Le
31 mai 2020
Au
sommaire de cette lettre d'information… Des textes de loi… un décret relatif à
"StopCovid"… un décret sur les prestations en espèces pour la
Covid-19… un décret abrogeant l'autorisation d'utilisation de la chloroquine et
de l'hydroxychloroquine dans les établissements de soins… et un arrêté limitant
la délivrance du Plaquenil© à certains prescripteurs… Une
jurisprudence consacrée au caractère forfaitaire du montant du salaire que
l'employeur doit reprendre un mois après l'avis d'inaptitude en l'absence de
reclassement ou de licenciement… Un point sur la polémique après la publication
dans The Lancet d'une étude sur le traitement par chloroquine et
hydroxychloroquine… Un commentaire d'un document de la Dares sur l'activité durant
le confinement et les salariés les plus exposés à la Covid-19… Une étude sur
les inégalités territoriales en termes d'hospitalisations, de décès et de
surmortalité vis-à-vis de la Covid-19… Et une étude anglaise analysant les
facteurs de risque de décès à l'hôpital du fait de la Covid-19 avec
intégration, dans ces facteurs de risque, d'un indice de précarité lié au lieu
du domicile…
· Textes de
loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires
Décret n° 2020-650
du 29 mai 2020 relatif au traitement de données dénommé «StopCovid»
Après le vote
favorable de l'assemblée nationale et du Sénat, ce décret vient officialiser la
mise en œuvre de l'application "StopCovid". Le décret entre en
vigueur le 31 mai 2020, pour une durée allant jusque 6 mois après la fin de
l'état d'urgence sanitaire.
Il s'agit d'une
application s'installant sur les téléphones mobiles et capable de tracer les
croisements entre individus, données qui sont stockées, de façon anonyme, sur
un serveur central et qui sont utilisées dès lors qu'un utilisateur déclare
qu'il est atteint par la Covid-19.
L'application
"StopCovid" est gratuite et son utilisation fait appel au
volontariat.
Voici les
objectifs de ce dispositif :
" 1°
D'informer les personnes utilisatrices de l'application qu'il existe un risque
qu'elles aient été contaminées par le virus du covid-19 en raison du fait
qu'elles se sont trouvées à proximité d'un autre utilisateur de cette
application ayant été diagnostiqué positif à cette pathologie. Les personnes
exposées à ce risque sont désignées ci-après comme « contacts à risque de
contamination » ;
2° De sensibiliser les personnes utilisatrices de l'application, notamment
celles identifiées comme contacts à risque de contamination, sur les symptômes
de ce virus, les gestes barrières et la conduite à adopter pour lutter contre
sa propagation ;
3° De recommander aux contacts à risque de contamination de s'orienter vers les
acteurs de santé compétents aux fins que ceux-ci les prennent en charge et leur
prescrivent, le cas échéant, un examen de dépistage ;
4° D'adapter, le cas échéant, la définition des paramètres de l'application
permettant d'identifier les contacts à risque de contamination grâce à
l'utilisation de données statistiques anonymes au niveau national.
Concrètement, le
serveur central garde la trace des contacts entre les utilisateurs de
l'application. Si l'un d'entre eux informe du fait qu'il a contracté la
Covid-19 et fourni, s'il le peut, la date du début des symptômes l'objectif est
de transmettre l'information aux personnes avec lesquelles il a été en contact.
Les sujets
contacts reçoivent alors, par l'intermédiaire de leur application,
l'information selon laquelle ils ont été en contact à proximité avec un autre
utilisateur diagnostiqué positif au coronavirus au cours des 15 derniers jours.
Ils peuvent alors
prendre toute mesure pour se faire dépister.
France Info a fait
une enquête, " Application
StopCovid : accouchée dans la douleur et déjà limitée ", sur l'utilité de la mise en œuvre d'une
application telle que "StopCovid" dans d'autres pays et les résultats
sont loin d'être probants. De plus, il semble que l'application ne fonctionne
pas, ou mal, sur les appareils d'Apple qui représentent environ 20% des
téléphones mobiles.
Un Arrêté
du 30 mai 2020 définit les critères de distance et de durée du contact entre les personnes pris en compte pour estimer le
risque de contamination par le virus de la Covid-19 dans le cadre de l'application
"StopCovid" : la distance est de moins d'un mètre et la duré du
contact de 15 minutes.
Décret n° 2020-637
du 27 mai 2020 modifiant le décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020 portant
adoption de conditions adaptées pour le bénéfice des prestations en espèces
pour les personnes exposées au coronavirus
Ce décret entre en
vigueur le 29 mai 2020 et les dispositions concernant les articles 1er, 2, 2 quinquies et 2
septies (voir ci-dessous pour ces deux articles) du décret n° 2020-73
du 31 janvier 2020
peuvent être mises en œuvre jusqu'au terme d'une période de trois mois après la
fin de l'état d'urgence.
Le décret modifie
le décret n° 2020-73 du 31 janvier 2020 avec les dispositions figurant
ci-dessous.
L'article deux
quinquies est modifié en étendant la suppression de la participation des
patients, selon l'article L. 163-13 du Code de la
Sécurité sociale, aux actes suivants :
" - pour
les actes et prestations dispensés aux assurés dans les centres ambulatoires dédiés
au covid-19 ;
- pour l'examen
de détection du génome du SARS-CoV-2 par amplification génique inscrit à la
nomenclature des actes de biologie médicale ;
- pour la
réalisation d'un test sérologique pour la recherche des anticorps dirigés
contre le SARS-CoV-2 inscrit à la nomenclature des actes de biologie
médicale ;
- pour la
consultation initiale d'information du patient et de mise en place d'une
stratégie thérapeutique réalisée à la suite d'un dépistage positif au covid-19
;
- pour la
consultation réalisée par le médecin permettant de recenser et de contacter les
personnes ayant été en contact avec un malade en dehors des personnes vivant à
son domicile. "
Et il rajoute au
décret du 31 janvier 2020 des articles 2 quinquies et 2 septies qui sont repris
ci-dessous.
Article 2 sexies
" En application de
l'article
L. 16-10-1 du code de la sécurité sociale,
une consultation complexe réalisée en présence du patient par le médecin
traitant, ou tout autre médecin impliqué dans la prise en charge du patient en
l'absence de médecin traitant désigné, peut faire l'objet d'un remboursement
par l'assurance maladie, par dérogation aux dispositions conventionnelles prises
en application de l'article L. 162-1-7, pour les assurés vulnérables au sens du
décret du 5 mai 2020 susvisé et les assurés reconnus atteints d'une affectation
de longue durée qui remplissent au moins un des critères suivants :
- ne pas avoir eu
de consultation avec leur médecin traitant ou tout autre médecin impliqué dans
la prise en charge du patient en l'absence de médecin traitant désigné pendant
la période d'interdiction de tout déplacement de personne hors de son domicile
;
- avoir été adressé
par un établissement de santé en sortie d'hospitalisation.
La participation
de l'assuré mentionnée au I de l'article L. 160-13 du même code est supprimée
pour cette consultation dont le tarif ne peut donner lieu à dépassement. "
Article 2 septies.
" En
application du 5° de l'article L.
16-10-1 du code de la sécurité sociale et par dérogation aux dispositions
du I de l'article L. 162-1-7 du même code, le test sérologique pour la
recherche des anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 réalisé dans le cadre d'un
dépistage systématique des personnels en établissement de santé ou en
établissement social ou médico-social peut faire l'objet d'un remboursement par
l'assurance maladie obligatoire quelle que soit l'indication de réalisation
du test. La participation de l'assuré mentionnée au I de l'article L. 160-13 du
même code est supprimée pour les tests pris en charge en application du présent
article. "
Décret n° 2020-630
du 26 mai 2020 modifiant le décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 prescrivant les
mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le
cadre de l'état d'urgence sanitaire
Ce décret abroge l'article 19 du
décret 2020 548
du 11 mai 2020. Cet article 19 autorisait, de façon dérogatoire, l'utilisation
de l'hydroxychloroquine, sous la responsabilité d'un médecin dans les
établissements de santé, pour les traitement des patients atteints par la
Covid-19. Avec la possibilité de poursuite, ensuite, du traitement à domicile.
Arrêté du 26 mai
2020 complétant l'arrêté du 23 mars 2020 prescrivant les mesures
d'organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire
face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire
Cet arrêté modifie
l'arrêté du 23
mars 2020
en y rajoutant, entre autres, l'article 6-2 comprenant les dispositions
suivantes : " La spécialité pharmaceutique PLAQUENIL ©, dans le respect
des indications de son autorisation de mise sur le marché, et les préparations
à base d'hydroxychloroquine ne peuvent être dispensées par les
pharmacies d'officine que dans le cadre d'une prescription initiale émanant
exclusivement de spécialistes en rhumatologie, médecine interne, dermatologie,
néphrologie, neurologie ou pédiatrie ou dans le cadre d'un renouvellement de
prescription émanant de tout médecin. "
· Jurisprudence
Un salarié peut,
s'il n'a pas été reclassé ou licencié un mois après l'avis d'inaptitude,
cumuler la reprise du paiement du salaire par son employeur et une autre
activité
C'est un arrêt de
la Cour de cassation du 4 mars 2020 - Cass. Soc. n° 18-10719 – publié au
Bulletin d'information et dans le bulletin des arrêts de la Cour de cassation,
ce qui lui confère une certaine importance du point de vue jurisprudentiel.
Les faits - Une salariée
embauchée en novembre 2011 dans une association, en tant que coordinatrice du
secteur d'accueil des mineurs, est en arrêt maladie à compter du 7 mars 2013.
Suite à deux consultations du médecin du travail en date des 29 août et 12
septembre 2014, elle est déclarée inapte à son poste.
Elle est licenciée
pour inaptitude le 3 décembre 2014.
En janvier 2015,
elle saisit le conseil de prud'hommes pour demander la nullité de son
licenciement, en invoquant un harcèlement moral, et le paiement de sommes à
titre de dommages-intérêts et d'un rappel de salaire.
Elle se pourvoit
en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel qui l'a déboutée :
ü de la nullité du
licenciement en ne reconnaissant pas le harcèlement moral (premier moyen) ;
ü du paiement de
dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail (deuxième moyen)
;
ü du refus de
reconnaître le licenciement sans cause réelle et sérieuse (troisième moyen) ;
ü et, enfin, de l'avoir obligée à rembourser les
salaires versés du 12 octobre au 3 décembre 2014, soit entre la fin de la
période d'un mois après le licenciement prévue à l'article L. 1226-4 pour une
inaptitude d'origine non professionnelle (ou L. 1226-11 pour une inaptitude
d'origine professionnelle) et la date du licenciement (quatrième moyen).
La Haute
juridiction rejette les trois premiers moyens qu'elle ne considère pas
susceptibles de cassation.
En revanche, elle
n'a pas la même appréciation des textes que la cour d'appel qui avait condamné
la salariée à rembourser des salaires payés entre le 12 octobre et le 3
décembre 2014 car la salariée avait retrouvé un emploi le 17 septembre 2014.
" Attendu que, selon
ce texte, l'employeur est tenu de verser au salarié victime d'une maladie ou
d'un accident non professionnel, qui n'est pas reclassé dans l'entreprise à
l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen de reprise du
travail ou qui n'est pas licencié, le salaire correspondant à l'emploi qu'il
occupait avant la suspension de son contrat de travail ;
Attendu que
pour condamner la salariée à rembourser à l'association les salaires versés par
cette dernière entre le 12 octobre 2014, soit un mois après sa déclaration
d'inaptitude, et le 3 décembre 2014, date de son licenciement, la cour
d'appel a retenu que depuis le 17 septembre 2014, la salariée avait retrouvé un
nouvel emploi à temps plein ;
Qu'en statuant
ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat n'avait
été rompu que par le licenciement intervenu le 3 décembre 2014, de sorte
que l'employeur était tenu de verser à la salariée, pour la période du 12
octobre au 3 décembre 2014, le salaire correspondant à l'emploi qu'elle
occupait avant la suspension du contrat de travail, la cour d'appel a violé le
texte susvisé ".
L'arrêt de la cour
d'appel est cassé sur ce point et l'affaire renvoyée devant une autre cour
d'appel.
Dans un arrêt
inédit du 18 décembre 2013 - Cass. Soc. pourvoi
n° 12.16460
-, la chambre sociale de la Cour de cassation avait déjà abordé la reprise du paiement
du salaire un mois après l'avis d'inaptitude.
Elle avait considéré
que, durant la période de reprise du paiement du salaire, l'employeur ne
pouvait déduire, du montant forfaitaire qu'il devait verser au titre de
l'article L. 1226-11 du Code du travail, des indemnités journalières ou de
prévoyance perçues par le salarié.
· Polémique suite à l'étude publiée dans The Lancet
Vous avez pu lire,
ci-dessus, le décret faisant suite à la publication dans The Lancet, le 22 mai
2020, d'une étude que vous pourrez lire en pièce jointe et sur le site de la
revue à l'adresse suivante (https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)31180-6) mettant en
évidence un nombre important de décès suite à l'utilisation de chloroquine ou d'hydroxychloroquine.
Cette étude - qualifiée de "foireuse" par le Pr Raoult auquel
l'évolution des événements pourrait tout à fait donner raison - reposait sur
des données en provenance de 671 hôpitaux sur 6 continents et a pris en compte
plus de 95 000 dossiers de patients avec traitement par chloroquine ou
hydroxychloroquine seule ou avec rajout d'un antibiotique de la famille des
macrolides comparé à l'absence de traitement spécifique.
Pour les auteurs,
la conclusion était que les traitements par chloroquine ou hydroxychloroquine
ne faisaient pas la preuve d'un bénéfice pour les patients et étaient associés à
une augmentation du risque d'arythmie ventriculaire et de décès. Ces
traitements ne devraient donc pas être utilisés en dehors des essais cliniques
et une confirmation par des essais randomisés est nécessaire.
Il est à noter que
cette étude est une étude observationnelle rétrospective et ne présente donc
pas le niveau de preuve qu'aurait pu avoir une étude randomisée en double
aveugle, l'une des critiques les plus fréquentes apportées aux études publiées
par l'Institut hospitalo-universitaire Méditerranée de Marseille.
La publication de
cette étude a entraîné des suites très rapidement.
Le Haut Conseil de
la santé publique français a publié le 26 mai 2020 un avis recommandant : "
De ne pas utiliser l’hydroxychloroquine (seule ou associée à un macrolide) dans
le traitement du Covid-19.
D’évaluer le
bénéfice/risque de l’utilisation de l’hydroxychloroquine dans les essais
thérapeutiques.
De renforcer la
régulation nationale et internationale des différents essais évaluant l’hydroxychloroquine
dans le Covid-19. "
L'Agence nationale
de sécurité du médicament et des produits de santé - que l'on a connue beaucoup
moins prompte à réagir dans certains dossiers - va même plus loin, en
préconisant, par précaution, une suspension des essais cliniques utilisant
l'hydroxychloroquine.
Dans les essais
cliniques Discovery (au niveau européen mais surtout français) menés par
l'Inserm et international Solidarity mené par l'OMS, les nouvelles inclusions
avec traitement par hydroxychloroquine, sont stoppées.
L'étude du Lancet
est, cependant, fortement critiquée. En particulier, plus d'une centaine de
médecins et scientifiques, de 26 pays du monde, pas forcément favorables au
traitement par l'hydroxychloroquine, ont écrit une lettre critiquant l'étude
dont vous pourrez lire la traduction ci-dessous. Cette critique porte tant sur
la qualité des données étudiées et celle de l'étude que sur l'absence de
transparence des auteurs qui refusent, alors que cela est usuel lors de la
publication d'une étude, de fournir les données de base à leurs collègues et le
mystère qui entoure la société qui a recueilli et traité les données. Sans
parler de conflits d'intérêts des auteurs de l'étude.
Voici la
traduction du texte de la lettre ci-dessous. J'ai trouvé cette traduction sur
le site de l'Union populaire républicaine, mouvement avec lequel je n'ai rien à
voir. J'ai comparé la traduction à la version anglaise que vous trouverez en
pièce jointe et elle apparaît tout à fait correcte.
" PRÉOCCUPATIONS
CONCERNANT L’ANALYSE STATISTIQUE ET L’INTÉGRITÉ DES DONNÉES
L’étude
rétrospective et observationnelle de 96 032 patients COVID-19 hospitalisés de
six continents a signalé une augmentation substantielle de la mortalité (~ 30%
de décès en excès) et la survenue d’arythmies cardiaques associées à
l’utilisation des médicaments à base de 4-aminoquinoléine, l’hydroxychloroquine
et la chloroquine. Ces résultats ont eu un impact considérable sur la pratique
et la recherche en santé publique.
L’OMS a suspendu
le teste de l’hydroxychloroquine dans son essai SOLIDARITY. L’organisme de
réglementation britannique, MHRA, a demandé la suspension temporaire du
recrutement dans tous les essais d’hydroxychloroquine au Royaume-Uni
(traitement et prévention), et la France a modifié sa recommandation nationale
pour l’utilisation de l’hydroxychloroquine dans le traitement au COVID-19 et a
également interrompu les essais.
Les titres des
médias qui ont suivi ont suscité une inquiétude considérable chez les participants
et les patients inscrits à des essais contrôlés randomisés (ECR) cherchant à
caractériser les avantages et les risques potentiels de ces médicaments dans le
traitement et la prévention des infections à COVID-19. Il existe un accord
uniforme selon lequel des ECR bien menés sont nécessaires pour éclairer les
politiques et les pratiques.
Cet impact a
conduit de nombreux chercheurs du monde entier à examiner en détail la
publication en question. Cet examen a soulevé à la fois des problèmes
méthodologiques et d’intégrité des données. Les principales préoccupations sont
les suivantes :
1. Il n’y a pas eu
d’ajustement adéquat pour les facteurs de confusion connus et mesurés (gravité de la
maladie, effets temporels, effets sur le site, dose utilisée).
2. Les auteurs
n’ont pas adhéré aux pratiques standard de la communauté de l’apprentissage
automatique et des statistiques. Ils n’ont pas publié leur code ou
leurs données. Il n’y a pas de partage de données / code et déclaration de
disponibilité dans le document. Le Lancet figurait parmi les nombreux
signataires de la déclaration Wellcome sur le partage des données pour les
études COVID-19.
3. Il n’y a pas eu
d’examen éthique.
4. Aucune mention
n’a été faite des pays ou des hôpitaux qui ont contribué à la source des
données et
aucune reconnaissance de leurs contributions. Une demande d’information aux
auteurs sur les centres contributeurs a été refusée.
5. Les données de
l’Australie ne sont pas compatibles avec les rapports du gouvernement (trop de cas
pour seulement cinq hôpitaux, plus de décès à l’hôpital que dans tout le pays
au cours de la période d’étude). Surgisphere (la société de données) a
depuis déclaré qu’il s’agissait d’une erreur de classification d’un hôpital
d’Asie. Cela indique la nécessité d’une vérification supplémentaire des erreurs
dans toute la base de données.
6. Les données en
provenance d’Afrique indiquent que près de 25% de tous les cas
de COVID-19 et 40% de tous les décès sur le continent sont survenus dans des
hôpitaux associés à Surgisphere qui disposaient d’un enregistrement
électronique sophistiqué des données des patients et d’un suivi des patients
capable de détecter et d’enregistrer des cas «non soutenus [au moins 6
secondes] ou une tachycardie ventriculaire soutenue ou une fibrillation
ventriculaire ». Le nombre de cas et de décès, ainsi que la collecte de
données détaillées, semblent peu probables.
7. Des écarts
inhabituellement faibles ont été signalés dans les variables de base, les
interventions et les résultats entre les continents (tableau
S3).
8. L’étude se
fonde sur des doses quotidiennes moyennes d’hydroxychloroquine supérieures de
100 mg aux recommandations de la Food and Drug Administration, alors que 66%
des données proviennent des hôpitaux nord-américains.
9. Il existe des rapports
invraisemblables entre la chloroquine et l’hydroxychloroquine sur certains
continents.
10. Les
intervalles de confiance très étroits de 95% signalés pour les ratios de risque
sont peu probables. Par exemple, pour les données australiennes, il
faudrait environ le double du nombre de décès enregistrés comme indiqué dans le
document.
Les données des
patients ont été obtenues grâce à des dossiers électroniques des patients et
sont détenues par la société américaine Surgisphere. En réponse à une demande
de données, le professeur Mehra a répondu : «Nos accords de partage de données
avec les différents gouvernements, pays et hôpitaux ne nous permettent
malheureusement pas de partager des données.»
Compte tenu de
l’énorme importance et de l’influence de ces résultats, nous pensons qu’il est
impératif que :
1. La société
Surgisphere fournisse des détails sur la provenance des données. Au minimum,
cela signifie partager les données agrégées des patients au niveau de l’hôpital (pour toutes les
covariables et les résultats).
2. Une validation
indépendante de l’analyse soit effectuée par un groupe constitué par
l’Organisation mondiale de la santé, ou au moins par une autre institution
respectée.
Cela impliquerait des analyses supplémentaires (par exemple pour déterminer
s’il y a un effet de dose) pour évaluer la validité des conclusions.
3. Il y
ait un accès libre à tous les accords de partage de données cités
ci-dessus pour garantir que, dans chaque juridiction, toutes les données
extraites étaient légalement respectueuses de l’éthique et du respect de la vie
privée des patients.
Dans un souci de
transparence, nous demandons également à The Lancet de rendre ouvertement
disponibles les commentaires des pairs qui ont conduit à l’acceptation de ce
manuscrit pour publication.
Cette lettre
ouverte est signée par des cliniciens, des chercheurs médicaux, des
statisticiens et des éthiciens du monde entier. La liste complète des
signataires et affiliations se trouve ci-dessous. "
· Activité et conditions d’emploi de la main-d’œuvre
pendant la crise sanitaire Covid-19 (Dares)
Vous pouvez
accéder à ce document de la Dares en pièce jointe et sur le site du ministère
du travail à l'adresse figurant en fin de commentaire.
Matériel et
méthode
Cette enquête
couvre 15 millions de salariés sur les 25 millions de l'ensemble de la
population des travailleurs.
En particulier le
secteur de l'agriculture, l'administration publique et les organismes de
Sécurité sociale ont été exclus du champ de l'étude. Ont été prises en compte
les entreprises de plus de 10 salariés. L'enquête couvre géographiquement la
France métropolitaine et les DOM (à l'exception de Mayotte).
Les résultats
présentés sont issus de l'enquête réalisée par internet du 1er au 13
avril 2020 avec 14 000 questionnaires exploitables reçus au 14 avril 2020.
Il est à noter que
les résultats sont exprimés en termes de taux de salariés touchés et non pas en
pourcentage d'entreprises dans ce document.
Résultats
Activité des
entreprises au 31 mars 2020
Les données
constituent une réponse à la question concernant l'effet de la crise sanitaire
sur l'activité des entreprises fin mars 2020 par rapport à ce qui était prévu.
Dans l'ensemble
des entreprises, pour 19% des salariés, il y a eu un arrêt de l'activité, pour
30% elle a diminué très fortement (de plus de 50%), pour 31.9% elle a diminué
de moins de 50%, pour 14.9% elle est restée inchangée et pour 4.2% elle a
augmenté.
Ces résultats
varient selon plusieurs critères.
Selon la taille de
l'entreprise
L'arrêt de
l'activité est surreprésenté dans les entreprises de 10 à 19 salariés (38.9%
des salariés touchés), celles de 20 à 49 salariés (23.3%) et celles de 50 à 99
salariés mais il est plus faible dans les entreprises de 500 salariés et plus
(10.6%).
L'activité a
diminué très fortement, au-delà de l'ensemble des entreprises, mais très
faiblement, pour les entreprises de 10 à 49 salariés (30.2%), celles de 100 à
249 salariés (30.5%) et celles de 500 salariés ou plus (31.8%). Une activité en
diminution de moins de 50% est surreprésentée pour les entreprise les plus
importantes, celles de 250 à 499 salariés (34.2%) et celles de 500 salariés ou
plus (39.6%).
L'activité est
restée inchangée de façon plus importante que la moyenne dans les entreprises
de 50 à 99 salariés (19.1%), celles de 100 à 249 salariés et celles de 250 à
499 salariés.
Enfin, les
entreprises qui ont augmenté leur activité au-delà de la moyenne sont celles de
50 à 99 salariés (6.7%), celles de 100 à 249 salariés (5.5%) et celles de 250 à
499 salariés (4.4%).
Selon le secteur
d'activité
Là aussi, il
existe une forte variation de l'activité suite à la crise sanitaire en fonction
du secteur économique.
Les secteurs
d''activité où celle-ci a diminué ou stoppé en touchant plus de 50% des
salariés (entre parenthèses le nombre de salariés touchés) sont l'hébergement
et la restauration (96% dont 75% en arrêt), la fabrication de matériel de
transport (92% dont 29% à en arrêt), la construction (87% dont 53% en arrêt) et
les autres activités de services incluant les arts, les spectacles et les
activités récréatives (90% dont 66% à l'arrêt).
En revanche,
l'activité est restée inchangée ou a augmenté faiblement principalement dans la
fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac
(42% dont 10% d'augmentation) et l'enseignement, la santé humaine et l'action
sociale (35%). L'activité a augmenté dans environ 12% dans le secteur des
commerces et de la réparation automobile et de motocycles.
Causes de la baisse
d'activité
Parmi les causes
ayant entraîné une modification ou un arrêt de l'ensemble des entreprises, nous
trouvons les difficultés suivantes, le pourcentage de salariés touchés figurant
entre parenthèses :
ü la gestion des
questions sanitaires avec des problèmes de fourniture de masques, des
difficultés de distanciation et de mise à disposition de gel hydroalcoolique
(64%) ;
ü des difficultés
financières (34.4%) ;
ü des difficultés
d'approvisionnement de matières premières (28.1%) ;
ü un manque de
débouchés (24.%) ;
ü une fermeture
administrative (24%) ;
ü un manque de
personnel (24%) ;
ü des difficultés
liées à un problème en aval, tel que le transport (15%) ;
ü et d'autres
difficultés (20.8%).
Cependant, ces
difficultés varient de façon notable selon les secteurs.
Gestion des
questions sanitaires
Cette difficulté
de gestion sanitaire touche l'ensemble des secteurs d'activité pour plus de 40%
des salariés, à l'exception des secteurs de l'hébergement et de la restauration
(32.3%) et de l'information et de la communication (38.5% des salariés sont
touchés).
Plus de 80% des
salariés sont touchés par cette problématique dans les secteurs de la
construction (87.5%) et de la cokéfaction et du raffinage (89%).
Difficultés
financières
Sont
particulièrement en butte à ces difficultés les secteurs de l'hébergement et de
la restauration (58.6% des salariés touchés), l'information et la communication
(47.2%) et les activités scientifiques et techniques et les services
administratifs et de soutien (44.5% des salariés touchés).
Difficultés
d'approvisionnement
Les salariés des
secteurs suivants sont impactés au-delà de 60% par ces difficultés
d'approvisionnement : la construction (70% des salariés) et la fabrication
d'équipements électriques, électroniques, informatiques et la fabrication de
machines (71% des salariés).
Fermeture
administrative
Elle concerne
principalement les secteurs de l'hébergement et de la restauration (57% des
salariés) et les autres activités de services (49% des salariés impliqués).
Manque de
débouchés
Le manque de
débouchés atteint de façon très importante, avec 97.9% des salariés touchés, le
secteur de la cokéfaction et du raffinage et, de façon moindre, le secteur de
l'information et de la communication (45.8%).
Manque de
personnel
Le manque de
personnel touche moins de 40% des salariés pour l'ensemble des secteurs. Sont
particulièrement impliqués les secteurs de l'immobilier (31% des salariés
touchés) et la fabrication d'équipements électriques, électroniques,
informatiques et la fabrication de machines (28% des salariés touchés),
Difficultés liées
à l'aval
Les secteurs plus
particulièrement impactés par les difficultés d'approvisionnement en aval avec
plus de 20% des salariés touchés, sont ceux de la fabrication d'équipements
électriques, électroniques, informatiques et la fabrication de machines, la
fabrication d'autres produits industriels et le commerce et la réparation
d'automobiles et de motocycles.
Réduction
d'effectifs en lien avec la crise
Globalement, pour
l'ensemble des entreprises, pour 85.5% des salariés il n'y a pas eu de
réduction d'effectifs, ce qui est encore plus le cas pour les petites
entreprises de 10 à 19 salariés (88.1% des salariés) et celles de 20 à 49
salariés (87.1% des salariés).
Les effectifs n'ont
diminué plus que pour la moyenne de 11.1% des salariés dans les entreprises de
250 à 499 salariés (13.9%).
Enfin, les
effectifs ont augmenté au-delà des 3.4% des salariés pour les entreprises de 50
à 99 salariés (5.2%), de 100 à 249 salariés (4.5%) et de 500 salariés ou plus
(3.7%).
Les ajustement de
la main d'œuvre des entreprises sont surtout passées par une action de report
ou d'annulation des embauches (51%) et le non-renouvellement des CDD (49%). Il
y eu peu de licenciements (2%) ou de ruptures conventionnelles (4%).
Pour leur part,
les entreprises dont l'activité a augmenté ont surtout utilisé les heures
supplémentaires ou complémentaires (70%), les recrutements en CDD (48%), le
recours à l'intérim (36%) ou une augmentation des horaires d'activité (28%).
Recours au chômage
partiel
Les entreprises
ont fortement recouru à la mise au chômage partiel de leurs salariés. Ainsi 59%
des salariés travaillent dans une entreprise qui a eu recours partiellement ou
complètement au chômage partiel.
Le recours au
chômage partiel est particulièrement marqué pour certains secteurs d'activité
(entre parenthèses, le taux de salariés touchés) : le secteur de la fabrication
de matériel de transport (97%), l'hébergement et la restauration (96%) et la
construction (95%). Le recours au chômage partiel a été le plus faible dans le
secteur de l'assurance et de la banque avec 14% des salariés touchés.
Fin mars 2020,
environ un quart des salariés est au chômage partiel, un autre quart en
télétravail et un troisième quart en activité présentielle ou sur un chantier.
Le quatrième quart est principalement constitué par les salariés en arrêt
maladie et en congés.
A noter qu'avant
la crise, une majorité des salariés (75.8%) exerçaient dans une entreprise dont
moins de 2% des effectifs bénéficiaient du télétravail de façon régulière ou
occasionnelle.
La part des
salariés au chômage partiel est particulièrement élevée dans les secteurs de
l'hébergement et de la restauration (67%), de la construction (49%), de la
fabrication de matériels de transport (48%) et les autres activités de services
(41%).
En revanche, le
taux de salariés en chômage partiel est nettement plus faible dans les secteurs
de l'assurance et de la banque (4%) de l'industrie agro-alimentaire (9%) et les
secteurs de l'énergie, de l'eau et de la gestion des déchets (10%).
Mesures de
prévention mises en œuvre sur les sites ou les chantiers (en % de salariés)
Les entreprises
employant 33% des salariés n'ont mis en œuvre aucune mesure de prévention,
celles employant 37.1% des salariés ont mis en œuvre des mesures de prévention
couvrant 80% ou plus de leur salariés, celles employant 6.5% des salariés ont
mis en œuvre des mesures de prévention pour 50% à 79% de leurs salariés, celles
employant 9.9% des salariés ont mis en œuvre de la prévention pour 10 à 49% de leurs
salariés et les entreprises employant 13.5% des salariés ont mis en œuvre de la
prévention pour moins de 10% de leurs salariés.
Les entreprises
ayant mis en œuvre des mesures de prévention pour 80% de leurs salariés ou plus
ont utilisé principalement les mesures de distanciation vis-à-vis des collègues
et/ou des clients (68.9%), la mise à disposition de gel hydroalcoolique (68.9%)
et, de façon moins importante, la mise à disposition de masques (28.7%) et de
gants (37.1%) ainsi qu'une aide au transport individuel (5.2%).
Les raisons pour
lesquelles les entreprises n'ont pas mis en œuvre de mesures de prévention sur
site ou sur les chantiers sont que :
ü cela n'était pas
nécessaire compte tenu de l'organisation de l'activité (touchant 43% des
salariés) ;
ü elles ne
disposaient pas des équipements nécessaires (42.7% des salariés) ;
ü cela n'était pas
possible compte tenu de l'organisation du travail (22.8% des salariés) ;
ü autres raisons
(18.2%).
Estimation du
risque d'exposition professionnelle à la Covid-19
Selon son
exposition au risque de la Covid-19, la population salariée peut être répartie
en 4 catégories :
ü les
télétravailleurs qui ne sont pas exposés du fait de leur activité
professionnelle à domicile. Selon l'enquête Sumer 2017, on peut les estimer à
environ 30% des salariés, soit 7 millions ;
ü les salariés en
activité sur site ou sur chantier avec des contacts, pour lesquels on peut
estimer un risque supplémentaire d'exposition à la Covid-19 à partir des
données des enquêtes Sumer 2017 et Conditions de travail 2013. Ce qui fournit
des informations relatives à un contact direct avec le public, si le salarié
travaille de façon étroite au sein d'une équipe ou s'il est exposés à un risque
infectieux en temps ordinaire :
Ø 12% des salariés
(2.8 millions) ne sont exposés à aucun de ces facteurs de risque et sont donc
faiblement exposés professionnellement à la Covid-19. Les métiers les plus
représentés sont les ouvriers agricoles, les ouvriers qualifiés par enlèvement
de métal, les ouvriers non qualifiés de l'électricité et de l'électronique ou
du textile et les employés de maison ;
Ø de 26% à 35% des
salariés, selon que l'on se fonde sur l'une ou l'autre des enquêtes (soit de 6
à 8 millions de salariés), sont exposés à un seul des trois risques et sont
donc ponctuellement exposés. Il s'agit, en termes de métiers, des ouvriers
qualifiés et non qualifiés (des secteurs du bois, des industries graphiques,
des industries de process, etc…), des ouvriers non qualifiés du bâtiment (gros
et second œuvres) et des travaux publics, des secrétaires, des conducteurs des
différents types de véhicules et de la fonction publique ;
Ø enfin, de 20% à
32% des salariés, soit de 4.7 à 7.6 millions sont exposés à au moins deux des
facteurs de risque évoqués ci-dessus. Parmi les métiers les plus représentés,
les aides-soignants, les infirmiers, les policiers et les militaires, les
vendeurs, les caissiers et employés de libre-service, les employés et agents de
maîtrise de la restauration et de l'hôtellerie, les aides à domicile et les
aides ménagères, les professions paramédicales, les professionnels de l'action
sociale, les agents d'entretien, les assistantes maternelle, les coiffeurs et
les ouvriers qualifiés du BTP [NDR – Soit, pour une bonne partie de ces
métiers, des salariés qui ont été amenés à continuer à travailler durant la
crise sanitaire].
· Covid-19 et inégalités territoriales françaises (Etude)
Vous pourrez accéder à ce document en pièce jointe et à l'adresse
figurant en fin de commentaire.
Ce document est intitulé " Covid-19 : analyse spatiale de
l'influence de facteurs socio-économiques sur la prévalence et les conséquences
de l'épidémie dans les départements français ". Il est signé par M. Amdaoud et al. (les auteurs sont membres du
laboratoire EconomiX, du CNRS et de l'Université Paris-Nanterre).
Introduction
Cet article s'intéresse à la répartition spatiale du nombre
d'hospitalisations et de décès recensés dans les départements français à partir
de données issues de l'Insee et du ministère de la santé.
Des premières analyses ont montré une forte hétérogénéité dans la
répartition territoriale des hospitalisations et des décès liés à la Covid-19. L'objectif
des auteurs est d'estimer l'influence de facteurs socio-économiques et
démographiques locaux susceptibles d'expliquer cette hétérogénéité. Ces
facteurs sont la densité de population, la répartition des revenus et les
conditions de vie.
Ces données sont susceptibles de compléter celles fournies par les
cliniciens et les épidémiologistes sur les facteurs individuels de risque de
décès liés à la Covid-19 tels que l'âge, le sexe, l'indice de masse corporelle
ou les comorbidités.
Matériel et méthode
L'analyse de cette étude porte sur les 96 départements de France
métropolitaine. Pour chacun de ces départements, trois indicateurs d'intensité
de l'épidémie ont été calculés :
ü la prévalence mesurée par le nombre d'hospitalisations liées à la
Covid-19 définie par la somme des nouvelles hospitalisations entre le 19 mars
et le 12 avril 2020 ;
ü le nombre de décès à l'hôpital dus à la Covid-19 recensés au 12 avril
2020 ;
ü un taux de surmortalité mesuré par la différence entre le nombre total de
décès par département au 30 mars 2020 et la moyenne des décès recensés à la
même date en 2018 et 2019 (en 2018, il y a eu une forte épidémie de grippe qui
a été moins marquée en 2019, c'est pourquoi la comparaison des mortalités porte
sur ces deux années).
Les variables prises en compte
Les variables que l'on cherche à expliquer
Il s'agit des variables suivantes :
ü le taux d'hospitalisation entre le 19 mars et le 12 avril 2020 calculé
pour le nombre d'habitants et rapporté à 1000 habitants. Les données ont été
fournies par Santé publique France ;
ü le taux de décès entre le 19 mars et le 12 avril 2020 calculé pour le
nombre d'habitants et rapporté à 1000 habitants à partir des données de Santé
publique France ;
ü le taux de surmortalité calculé par rapport à la moyenne de la mortalités
des deux années 2018 et 2019 à partir de données fournies par l'Insee.
Les variables explicatives
Parmi les variables susceptibles d'expliquer l'intensité de l'épidémie
dans certains départements, il y a des variables socio-démographiques telles
que la densité de la population au Km2 - susceptible de favoriser la
contagion -, la part des ouvriers dans le département - ils sont plus exposés à
la continuation de leur activité durant l'épidémie (voir ci-dessus) et des
inactifs - qui peut être un marqueur de la part des sujets les plus âgés - dans
la population.
Du point de vue économique, l'écart interdécile des revenus est pris en
compte pour traduite les inégalités économiques qui caractérisent les
départements.
Les variables sur les conditions de vie sont la part des résidences
secondaires dans le département - qui a pu expliquer des mouvements de
population à partir des centres urbains lors du confinement -, le nombre de
services d'urgence par département et le caractère urbain ou rural du
département.
Résultats
Hospitalisations et variables explicatives
Les résultats des analyses dans le modèle qui a été retenu mettent en
évidence les résultats suivants.
Il existe une relation d'augmentation significative à 5% des
hospitalisations en lien avec la densité de la population.
Le taux des ouvriers dans la population est aussi significativement
corrélé (mais avec une significativité à 10%) avec une augmentation des
hospitalisations. Pour les auteurs, " Cela confirme le risque
d’exposition accru de cette catégorie sociale (conducteurs des systèmes de
transport, livreurs, services de voirie et de nettoyage dans la fonction
publique territoriale, réparations d’urgence dans les industries de réseaux,
etc.) en raison des moindres possibilités de pratique du télétravail et de leur
participation plus élevée aux plans de continuité d’activité mis en oeuvre dès
le début du confinement. "
Les inégalités sociales approchées par l'écart interdécile des revenus
ont aussi un lien avec une augmentation significative à 1% du nombre
d'hospitalisation.
En revanche, le nombre de services d'urgences est en lien avec une
diminution significative à 1% du nombre des hospitalisations.
Le nombre de résidences secondaires n'influe pas sur les résultats des
hospitalisations.
Décès et variables explicatives
On retrouve, pour les décès, les mêmes liens entre l'augmentation des
décès et les variables explicatives. Une augmentation significative à 5% des
décès par la Covid-19 en lien avec la densité de la population, et une
augmentation significative à 1% avec les écarts de niveau de vie ainsi qu'une
augmentation significative à 10% avec la part d'ouvriers dans la population.
Et un lien négatif, significatif à 1%, entre les décès et le nombre de
services d'urgence.
Surmortalité et variables explicatives
Relativement à la surmortalité, on retrouve des résultats proches de ceux
des liens entre les variables explicatives et les hospitalisations, d'une part,
et les décès, d'autre part.
Ainsi, on retrouve une association significative à 1% entre la surmortalité
et, d'une part, la densité de la population et, d'autre part, la proportion des
ouvriers dans la population. L'association entre la surmortalité et les écarts
de niveau de vie est aussi significative mais seulement à 5%.
En revanche, l'association entre la moindre surmortalité et le nombre de
services d'urgence n'est pas significative.
Conclusion
" Cette recherche
met en évidence que, au-delà de l’importance des caractéristiques individuelles
comme facteurs explicatifs de la probabilité de contracter la Covid-19 et de ses
conséquences, les éléments liés au contexte économique, démographique et social
interviennent également. Les
départements les plus denses, les plus inégalitaires ainsi que ceux dans
lesquels la part d’ouvriers est la plus élevée se sont en effet révélés les
plus vulnérables. Ces
caractéristiques soulignent d’abord la complémentarité entre les politiques de
santé d’une part et les politiques sociales et de redistribution de l’autre. Le rôle des services d’urgence comme facteur de réduction des
manifestations de l’épidémie va dans le même sens. Il montre en effet qu’en
présence d’inégalités les services publics, en l’occurrence de santé,
permettent de protéger les populations de la maladie et de réduire les décès.
Ensuite, en mettant en évidence le rôle de la densité démographique, cet
article rappelle que les départements ruraux ou les moins peuplés ne sont pas
les plus vulnérables mais que les territoires métropolitains présentent aussi
des faiblesses au niveau de la prise en charge des malades qu’il est important
de considérer. "
· Facteurs de risque associés au décès liés à la Covid-19
Dans la lignée de
l'étude précédente, cette étude anglaise m'a paru très intéressante car, outre
les facteurs de risque de décès déjà largement connus, elle a étudié un facteur
socio-démographique et géographique.
Il s'agit d'une étude intitulée " OpenSAFELY: factors associated
with COVID-19-related hospital death in the linked electronic health records of
17 million adult NHS patients "
Les auteurs de cette étude
sont E. Williamson and al. p
Elle a été publiée en pré-print sur medRxiv and bioRxiv.
Vous pourrez accéder à cette étude en pièce jointe et à
l'adresse suivante : https://doi.org/10.1101/2020.05.06.20092999.
Introduction
Les auteurs indiquent
que le 11 mars 2020, l'OMS a déclaré que la Covid-19 constituait une pandémie
avec des cas rapportés dans 114 pays. Au 30 avril 2020, il y avait plus de 3
millions de cas avec plus de 200 000 décès attribués au coronavirus.
Des facteurs de
risque ont été bien établis tels que l'âge – plus de 90% des décès en
Grande-Bretagne chez des sujets de plus de 60 ans - et le sexe avec 60% des
décès chez les hommes.
D'autres facteurs
de risque de décès ont été rapportés par le Centre de contrôle des maladies et
de la prévention chinois portant sur 44 672 atteintes par la Covid-19 et 1023
décès : les maladies cardiovasculaires, l'hypertension, le diabète, les
maladies respiratoires et les cancers.
Une étude menée en
Angleterre portant sur 16 749 patients hospitalisés a montré un risque plus
important de décès suite à la Covid-19 pour des patients avec des atteintes
cardiaques, pulmonaires et rénales (avec un facteur de risque, HR de 1.19-1.39
après correction sur l'âge et le sexe).
En France,
l'obésité a aussi été reconnue comme facteur de risque de décès. L'augmentation
du risque lié au tabagisme est plus en discussion car on a pu constater, parmi
les patients atteints par la Covid-19, une plus faible proportion de fumeurs
que celle des fumeurs dans la population.
Matériel et
méthode
Il s'agit d'une
étude de cohorte de sujets de 18 ans et plus, disposant d'un dossier dans le
système de soins depuis au moins un an, pris en charge entre le 1er
février 2020 et le 25 avril 2020. Ces dossiers concernent 17 425 445 sujets
parmi lesquels il y eu 5 683 décès qui ont été étudiés.
Pour réaliser
cette étude, une plateforme intitulée OpenSAFELY a été utilisée. Elle permet
une interface sécurisée permettant une analyse "pseudonymisée" de
dossier de patients quasiment en temps réel.
Les évènements
pris en compte étaient les décès par la Covid-19 à l'hôpital.
Les variables
prises en compte étaient l'âge, le sexe, l'indice de masse corporelle (IMC).
les problèmes de santé indiqués comme facteurs de risque mentionnés dans un
guide anglais sur les personnes à risque de décès ainsi que les cas
d'immunodéficience. Etaient aussi pris en compte l'asthme, les autres maladies
respiratoires chroniques, les atteintes cardiaques chroniques, le diabète, les
atteintes chroniques hépatiques, les maladies neurologiques, etc…
Enfin, ce qui m'a particulièrement
intéressé, était la prise en compte un "Index of multiple
deprivation" que je traduirai par indice de multiple précarité sur lequel
je m'arrête un instant. Cet indice est en lien très précisément avec le lieu de
résidence du patient et est corrélé au numéro de code postal de son domicile.
L'indice est
calculé à partir de sept catégories de données auxquelles un poids en
pourcentage est attribué : les revenus (22.5%), l'emploi (22.5%), l'éducation
(13.5%), la santé (13.5%), la criminalité (9.3%), la difficulté à se loger et à
accéder aux services (9.3%) et l'environnement de vie (9.3%). Les sujets sont
répartis en 5 quintiles vis-à-vis cet indice.
L'origine ethnique
des sujets a aussi été prise en compte
Résultats
Les résultats avec
ajustement concernant les patients décédés confirment certains des risques déjà
mis en évidence et connus (entre parenthèses, le Hazard ratio avec intervalle
de confiance à 95%) :
ü une proportion de
36.9% de femmes et de 63% d'hommes alors qu'ils représentent respectivement
dans l'ensemble des dossiers 50.1% et 49.9% des sujets ;
ü un gradient
croissant des décès avec l'âge avec une sous-représentation significative des
sujets de moins de 50 ans, la tranche d'âge de 50 à 60 servant de référence,
puis un HR de 2.09 [1.84-2.38] pour la tranche des 60-70 ans, de 4.77
[4.23-5.38] pour la tranche des 70 à 79 ans et de 12.64 [11.19-14.28] pour les
sujets de 80 ans et plus ;
ü l'obésité augmente
fortement le risque de décès avec un HR de 1.56 [1.41-1.73] pour un IMC compris
entre 35 et 39.9 kg/m2 et de 2.27 [1.99-2.56] pour un IMC supérieur
ou égal à 40 kg/m2 ;
ü ce qui va dans le
sens d'un rôle protecteur du tabac, la référence étant les sujets n'ayant
jamais fumé, l'étude trouve un HR significativement augmenté de 1.25
[1.18-1.33] pour les anciens fumeurs alors qu'il est diminué significativement
pour les fumeurs actuels avec un HR de 0.88 [0.79-0.99] ;
ü une maladie
cardiaque chronique augmente le risque de décès avec un HR de 1.27 [1.20-1.35]
;
ü le diabète, même
avec le HbA1C dans la zone de contrôle, augmente aussi le risque de décès avec
un HR de 1.5 [1.40-1.60] ;
ü l'asthme même sans
utilisation récente de corticoïde oral augmente le risque de décès avec un HR
de 1.25 [1.08-1.35]
ü un cancer non
hématologique diagnostiqué il y a moins d'un an augmente de risque de décès
d'un HR de 1.56 [1.29-1.89].
Enfin, ce qui est
original dans cette étude est l'estimation de l'augmentation du risque de décès
en fonction de l'indice multiple de précarité. Si l'on prend comme référence le
premier quintile correspondant à la moindre précarité, on observe un gradient
croissant en fonction du quintile :
ü 1.13 [1.04-1.24]
pour le 2e quintile,
ü 1.23 [1.13-1.35]
pour le 3e quintile,
ü 1.49 [1.37-1.63]
pour le 4e quintile,
ü et 1.75
[1.60-1.91] pour le 5e quintile des sujets habitant dans une zone
avec fort indice multiple de précarité.
Conclusion
Les auteurs
indiquent avoir démontré pour la première fois qu'une faible part de
l'augmentation substantielle du risque de décès dû à la Covid-19 parmi les
sujets demeurant dans des zones les plus précarisées, peut être attribuée à
l'état de santé. Il est important de prendre cela en considération pour
protéger ces sujets. Les causes sous-jacentes de l'augmentation du risque de
décès des sujets de ces zones précarisées nécessitent de futures explorations. Ils
suggèrent de recueillir des informations sur les expositions professionnelles
et les conditions de vie dans un premier temps.
A
bientôt…
Jacques Darmon
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