le
cancer du sein, 14.50% pour les cancers de l’appareil reproducteur et 8.93%
pour les cancers hématologiques comprenant le lymphome de Hodgkin, les
leucémies, le myélome multiple et les lymphomes non hodgkiniens.
En
termes de décès, on est passé de 0.83 million à 1.06 million avec (entre
parenthèses, les taux de décès de 1990 et 2019) les cancers digestifs (35.59%
et 32.03%), les cancers de l’appareil respiratoire comprenant les cancers du
larynx, du pharynx et bronchopulmonaire (15.47% et 14.74%), les cancers
hématologiques (13.21% et 11.79%) et le cancer du sein (10.52% et 12.84% -
représentant la 4e cause de décès en 1990 et la 3e en
2019).
Taux
d’incidence et de décès pour 100 000 des cancers précoces
Les
taux d’incidence pour 100 000 pour les cancers précoces les plus fréquents
respectivement en 1990 et 2019 sont les suivants :
ü cancer
du sein, 19.4 et 27.5,
ü cancers
cutanés hors mélanomes, 9.4 et 13.7,
ü cancer
du col de l’utérus, 13 et 13.2.
Les
taux de décès pour 100 000 pour les cancers précoces respectivement en
1990 et 2019 sont :
ü cancer
du sein, 6.5 et 7,
ü cancer
du col de l’utérus, 4.3 et 3.9,
ü cancer
de l’estomac, 3.1 et moins de 2.
Taux
d’années de vie perdues pour 100 000 par incapacité ou mortalité (DALY)
On
retrouve les taux les plus élevés d’années de vie perdues pour 100 000
respectivement en 1990 et en 2019 pour :
ü le
cancer du sein, 321 et 348.1,
ü le
cancer du col de l’utérus, 217.8 et 195.4.
https://bmjoncology.bmj.com/content/2/1/e000049
· Baromètre 2023 santé des salariés et qualité de vie au
travail (MalakoffHumanis)
Personnellement,
je pense que les membres du gouvernement et de la Sécurité sociale devraient
plutôt réfléchir aux résultats de tels baromètres plutôt que d’essayer de
répondre à l’augmentation des arrêts maladie et des indemnités journalières en
s’en prenant aux salariés et aux médecins qui les soignent. Il y aurait aussi à
interroger la responsabilité des entreprises dans cette augmentation des arrêts
maladie, en particulier en termes d’organisation du travail, lorsque l’on
constate à quel point l’intensité et le temps de travail peuvent impacter la
santé des salariés.
Matériel et
méthodes
Ce 14e
Baromètre « Santé des salariés et qualité de vie au travail » a été
réalisé pour MalakoffHumanis par Ipsos. Du 17 mars au 5 avril 2023, 3 500
salariés exerçant une activité professionnelle dans une entreprise privée ou
dans le public avec un contrat de droit privé ont été interrogés.
Résultats
Une majorité des
salariés se déclarent en bonne santé mais…
Les salariés
sont 65% à se dire en bonne santé, ce qui est en baisse régulière depuis les
71% de 2011.
Plus de deux
tiers des salariés sont ou ont été concernés par un trouble de santé au cours
des 12 derniers mois. Parmi ces troubles, les salariés se plaignent pour :
ü 46%
de troubles du sommeil,
ü 40%
de fatigue chronique,
ü 32%
de troubles anxieux (anxiété généralisée, phobie),
ü 28%
de troubles de l’humeur (dépression),
ü 24%
d’un épuisement professionnel (burn out),
ü 21%
de troubles liés à un traumatisme ou au stress (accident ou agression ayant
causé du tort sur le plan physique, émotionnel, mental),
ü 14%
un autre trouble psychique.
Il faut
souligner que la majorité des salariés concernés par un trouble de santé n’est
pas suivie par un professionnel de santé. Seuls 16% sont suivis par un
psychologue et 14% par un psychiatre.
Les causes des
atteintes à la santé mentale
Les causes des
atteintes psychiques sont à peu près également liées à la vie professionnelle
(32%) et à la vie personnelle (30%).
Parmi les causes
professionnelles, l’intensité et les temps de travail occupent la part la plus
importante (62%), suivis par des rapports sociaux au travail dégradés (40%) et
des conflits de valeur (34%).
Un salarié sur
deux se sent épuisé professionnellement. Ce niveau revient à ce qu’il était
avant la crise de la Covid-19.
Une majorité des
salariés déclarent que des situations professionnelles nerveusement,
émotionnellement et physiquement difficiles participent indirectement à
l’aggravation de leur santé mentale.
Parmi les
raisons personnelles, on retrouve une situation financière compliquée (33%), un
événement familial ou une situation familiale compliqué (37%) et des problèmes
de santé physiques (31%).
Les causes
personnelles d’atteinte à leur santé mentale sont plus marquées chez les sujets
de moins de 30 ans, en particulier une situation financière compliquée et un
isolement social. Au travail, ils ont le sentiment d’être stressés et éprouvés
émotionnellement.
Des conditions
de travail en cause
Près de 80% des
salariés se disent satisfaits de leur travail, ce qui est stable depuis 2011.
Cependant, un salarié sur deux exprime des craintes relatives à une surcharge
de travail et 30% travaillent chez eux en plus des horaires de travail.
En outre, 19%
des salariés déclarent subir des remarques blessantes ou agressives dans leur
entreprise et 16% se disent insultés ou agressés par le public ou les clients.
Les salariés en
mauvaise santé mentale sont seulement 6% à considérer que leur entreprise a mis
en place des actions efficaces. Ils étaient 14% en 2020.
Les attentes des
salariés relatives à la santé mentale
Les services
attendus par les salariés sont les suivants :
ü être
accompagnés lorsqu’ils traversent une situation de fragilité (situation
financière compliquée, séparation, dépression, situation d’isolement social),
63% ;
ü aide
psychologique en cas de coup dur, de difficultés professionnelles ou personnelles,
61% ;
ü aide
à une meilleure gestion du stress (bonnes pratiques, solutions comme la
méditation, le yoga ou la sophrologie), 61% ;
ü bénéficier
d’une information et d’une sensibilisation dédiée à la santé mentale,
50% ;
ü bénéficier
de séances de consultation avec un psychologue, 46% ;
ü bénéficier
d’une offre de « case management » (assistance à la construction et
au suivi d’un projet de soins et de vie pour une personne en difficulté
psychologique), 46%.
Ainsi, 70% des
moins de 30 ans souhaiteraient un accompagnement lorsqu’ils traversent une
situation de fragilité. C’est nettement, moins le cas, 57%, pour les plus de 50
ans.
Et 57% des
salariés souhaiteraient un accompagnement dans leur suivi médical, en hausse de
12% depuis 2020.
Les femmes
encore plus concernées
Un mauvais état
de santé général
En 2023, 38% des
femmes se disent en mauvais état de santé général versus 31% des hommes. Elles
étaient 34% à l’indiquer en 2020.
Cette différence
entre sexes est encore marquée pour la présence de certains symptômes et
troubles, respectivement chez les femmes versus chez les hommes :
ü troubles
du sommeil et insomnie, 51% versus 43% ;
ü fatigue
chronique, 46% versus 36% ;
ü troubles
anxieux, 37% versus 28%.
Elles sont aussi
moins diagnostiquées par un professionnel de santé, 47% des femmes versus 40%
des hommes
Une mauvaise
santé mentale
Les femmes sont
44% à déclarer qu’elles ont une santé mentale moyenne ou mauvaise alors que les
hommes sont 32%.
Elles
incriminent de façon importante, d’un point de vue professionnel, l’intensité
et le temps de travail, à 65% versus 59% pour les hommes (et 62% pour
l’ensemble des personnes interrogées) ainsi que la dégradation des rapports
sociaux au travail dont elles sont 41% à se plaindre versus 38% chez les hommes
(et 40% pour l’ensemble des personnes interrogées).
Du point de vue
personnel, les femmes sont surtout inquiètes de leur situation financière, 39%
des femmes versus 26% des hommes (33% pour l’ensemble des personnes
interrogées).
Les plaintes des
femmes relatives à leur état de santé dépend de leur âge. Les femmes de 50 ans
et plus ont tendance à déclarer un état de santé général moins bon (49%) que
les moins de 35 ans (32%).
En revanche, 46%
des femmes entre 18 et 34 ans se déclarent surtout en moins bonne santé
mentale.
Synthèse de la
Directrice des études, Mme Godon-Rensonnet :
« Cette
14ème édition de notre baromètre révèle que les salariés sont de plus en
plus satisfaits de leur travail et de leur qualité de vie au travail. De
plus, la grande majorité des salariés (65 %) déclare être en bonne ou très
bonne santé. Ce chiffre, toujours élevé, baisse cependant
régulièrement. Derrière cette tendance, se cachent deux
phénomènes principaux : la dégradation de la santé mentale,
particulièrement chez les femmes, et l’augmentation des maladies chroniques
dont on peut faire l’hypothèse qu’elles vont continuer à progresser avec le
vieillissement de la population active. Ces enjeux sont autant de
fragilités qui impactent fortement le travail selon les salariés et qui
pourraient éloigner certains de l’emploi. À titre d’exemple, 22 % des salariés
déclarent souffrir d’une maladie chronique et pour 70 % d’entre eux, cette
maladie a des répercussions sur leur travail. La santé des salariés est plus
qu’un enjeu légal : elle questionne notamment les politiques RSE des
entreprises mais c’est leur performance qui est également en jeu. La santé de
l’entreprise est liée, sans conteste, à la santé de ses salariés. D’ailleurs,
l’Organisation mondiale de la santé (OMS) met ce lien en exergue lorsqu’elle
définit la santé comme : un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser
son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler
avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une
contribution à la communauté ». Protéger la santé des salariés est donc un
enjeu majeur pour les entreprises et nous avons tous un rôle à jouer. »
A bientôt pour
suivre le feuilleton du projet de loi de financement de la Sécurité sociale…
Jacques Darmon
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire