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Le 24 avril 2022
Au sommaire de
cette lettre d'information… Plusieurs textes de loi… Trois décrets… le premier
relatif à la création du tableau 102 du Régime général pour le cancer de la
prostate lié à une exposition aux pesticides… le second à la composition et au
fonctionnement du comité d'évaluation des textes limitant l'emploi des
personnes atteintes de certaines pathologies… et le troisième autorisant
infirmiers et infirmières à administrer des vaccins sans prescription médicale
préalable… Et un arrêté précisant les personnes auxquelles ces vaccins peuvent
être administrés… Des jurisprudences… l'une du Conseil d'Etat relative à un
préjudice d'anxiété pour un marin non directement exposé à l'amiante par son
métier… une autre traitant du manquement de l'employeur à son obligation de
sécurité même si un harcèlement moral n'est pas reconnu… Une étude fort
intéressante publiée dans le BEH sur le stress professionnel ressenti selon diverses
origines d'immigrés et d'enfants d'immigrés comparé à celui de la population
majoritaire… Et une étude sur l'évolution de la symptomatologie lors d'un
Covid-19 long…
Vous pouvez
accéder à mes lettres d’information depuis janvier 2019 sur un blog à l’adresse
suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.
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Textes de loi, réglementaires, circulaires, instructions, questions
parlementaires, Conseil d'Etat
Décret nº 2022-573 du 19 avril 2022
révisant et complétant les tableaux des maladies professionnelles annexés au
livre IV du code de la sécurité sociale
Ce décret, entrant en vigueur le 20 avril
2022, crée le tableau des maladies professionnelles n° 102 dont le tire est "
Cancer de la prostate provoqué par les pesticides ".
Le décret précise que " Le terme « pesticides » se rapporte aux
produits à usages agricoles et aux produits destinés à l'entretien des espaces
verts (produits phytosanitaires ou produits phytopharmaceutiques) ainsi qu'aux
biocides et aux antiparasitaires vétérinaires, qu'ils soient autorisés ou non au
moment de la demande. "
Les conditions du tableau sont les
suivantes :
ü la pathologie
désignée dans la colonne de gauche est " cancer de la prostate " ;
ü la colonne du
milieu précise le délai de prise en charge qui est de 40 ans après la fin de
l'exposition, sous réserve d'une durée d'exposition d'au moins 10 ans ;
ü enfin, la colonne
de droite indique une liste limitatives des travaux susceptibles d'avoir
entraîné la survenue de la pathologie : " Travaux exposant
habituellement aux pesticides :
- lors de la manipulation
ou l'emploi de ces produits, par contact ou par inhalation ;
- par contact avec
les cultures, les surfaces, les animaux traités ou lors de l'entretien des
machines destinées à l'application des pesticides ;
- lors de leur
fabrication, de leur production, de leur stockage et de leur conditionnement ;
- lors de la
réparation et du nettoyage des équipements de production, de conditionnement et
d'application de pesticides ;
- lors des
opérations de dépollution, de collecte et de gestion des déchets de pesticides.
"
À noter que ni le tableau 101 – le cancer
du rein lié à l'exposition au trichloroéthylène - ni le présent tableau ne
figurent dans la liste des
tableaux des maladies professionnelles du Régime général sur le site de
l'Inrs.
La présomption de reconnaissance en
maladie professionnelle du cancer de la prostate liée à l'exposition aux
pesticides a été prévue par le tableau n° 61 du Régime
agricole créé par un décret du 20 décembre 2021.
En revanche, s'il existe le tableau n° 58 des maladies
professionnelles du Régime agricole consacré à la maladie de Parkinson liée à
l'exposition aux pesticides créé par un décret de 2012, ce n'est pas le cas
pour le Régime général.
Pour information, le bilan 2020 des CRRMP
commenté dans la lettre d'information du 10 avril 2022 (voir le blog) indique (diapo
12) que 16 cancers de la prostate ont été soumis aux CRRMP au titre de l'alinéa
7 de l'article L. 461-1 du Code de la Sécurité sociale dont seuls 3 ont été
reconnus (sans que l'on sache quelle en est la cause).
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045602348
Décret n° 2022-606 du 22 avril 2022
relatif à la composition, au fonctionnement et à l'organisation du comité
d'évaluation des textes encadrant l'accès au marché du travail des personnes
atteintes de maladies chroniques
La loi n° 2021-1575
du 6 décembre 2021
relative aux restrictions d'accès à certaines professions en raison de l'état
de santé a prévu de toiletter les textes en vigueur, en particulier prévoyant
des restrictions d'accès à certaines activités pour certaines pathologies, en
fonction de l'évolution des connaissances, notamment en termes de traitements
(voir sur le blog la lettre
d''information du 12 décembre 2021).
Cette loi a créé un comité chargé
d'évaluer les textes.
Le présent décret, dans son article 1, détermine
la composition de ce comité qui comprend 16 membres :
ü
huit
représentants de l'Etat :
a) Le
directeur des ressources humaines du ministère de la transition écologique ;
b) Le
directeur des ressources humaines du ministère de la défense ou son
représentant ;
c) Le directeur
central du service de santé des armées ou son représentant ;
d) Le directeur des ressources humaines du
ministère de l'intérieur ou son représentant ;
e) Le
directeur général du travail ou son représentant ;
f) Le délégué
général à l'emploi et à la formation professionnelle ou son représentant ;
g) Le
directeur général de la santé ou son représentant ;
h) Le
directeur général de l'administration et de la fonction publique ou son
représentant ;
ü quatre personnalités qualifiées reconnues pour leurs
compétences dans le champ de la santé au travail ainsi que des soins, de
l'épidémiologie et de la recherche sur les maladies concernées ;
ü quatre représentants d'associations agréées de personnes
malades ou d'usagers du système de santé, désignés au titre de l'article
L. 1114-1 du code de la santé publique.
Les quatre personnalités qualifiées et les
quatre représentants d'associations seront nommés par arrêté conjoint du
ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la santé au travail.
L'article 2 précise des modalités de fonctionnement
:
" Pour l'exercice de sa mission,
le comité peut instituer des groupes techniques et solliciter le concours
d'experts.
Le secrétariat du comité est assuré à tour
de rôle, pour une durée d'un an, par les directions mentionnées aux e, f et g du
1° de l'article 1er.
Les dépenses de fonctionnement du comité
sont imputées sur le budget du ministère de rattachement de la direction
d'administration centrale qui assure le secrétariat du comité.
Le comité se réunit au moins deux fois par
an, sur convocation de son président qui fixe l'ordre du jour. Le président
peut également convoquer une réunion du comité sur proposition de la majorité
de ses membres.
Les membres du comité exercent leur mandat
à titre gratuit."
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045638680
Décret n° 2022-610 du 21 avril 2022
relatif aux compétences vaccinales des infirmiers et des pharmaciens d'officine
Ce décret modifie, à compter du 24 avril
2022, l'article R. 4311-5-1 du Code de la Santé publique en habilitant les
infirmiers " à administrer, sans prescription médicale préalable de
l'acte d'injection, dans les conditions définies à l'article R. 4311-3, aux personnes
dont les conditions d'âge et, le cas échéant, les pathologies sont précisées
par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de la Haute Autorité
de santé, les vaccinations suivantes :
1° Vaccination
contre la grippe saisonnière ;
2° Vaccination
contre la diphtérie ;
3° Vaccination
contre le tétanos ;
4° Vaccination
contre la poliomyélite ;
5° Vaccination
contre la coqueluche ;
6° Vaccination
contre les papillomavirus humains ;
7° Vaccination
contre les infections invasives à pneumocoque ;
8° Vaccination
contre le virus de l'hépatite A ;
9° Vaccination
contre le virus de l'hépatite B ;
10° Vaccination
contre le méningocoque de sérogroupe A ;
11° Vaccination
contre le méningocoque de sérogroupe B ;
12° Vaccination
contre le méningocoque de sérogroupe C ;
13° Vaccination
contre le méningocoque de sérogroupe Y ;
14° Vaccination
contre le méningocoque de sérogroupe W ;
15° Vaccination
contre la rage.
Pour ces vaccinations, l'infirmier ou
l'infirmière utilise des vaccins monovalents ou associés. "
L'infirmier ou l'infirmière doit inscrire
la dénomination du vaccin administré, sa date d'administration et le numéro de
lot dans le carnet de santé ou le carnet de vaccination et le dossier médical
partagé (DMP) du patient. A défaut, l'infirmier ou l'infirmière indique ces
informations dans le dossier de soins infirmier et délivre une attestation de
vaccination indiquant ces informations.
En l'absence de DMP, l'infirmier ou
l'infirmière, avec l'accord du patient, transmet les informations relatives à
la vaccination au médecin traitant par messagerie sécurisée de santé.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045638858
Arrêté du 21 avril 2022 fixant la liste
des personnes pouvant bénéficier des vaccinations administrées par un infirmier
ou une infirmière, sans prescription médicale préalable de l'acte d'injection
Cet arrêté détermine les sujets qui
peuvent être vaccinés par les infirmiers et infirmières selon l'article R.
4311-5-1 modifié par le décret évoqué ci-dessus et ainsi pratiquer l'une des 15
vaccinations qui y sont mentionnées.
Vaccination contre la grippe (1° du I de l'article R. 4311-5-1)
" L'infirmier ou l'infirmière peut administrer la vaccination
mentionnée au 1° du I de l'article R. 4311-5-1 du code de la santé publique aux :
1° personnes
majeures pour lesquelles cette vaccination est recommandée dans le calendrier
des vaccinations en vigueur, à l'exception des personnes présentant des
antécédents de réaction allergique sévère à l'ovalbumine ou à une vaccination
antérieure ;
2° personnes
majeures non ciblées par les recommandations vaccinales en vigueur, à
l'exception des personnes présentant des antécédents de réaction allergique
sévère à l'ovalbumine ou à une vaccination antérieure ;
3° personnes
mineures âgées de 16 ans et plus pour lesquelles cette vaccination est
recommandée dans le calendrier des vaccinations en vigueur, à l'exception des
personnes présentant des antécédents de réaction allergique sévère à
l'ovalbumine ou à une vaccination antérieure. "
Vaccinations mentionnées du 2° au 15° de
l'article R. 4311-5-1
Ces vaccins peuvent être administrés par
les infirmiers et infirmières aux :
" 1° personnes mineures âgées de 16
ans et plus pour lesquelles ces vaccinations sont recommandées dans le
calendrier des vaccinations en vigueur ;
2° personnes majeures pour lesquelles ces
vaccinations sont recommandées dans le calendrier des vaccinations en vigueur.
"
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045638961
·
Jurisprudence
Un préjudice d'anxiété peut être indemnisé, sans en exiger de
manifestations pathologiques, pour un agent dont le métier ne l'exposait pas
directement à l'amiante
Arrêt du Conseil d'Etat du 28 mars 2022 – CE n° 453378, publié au recueil Lebon – qui concerne
un marin.
Faits et procédure
Un agent, M. J…, a saisi le tribunal administratif de Rennes afin de faire
condamner l'Etat, en tant qu'employeur, à lui verser les sommes de 15 000 et 12
000 € en réparation respectivement d'un préjudice moral et des troubles causés
dans ses conditions d'existence. Cet agent avait effectué toute sa carrière
dans la Marine nationale. Il avait exercé des fonctions de commis aux vivres
sur des navires de la Marine nationale entre les années 1977 et 2001.
En 2016, il sollicite de la ministre des armées la réparation du préjudice
moral et des troubles dans ses conditions d'existence du fait de son exposition
à l'amiante sans avoir pu disposer de protections efficaces fournies par son
employeur.
En juin 2019, le tribunal administratif lui alloue une somme de 5 000 € au
titre de son préjudice moral et l'a débouté du surplus de ses demandes. Le
ministère a fait appel de cette décision.
La cour d'appel administrative, dans un arrêt du 6 avril 2021, a rejeté
l'appel formé contre la décision du tribunal administratif par le ministère des
armées et a rejeté les demandes complémentaires de l'agent.
Le ministère des armées se pourvoit en cassation devant le Conseil d'Etat
et demande l'annulation de l'arrêt de la cour d'appel administrative.
Cadre juridique
Le conseil d'Etat rappelle que " La personne qui recherche la
responsabilité d'une personne publique en sa qualité d'employeur et qui fait
état d'éléments personnels et circonstanciés de nature à établir une
exposition effective aux poussières d'amiante susceptible de l'exposer à
un risque élevé de développer une pathologie grave et de voir, par là même,
son espérance de vie diminuée, peut obtenir réparation du préjudice moral
tenant à l'anxiété de voir ce risque se réaliser. Dès lors qu'elle établit
que l'éventualité de la réalisation de ce risque est suffisamment élevée et que
ses effets sont suffisamment graves, la personne a droit à l'indemnisation
de ce préjudice, sans avoir à apporter la preuve de manifestations de troubles
psychologiques engendrés par la conscience de ce risque élevé de développer une
pathologie grave ".
Plus précisément, " Doivent également être regardés comme justifiant
d'un préjudice d'anxiété indemnisable, eu égard à la spécificité de leur
situation, les marins qui, sans intervenir directement sur des matériaux
amiantés, établissent avoir, pendant une durée significativement longue, exercé
leurs fonctions et vécu, de nuit comme de jour, dans un espace clos et
confiné comportant des matériaux composés d'amiante, sans pouvoir, en raison de
l'état de ces matériaux et des conditions de ventilation des locaux, échapper
au risque de respirer une quantité importante de poussières d'amiante
". (Ce qui constitue le point 3 de l'arrêt évoqué ci-dessous.)
Or, il en est ainsi des personnes qui sont intégrées dans le dispositif de
cessation anticipée d'activité régi par la loi n°
2015-1785 du 29 décembre 2015 qui vise à
compenser un risque élevé de baisse de l'espérance de vie des personnels ayant
effectivement été exposés à l'amiante [NDR – la loi du 29 décembre 2015 prévoit
à son article 120 que " Les militaires reconnus atteints, au titre de
leur activité en qualité de militaire, d'une maladie provoquée par l'amiante
figurant sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de la défense
peuvent demander à bénéficier d'une cessation anticipée d'activité et à
percevoir à ce titre une allocation spécifique "]. Les personnes
susceptibles de bénéficier de dispositif, doivent être considérées "
comme justifiant de ce seul fait d'un préjudice d'anxiété lié à leur exposition
à l'amiante. "
Pour le Conseil d'Etat, le montant de l'indemnisation du préjudice doit prendre
en compte les fonctions exercées et la durée d'exposition aux poussières
d'amiante.
Conclusion du Conseil d'Etat
" En premier lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que,
pour établir la réalité de l'exposition de M. J... aux risques d'inhaler des
poussières d'amiante lors de ses affectations à bord de bâtiments de la Marine
nationale, la cour administrative d'appel de Nantes a d'abord relevé
qu'il était constant que sur les navires de la Marine nationale construits
jusqu'à la fin des années quatre-vingt, l'amiante était utilisée de façon
courante comme isolant pour calorifuger tant les tuyauteries que certaines
parois et certains équipements de bord, que ces matériaux d'amiante avaient
tendance à se déliter du fait des contraintes physiques imposées à ces
matériels, de la chaleur, du vieillissement du calorifugeage, ou de travaux
d'entretien en mer ou au bassin, et qu'en conséquence, les marins
servant sur les bâtiments de la Marine nationale, qui ont vécu et travaillé
dans un espace souvent confiné, étaient susceptibles d'avoir été exposés à
l'inhalation de poussières d'amiante. Elle a ensuite mentionné
l'attestation du directeur du personnel militaire de la Marine du 13 mai 2013,
qui récapitule précisément les différentes affectations de M. J... et indique
que " pendant ces affectations ou mises pour emploi, l'intéressé a été
exposé aux risques présentés par l'inhalation de poussières d'amiante ".
Par suite, la ministre des armées n'est pas fondée à soutenir, que la cour
aurait insuffisamment motivé son arrêt, commis une erreur de droit et dénaturé
les faits et pièces du dossier en se fondant sur cette attestation, qui établit
à la fois la durée des fonctions de l'intéressé et la connaissance qu'il a eu
du risque auquel il a été exposé, pour établir l'exposition de M. J... au
risque d'inhaler des poussières d'amiante.
En second lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la
cour administrative d'appel, dont l'arrêt est suffisamment motivé, n'a
pas commis d'erreur de droit en jugeant, après avoir, par une appréciation
souveraine exempte de dénaturation, relevé que M. J... avait été exposé de
manière intensive, sans protection particulière, lors de ses affectations à
bord de navires de la Marine nationale, dans les conditions rappelées au point
précédent, à l'inhalation de poussières d'amiante pendant une durée totale
d'environ huit ans et quatre mois, qu'il avait ainsi été exposé à un risque élevé
de développer une pathologie grave de nature à engendrer un préjudice d'anxiété
indemnisable, alors même que ses fonctions de commis aux vivres
n'étaient pas de nature, par elles-mêmes, à l'exposer à un tel risque. Elle
n'a pas davantage inexactement qualifié les faits en déduisant de ces
circonstances qu'il pouvait légitimement craindre de voir son espérance de vie
diminuer du fait du manquement de son employeur à ses obligations de sécurité.
Enfin, elle n'a commis aucune erreur de droit en jugeant, sans exiger qu'il
produise des preuves de manifestations pathologiques de son anxiété, que M.
J... justifiait ainsi d'un préjudice moral indemnisable et elle n'a pas
dénaturé les pièces du dossier en évaluant celui-ci à la somme de 5 000 euros.
Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées n'est pas fondée à
demander l'annulation de l'arrêt attaqué. "
Arrêt de la chambre sociale de
la Cour de cassation du 23 mars 2022 – Cass. Soc. pourvoi n° 20-23272, inédit –
qui s'intéresse à ce qui peut qualifier un manquement de l'employeur à son
obligation de sécurité.
Faits et procédure
Une salariée, Mme D…, a été
embauchée en octobre 2009 par une caisse régionale du Crédit agricole en tant
que chargée de clientèle particulière.
Sur un avis du médecin du
travail, préconisant un rapprochement entre le lieu de travail et son domicile,
elle est mutée, à compter du 1er juillet 2011, dans une autre agence
avec une fonction de conseiller particuliers, sa position dans la grille
indiciaire passant de 9 à 6, ce qui correspond à une dégradation.
En mai 2017, elle saisit le
conseil de prud'hommes et demande la résiliation judiciaire de son contrat de
travail en raison d'un harcèlement moral de son supérieur hiérarchique qui a
conduit à un arrêt maladie à compter du 9 août 2016.
Le 16 juin 2017, elle est
déclarée inapte à tous postes. Elle est licenciée pour inaptitude avec
impossibilité de reclassement le 5 septembre 2017.
Devant le conseil de
prud'hommes, la salariée sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de
travail, subsidiairement la nullité de son licenciement et, encore plus
subsidiairement, que le licenciement soit reconnu sans cause réelle et
sérieuse.
A l'appui de ses demandes, la
salariée évoque un harcèlement moral et le manquement de son employeur à son
obligation de sécurité.
Elle est déboutée de ses
demandes devant la cour d'appel et elle saisit d'un pourvoi la Cour de
cassation.
Moyens soulevés
La salariée fait grief à
l'arrêt de la cour d'appel de ne pas avoir reconnu le harcèlement moral. Ce
moyen est rejeté par la Haute juridiction car il n'est pas susceptible
d'entraîner une cassation (dans ce domaine, l'appréciation des juges de fond
est souveraine s'ils ont respecté le droit).
En revanche, la Cour de
cassation prend en compte le grief de la salariée relatif au refus par la cour
d'appel de sa demande de reconnaître un manquement de l'employeur à son
obligation de sécurité et de l'indemnisation conséquente.
En particulier, la salariée
reproche à l'arrêt de la cour d'appel de ne pas avoir fait droit à sa demande
de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices nés du manquement de
l'employeur à l'obligation de prévention des risques, ainsi que de sa demande
en paiement d'une indemnité de préavis outre les congés payés afférents. Ceci
en raison du fait « que l'obligation de sécurité et de prévention du
harcèlement moral impose à l'employeur de mettre en place des actions de
prévention et de prendre les mesures nécessaires en cas de signalement de
harcèlement pour, s'il est avéré, y mettre fin ; qu'en écartant tout
manquement de l'employeur à l'obligation de prévention du harcèlement moral aux
motifs que l'employeur avait organisé une enquête une fois averti par la
salariée, sans s'expliquer sur le fait que l'enquête était intervenue un an
plus tard, que l'employeur n'avait pris aucune mesure suite à l'alerte reçue le
23 mai 2016, ni mis en place, en amont de toute difficulté, de
véritables actions de prévention dans l'entreprise , la cour d'appel a
privé sa décision de base légale au regard de l'article L.4121-1 du code du
travail. »
Réponse de la Cour de
cassation
Au visa des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail en vigueur
(liens vers la version applicable dans cet arrêt), la Cour de cassation écrit :
" Pour rejeter les demandes de la salariée au titre d'un manquement
de l'employeur à son obligation de sécurité et ses demandes subséquentes, l'arrêt
retient, d'une part, que l'employeur a mis en œuvre une procédure d'enquête au
cours de laquelle il a entendu les personnes pouvant avoir été témoin des faits
invoqués par la salariée et a saisi le comité d'hygiène, de sécurité et des
conditions de travail de sorte qu'il ne peut lui être reproché un défaut de
prévention à ce sujet, d'autre part que sur demande du médecin du travail,
il a trouvé en 2017 une nouvelle affectation pour la salariée, qui a échoué en
raison de l'avis d'inaptitude.
En se déterminant ainsi, alors que dans
ses conclusions la salariée invoquait l'inertie de l'employeur qui, bien
qu'averti de la dégradation des conditions de travail de la salariée dès
l'entretien annuel de 2015 par le commentaire écrit qu'elle y avait porté, puis
alerté d'abord le 23 mai 2016 par le médecin du travail, lequel, évoquant
une souffrance chronique au travail, l'invitait à prendre toutes
dispositions nécessaires à la poursuite de l'activité de la salariée dans des
conditions préservant l'état de santé de celle-ci pour qui il préconisait
un changement d'agence, et encore le 24 mai 2016 par un délégué syndical
dans un signalement effectué auprès de la direction des ressources humaines,
n'avait mis en place aucune action de prévention et avait réagi tardivement, et
seulement après la saisine du conseil des prud'hommes aux fins de
résiliation du contrat de travail en raison d'un manquement à l'obligation de
sécurité, en décidant le 13 juin 2017 d'une enquête, la cour d'appel a privé sa
décision de base légale. "
Pour la Haute juridiction, dans ce cas
d'espèce, le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité entraîne la
cassation des dispositions qui déboutent la salariée de ses demandes à titre de
dommages-intérêts du fait du manquement et au titre de la rupture de son
contrat de travail.
· Étude
du job strain, de l'iso strain et de l'anxiété selon l'origine (Étude)
L'étude intitulée " Prévalence des risques psychosociaux au travail et santé mentale parmi
les immigrés et descendants d'immigrés : résultats de l'enquête nationale
Conditions de travail – Risques psychosociaux 2016 " est publiée dans le Bulletin hebdomadaire n°
7 du 12 avril 2022 (p. 141 à 149). Elle est signée par Mme Anne Gosselin et al.
Vous pourrez y accéder en pièce jointe et sur le site de Santé publique France
à l'adresse en fin de commentaire.
Introduction
Une revue récente systématique de la littérature a montré que les
conditions de travail des immigrés dans leur pays de destination entraîne un
lourd fardeau en termes de morbidités physique et mentale. Cependant, les
études menées n'établissent pas de comparaison entre les données sur les
populations immigrées et sur la population autochtone.
Les risques psychosociaux (RPS) sont constitués par l'ensemble des
risques pour la santé mentale et physique liés aux conditions et à
l'organisation du travail.
En Europe, les immigrés occupent souvent des emplois peu qualifiés et
peu rémunérateurs. Ils constituent probablement une population particulièrement
exposée à des RPS au travail.
Une revue récente de la littérature sur les conditions de travail et la
santé des immigrés en Europe et au Canada a donné des résultats contradictoires
sur l'exposition à la demande psychologique mais, en termes de soutien social,
ils étaient soit à un niveau inférieur, soit, au mieux, au même niveau que les
natifs.
Les auteurs de cette revue ont noté que les immigrés étaient généralement
plus exposés au harcèlement et à la discrimination.
En France, la population immigrée représente 9% de la population et les
descendants d'immigrés 11%. Les immigrés sont principalement originaires
d'Afrique (46%) et d'Europe (33%), soit respectivement pour les descendants
d'immigrés 39% et 48% en 2008/2009.
Ces immigrés rencontrent des difficultés spécifiques sur le marché du
travail, ils sont, en particulier, plus souvent au chômage que la population
majoritaire.
Les enfants d'immigrés rencontrent aussi des difficultés relatives à
l'emploi notamment en lien avec des discriminations à l'embauche et dans leur
travail qui sont bien documentées en France.
Cette étude vise, à partir des données de l'enquête Conditions de
travail et Risques psychosociaux 2016, d'estimer :
ü
d'une part, la prévalence
du job strain et de l'iso strain (job strain et manque de soutien social) en
tenant compte des caractéristiques socio-démographiques et de l'origine des
immigrés et des caractéristiques de l'emploi ;
ü
d'autre part, d'apprécier
l'association entre job strain, iso strain et anxiété selon le statut
migratoire.
Matériel et méthodes
Cette étude transversale, basée sur l'enquête Conditions de travail –
Risques psychosociaux de 2016, a recueilli les données au domicile des sujets
entre octobre 2015 et juin 2016. Au cours de cette enquête, l'origine des
sujets et de leurs parents a été questionnée. Finalement, 19 212 sujets ont été
inclus dans l'étude.
La demande psychologique et la latitude décisionnelles ont été appréciées
par des questionnaires avec moins d'items que l'ensemble des questions du questionnaire
de Karasek (en règle générale utilisé pour apprécier la demande psychologique
et la latitude décisionnelle permettant d'estimer le job strain), de même que
le soutien social. Cependant, les résultats obtenus sont très proches de ceux
de l'ensemble de la population.
L'anxiété a été appréciée par l'échelle Gad-Mini du score anxieux
généralisé.
Les variables et co-variables prises en compte ont été le statut
migratoire, le sexe, l'âge, le niveau d'éducation, la catégorie
socio-professionnelle (CSP), le type de contrat, la taille de l'entreprise dans
laquelle le sujet travaille et la présence d'un travail de nuit ainsi que la
situation de famille et le fait d'avoir déjà fait une tentative de suicide au
cours de sa vie pour estimer la présence d'antécédents de santé mentale.
Résultats
Caractéristiques des sujets
Parmi les 19 212 sujets interrogés, 51.7% sont des hommes et 48.2% des
femmes. Les tranches d'âge comprennent 31.3% de sujets de 15 à 34 ans, 40.9% de
sujets de 34 à 49 ans et 27.7% de sujets de 50 ans et plus.
Du point de vue du statut migratoire, une majorité de 77.1% des sujets
sont natifs, 2.2% originaires des départements et régions d'Outre-mer (DROM),
6.1% descendant d'immigrés de l'Union européenne (UE), 5.6% descendants
d'immigrés d'Afrique, 1.8% descendants d'immigrés hors UE, 2.3% immigrés de
l'Union européenne (UE), 3.3% immigrés d'Afrique et 1.7% immigrés d'origine hors
UE et hors Afrique.
Le niveau d'éducation est primaire ou absent pour 12.7% des sujets, de
niveau secondaire pour 43.4% et de niveau supérieur pour 44%.
La répartition selon les caractéristiques de l'emploi est la suivante :
0.5% d'agriculteurs, artisans et chefs d'entreprise salariés, 19.7% de cadres
et professions intellectuelles supérieures, 28.8% de professions
intermédiaires, 17.4% d'employés qualifiés et 11.4% non qualifiés, 16.1%
d'ouvriers qualifiés et 6% de non qualifiés.
Selon le type de contrat, une majorité de 86% des sujets est en CDI ou
exerce dans la fonction publique, 11.7% sont en CDD, en intérim ou saisonniers,
19% sont en apprentissage ou en stage et 0.4% n'ont pas de contrat.
Une majorité des sujets travaille dans le privé (74.5%).
Une part importante des personnes interrogées travaillent dans de
petites ou moyennes entreprises : 47.5% dans celles de moins de 50 salariés,
34.5% dans celles de 50 à 499 salariés, 6.9% dans celles de 500 à 999 salariés
et 11% dans des entreprises d'au moins 1000 salariés.
Un taux de 15.4% de sujets travaille de nuit.
Prévalence du job strain et de l'iso strain
Prévalence du job strain
Globalement, à l'exception des personnes nées dans les DROM et les
immigrés d'Afrique, le job strain est plus fréquent chez les femmes que chez
les hommes.
Le taux de job strain le plus élevé est retrouvé chez les descendants
d'immigrés hors UE et hors Afrique (50%), suivi par celui des immigrés
d'Afrique (44%) et celui des descendants d'immigrés d'Afrique (36%). La
prévalence du job strain est la plus faible parmi les immigrés de l'UE des 27 (20%)
et la population majoritaire (32%).
Prévalence de l'iso strain
Les prévalences de l'iso strain sont plus faibles que celles du job
strain.
On retrouve cette prévalence de façon plus élevée chez les immigrés
d'Afrique (23%) et les descendants d'immigrés d'Afrique (20%). La prévalence de
l'iso strain est la plus faible chez les immigrés de l'UE des 27 (9%). Dans la
population majoritaire, la prévalence de l'iso strain est de 15%.
Prévalence de l'anxiété
La prévalence de l'anxiété dans la population étudiée est indiquée
ci-dessous avec précision de l'association avec le job strain et l'iso strain
lorsque l'augmentation de celle-ci est statistiquement significative.
Population majoritaire : 4% chez les hommes et 8% chez les femmes avec
facteur de 2.39 [1.87-3.06] pour l'association au job strain et 2.35 [1.83-3.03
pour celle à l'iso strain.
Population des DROM, prévalence de l'anxiété de 2% chez les hommes et
5% chez les femmes, pas d'association significative avec job strain et iso
strain.
Descendants d'immigrés de l'UE : prévalence de l'anxiété de 3% chez les
hommes et de 6% chez les femmes. Pas d'association significative avec job
strain ou iso strain.
Descendants d'immigrés africains : prévalence de 8% de l'anxiété chez
les hommes et 16% chez les femmes. Augmentation significative de l'association
avec le job strain (2.70 [1.22-6.01]) et, encore plus importante, avec l'iso
strain (4.26 [2.29-7.92]).
Descendants d'immigrés hors UE et hors Afrique : la prévalence de
l'anxiété est surtout marquée chez les femmes (13%) et faible chez les hommes
(1%). L'association est significative avec le job strain (4.11 [1.06-15.86])
et, surtout, l'iso strain (20.29 [6.34-64.88]).
Immigrés de l'UE : la prévalence de l'anxiété est de 4% chez les hommes
et de 10% chez les femmes. L'association n'est significative qu'entre anxiété
et job strain avec un facteur multiplicateur de 2.96 [1.04-8.39].
Immigrés d'Afrique chez lesquels la prévalence de l'anxiété est de 5%
chez les hommes et 4% chez les femmes avec une association significative de
l'anxiété seulement avec l'iso strain avec un facteur multiplicateur de 6.21
[1.03-37.45).
Facteurs associés au job strain et à l'iso strain
Je ne fournis les résultats de ces association que lorsqu'ils sont
statistiquement significatifs.
Il existe une augmentation de l'association statistiquement
significative avec le job strain pour les facteurs suivants (entre parenthèses le facteur multiplicateur et
l'intervalle de confiance à 95%) :
ü
le sexe, pour les femmes
par rapport aux hommes (1.35 [1.23-1.47]) ;
ü
un niveau éducatif faible
ou absent par rapport au secondaire servant de référence (1.14 [1.03-1.27]) ;
ü
un gradient croissant
d'association alors que l'on va des CSP + vers les CSP - , les cadres et professions intellectuelles supérieures étant
la référence : 1.98 [1.67-2.35]) pour les professions intermédiaires, 2.78
[2.32-3.34] pour les employés qualifiés, 3.23 [2.66-3.91] pour les employés non
qualifiés, 3.35 [2.78-4.03] pour les ouvriers qualifiés et 3.65 [2.96-4.50]
pour les ouvriers non qualifiés ;
ü
un facteur de 1.11
[1.02-1.21] pour le privé par rapport au public ;
ü
un facteur de 1.19
[1.05-135] pour les entreprises de 1000 salariés et plus, la référence étant
celles de moins de 50 salariés ;
ü
pour le travail de nuit
un facteur de 1.30 [1.15-1.43] par rapport au travail de jour.
L'association avec l'iso strain est statistiquement significative pour
les caractéristiques des sujets suivantes (entre parenthèses le facteur
multiplicateur et l'intervalle de confiance à 95%) :
ü
le sexe, les hommes
servant de référence, pour les femmes, 1.37 [1.19-1.58] ;
ü
les sujets descendants d'immigrés
d'Afrique (1.33 [1.05-1.69]), la référence étant celle de la population
majoritaire ;
ü
un niveau d'éducation
faible (1.21 [1.01-1.44]), la référence étant un niveau du secondaire ;
ü
on retrouve, comme, pour
le job strain (à l'exception des ouvriers non qualifiés) un gradient croissant
des CSP + allant vers les CSP - : les cadres et professions intellectuelles
supérieures étant la référence : 1.58 [1.23-2.02] pour les professions
intermédiaires, 2.03 [1.55-2.68] pour les employés qualifiés, 2.85 [2.15-3.77]
pour les employés non qualifiés, 2.93 [2.21-3.87] pour les ouvriers qualifiés
et 2.81 [2.03-3.90] pour les ouvriers non qualifiés ;
ü
le travail de nuit
augmente l'association de 1.30 [1.09-1.56].
Conclusion
" Notre étude donne les premières estimations des risques
psychosociaux parmi les immigrés et descendants d’immigrés en France en se
basant sur une enquête représentative de la population d’actifs au niveau
national. Elle montre que les immigrés et les descendants d’immigrés sont
particulièrement exposés au job strain et à l’iso-strain. Bien que ces
expositions au travail soient rarement mesurées, elles pourraient contribuer à
une moins bonne santé mentale parmi les immigrés originaires d’Afrique et leurs
descendants. Enfin, d’autres recherches sont nécessaires, incluant notamment la
question de la discrimination vécue par ces populations dans le cadre de
leur travail, pour mieux comprendre ces niveaux élevés de
risques psychosociaux. "
http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2022/7/2022_7_2.html
· Symptomatologie persistante dans la
Covid-19 (étude)
Cette étude a été publiée le 5 avril 2022 sur
internet par Nature communications sous le titre de " Course of post
COVID-19 disease symptoms over time in the ComPaRe long COVID prospective
e-cohort " (https://doi.org/10.1038/s41467-022-29513-z). Elle a été
signée par Viet-Thi Tran et al. Vous pouvez y accéder en pièce jointe et à
l'adresse internet en fin de commentaire.
Introduction
Entre le début de la pandémie et mars
2022, environ 437 millions de personnes ont été atteintes, dans le monde, par
le virus Sars-CoV-2, responsable de la Covid-19. Selon l'Office national des
statistiques du Royaume-Uni, environ 10% vont souffrir d'une symptomatologie
post-Covid que l'on dénomme Covid long caractérisé par la persistance chez les
patients infectés de symptômes tels que fatigue, dyspnée, douleurs thoraciques,
troubles cognitifs ou douleurs articulaires. Symptômes susceptibles de
persister plusieurs mois après l'infection initiale.
Peu d'études se sont intéressées au suivi
longitudinal de l'évolution de la symptomatologie post-Covid mais leur effectif
était en général faible, c'étaient des études rétrospectives et elles étaient
limitées à un seul centre.
Dans ce travail, les auteurs s'appuient
sur une cohorte nationale française de patients pour étudier l'évolution de
leur symptomatologie jusque un an après l'infection initiale.
Matériel et méthodes
Les données de cette étude sont issues du
programme ComPaRe qui suit une cohorte de patients atteints de la Covid-19. Ce
programme a débuté en décembre 2020.
Au sein des 1859 patients de cette
cohorte, la présente étude a inclus les données de 968 patients pour lesquels
une infection au Sars-CoV-2 a été confirmée par PCR et/ou par sérologie.
Afin d'améliorer la représentativité des données,
les auteurs ont redressé les données concernant les tranches d'âge, le sexe et
l'hospitalisation pendant la phase aiguë selon les données du Bureau national
de la statistique du Royaume-Uni. Les résultats présentés sont pondérés selon
cette méthode.
Les patients ont été suivis tous les 60
jours par questionnaire accessible sur ordinateur ou smartphone. A chaque
point, il était demandé aux patients s'ils avaient encore des symptômes en lien
avec la Covid-19. Ceux qui répondaient positivement remplissaient un
questionnaire qui estimait la présence des 53 symptômes pris en compte dans
cette étude. En outre, six items ont été suivis durant ce programme : le
retentissement de la symptomatologie sur les activités personnelles et
professionnelles, les activités sociales, le moral, la famille, les relations
avec les soignants et le sentiment d'inacceptabilité de la maladie.
Le suivi médian des patients a été de 181
jours (118-240 jours).
Résultats
Caractéristiques des patients
Après redressement des données, il y a
57.7% d'hommes. L'âge moyen est de 48 ans.
Les tranches d'âges les plus représentées
sont les 35-49 ans (26.8%) et les 50-69 ans (34.6%).
Une majorité des patients (57.8%) avaient
un niveau d'éducation d'au moins trois ans d'enseignement supérieur.
Les patients étaient, pour 35.1% d'entre
eux, atteints d'au moins une comorbidité. Les comorbidités les plus fréquentes
retrouvées chez les patients étaient des atteintes pulmonaires (6.3%), de
l'hypertension (4.2%), des troubles de l'humeur (4.1%) et un diabète (2.6%).
Le temps à l'inclusion depuis l'infection
était en médiane de 174 jours (97-284) et 7.7% des patients avaient été
hospitalisés dont 3.5% dans une unité de soins intensifs. L'hospitalisation
avait eu une durée médiane de 12 jours (3-26 jours).
Durant le suivi, une rémission de la
symptomatologie a été constatée chez 150 patients. Néanmoins, chez 50 de ces
patients, une récidive est survenue pour au moins un symptôme. Au final, au
terme de 12 mois, 84.9% des patients présentaient encore un ou des symptômes.
Les rémissions, ont commencé à apparaître
à compter du 120e jour puis elles ont augmenté régulièrement
jusqu'au 360e jour pour atteindre un taux d'environ 15%.
Évolution de la symptomatologie au cours
du temps
Au cours de l'étude, la prévalence entre
le 60e jour et le 360e jour, de 27 (51%) des symptômes a
diminué, elle est restée quasiment stable pour 18 symptômes (31%) et elle a
diminué pour 8 symptômes (18%).
Parmi les symptômes dont la prévalence est
la plus élevée (supérieure à 40%) et qui ont diminué entre le 60e
jour et le 360e jour on retrouve (entre parenthèses, respectivement les
taux de prévalence au 60e et au 360e jour et le
différentiel de taux) :
ü la fatigue (93% et
81%, - 12%) ;
ü les céphalées
(82.8% et 63.7%, - 19.1%) ;
ü le brouillard cérébral
et les troubles de la concentration (71.8% et 60.2%, - 11.6%) ;
ü les troubles du
sommeil (70.1% et 60.8%, - 9.9%) ;
ü les troubles de
l'humeur et l'impact sur le moral (61.1% et 46.2%, - 14.9%) ;
ü les troubles de la
mémoire (57.27% et 50.2%, -5.5%) ;
ü les
sensations vertigineuses et les malaises (55.2% et 43.3%, -11.9%) ;
ü les
modifications ou la perte du goût (46.9% et 24.1%, -22.8%) ;
ü la
toux (44.6% et 21.8%, - 22.8%) ;
ü une
oppression thoracique (44.1% et 33.7%, - 10.4%) ;
ü les
manifestations cardiaques telles que tachycardie, palpitations et arythmie
(43.8% et 33%, - 10.8%) ;
ü des
courbatures (43.6% et 38.3%, - 5.3%) ;
ü de la fièvre et
des frissons (41% et 22.9%, - 18.1%).
Parmi les symptômes dont la prévalence a
peu diminué ou peu augmenté, que l'on considère comme stables, dont la
prévalence est globalement plus faible que celle des symptômes mentionnés
ci-dessus, on retrouve :
ü la difficulté à
trouver ses mots (47.5% et 48.3%, + 0.8%) ;
ü la dyspnée (44.2%
et 44.5%, + 0.3%) ;
ü des sensations
auditives anormales (38.9% et 36.1%, - 2.8%) ;
ü une congestion ou un
écoulement nasal (33.9% et 34.1%, + 0.2%) ;
ü des douleurs
costales (29.9% et 25.8%, - 4.1%).
Enfin, parmi les symptômes dont la
prévalence a augmenté on retrouve :
ü des douleurs
osseuses et articulaires (32.2% et 41.4%, + 9.2%) ;
ü une sécheresse
oculaire (23.9% et 28.4%, + 4.5%) ;
ü des douleurs
vertébrales aux niveaux du cou, du dos et lombaire (23.4% et 38.5%, + 15.1%) ;
ü des paresthésies
(21.1% et 33.7%, + 12.6%).
Évolution du retentissement sur la vie des
patients
Quoique avec des niveaux de prévalence
différents, les six items permettant d'apprécier le retentissement de la
symptomatologie ont évolué de façon assez semblable.
Leur prévalence assez élevée au 60e
jour a diminué pour atteindre un point bas entre le 220e et le 260e
jour. Puis la prévalence de ces items a augmenté jusqu'au 360e jour sans
cependant, pour la majorité d'entre eux, atteindre le niveau initial.
Les niveaux de prévalence les plus élevés
concernaient le sentiment d'inacceptabilité de la maladie et le retentissement
sur les activités professionnelles. Dans ces deux items en particulier, la
prévalence était plus faible au 360e jour qu'au 60e.
Conclusion
Cette étude montre que la plupart des
patients avec une atteinte post-Covid présentent des symptômes qui évoluent
selon différentes modalités mais persistent encore chez une majorité de patients à un an. La guérison de
l'infection aigue est un processus lent avec une décroissance de la prévalence
de la plus grande partie des symptômes avec la formation d'un plateau vers 6-8
mois après l'infection initiale. Les résultats de cette étude sont importants
pour connaître l'histoire naturelle de cette maladie et devraient aider les médecins
à informer les patients sur l'évolution potentielle de leur maladie.
https://www.nature.com/articles/s41467-022-29513-z.pdf
Un projet de
décret sur l'offre socle des services de santé au travail est en train de
circuler pour avis de diverses instances… On en reparlera certainement
prochainement… À bientôt…
Jacques Darmon
Si vous souhaitez
ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à
l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.
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