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Au sommaire de
cette lettre… Parmi les textes de loi… Une loi visant à renforcer la protection
des parents d’enfant handicapé, malade ou gravement accidenté… Un décret
modifiant le plafond de comparaison pour le cumul pension d’invalidité et
salaire… Un arrêté sur la formation des infirmiers des services de médecine
préventive de la fonction publique territoriale… Un accord sur la protection
sociale complémentaire dans la fonction publique territoriale… Une circulaire
de la Cnav sur le départ anticipé à la retraite pour carrière longue... Un
résumé du très intéressant rapport sénatorial consacré à la santé au travail
des femmes comprenant des recommandations dont certaines concernent les
services de prévention et de santé au travail…
Les lettres d’information sont accessibles, depuis janvier
2019, sur un blog à l’adresse suivante : https ://bloglettreinfo.blogspot.com/.
·
Textes de
loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions parlementaires,
Conseil d’État
Il s’agit d’une proposition de loi formulée par un
député qui a été adoptée par l’Assemblée nationale et le Sénat visant à
protéger les familles d’enfants atteints d’une maladie ou d’un handicap ou
victimes d’un accident d’une particulière gravité (« rendant
indispensables une présence soutenue et des soins contraignants »).
Cette loi modifie le Code du travail et le Code de
la Sécurité sociale.
Article 1
Un nouvel article L. 1225-4-4 est créé, instaurant
une protection contre le licenciement. Cet article dispose que « Aucun
employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant un congé de
présence parentale prévu à l'article L.
1225-62 ni pendant les périodes travaillées si le congé de
présence parentale est fractionné ou pris à temps partiel.
Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il
justifie d'une faute grave de l'intéressé ou de son impossibilité de maintenir
ce contrat pour un motif étranger à l'état de santé de l'enfant de
l'intéressé. »
Article 2
D’une part, le texte de loi modifie l’article L. 3142-4 du Code
du travail, relatif à des congés, dont le 4° porte la durée des congés
respectivement de 5 et 7 jours à « Douze jours pour le décès d'un enfant ou quatorze jours
ouvrés lorsque l'enfant est âgé de moins de vingt-cinq ans et quel que soit son
âge si l'enfant décédé était lui-même parent ou en cas de décès d'une personne
âgée de moins de vingt-cinq ans à sa charge effective et permanente ».
D’autre part, le texte de loi modifie l’articles L. 622-2 du Code
général de la fonction publique pour permettre les mêmes durées d’absences que
celles évoquées ci-dessus dans le Code du travail. Et l’article L. 622-1
dispose que ces congés sont sans effet sur la durée des congés annuels et n’en
modifient pas la constitution de droits.
Article 3
L’article L. 1222-9 du Code
du travail dispose maintenant que, relativement au télétravail, « En
l'absence d'accord collectif ou de charte, lorsque le salarié et l'employeur
conviennent de recourir au télétravail, ils formalisent leur accord par tout
moyen. Lorsque la demande de recours au télétravail est formulée par un
travailleur handicapé mentionné à l'article L.
5212-13 ou un
salarié aidant d'un enfant, d'un parent ou d'un proche, l'employeur
motive, le cas échéant, sa
décision de refus. »
Article 4
Le droit à une allocation journalière de présence
parentale, selon l’article L 544-2 du Code
de la Sécurité sociale, « est soumis à un avis favorable du service du contrôle médical
prévu à l'article L. 315-1 ou du régime
spécial de sécurité sociale. »
L’article L. 544-3 précise
maintenant que « L'allocation peut faire l'objet d'une avance dans
l'attente de l'avis » du service du contrôle médical.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047862209
Ce décret publié
par le ministère des solidarités et des familles du entre en vigueur le 30
juillet 2023.
Il modifie
l’article R. 341-17 du code de la Sécurité sociale en portant le salaire de
comparaison à 1.5 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale au-dessus
duquel la pension d’invalidité est diminuée de moitié lorsqu’il y a cumul avec
une activité professionnelle.
Contexte de ce
décret
La problématique à
laquelle prétend répondre ce décret a été évoquée dans une question
parlementaire, et sa réponse, reprise dans une lette d’information du 2 juillet
2022, voir le blog.
Un décret passé
inaperçu
Un décret n° 2022-257
relatif au cumul de la pension d'invalidité avec d'autres revenus et diverses
dispositions relatives aux pensions d'invalidité a été publié le 23 février
2022.
Les mesures de ce
décret n’ont été mises en œuvre qu’en fin d’année 2022, ce qui fait que ses conséquences
ne se sont manifestées que bien plus tard.
Un objectif,
favoriser le cumul pension invalidité et activité professionnelle…
L’objectif de ce
décret du 23 février 2022 était de favoriser l’activité professionnelle des
personnes reconnues en invalidité.
Ceci se faisait en
n’ôtant plus de la pension d’invalidité le montant total de ce qui dépassait du
cumul pension d’invalidité et salaire d’activité du montant du salaire de
comparaison antérieur (calculé sur les dix meilleures années) mais seulement de
la moitié.
Ce qui était bien
sur favorable à nombre de personnes reconnues invalides et exerçant une
activité.
Mais une autre
mesure de ce décret était défavorable pour les salaires élevés
En effet, le
salaire de comparaison (qui est maintenant le meilleur des deux, salaire annuel
de l’année précédente ou salaire moyen des dix meilleures années d’activité)
que ne devait pas dépasser le cumul de la pension et de l’activité était
auparavant le montant du salaire de comparaison perçu par le salarié.
Le décret a
modifié cela en introduisant un salaire de comparaison limité au plafond annuel
de la Sécurité sociale (PASS, soit 43 992 € en 2023). Et tout ce qui
dépassait ce plafond était donc diminué de moitié sur la pension d’invalidité.
Sachant, de plus,
que le calcul ne se faisait plus par trimestre mais annuellement. Comme le
montre un calcul effectué par l’Assurance maladie ceci était aussi défavorable.
Pour un revenu de 60 000 € par an (3 300 de salaire mensuel et
1 700 de pension d’invalidité), le calcul trimestriel aboutissait à une
pension mensuelle de 1 283 € alors que le calcul annuel aboutit à une
pension mensuelle de 914€ (dans le premier cas, le dépassement mensuel était de
417 € et dans le second cas de 1 572 dont on déduisait donc la moitié de la
pension d’invalidité).
Ainsi certains salariés,
en particulier des cadres, cumulant pension d’invalidité et activité
professionnelle, ont eu la mauvaise surprise de se retrouver avec une pension
d’invalidité ramenée à zéro. Cette mesure, selon les informations diffusées par
le gouvernement, en particulier en réponse à des questions parlementaires, concernait
environ 8 000 personnes bénéficiant d’une pension d’invalidité.
Une deuxième
mauvaise surprise !
Cette mauvaise
surprise s’est accompagnée d’une deuxième mauvaise surprise pour certaines des
personnes concernées par ce décret.
En effet, certains
organismes de prévoyance ont aussitôt coupé le complément de pension
d’invalidité qu’ils versaient à leurs assurés en indiquant que si le montant de
la pension d’invalidité était ramené à zéro, ils ne verseraient plus le
complément de la pension prévu par leurs garanties. A ce sujet, le gouvernement
a indiqué qu’il envisageait d’en discuter avec les organismes de prévoyance. A
ce jour, aucune nouvelle de ces discussions et de leur éventuel effet.
Une réponse
partielle
Ainsi, ce décret
apporte une réponse partielle à la problématique créée par le décret du 23
février 2022, continuant à toucher les salaires annuels de plus de 1.5 fois le
plafond annuel de la Sécurité sociale, avec le risque de ramener à zéro le
complément de la prévoyance, et le calcul du cumul se faisant sur une année,
plus défavorable que celui trimestriel.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047901978
Rappelons qu’un décret n°
2022-1664 du 27 décembre 2022 était relatif
à la formation spécifique des infirmiers de santé au travail pour les services
de prévention et de santé au travail du privé et en agriculture.
Le présent arrêté vise la formation professionnelle
des infirmiers en santé au travail des services de médecine de prévention de la
fonction publique territoriale avec de petites variations par rapport à ce qui
est prévu dans le décret mentionné ci-dessus.
L’article 1 prévoit
que la formation, indispensable pour exercer des fonctions d’infirmier dans un
service de médecine préventive, est prise en charge par l’autorité territoriale
et est dispensée par un organisme de formation mentionné à l’article L. 6351-1 du Code
du travail ou par le Centre national de la fonction publique territoriale.
L’article 2 indique
que la durée de la formation est d’une durée de 350 heures sur une période de 6
mois (dans le décret mentionné ci-dessus pour le privé, la formation comprenait
240 heures de cours et 105 heures de stage).
Cette formation couvre les blocs de compétences
suivantes (dont le détail figure en annexe) :
- « la gestion et l'organisation des visites ;
- la gestion et la logistique du service de médecine
préventive ;
- la participation à l'équipe pluridisciplinaire ;
- la réalisation des visites d'information et de
prévention ;
- l'action sur le milieu de travail ;
- la gestion des situations individuelles imprévues
;
- la gestion des situations collectives
imprévues. »
L’article 3 précise
que la formation comprend des apports théoriques et des travaux pratiques, des
échanges entre stagiaires sur la pratique professionnelle et un accompagnement
par un référent pédagogique de l’organisme de formation.
Elle peut se dérouler en présentiel et à distance et
a lieu en alternance avec des séquences en milieu de travail.
Un encadrement par au moins un médecin du travail
doit avoir lieu dans le service de médecine préventive dans lequel l’infirmier
est affecté.
L’article 4 dispose qu’une évaluation des compétences, dont les
modalités sont précisées dans l’annexe jointe à l’arrêté, est assurée par
l’organisme de formation et le service de médecine préventive dès l’entrée en
formation.
L’article 5 indique qu’il est possible d’individualiser le
parcours de la formation avec une durée inférieure à 350 heures si des
infirmiers ont obtenu des équivalences pour un ou des blocs de compétences par
une formation diplômante ou certifiante.
L’article 6 précise que l’évaluation de la formation doit donner
lieu à la délivrance de documents prouvant la validation de chacun des blocs de
compétences.
Enfin,
l’article 7, prévoit que l’infirmier doit s’engager par contrat avec le
service de médecine préventive où il est affecté à suive la formation.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047826073
Accord national sur la protection
sociale dans la fonction publique territoriale
Un accord collectif national portant réforme de la
protection sociale complémentaire des agents publics territoriaux a été signé
le 11 juillet 2023 par six organisations syndicales et sept organisations
d’employeurs.
Cet accord porte sur la prévoyance (incapacité et
invalidité) et sur la complémentaire santé (remboursement des soins).
Des textes de loi avaient déjà abordé cette
protection sociale pour la fonction publique : l’ordonnance
n° 2021-175 du 17 février 2021 et le décret
n° 2022-581 du 20 avril 2022 (ce dernier définissant
les garanties minimales que devrait offrir cette protection sociale) en ouvrant
la voie à la négociation collective pour en définir les modalités pratiques.
Vous pourrez accéder au document en pièce jointe et
à l’adresse internet en fin de commentaire.
Modalités de la
prévoyance
Garanties
minimales en termes de prévoyance
Incapacité temporaire
Les garanties minimales prévues par cet accord pour
la prévoyance sont que tout agent de la fonction publique territoriale, en cas
d’incapacité temporaire, sera couvert par le maintien de 90% de son revenu
net : traitement indiciaire (TI), nouvelle bonification indiciaire (NBI)
et régime indemnitaire (RI).
Ceci, sous déduction des prestations versées par
l’employeur ou tout régime obligatoire. À noter que le décret n° 2022-581
prévoyait comme garanties minimales 90% du TI et de la NBI, mais seulement 40%
du régime indemnitaire.
Ce maintien de rémunération concerne les
fonctionnaires et les agents contractuels.
Il est prévu que les contractuels et stagiaires
puissent bénéficier du contrat de protection complémentaire s’ils sont présents
plus de 6 mois dans la collectivité ou si leur contrat initial prévoit une
durée d’emploi de plus de 6 mois.
Invalidité
La prévoyance en termes d’invalidité dépend du
statut des agents et du niveau ou de la catégorie de l’invalidité :
ü
pour les
agents affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités
locales (CNRACL), si le taux d’invalidité, fixé par la CNARCL, est supérieur ou
égal à 50%, le maintien de la rémunération nette de l’agent sera de 90% de la
rémunération (TI + NBI + RI) et si le taux d’invalidité est inférieur à 50%, le
taux de maintien de la rémunération sera proportionnel au taux d’invalidité défini
par la CNRACL ;
ü
pour les
agents contractuels affiliés au Régime général, la prévoyance maintient la
rémunération à 90% du revenu net en cas d’invalidité de 2e ou 3e
catégorie ou de taux d’incapacité permanente d’au moins 66% suite à un accident
du travail ou à une maladie professionnelle.
Ce maintien de la rémunération se fait sous
déduction des prestations perçues par l’agent.
Type de contrat
de prévoyance
Le contrat de prévoyance avec un organisme
prestataire sera un contrat collectif à adhésion obligatoire.
Participation de
l’employeur
La participation de l’employeur à la cotisation à
payer pour la protection prévoyance des agents sera de 50% (elle était au
minimum de 20% dans le décret cité ci-dessus).
Complémentaire
santé
Garanties minimales
de la complémentaire santé
Il s’agit d’un panier minimal de référence.
[NDR - Dans le privé, le panier de référence comprend :
la totalité du ticket modérateur (consultations, actes et prestations
remboursables par l'Assurance maladie obligatoire), hors exception ;
l’intégralité du forfait journalier hospitalier dans le cadre d'une
hospitalisation ; le remboursement des frais dentaires à hauteur de 125 %
du tarif conventionnel (orthodontie et prothèses) et le remboursement
forfaitaire des frais d'optique par période de 2 ans (1 an pour les mineurs ou
en cas d'évolution de la vue), avec une prise en charge minimum fixée à 100 €
pour une correction simple (verres + monture), 150 € (voire 200 €) pour une
correction complexe simple (verres + monture).]
Participation de
l’employeur
Ce sera celle prévue dans le décret n°
2022-581 : « La participation mensuelle des collectivités territoriales
et de leurs établissements publics au financement, pour chaque agent, des
garanties prévues à l'article 5 ne peut être inférieure à la moitié d'un
montant de référence, fixé à 30 euros. »
Fonds national
de solidarité
L’accord prévoit la mise en place d’un fonds
national de solidarité qui sera alimenté par un prélèvement de 2% sur les
cotisations des contrats de complémentaire santé individuels et collectifs
subventionnés par les employeurs publics territoriaux.
Ce fonds national de solidarité est instauré au
bénéfice des agents territoriaux actifs et retraités.
Autres
dispositions de l’accord
Limitation des
barrières à l’entrée des contrats collectifs de prévoyance
Des dispositions devront être prises en vue :
•
« d’interdire
le questionnaire médical tout au long de la durée du contrat, ainsi que la mise
en place d’une tarification différente en raison de l’état de santé.
•
d’encadrer
la pratique des délais de carence ou de stages en matière de prévoyance en
limitant leur durée à 3 (trois) mois.
•
d’interdire
la proratisation de l’indemnisation en fonction de la durée d’adhésion.
•
de
supprimer la possibilité de majorer les cotisations pour adhésion tardive.
•
•de
prévoir que :
- les agents qui ne sont pas en arrêt de travail à
la date d’effet du contrat ou du règlement et qui ne sont pas inscrits à
celui-ci peuvent y adhérer sous réserve que leur inscription intervienne
pendant les 12 premiers mois qui suivent la date de prise d’effet du contrat ;
- les agents embauchés postérieurement à la date de
prise d’effet du contrat ou du règlement peuvent y adhérer sous réserve que
leur inscription intervienne dans les 12 premiers mois qui suivent la date
d’embauche ;
- les agents en arrêt de travail peuvent adhérer au
contrat dans les conditions prévues. »
Évolution des
conditions tarifaires
Il est prévu un plafonnement des évolutions
tarifaires qui ne pourront être supérieures à une hausse annuelle maximale de
15% en matière de prévoyance et de 10% en termes de complémentaire santé.
Reporting annuel
obligatoire
Les organismes de protection sociale complémentaire
devront transmettre chaque année, avant le 30 juin de l’année n, un bilan en
termes de comptes de résultats de l’année n-1 comprenant, entre autres, les
données suivantes : le nombre d’agents ou de retraités (et de leurs
conjoints et enfants bénéficiaires) assurés par garantie, l’âge moyen des
adhérents, les cotisations nettes de taxes et de frais, les provisions
constituées par risque, la liste des sinistres en prévoyance (CMO, CLM, CLD et
invalidité), le résultat du contrat et le ratio prestations / cotisations.
Garanties en cas
de succession de contrats et de changements d’organismes
Rechute d’arrêt maladie
L’accord prévoit que l’organisme titulaire du
contrat collectif de prévoyance devra indemniser la rechute d’un arrêt de
travail survenu lorsque l’agent était adhérent d’un contrat individuel ou
n’avait pas de contrat de prévoyance.
En cas de succession de contrats collectifs de
prévoyance, l’organisme du contrat échu devra prendre en charge l’indemnisation
d’un arrêt maladie survenu après l’échéance du contrat si le fait générateur a
eu lieu pendant le contrat échu.
CLM et CLD
L’effet rétroactif de la reconnaissance de CLM ou de
CLD ne pourra faire l’objet d’une indemnisation par le nouvel organisme lorsque
l’agent était titulaire d’un contrat de prévoyance individuelle ou n’était pas
assuré. S’il disposait d’un contrat individuel, c’est à l’organisme durant le
contrat duquel a eu lieu l’arrêt initial qui devra assurer l’indemnisation.
De la même façon, en cas de succession de contrats
collectifs, c’est à l’organisme pendant le contrat duquel a eu lieu l’arrêt
initial de prendre en charge de façon rétroactive le CLM ou le CLD.
Circulaire de la Caisse nationale
d’assurance vieillesse (Cnav) du 10 juillet 2023
Il s’agit d’une circulaire de la Cnav sur la
retraite anticipée pour carrière longue publiée le 10 juillet 2023 et relative
aux salariés et aux travailleurs indépendants.
Cette circulaire prend en compte les évolutions
législatives de la loi n°
2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la Sécurité sociale
pour 2023 et les dispositions du décret n°
2023-436 du 3 juin 2023. Ces textes ont été commentés respectivement dans
les lettres d’information du 23 avril
2023 et du 18 juin
2023 (liens avec les commentaires sur le blog).
Rappelons que la loi de financement rectificative de
la Sécurité sociale porte l’âge légal de départ à la retraite de 62 ans à 64
ans à compter du 1er septembre 2023.
[NDR - Les départs à la retraite anticipé
représentent la part la plus importante des départs à la retraite dérogatoires.
Il y a eu, en 2022, 135 272 départs anticipés à la retraite pour carrière
longue, 94 498 hommes et 40 774 femmes.]
Vous pourrez accéder à cette circulaire en pièce
jointe et sur le site de la Cnav à l’adresse en fin de commentaire.
Ouverture du
droit à la retraite anticipée pour carrière longue
Conditions requises
L’article L.
351-1-1 du Code de la Sécurité sociale (CSS) dispose que
l’âge légal de départ à la retraite est abaissé pour les assurés qui ont
commencé à exercer une activité avant différents âges, dont le plus élevé est
21 ans.
Le droit à la retraite anticipée pour carrière
longue est soumis à deux contraintes cumulatives prévues à l’article D.
351-1-1 du CSS :
ü
avoir
commencé à travailler avant un âge donné ;
ü
disposer
d’une certaine durée d’assurance cotisée.
Age de début d’activité
L’âge de début d’activité, pour les travailleurs à
partir de la génération 1970, en fonction de l’âge de départ anticipé à la
retraite, est le suivant :
ü
16 ans
pour un départ à compter de 58 ans ;
ü
18 ans
pour un départ à compter de 60 ans ;
ü
20 ans
pour un départ à compter de 62 ans ;
ü
21 ans
pour un départ à compter de 63 ans.
Pour les générations nées entre le 1er
septembre 1961 et le 31 décembre 1969, l’âge de départ anticipé est adapté en
fonction de l’augmentation progressive de l’âge légal de départ à la retraite.
Durée d’assurance en début
d’activité
Pour pouvoir bénéficier de ce départ anticipé à la
retraite, à la fin de l’année civile de l’âge anniversaire de leurs16 ans, 18
ans, 20 ans ou 21 ans, les assurés devront :
ü
pour ceux
nés au cours des trois premiers trimestres de l’année avoir justifié 5
trimestres d’activité ;
ü
pour ceux
nés au cours du dernier trimestre de l’année, avoir justifié de 4 trimestres
d’activité.
Durée d’assurance cotisée
Pour pouvoir bénéficier de ce départ anticipé à la
retraite, les assurés devront justifier, dans le Régime général ou d’autres
régimes de protection sociale, une durée d’assurance cotisée à leur charge
correspondant à celle nécessaire pour obtenir le taux plein pour leur
génération.
Sont considérées comme périodes cotisées :
• « les périodes de cotisations à
l'assurance vieillesse obligatoire ;
• les périodes d'assurance volontaire vieillesse ;
• les périodes de rachats de cotisations en fonction
de la date de la demande et de leur nature ;
• les périodes de validation de carrière au titre de
la loi du 26 décembre 1964 et la loi 85-1274 du 4 décembre 1985 ;
• les périodes de congé de formation ;
• les périodes de stage de la formation
professionnelle ;
• les périodes de cotisations arriérées ;
• les versements pour la retraite effectués au titre
des années civiles d’apprentissage effectuées dans le cadre d'un contrat conclu
entre le 1er juillet 1972 et le 31 décembre 2013, visés au IV de
l’article L. 351-14-1 CSS (article L. 173-7 CSS). »
Sont exclues de la prise en compte au titre des
durées cotisées les périodes reconnues équivalentes, les majorations de durée
d’assurance, à l’exception de celles acquises par le compte professionnel de
prévention, et les périodes de volontariat associatif.
Certaines périodes non cotisées sont néanmoins
réputées cotisées, selon l’article D.
351-1-2 du CSS :
ü
les
périodes de service national dans la limite de 4 trimestres ;
ü
les
périodes d’indemnisation au titre de la maladie et de l’incapacité temporaire
des accidents du travail dans la limite de quatre trimestres pour l’ensemble de
la carrière ;
ü
l’ensemble
des périodes d’indemnisation au titre de la maternité ou de l’adoption ;
ü
les
périodes de perception d’une pension d’invalidité dans la limite de deux
trimestres pour l’ensemble de la carrière ;
ü
les
périodes d’indemnisation au titre du chômage et d’activité partielle dans la
limite de quatre trimestres pour l’ensemble de la carrière ;
ü
les
trimestres de majoration de durée d’assurance acquis au titre du compte
professionnel de prévention pour leur ensemble (au maximum huit trimestres) ;
ü
les
périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer et de
l’assurance vieillesse pour les aidants.
Retraite
anticipée
Demande de retraite anticipée
La demande de retraite anticipée peut se faire en
ligne ou par le formulaire « demande unique de retraite pour carrière
longue ».
Cependant, si l’assuré utilise pour sa demande un
formulaire non spécifique de demande de retraite en indiquant vouloir prendre
sa retraite avant l’âge légal, ses droits à une retraite anticipée pour
carrière longue doivent être examinés à ce titre.
Régime compétent
Le régime compétent pour la demande de retraite est
celui dont relève l’assuré au cours de sa dernière activité.
L’assuré peut néanmoins faire cette demande auprès
d’un autre régime si celui-ci entre dans le champ de la demande unique de
retraite (ces régimes sont : le régime général, le régime des
salariés agricoles, le régime des non-salariés agricoles, le régime des
commerçants et le régime des artisans).
Modalités de calcul de la pension
de retraite
Le calcul du montant de la retraite pour carrière
longue se fait selon les conditions de droit commun de l’article L. 351-1 du CSS.
La retraite pour carrière longue est obligatoirement
calculée avec un taux plein de 50%.
Date d’application
Les dispositions de cette circulaire sont
applicables aux retraites prenant effet à compter du 1er septembre
2023 pour les assurés nés à partir du 1er septembre 1961.
https://legislation.lassuranceretraite.fr/Pdf/circulaire_cnav_2023_14_10072023.pdf
· Rapport
sénatorial sur la santé des femmes au travail
Quatre sénatrices de la délégation
aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes
ont participé à l’élaboration de ce rapport, Mmes Laurence Cohen, Annick Jacquemet,
Marie-Pierre Richer et Laurence Rossignol.
Vous pourrez accéder à ce rapport
en pièce jointe et sur le site du Sénat à l’adresse en fin de commentaire.
Introduction
Ce rapport établit d’abord un
constat sur les problématiques inhérentes à la santé des femmes au travail puis
émet 23 recommandations afin d’améliorer la prise en compte de la santé des
femmes au travail.
Le constat de l’état actuel des
choses se fait selon quatre axes :
ü l’absence
ou la très faible prise en compte d’une approche « genrée » en
santé au travail ;
ü la
sous-estimation, voire la méconnaissance, des risques professionnels auxquels
les femmes sont exposées ;
ü penser
la santé au travail des femmes ;
ü la
prise en compte des spécificités féminines en termes de pathologies et de santé
sexuelle et reproductive.
Les constats du
rapport
Un
défaut durable d’approche selon le sexe en matière de santé au travail
Un manque de données statistiques
différenciées selon le sexe
Les auteures du rapport constatent
qu’il existe un souhait délibéré de la part des employeurs, des institutions et
des professionnels de la prévention et de la santé au travail d’adopter une
approche indifférenciée en termes de sexes se rapportant le plus souvent à un
« homme moyen » et ignorant les spécificités féminines.
Ceci alors qu’une loi
n° 2014-873 du 4 août 2014 (article
20) pour l’égalité entre les hommes et les femmes a exigé des entreprises une
prise en compte spécifique en fonction des sexes relative à la santé et la
sécurité au travail. Ainsi, l’article L.
4121-3 du Code du travail sur
l’évaluation des risques professionnels dispose que « Cette évaluation
des risques tient compte de l'impact différencié de l'exposition au risque en
fonction du sexe. »
De même, une loi n° 2016-41 a
imposé à la Caisse nationale d’Assurance maladie [NDR – Les rapports de la
Branche AT/MP ne fournissent pas d’information sur la sinistralité en fonction
du sexe] et aux services de prévention et de santé au travail de produire des
données sexuées (l’article L. 4624-1 disposait que « Le rapport annuel d'activité, établi par
le médecin du travail, pour les entreprises dont il a la charge, comporte des
données présentées par sexe. » [NDR – Le rapport annuel du médecin du travail a été supprimé
par la loi du 2 août 2021].
Par exemple, la Caisse nationale
d’Assurance maladie n’a pu fournir aux auteures du rapport de données sur la
répartition des arrêts maladie par sexe et la Direction générale du travail ne
dispose pas de données relatives au sexe sur le suivi individuel en santé au
travail.
Les emplois occupés par des femmes
font moins l’objet de recherches en santé au travail. Ceci alors que, par
exemple, les campagnes des Quinzaines des maladies à caractère professionnel
font apparaître, entre 2012 et 2018, des taux de signalements plus élevés de
maladies à caractère professionnel chez les femmes que chez les hommes
(respectivement, en 2018, 11.4% et 7.1%).
Une approche ergonomique basée sur l’homme
moyen
La conception et de l’aménagement
des postes et des équipements de travail sont le plus souvent pensés pour un
homme de taille moyenne et ne prennent pas en compte la morphologie et les
caractéristiques anthropométriques et physiologiques des femmes.
En particulier, celles-ci se
caractérisent par une taille plus petite, une force musculaire moindre, un
centre de gravité plus bas, un poids moindre et un débit cardiaque plus faible.
De la même façon, les équipements
de protection individuelle sont basés sur une morphologie masculine. Ce qui
aboutit, par exemple à des gants de protection surdimensionnés et à des
appareil de protection respiratoire qui ne sont pas adaptés pour les femmes.
Absence de prise en compte du sexe
dans le DUERP
Alors que cette exigence
apparaissait dans la loi n° 2014-876, il n’y a que très rarement une approche
par sexe dans les documents uniques d’évaluation des risques professionnels.
Cette approche est souvent méconnue. Et lorsqu’elle n’est pas méconnue elle
soulève des objections car faisant craindre des discriminations. Craintes
exprimées lors des entretiens des auteures tant par une représentante d’une
organisation syndicale très impliquée dans la santé au travail que d’un
employeur, lui aussi très impliqué dans la santé au travail.
Des politiques de prévention et de
réparation pensées pour les hommes
Les auteures du rapport renvoient à
un imaginaire collectif qui considère que le travail pénible est masculin et
lié à des efforts physiques importants, à des ports de charges lourdes, à
l’exposition au bruit tandis que la pénibilité à laquelle les femmes sont
exposées est moins dangereuse.
En conséquence, les politiques de
prévention, en particulier la définition des critères de pénibilité et de
qualification des maladies professionnelles, obéissent à cette logique.
Ainsi la Direction générale du
travail indique que seulement 23% des personnes concernées par le compte
professionnel de prévention sont des femmes en 2021.
De la même façon, les tableaux des
maladies professionnelles, notamment ceux relatifs aux cancers professionnels, ont
été pensés à l’origine pour des métiers masculins (mines, BTP) et non pas pour
des secteurs d’activité féminins comme le soin ou le nettoyage [NDR - Dont le
développement a été plus récent].
Une absence de prise en compte de
pathologies non professionnelles
Les femmes présentent des
pathologies spécifiques qui retentissent sur le travail comme l’endométriose,
le cancer du sein ou la fibromyalgie qui sont peu prises en compte pour
permettre de bonnes conditions de travail, avec de la souplesse dans l’emploi
du temps et les horaires, des marges de manœuvre améliorées et un soutien
managérial.
Ainsi, le retour au travail après
un cancer du sein, le cancer le plus fréquent chez les femmes, survenant
fréquemment pendant que la femme est encore en activité professionnelle, se
pose de façon beaucoup plus fréquente pour les femmes alors que les autres cancers
surviennent plus souvent chez des sujets nettement plus âgés.
Ces spécificités de la santé des
femmes justifieraient une formation adaptée des professionnels de santé
intervenant au sein des services de prévention. En effet, de nombreux symptômes
et affections féminins, même en dehors de la sphère gynécologique, sont laissés
de coté et ignorés comme les maladies cardio-vasculaires chez les femmes ou
leur exposition à la dépression, en raison de facteurs psychosociaux.
Il faudrait aussi prendre en compte
le fait qu’il y a plus de femmes que d’hommes reconnus handicapés.
Des risques
professionnels sous-estimés, méconnus et différenciés chez les femmes
Les expositions professionnelles
des femmes sont l’objet :
ü d’une
part, de la minimisation de leur charge de travail, de la pénibilité de leurs
tâches, de la négligence des risques plus silencieux auxquels elles sont
exposées ainsi qu’à l’absence de prise en compte de la précarité de leurs
conditions de travail ;
ü d’autre
part, d’une méconnaissance des risques auxquels elles sont exposées, différents
de ceux de leurs homologues masculins du fait de secteurs d’activité différents
[NDR – Voir à ce sujet une étude de la Dares sur les différences des
expositions professionnelles entre hommes et femmes commentée dans la lettre
d’information du 19 février 2023 sur le blog].
Sous-estimation de la pénibilité
des activités majoritairement féminines
Les secteurs d’activité fortement
féminisés font l’objet d’une sous-évaluation de leur pénibilité et des risques alors
que ces métiers féminins sont exposés à des risques professionnels conséquents.
Ceci a été relevé par l’Anact qui
estime que dans les secteurs de la santé et du social, du nettoyage, de
l’intérim, du commerce et des industries de l’alimentation, dans lesquels de
très nombreuses femmes travaillent, les risques professionnels sont
vraisemblablement sous-évalués et les politiques de prévention insuffisamment
développées.
Ainsi, comme le montre l’étude de
l’Anact « Photographie statistique de la sinistralité au travail en
France selon le sexe », alors que la sinistralité par accidents de
travail a globalement diminué, elle a augmenté de 42% chez les femmes entre
2001 et 2019. En 2019, le nombre d’accidents du travail est plus élevé dans les
activités de services (santé, action sociale, nettoyage, travail temporaire) à
prédominance féminine (106 039) que dans le BTP (72 444). [NDR – Ces
données sont issues du document de l’Anact mentionné ci-dessus commenté dans la
lettre d’information du 17 juillet 2022, voir le blog.]
Par ailleurs, dans de nombreux
métiers féminins, les femmes sont exposées à des ports de charges dépassant la
norme des 25 kg prescrits par le Code du travail [article R.
4541-9 du Code du travail]. Il en est
ainsi pour des ouvrières, des infirmières, des aides-soignantes et des aides à
domicile.
Les auteures du rapport constatent,
en s’appuyant sur plusieurs entretiens, que la pénibilité est minimisée dans
les métiers considérés comme « typiquement féminins ».
De plus, les risques professionnels
auxquels les femmes sont exposées sont davantage invisibles, silencieux, liés à
une usure physique et psychique par rapport à ceux auxquels sont exposés les
hommes. Il en est ainsi des TMS qui touchent majoritairement les femmes qui
sont moins apparents que les accidents du travail dont un certain nombre sont
mortels touchant majoritairement les hommes. De même, les risques psychosociaux
dont elles sont plus victimes que les hommes sont peu visibles [NDR – Voir à ce
sujet les résultats des quinzaines des maladies à caractère professionnel dans
la lettre d’information du 23 avril 2023 sur le blog.
Ces quinzaines des maladies à caractère professionnel montrent que les TMS et
la souffrance psychique sont plus fréquents chez les femmes que chez les
hommes.]
Invisibilisation des cancers
professionnels affectant les femmes
Le Centre international de
recherche sur le cancer a classé en 2007 le travail posté de nuit comme
probablement cancérogène pour le cancer du sein et en 2019 il a conclu que le
travail de nuit posté est un facteur de risque de cancer du sein.
Une étude publiée en 2018 a montré
que le risque de cancer du sein augmente de 26% en cas de travail de nuit chez
des femmes non ménopausées. Par ailleurs, ce risque de cancer du sein est deux
à trois fois plus élevé chez des femmes qui ont travaillé au moins deux nuits
par semaine pendant plus de 10 ans.
Cependant, malgré une exposition
importante des femmes à ce facteur de risque, il y a peu de cancers du sein
reconnus comme maladie professionnelle [NDR – A signaler récemment la
reconnaissance d’un cancer du sein pour une infirmière ayant travaillé de nuit
dans un hôpital dans l’Est de la France. Voir en pièce jointe à ce sujet un
article du Monde].
Exposition à des cancérogènes dans
certaines activités
Les auteures du rapport citent les
travaux du Giscop 93 qui a mis en évidence l’exposition à une combinaison
d’agents biologique et à des polluants organiques dans des activités de soin et
de nettoyage dans lesquelles les femmes sont beaucoup plus présentes que les
hommes. Le Giscop 84 aurait identifié l’utilisation de 7 agents cancérogènes
dans les produits de nettoyage ainsi qu’une exposition à l’amiante du fait de
l’utilisation de brosses de nettoyage.
Du fait de leur parcours
professionnel, plus haché, ne permettant pas les durées ou les intensités
d’exposition exigées par les tableaux, un moindre nombre de femmes pourraient
déclarer une maladie professionnelle et, parmi celles qui le feraient, il y aurait
un moindre taux de reconnaissance
Le cancer de l’ovaire
Depuis 2012, le Circ considère
qu’il y a un lien causal entre le cancer de l’ovaire, et du larynx, et
l’exposition à l’amiante.
L’Anses a publié un rapport à ce
sujet et considère que ces deux cancers peuvent être liés à une exposition à
l’amiante et recommande la création de tableaux de maladies professionnelles à
leur sujet.
[NDR – Un décret créant un tableau
30 ter consacré aux cancer du larynx et de l’ovaire a été présenté à la
commission spécialisée des maladies professionnelles du Conseil d’orientation
des conditions de travail et devrait être publié.]
Deux professions sont
particulièrement exposées au cancer de l’ovaire, avec plus de 50% des femmes
exposées à l’amiante : les conductrices de machines textiles et les
ouvrières non qualifiées de l’électricité et de l’électronique.
En outre, de nombreuses activités
professionnelles sont effectuées dans un environnement contaminé par l’amiante,
par exemple dans l’administration, l’enseignement, ou la santé.
Des conditions de travail
difficiles et des situations de précarité fréquentes
Les femmes exercent souvent des
professions où les conditions de travail sont difficiles.
Elles sont de plus exposées de
façon croissante à des horaires de travail atypiques avec des journées de
travail morcelés, des horaires de nuit, une activité tôt le matin ou tard le
soir.
Il en est ainsi des horaires morcelés
dans des secteurs à prédominance féminine comme le nettoyage ou l’aide à
domicile qui conduisent à une amplitude des horaires importante avec des
déplacements fréquents.
Une expertise menée par l’Anses
entre 2012 et 2016 a permis de mettre en évidence plusieurs effets, avec des
niveaux de preuve différents, sur la santé des femmes des activités dans
certains secteurs avec travail de nuit :
ü effets
sur la somnolence, les troubles du sommeil et les troubles métaboliques ;
ü des
effets probables sur la santé psychologique, l’anxiété, la dépression, le burn
out, les performances cognitives, l’obésité, la prise de poids, le diabète, les
maladies coronariennes ainsi que le cancer du sein ;
ü des
effets possibles sur l’augmentation du taux de lipides sanguins, l’hypertension
artérielle et les accidents vasculaires cérébraux.
Les femmes connaissent des
évolutions de carrière globalement moins rapides que celles des hommes. Elles
restent donc plus longtemps dans des emplois opérationnels très exposés aux
risques professionnels.
De plus, les femmes sont plus
exposées à la précarité de l’emploi que les hommes, en particulier à des
emplois avec du temps partiel subi.
Des expositions
différenciées aux risques professionnels
Du fait des métiers exercés
différemment par les hommes et les femmes, ces dernières sont susceptibles
d’être plus exposées à certains facteurs de risque professionnels.
Le risque de troubles
musculo-squelettiques
Les femmes sont ainsi plus exposées
à des risques de survenue de troubles musculo-squelettiques (TMS) et aux
sollicitations psychosociales.
Alors que les hommes sont plus
exposés à des tâches pénibles physiquement reconnues comme telles (port de
charges, travail dans un environnement agressif, comme dans le BTP), les femmes
exercent des métiers où elles doivent se dépêcher, répéter continuellement une
même série de gestes ou d’opérations avec pour une partie de ces métiers des horaires
peu flexibles, physiquement pénibles et / ou exposant à une charge mentale ou
des comportements hostiles.
Ainsi, les femmes, comme on l’a déjà
dit, sont plus exposées que les hommes au risque de TMS, à la fois en fréquence
et en intensité.
L’Anact dans le rapport sur la photographie
des risques professionnels rapporte que la fréquence des TMS, pour un million
d’heures salariées, pour les femmes est de 17.8 contre 11.5 chez les hommes. De
même, l’indice de gravité est plus élevé chez les femmes que chez les hommes.
C’est aussi ce que démontrent les
quinzaines des maladies à caractère professionnel qui dénombrent des taux de
TMS chez les femmes de 4.4% contre 3.2% chez les hommes.
Une surexposition des femmes aux
risques psychosociaux
Comme on l’a vu, les femmes sont exposées
à certains facteurs de risque psychosociaux liés à leur activité comme le fait
de se dépêcher, de faire des tâches répétitives, de subir des horaires
atypiques qui sont susceptibles de retentir sur leur psychisme.
Les femmes sont aussi plus
spécifiquement exposées aux violences sexuelles et sexistes sur leur lieu de
travail.
Ainsi, l’enquête Conditions de
travail menée en 2013 montre que 8% des femmes et 1% des hommes déclarent avoir
subi un comportement sexiste au travail. Ce qui est encore plus important dans
les secteurs à prédominance masculine où 15% des femmes et 1% des hommes se
déclarent victimes de comportements hostiles à dimension sexiste.
Outre ces actes sexistes, les
femmes sont plus souvent victimes de faits de violence dans le cadre de leur
activité professionnelle.
Dans une étude sur les Violences et
les rapports de genre, réalisée en 2015, 18% des sujets déclarent avoir subi un
acte de violence dans les 12 mois précédant l’enquête. C’est le cas de 20% des
femmes et 16% des hommes.
Les victimes de ces violences,
comme l’a montré cette enquête, sont plutôt des femmes jeunes, célibataires, en
charge de famille monoparentale ou en difficulté financière qui sont déjà en
situation de précarité.
Cette exposition à des violences a
plusieurs effets sur la santé des femmes, le travail et leur vie
personnelle :
- « sur la santé, en particulier psychique,
des victimes : culpabilité, anxiété, dépression, insomnies, migraines, stress,
addictions, tentatives de suicide ;
- sur leur travail : perte de confiance dans leurs
compétences, isolement, absentéisme, retard, déconcentration, désinsertion
professionnelle ;
- sur leur vie personnelle : pertes financières en
cas d’arrêt maladie de plus de trois mois signant la fin des indemnités
journalières [NDR – Je
laisse la responsabilité de ce propos aux auteures], difficultés avec
l’entourage, rupture de vie sociale ;
- sur le collectif de travail : malaise des
témoins, ambiance de travail dégradée, tensions, clivage entre les salariés ;
- sur les
entreprises : risques de contentieux, atteinte à l’image, perte de talents, manque
d’attractivité. »
Focus sur
certains secteurs féminisés emblématiques des atteintes à la santé des femmes
Le secteur du soin
C’est un secteur d’activité à forte
prédominance féminine (80%).
Dans ce secteur d’activité, dans
une étude menée pour une mutuelle hospitalière, un quart des répondants se
déclarent en mauvais état de santé, soit deux fois plus que la population
active en général.
Les femmes qui travaillent dans ce
secteur indiquent être exposées au port de charges lourdes et à une pénibilité
physique importante.
Elles sont aussi souvent exposées à
des horaires de travail atypiques, en particulier du travail de nuit.
Une étude de la Dares, publiée en
2022, relève que 22% des infirmières et 15% des aides-soignantes travaillent de
nuit et le week-end. Ce qui n’est pas sans entraîner des répercussions néfastes
sur leur état de santé.
Dans ces métiers, il y a aussi une
forte exposition à des facteurs de risque professionnels tels que les exigences
émotionnelles, les contraintes organisationnelles et le manque de
reconnaissance.
De plus, le secteur du soin est
particulièrement exposé aux incivilités et aux violences verbales, voire
physiques. Selon l’enquête de la mutuelle mentionnée ci-dessus, 29% des
professionnels de soin hospitaliers disent subir des agressions physiques.
Le secteur du nettoyage
Dans ce secteur, les femmes sont
aussi majoritaires, à 80% selon la Dares.
Elles sont exposées à des risques
physiques, chimiques et organisationnels.
Selon la Dares, 90% des salariés de
ce secteur sont exposés à au moins un risque physique, en particulier au
travail répétitif (71%) ou à des postures pénibles (52%).
L’état de santé des travailleurs de
ce secteur est notablement altéré avec, entre 60 ans et 62 ans, 50% des
salariés, ou des anciens salariés, qui déclarent une limitation pour effectuer
des gestes quotidiens contre 30% dans l’ensemble de la population active. Il y
a dans ce secteur 7% des licenciements pour inaptitude alors que les salariés
de ce secteur ne représentent que 1.8% des contrats à durée indéterminée.
Le risque chimique est aussi
important et peu mesuré. Sept substances cancérogène sont présentes dans des
produits couramment utilisés pour le nettoyage. Et la présence de ces substances
ne doit être indiquée, dans les produits de nettoyage, que si elle dépasse 5%.
Les femmes travaillant dans ce
secteur sont aussi exposées à l’amiante à travers l’exposition à des sols
amiantés présents dans de nombreux locaux publics, en particulier les écoles et
les hôpitaux. L’action des brosses est susceptible de mettre en suspension dans
l’air des fibres d’amiante.
L’organisation du travail dans ce
secteur peut aussi jouer un rôle délétère sur la santé des femmes. Les emplois dans
ce secteur sont très souvent à temps partiel, les horaires sont le plus souvent
décalés mais comme ils n’ont le plus souvent pas lieu entre minuit et cinq
heures, le travail n’est pas considéré de nuit, et le travail est haché.
Du point de vue psychosocial, il y
a aussi une exposition à une activité isolée, un management strict (et souvent
masculin) et une faible autonomie.
Le secteur de la grande
distribution
Ce secteur est féminisé à 60%. Dans
ce secteur, les femmes occupent les trois-quarts des postes de caisses et elles
ont, pour 40% d’entre elles, des postes à temps partiel.
Dans ce secteur, on constate une
sinistralité assez importante en termes d’accidents du travail et de maladies
professionnelles.
En particulier, on constate de très
nombreux TMS liés à des contraintes biomécaniques et physiques (manutention de
charges, gestes répétitifs) et psychosociales (fragmentation des horaires,
contact avec le public, management strict, etc…).
Le secteur du mannequinat et de
l’accueil
Ces métiers sont par essence
féminins.
Les mannequins sont majoritairement
des femmes de 16 à 30 ans qui sont recrutées pour leur physique et leur âge.
Après 35 ans, il est plus difficile de trouver du travail.
La profession de l’accueil est
aussi à prédominance féminine avec des hôtesses très jeunes, en général de
moins de 25 ans sauf en accueil en entreprise où elles peuvent être plus âgées.
Les risques professionnels auxquels
sont exposées les mannequins, selon un service de prévention et de santé au
travail spécialisé dans ce secteur, sont :
ü des
contraintes de travail (multiplicité des lieux de travail avec déplacements
professionnels y compris avec décalages horaires, horaires atypiques, travail
de nuit, postures pénibles, risque routier lors des déplacements) ;
ü des
risques physiques avec exposition à la lumière artificielle, bruit et musique,
ambiances thermiques et climatiques, exposition à des poussières ;
ü risque
biologique lié au risque infectieux interhumain ;
ü risque
chimique du fait de l’exposition à des produits allergisants, sensibilisants,
irritants tels que les parfum, les produits capillaires, les cosmétiques ;
ü le
risque d’accident, de chute d’agressions verbales et physiques, le risque
routier lors des déplacements ;
ü les
risques psychosociaux en lien avec la précarité de l’emploi, des employeurs
multiples, des contraintes organisationnelles (rythmes de travail irréguliers,
travail intermittent), relationnelles, etc… ;
ü du
fait de la nécessité de maintenir une minceur souhaitée par les employeurs, les
mannequins présentent souvent des comportements alimentaires délétères pour
leur santé.
Les hôtesses d’accueil peuvent
aussi être exposées à des conditions de travail difficiles, des horaires
imprévisibles et atypiques et une dévalorisation de leurs compétences.
De plus, tant les mannequins que
les hôtesses d’accueil sont exposées aux violences sexuelles et sexistes.
Les
recommandations
Recommandation n° 1
Développer l’élaboration et
l’exploitation, par les organismes producteurs de statistiques publiques, de
données sexuées et croisées sur la sinistralité au travail.
Recommandation n° 2
Faire de l’approche genrée de la
santé au travail et de la conception de politiques de prévention spécifiquement
dédiées aux femmes un des axes stratégiques principaux du prochain PST
(2026-2030).
Recommandation n° 3
Sur le modèle du plan régional de
santé au travail (PRST) de Bretagne, encourager l’ensemble des régions à intégrer,
au sein de leur PRST, une analyse différenciée de l’évaluation des risques en
fonction du sexe et des actions spécifiques dédiées à la prise en compte de la
santé des femmes au travail dans toutes ses dimensions.
Au sujet de ces deux dernières recommandations,
les auteures s’appuient sur le modèle du PRST 4 de Bretagne qui a créé un focus
visant à identifier les spécificités de la population féminine en lien avec ses
expositions professionnelles et la sinistralité à laquelle elle est confrontée.
Recommandation n° 4
Faire appliquer par les employeurs
l’obligation légale d’un Document unique d’évaluation des risques
professionnels (DUERP) genré et les inciter à intégrer dans ce document des
risques auxquels les femmes sont plus particulièrement exposées, tels que les
violences sexuelles et sexistes au travail, les risques psychosociaux ou les
TMS.
Recommandation n° 5
Inscrire dans le code du travail
l’obligation d’une approche sexuée des risques professionnels au sein des
fiches d’entreprise établies par la médecine du travail, par parallélisme avec
le DUERP.
Recommandation n° 6
Former les professionnels de santé,
et en premier lieu les médecins du travail, l’Inspection du travail, l’ensemble
des préventeurs et les DRH à une approche genrée de la santé au travail.
Recommandation n° 7
Élaborer une Stratégie nationale
globale pour la santé des femmes incluant un volet « santé au travail » et
renforcer le rôle pivot de la médecine du travail dans le suivi de la santé des
femmes au travail.
Selon les auteures, ce volet de
santé au travail inclus dans la stratégie nationale de santé pourrait
représenter un levier d’amélioration de la santé des femmes en général, en
particulier pour les femmes les plus précarisées ayant moins accès aux soins et
aux dispositifs de prévention. Ceci se heurtant bien évidemment au manque de
ressources en termes de médecins du travail.
Recommandation n° 8
Généraliser le développement de
maisons des soignants sur tout le territoire.
Recommandation n° 9
Adapter les mesures de prévention
primaire et secondaire aux caractéristiques anthropométriques et aux conditions
de travail des femmes, notamment dans les secteurs à prédominance féminine.
Recommandation n° 10
Renforcer les sanctions légales à
l’encontre des employeurs ne respectant pas les obligations d’aménagement de
poste après un arrêt de travail de longue durée.
C’est une recommandation qui
pourrait être bénéfique pour l’ensemble des salariés, que ce soient des femmes
ou des hommes.
Recommandation n° 11
Renforcer les moyens humains,
notamment ceux de la médecine et de l’inspection du travail, dédiés au contrôle
de l’application par les employeurs des mesures de prévention et de santé au
travail.
Recommandation n° 12
Encourager l’accès de toutes les
femmes aux services de prévention et de santé au travail dans le cadre de leur
parcours professionnel.
Recommandation n° 13
Faciliter la reconnaissance en
maladie professionnelle, d’une part, du cancer du sein en lien avec le travail
de nuit, d’autre part, du cancer des ovaires en lien avec une exposition à
l’amiante.
Recommandation n° 14
Revoir la liste des critères de
pénibilité en l’adaptant à la réalité des risques professionnels féminins.
Recommandation n° 15
Ajouter l’endométriose à la liste
des affections de longue durée (ALD 30), permettant de supprimer le délai de
carence et donc les pertes financières en cas d’arrêts de travail répétés.
Recommandation n° 16
Généraliser la mise en œuvre du programme ENDOpro, développé par la
Fondation pour la recherche sur l’endométriose, aux employeurs privés et
publics.
L’endométriose touche près de 10% des femmes et génère
un retentissement important sur leur capacité à assumer pleinement leurs
activités professionnelles, ce qui justifierait de plus s’intéresser à cette
pathologie qui est, en outre, souvent dépistée avec un important retard.
Recommandation n° 17
Inciter les branches à négocier des
mesures d’aménagement des conditions de travail des femmes atteintes de
pathologies menstruelles incapacitantes (poste de travail, temps et horaires de
travail, évolution de carrière).
Certaines entreprises ont déjà mis
en œuvre un congé pour règles menstruelles douloureuses (voir en pièce jointe
un article du Figaro à ce sujet) et une proposition de loi a été faite afin
d’intégrer cela dans le Code du travail, prenant exemple sur l’Espagne qui l’a
déjà fait. Il s’agit de la
proposition de loi à l’Assemblée nationale n°1219
relative à la prise en compte de la santé menstruelle.
Recommandation n° 18
Assurer une meilleure communication
des employeurs auprès des femmes enceintes sur l’ensemble de leurs droits
pendant la grossesse.
Les auteures du rapport relèvent
qu’il y a encore une fréquence importante de discriminations liées avec la
grossesse ou la maternité. Ce qui a été relevé par le Défenseur des droits dans
ses rapports sur la discrimination liée à l’emploi.
Recommandation n° 19
Étendre le régime des absences
autorisées par la loi, dans le cadre d’un parcours d’AMP (Assistance médicale à
la procréation), afin notamment de permettre un accompagnement dans la durée
des conjoints ou conjointes de femmes engagées dans ce parcours.
Recommandation n° 20
Mettre en place une stratégie
nationale de lutte contre l’infertilité avec un volet « travail », renforçant
notamment le rôle de la médecine du travail dans la diffusion d’information sur
la prévention de l’infertilité.
Recommandation n° 21
Rendre les parcours d’AMP plus
efficaces en incitant les professionnels de santé à s’adapter à la vie
professionnelle des femmes qu’ils suivent.
Les problèmes d’infertilité sont
fréquents, touchant 15% des couples, et le poids du traitement de de l’assistance
médicale à la procréation repose toujours sur les femmes. Hors, Les auteures du
rapport constatent que ces démarches pour une assistance médicale à la
procréation sont longues et créent de fortes contraintes pour les femmes en
activité en termes d’exploration et de traitement, générant le besoin
d’absences au travail.
Recommandation n° 22
Mieux informer, dans le milieu
professionnel, les employeurs, les employés et les professionnels de santé sur
la symptomatologie de la ménopause, et réfléchir à une adaptation des
conditions de travail en conséquence.
Recommandation n° 23
Actualiser les recommandations de
la Haute Autorité de Santé relatives aux traitements hormonaux de la ménopause.
https://www.senat.fr/notice-rapport/2022/r22-780-1-notice.html
Je
vous souhaite, à toutes et tous, en départ au mois d’août, d’excellentes
vacances… A bientôt…
Jacques Darmon
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