Lettre d'information 05 du 8 mars 2020




Le 8 mars 2020

Au sommaire de cette lettre… Parmi les textes de loi… un décret prorogeant l'activité de la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents de travail… et un arrêté permettant aux pharmaciens de préparer et vendre une solution hydroalcoolique en cas de rupture d'approvisionnement… Une jurisprudence traitant de la possibilité pour un CHS-CT d'une entreprise d'intérim de mandater un expert pour un risque pour la santé des intérimaires travaillant dans une entreprise utilisatrice… ainsi qu'une autre jurisprudence précisant qu'après une réintégration pour nullité du licenciement, l'employeur doit payer les salaires de la période d'éviction sans déduction des revenus de remplacement… et un document relatif à la jurisprudence sur l'inaptitude en cas de manquement de l'employeur… La transcription d'une enquête de Santé & Travail sur des pratiques illégales de télémédecine en médecine du travail… Le rapport de l'enquête Evrest portant sur les années 2017/2018 montrant globalement un état de santé plus altéré chez les 45 ans et plus… Un commentaire d'une photographie du marché de l'emploi en 2019 réalisée par l'Insee…

Vous pourrez aussi consulter, en pièce jointe, la très intéressante veille juridique du 1er trimestre 2020 de l'inspection médicale du travail d'Ile de France.

·     Textes de loi, réglementaires, circulaires, questions parlementaires

Décret n° 2020-155 du 24 février 2020 prolongeant la compétence de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail
Le fonctionnement de la Cnitaat (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail) est prorogé jusqu'au 31 décembre 2022.
Cette disposition était prévue par l'article 7 de l'ordonnance n° 2018-358 du 16 mai 2018 relative au traitement juridictionnel du contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale qui indiquait : " la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail demeure compétente pour connaître des procédures introduites avant cette date et jusqu’au 31 décembre 2020, ou à une date ultérieure qui sera fixée par décret, sans pouvoir dépasser le 31 décembre 2022, date à compter de laquelle ces procédures sont transférées en l’état aux cours d’appel "
La Cnitaat bénéficie donc du sursis maximum !

Arrêté du 6 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19
Cet arrêté permet aux pharmaciens de préparer et vendre une solution hydroalcoolique en cas de rupture d'approvisionnement de gel hydroalcoolique.
Une annexe de l'arrêté précise la formulation de la solution hydroalcoolique ainsi que les modalités de préparation.

·     Jurisprudence
Le CHS-CT/CSE d'une entreprise d'intérim peut voter une expertise pour une activité dans une entreprise utilisatrice
Il s'agit d'un arrêt du 26 février 2020 de la Cour de cassation – Cass. Soc. n° 18-22556 - publié au Bulletin de la Cour de cassation et sur son site où il est accompagné d'une notice explicative.
Les faits – Suite à une délibération du CHS-CT de Manpower, société d'intérim, votant un recours à un expert pour un risque grave pour les travailleurs intérimaires exerçant sur le site d'une entreprise utilisatrice, la société Feedback, Manpower saisit le tribunal de grande instance (TGI) pour faire annuler cette délibération.
Une ordonnance du président du TGI du 1er août 2018, après avoir statué en la forme des référé, annule la délibération du CHS-CT de Manpower ayant voté le recours à un expert pour un risque grave encouru par des travailleurs de cette entreprise sur le site d'un de ses clients, au titre de l'article L. 4614-12 du Code du travail (article dont j'ai déjà parlé dans une jurisprudence commentée dans la dernière lettre d'information).
Manpower saisit la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'interprétation de l'article L. 4614-12. La Cour de cassation, dans une décision n° 18-22556 du 5 juin 2019 dit qu'il n'y a pas lieu à renvoi de la question devant le Conseil constitutionnel.
Le CHS-CT de Manpower se pourvoit en cassation sur l'annulation de sa délibération.
Le moyen principal du pourvoi du CHS-CT, seul susceptible de cassation, porte sur le fait " que le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure, de contribuer à l’amélioration des conditions de travail de ces salariés et de veiller à l’observation des prescriptions légales prises en ces matières ; que les conditions de travail des travailleurs temporaires, même lorsqu’ils sont exclusivement mis à disposition d’entreprises utilisatrices, dépendent aussi de l’entreprise de travail temporaire ; qu’il en résulte que le CHSCT de l’entreprise de travail temporaire peut faire appel à un expert agréé, dans les conditions de l’article L. 4614-2 du code du travail, lorsqu’un risque grave est constaté dans l’établissement où les travailleurs temporaires sont mis à disposition ; qu’en retenant que le CHSCT de l’établissement Ile-de-France de la société Manpower France n’était pas compétent pour voter une expertise en raison d’un risque grave touchant les travailleurs temporaires mis à la disposition de la société Feedback, le tribunal de grande instance a violé les articles L. 4612-1 et L. 4614-12 du code du travail. "
La Cour de cassation s'appuie sur les articles L. 4614-12 et L. 1251-21 du Code du travail interprétés à la lumière de la Constitution et de textes internationaux :
ü l'alinéa 1 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 31 § 1 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne garantissant le droit à la santé et à la sécurité de tout travailleur ;
ü l’article 6 § 4 de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail. Cet article prévoit que " lorsque, dans un même lieu de travail, les travailleurs de plusieurs entreprises sont présents, les employeurs doivent coopérer à la mise en oeuvre des dispositions relatives à la sécurité, à l’hygiène et à la santé et, compte tenu de la nature des activités, coordonner leurs activités en vue de la protection et de la prévention des risques professionnels, s’informer mutuellement de ces risques et en informer leurs travailleurs respectifs et/ou leurs représentants. "
De ces textes, la Cour de cassation conclut ainsi " Il en résulte une obligation pour ceux qui emploient des travailleurs de veiller à ce que leur droit à la santé et à la sécurité soit assuré, sous la vigilance des institutions représentatives du personnel ayant pour mission la prévention et la protection de la santé physique ou mentale et de la sécurité des travailleurs.
S’agissant des salariés des entreprises de travail temporaire, si la responsabilité de la protection de leur santé et de leur sécurité est commune à l’employeur et à l’entreprise utilisatrice, ainsi que cela découle de l’article 8 de la directive 91/383/CEE du Conseil, du 25 juin 1991, complétant les mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire, il incombe au premier chef à l’entreprise utilisatrice de prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer cette protection en application de l’article L. 1251-21-4  du code du travail. Par conséquent, c’est au CHSCT de l’entreprise utilisatrice, en application de l’article 6 de la directive 91/383 précitée, qu’il appartient d’exercer une mission de vigilance à l’égard de l’ensemble des salariés de l’établissement placés sous l’autorité de l’employeur.
Cependant, lorsque le CHSCT de l’entreprise de travail temporaire constate que les salariés mis à disposition de l’entreprise utilisatrice sont soumis à un risque grave et actuel, au sens de l’article L. 4614-12 du code du travail alors applicable, sans que l’entreprise utilisatrice ne prenne de mesures, et sans que le CHSCT de l’entreprise utilisatrice ne fasse usage des droits qu’il tient dudit article, il peut, au titre de l’exigence constitutionnelle du droit à la santé des travailleurs, faire appel à un expert agréé afin d’étudier la réalité du risque et les moyens éventuels d’y remédier.
Pour écarter la compétence du CHSCT de l’entreprise de travail temporaire pour désigner un expert au sein de l’entreprise utilisatrice, le président du tribunal de grande instance retient que les travailleurs temporaires ont vocation à être représentés par le CHSCT de la seule entreprise utilisatrice, et que dès lors le CHSCT de la société Manpower France n’est pas compétent pour décider d’une expertise. "
L'ordonnance du Président du TGI de Paris est cassée et l'affaire envoyée devant le Tribunal judiciaire (regroupant TGI et tribunal d'instance).

Une salariée réintégrée après un licenciement nul a droit au paiement des salaires durant son éviction, sans déduction des revenus de remplacement
Il s'agit d'un arrêt de la Cour de cassation du 29 janvier 2020 – Cass. Soc. n° 18-21862 – qui est publié dans le Bulletin d'information et dans le Bulletin des arrêts de la Cour de cassation.
Les faits – Une salariée a été embauchée en qualité de chef de projet en janvier 2007. Elle est licenciée en novembre 2012, après un retour de maternité. Ce licenciement est requalifié en licenciement nul et sa réintégration ordonnée par un arrêt du 18 septembre 2015.
La salariée se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel qui l'a condamnée à déduire les revenus de remplacement qu'elle a perçus durant l'éviction de son emploi avant sa réintégration du rappel de salaires pour la période du 27 février 2013 au 27 décembre 2015.
La Haute juridiction, au titre de l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et des articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du Code du travail n'a pas la même appréciation.
Elle écrit " Attendu, qu'en application des dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1132-4 du code du travail, tout licenciement prononcé à l'égard d'une salariée en raison de son état de grossesse est nul ; que, dès lors qu'un tel licenciement caractérise une atteinte au principe d'égalité de droits entre l'homme et la femme, garanti par l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la salariée qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont elle a pu bénéficier pendant cette période ;
Attendu qu'après avoir prononcé la nullité du licenciement pour discrimination liée à l'état de grossesse de la salariée, l'arrêt ordonne que soit déduit du rappel de salaires dû entre la date du licenciement et la date effective de réintégration de la salariée dans l'entreprise, les sommes perçues à titre de revenus de remplacement ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ".
L'arrêt de la cour d'appel est cassé sur ce point et l'affaire est renvoyée devant la même cour d'appel autrement composée.
Voici le résumé de cet arrêt de la Cour de cassation : " Tout licenciement prononcé à l'égard d'une salariée en raison de son état de grossesse est nul. Dès lors qu'un tel licenciement caractérise une atteinte au principe d'égalité de droits entre l'homme et la femme, garanti par l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la salariée qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont elle a pu bénéficier pendant cette période. "

Evolution de la jurisprudence sur l'inaptitude et le manquement de l'obligation de l'employeur
Vous trouverez en pièce jointe un document pdf basé sur une présentation que j'ai faite récemment pour des conseillers prud'homaux d'Ile de France sur la jurisprudence en cas d'inaptitude liée à un manquement de l'employeur.
Dans un premier temps, une présentation succincte de l'évolution de la jurisprudence relative à l'obligation de l'employeur en termes de préservation de la santé et de la sécurité des salariés (article L. 4121-1 du Code du travail).
Ensuite, un point sur les textes du Code du travail concernant l'inaptitude et sa contestation. Les données issues du travail de suivi du maintien en emploi et des inaptitudes mené dans les Hauts-de-France montrent que l'inaptitude aboutit très fréquemment à un licenciement et à une désinsertion professionnelle.
A partir d'exemples de jurisprudence, les principales causes de manquement de l'employeur justifiant la requalification du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul : le harcèlement moral, l'absence de mise en oeuvre des préconisations du médecin du travail et des conditions de travail délétères.
En cas d'inaptitude dans le contexte d'une pathologie professionnelle reconnue, accident du travail ou maladie professionnelle, deux arrêts de la Cour de cassation du 3 mai 2018 déterminent les rôles respectifs des juridictions de Sécurité sociale et du conseil de prud'hommes. Pour les premières, réparation du retentissement de la pathologie sur l'emploi via l'incapacité permanente et, éventuellement, la faute inexcusable (et en particulier le retentissement sur l'emploi et la perte de droits à la retraite). En revanche, ces deux arrêts affirment que le conseil de prud'hommes est compétent pour juger de la rupture du contrat de travail et requalifier le licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul (en cas de harcèlement moral).

·     Une enquête de Santé & Travail sur la télémédecine du travail
Vous pourrez accéder sur le site de Santé & Travail (adresse en fin d'article) à l'enquête menée sur la télémédecine dans le domaine de la santé au travail mise en œuvre par certaines sociétés de façon très limite par rapport au droit actuel. Avec l'aimable autorisation de la revue, en voici le contenu. Cet article est signé par Mme C. de Gastines et M. F. Desriaux.

" Télémédecine du travail : des dérives illégales

Alertés par des médecins et services de santé au travail, nous avons enquêté sur le développement de certaines pratiques de télémédecine du travail a priori illégales. A terme, c’est le cœur de la mission de prévention primaire qui risque de disparaître.
Sous-traiter les visites médicales obligatoires à des médecins du travail « suppléants » en téléconsultation : telle est la proposition commerciale récemment reçue par plusieurs services de santé au travail (SST). Selon une directrice de SST qui a voulu en savoir davantage après avoir été démarchée, ces suppléants sont d’anciens médecins du travail en cumul emploi-retraite, employés par une structure associative pour mener depuis leur domicile des entretiens en téléconsultation et délivrer une attestation. Cette dernière devra néanmoins être validée par le médecin du travail « officiel » du SST en charge du suivi médical du salarié.

Visite médicale « hors-sol »

« Il s’agira d’une visite médicale “hors-sol”, car le médecin n’aura aucune connaissance du milieu de travail, ne fera pas d’examen clinique, ni de prévention primaire », s’alarme Sophie Fantoni-Quinton, professeur en médecine du travail à Lille et docteure en droit. Par ailleurs, « qui prouvera que cette personne est bien médecin ? », s’interroge notre directrice de SST.
« La loi ne prévoit pas qu’une consultation de médecine du travail puisse être déléguée à un autre médecin du travail sous l’autorité du premier », soulève Melissa Menetrier, médecin du travail et secrétaire générale adjointe du Syndicat national des professionnels de la santé au travail (SNPST). « Je serais très curieux de voir quel médecin prendrait le risque de valider une attestation rédigée par un autre médecin, de surcroît qu’il ne connaît pas… Cela me paraît irréaliste », estime Olivier Hardouin, directeur général de Medisis. Ce SST de l’Oise a investi dans plusieurs stations de téléconsultation pour assurer les visites d’embauche des intérimaires. Le médecin du travail du siège se met en lien avec une infirmière qui reçoit le salarié et peut procéder à des examens médicaux.
Par ailleurs, la structure sous-traitante ne semble pas garantir la confidentialité des échanges, la protection des données et le respect du secret médical. La directrice qui a mené l’enquête a demandé à son interlocuteur s’il avait un délégué à la protection des données (DPO) en interne ou en externe – obligatoire dans tout SST –, mais celui-ci n’a pas paru savoir de qui il était question.

Drôle de trio

Un drôle de trio est à l’origine de cette offre : la société commerciale Medispace, adossée à deux associations, l’Association française de télémédecine du travail (ASF2T) et le Groupement santé au travail (GST). Plusieurs médecins du travail s’inquiètent des ambitions de ces francs-tireurs, qui préfigurent une possible uberisation de la médecine du travail.
Dans le cadre de ses démarchages, l’ASF2T diffuse un petit film promotionnel destiné aux employeurs. L’un des atouts du programme de téléconsultation Medispace RH serait ainsi de « réduire le coût indirect de la médecine du travail pour l’entreprise » en supprimant par exemple les déplacements des salariés, mais aussi le surcoût lié aux rendez-vous manqués. Le film met également en avant la « sécurisation par rapport aux obligations légales ».

Sans agrément

Il semble pourtant qu’aucune de ces trois structures n’ait reçu d’agrément. Selon nos informations, la direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi (Direccte) d’Ile-de-France a même refusé par deux fois l’agrément à GST. Ce qui n’a pas empêché cette structure de se prévaloir de ce sésame, même si, aujourd’hui, toute référence à l’agrément a disparu de son site Web. Sur un site de recrutement, GST se présentait d’ailleurs abusivement comme « le premier SSTI national de France ». Et selon une source au sein de l’Inspection médicale d’Ile-de-France  « ces recalés de l’agrément déposent des recours devant le tribunal administratif, ce qui leur permet de dire que le dossier d’agrément est en cours d’instruction et ainsi de démarcher des structures publiques où il y a un gros déficit de médecins ».
De son côté, Patrick Augustin, le président de Medispace, prétend dans un premier temps que GST a une « habilitation de la DGT », avant de convenir que « l’agrément est en discussion … devant les tribunaux ». Selon lui, GST a vocation à devenir un groupement de SST en téléconsultation qui proposeront les « outils de Medispace ». Quant à l’ASF2T, c’est une simple « association de promotion de la télémédecine ».
Les liens entre les trois entités sont flous mais bien réels. Le porte-parole de l’ASF2T, Laurent Vervin, a préféré nous renvoyer sur Patrick Augustin, dont il est l’associé au sein de Medispace. A force d’insister, M. Augustin a fini par préciser qu’il était aussi secrétaire général de GST, créé fin 2018 par François Gotchac, un communicant.

Une fonction de « paravent »

Les offres commerciales du trio sont très similaires. « Les SST sont obligés de sous-traiter, car les médecins du travail en poste ne sont plus assez nombreux », affirme Patrick Augustin. Ainsi, « notre partenaire, l’ASF2T, emploie trois médecins salariés sous contrat cumul emploi-retraite, qui ont déjà effectué 100 à 200 téléconsultations par mois depuis janvier dernier. On est encore à un stade expérimental ». Mais pour la directrice de SST, qui a contacté Laurent Vervin pour savoir de quoi il retournait. « il semble que l’ASF2T serve de paravent à la start-up Medispace lors de ses démarches auprès des SST ».
Sur son site Web, l’ASF2T annonce qu’elle a « pour mission de mettre gratuitement [sic] à la disposition des SST des outils numériques permettant la téléconsultation et la digitalisation de l’organisation ». Parmi ces outils Medispace figurent un Intranet et une application qui peut, indique Patrick Augustin, « faire office de carnet de santé pour le salarié et sa famille et le suivre tout au long de sa carrière. D’où qu’il soit – chez lui, au bureau ou dans sa voiture –, le salarié peut se connecter sur son application avec son smartphone ou son ordinateur et discuter avec son médecin, qui sera aussi chez lui et travaille à la carte ».
La gratuité des outils (Intranet et application) va en réalité de pair avec une série de prestations payantes fournies par Medispace et l’ASF2T. Ainsi,  « la visite médicale de dix minutes en téléconsultation menée par un médecin suppléant sera facturée 90 euros hors taxes au SST », rapporte notre directrice de SST. Quant aux garanties sur la confidentialité des données, Patrick Augustin se défend : « L’application Medispace RH est hébergée par un hébergeur agréé dans l’utilisation des données de santé, comme toutes les applications. » Cela lui semble un critère suffisant.

L’uberisation de la médecine condamnée par le Cnom

Le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) vient pourtant de publier, le 2 mars, deux rapports, l’un sur la médecine de contrôle à distance, l’autre sur le télétravail des collaborateurs du médecin. Il y rappelle notamment l’interdiction d’utiliser le téléphone portable pour une téléconsultation et exige le chiffrage du poste de travail et du disque dur du médecin et de ses collaborateurs. Par ailleurs, le président du Cnom, Patrick Bouet, spécifie dans une déclaration écrite que l’Ordre « condamne sans réserve toute velléité d’uberisation de la médecine. Garant de la déontologie médicale, il défendra toujours l’idée selon laquelle la télémédecine doit être soumise aux mêmes obligations réglementaires et déontologiques que les autres formes de pratiques médicales, dans un parcours de soins coordonnés, au service des patients.
Sollicités, le ministère du Travail et son Inspection médicale nationale résument ainsi leur position  : « Nous sommes ouverts aux expérimentations au sein des SST, mais dans le cadre d’une démarche soumise à évaluation, justifiée et cadrée. » Avant d’ajouter  : « Un SST se bornant à faire de la télémédecine ne répond pas aux exigences légales quant aux activités des SST. »
D’après un médecin-inspecteur régional du travail, avec [la] pénurie de praticiens, la direction générale du Travail (DGT) subirait toutefois une énorme pression pour ne pas faire obstacle à l’agrément de ce type de structures développant la télémédecine du travail. Une évolution pourtant bien éloignée de la mission originelle et légale de la médecine du travail, qui, rappelons-le, est d’« éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail »."

·     Rapport Evrest 2019
Vous pourrez accéder au document Evrest commenté dans cette lettre en pièce jointe et sur le site Evrest dont l'adresse figure en fin de commentaire.
Introduction
Le programme Evrest (Evolutions et relations en santé au travail) recueille, via des médecins du travail volontaires, des informations sur les conditions de travail et l'état de santé des salariés.
Ce rapport couvre deux années, 2017 et 2018 pour avoir une vision assez significative des salariés vu l'espacement actuel des visites médicales. Le questionnaire est proposé aux salariés nés au mois d'octobre principalement au cours d'une visite périodique mais cela peut aussi se faire lors d'une visite de reprise du travail ou d'embauche si cette dernière est passée au moins deux mois après le début effectif du travail.
Il y a eu, pour ces deux années un redressement des effectifs en fonction de leur répartition dans le monde du travail selon des informations issues des déclarations annuelles de données sociales des entreprises.
L'enquête Evrest explore quatre champs :
ü les conditions de travail (changement dans le travail en lien éventuel avec l’état de santé, horaires de travail et leur régularité, contraintes de temps et pression temporelle, sens et vécu du travail, charge physique, exposition à certains types de risques professionnels) ;
ü  la formation reçue et dispensée (que je n'ai pas traitée) ;
ü le mode de vie (sport, tabac, café) ;
ü l’état de santé des salariés.
Description de l'échantillon Evrest 2017/2018 redressé
Cet échantillon comprend 28 507 sujets, 50.2% d'hommes (16 586) et 49.8% de femmes (11 921).
Selon les tranches d'âge, on trouve 12.1% de sujets de 24 ans ou moins (11.4% d'hommes et 12.7% de femmes), 23.7% de 25-34 ans (24.1% d'hommes et 23.3% de femmes), 24.2% de 35-44 ans (24.8% d'hommes et 23.6% de femmes), 24.5% de 45-54 ans (24.8% d'hommes et 24.3% de femmes) et 15.5% de seniors de 55 ans et plus (15% d'hommes et 16% de femmes).
La répartition selon les catégories socioprofessionnelles (CSP) indique 15.7% de cadres et professions intellectuelles supérieures (18.7% d'hommes et 12.7% de femmes), 20% de professions intermédiaires (19% d'hommes et 21.1% de femmes), 36.9% d'employés (18.1% d'hommes et 55.9% de femmes) et 27.4% d'ouvriers (44.3% d'hommes et 10.4% de femmes).
Les travailleurs interrogés exercent pour 14.2% dans les industries manufacturières, pour 6.4% dans la construction, pour 26.3% dans le commerce, le transport, l'hébergement et la restauration, pour 25.5% dans les services divers et pour 27.7% dans l'administration publique, l'enseignement, la santé et les activités sociales.
Caractéristiques du travail
Temps et horaires de travail
Changement de travail
Une majorité de 80% de sujets n'ont pas changé de travail (80.3% des hommes et 79.8% des femmes).
Pour ceux qui ont changé de travail, dans 1% c'est pour une raison médicale (1.1% chez les hommes et 0.9% chez les femmes).
Durées et modalités de l'activité
Le temps plein concerne 79.2% des sujets, nettement plus les hommes (89.6%) que les femmes (68.7%).
Le travail s'accomplit en journée normale pour 79.4% des sujets (79% des hommes et 79.8% des femmes).
Il y a une coupure de plus de deux heures pour 17.7% des sujets (16.6% d'hommes et 18.8% de femmes).
Les horaires décalés touchent 26.6% de l'échantillon, 29.8% des hommes et 23.2% des femmes et les horaires irréguliers ou alternés 27.1% de sujets, 27.5% des hommes et 26.8% des femmes.
Le travail de nuit concerne 11% des sujets (14.9% des hommes et 6.9% des femmes).
Un peu plus d'un tiers des personnes interrogées (34.8%, 36.9% des hommes et 32.7% des femmes) déclarent dépasser, assez souvent ou très souvent, leurs horaires normaux de travail.
Le fait de sauter ou écourter un repas ou une pause, assez souvent ou très souvent, concerne 21.1% des sujets (18.3% des hommes et 21.8% des femmes).
Exigences du travail
Plus d'un cinquième des sujets (22.5%) déclarent qu'ils doivent traiter trop vite, assez souvent ou très souvent, une opération qui nécessiterait davantage de soin (21.4% des hommes et 23.5% des femmes).
Sur une échelle cotée de 0 à 10 d'appréciation des difficultés liées à la pression temporelle, une majorité des sujets se positionne entre 5 et 10 (52%, 53.5% des hommes et 54.4% des femmes).
Presque la moitié des sujets interrogés déclarent qu'ils doivent fréquemment abandonner une tâche pour une autre (48.5%). Cela est un peu plus fréquent pour les femmes (50%) que pour les hommes (47.1%) et cela perturbe le travail pour 57.3% des sujets devant abandonner une tâche (54.9% des hommes et 59.5% des femmes).
Une forte majorité des personnes interrogées (84.8%, 84.9% des hommes et 84.8% des femmes) déclarent que leur travail permet, plutôt ou tout à fait, d'apprendre.
Une grande majorité des sujets interrogés (83.5%) considèrent que leur travail est varié (plutôt oui ou tout à fait oui), c'est quasiment le même taux chez les hommes (84%) et chez les femmes (83%).
La latitude décisionnelle, appréciée par la possibilité de pouvoir choisir soi-même la façon de procéder, est majoritaire avec 76.3% des sujets qui déclarent que c'est plutôt ou tout à fait le cas (77.8% chez les hommes et 74.7% chez les femmes).
L'entraide et la coopération est jugée suffisante (plutôt oui et tout à fait oui) pour 86.1% des sujets, 87% chez les hommes et 85.2% chez les femmes).
Une majorité des sujets de l'échantillon ont aussi répondu positivement (plutôt oui et tout à fait oui) quant au fait qu'ils disposent des moyens de faire un travail de bonne qualité : 88.4%, 89.1% pour les hommes et 87.7% pour les femmes.
La reconnaissance du travail accompli par l'entourage professionnel est très présente, il y a 84.3% de "Plutôt oui" ou "Oui tout à fait", 85.3% chez les hommes et 83.3% chez les femmes.
Une part importante des sujets (89.9%) considèrent qu'ils peuvent concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle ("Plutôt oui" ou "Oui tout à fait"). C'est presque autant le cas pour les hommes (89.3%) que pour les femmes (90.5%).
Le contact avec le public concerne une majorité des sujets de l'échantillon, 67.5%, 61.5% des hommes et 73.6% des femmes.
Un sujet sur cinq (20.5%) ressent une pression psychologique, 19.8% des hommes et 21.2% des femmes.
Conflit éthique
Une minorité des sujets (19.1%) déclarent qu'ils doivent ("Plutôt oui" ou "Oui tout à fait") faire des choses qu'ils désapprouvent, un peu plus pour les hommes (20.3%) que pour les femmes (17.9%).
Insécurité de l'emploi
La peur de perdre son emploi est présente chez 10.8% des sujets, 10.6% des hommes et 10.9% des femmes.
Exposition à des contraintes physiques
Je reprendrai dans ce chapitre, pour donner les taux, les avis indiquant "Oui parfois" et "Oui souvent".
Postures contraignantes
L'exposition à des postures contraignantes concerne 55.2% des sujets enquêtés, 58% des hommes et 52.3% des femmes.
Les sujets exposés à ces postures contraignantes considèrent, dans 24.5% des cas, qu'elles sont difficiles ou pénibles, 24.7% chez les hommes et 24.4% chez les femmes.
Port de charges
Près de la moitié des sujets de l'échantillon (49%) déclarent être exposés au port de charges lourdes, c'est une majorité des hommes (54.9%) et un peu moins chez les femmes (42.9%).
Les sujets exposés à ce port de charges lourdes sont 21.7% à considérer que cela est pénible ou difficile, 22.1% des hommes et 21.3% des femmes.
Gestes répétitifs
Une majorité des sujets interrogés sont exposés à des gestes répétitifs (61%), un peu moins chez les hommes (59.3%) que chez les femmes (62.7%).
Ces gestes répétitifs sont pénibles ou difficiles pour 17.9% des sujets exposés, 16.9% des hommes et 19% des femmes.
Déplacements à pied
L'exposition à d'importants déplacements à pied concerne 40.4% des sujets de l'échantillon, 46.9% des hommes et 33.9% des femmes.
Ces importants déplacements à pied sont difficiles ou pénibles pour 8.9% des sujets qui y sont exposés, 9.4% des hommes et 8.3% des femmes.
Station debout prolongée
Un peu plus de la moitié de l'échantillon (56.1%) est exposée à une station debout prolongée (59.2% des hommes et 52.9% des femmes).
Cette station debout prolongée est difficile ou pénible pour 17.1% des sujets exposés, 15.9% des hommes et 18.2% des femmes.
Exposition à d'autres contraintes
L'exposition à des produits chimiques touche 25.3% des sujets (28.8% des hommes et 21.8% des femmes).
L'exposition à des poussières et/ou des fumées concerne 30.2% des sujets de l'échantillon, 43.3% des hommes, nettement plus que les 16.9% de femmes.
L'exposition à des rayonnements ionisants touche 3% des sujets, un peu plus les hommes (3.5%) que les femmes (2.5%).
Enfin, l'exposition aux vibrations est présente chez 16.9% des sujets de l'échantillon, 29.2% des hommes et 4.5% des femmes.
L'exposition à un bruit supérieur à 80 dB concerne 22% des sujets, 34.5% des hommes et 9.2% des femmes.
Les contraintes visuelles concernent 28.5% des sujets de l'échantillon, 28.1% des hommes et 28.9% des femmes.
L'exposition à des températures extrêmes concerne, pour la chaleur intense, 15% des sujets (19.9% des hommes et 11% des femmes) et, pour le froid intense, 11.8% des sujets (16.7% des hommes et 6.9% des femmes).
L'exposition professionnelle à des intempéries concerne 14.9% des sujets, 24.9% des hommes et 4.8% des femmes.
La conduite routière prolongée est rapportée par 13.1% des sujets, nettement plus chez les hommes (20.1%) que chez les femmes (6.1%).
Enfin, l'exposition à des agents biologiques est présente pour 16.8% des sujets de l'échantillon, 12.6% des hommes et 21.2% des femmes.
Données sur le mode de vie
Une activité physique ou sportive régulière est pratiquée par 57.9% des sujets, 61.1% des hommes et 54.7% des femmes.
La consommation de tabac touche près d'un tiers des sujets de l'échantillon (32.8%), un peu plus les hommes (35.3%) que les femmes (30.2%).
Chez 6.5% des sujets, cette consommation est supérieure à 15 cigarettes par jour (8.3% des hommes et 4.6% des femmes).
Les trajets domicile/travail s'avèrent longs ou pénibles pour 16.3% des sujets, 17.1% des hommes et 15.5% des femmes.
Données sur l'état de santé
Les données sur l'état de santé des sujets de l'échantillon sont présentées pour l'ensemble des sujets (28 507), pour les hommes (15 586 dont 10 311 de moins de 45 ans et 6275 de 45 ans ou plus) et pour les femmes (11 921 dont 7296 de moins de 45 ans et 4625 de 45 ans ou plus). Je ne retiendrai, parmi ces nombreuses données, que de ce qui m'apparaît important pour la santé au travail.
Appareil cardio-respiratoire
Il y a 4.5% des sujets indiquant l'existence d'un problème respiratoire (plus fréquent chez les femmes avec 4.8%). Ces problèmes respiratoires entraînent une gêne dans le travail pour 1.1% des sujets mais respectivement 1.4% et 1.5% des hommes et femmes de 45 ans ou plus et des plaintes ou signes cliniques chez 3.8% des sujets mais chez respectivement 4.1% et 5.1% des hommes et femmes de 45 ans ou plus.
Les problèmes cardio-vasculaires touchent 2.8% des sujets, avec 2.1% de plaintes ou signes cliniques (3% chez les hommes et les femmes d'au moins 45 ans). La gêne dans le travail concerne 0.6% des sujets, respectivement 0.6% et 0.8% chez hommes et femmes de 45 ans ou plus.
Manifestations neuro-psychiques
Lassitude et fatigue
Près d'un quart des sujets interrogés se plaignent de l'existence d'un problème de lassitude et de fatigue (24.4%). Ce problème est nettement plus fréquent chez les femmes (29.9%) que chez les hommes (19%) et il est juste un peu plus fréquent chez les 45 ans et plus (respectivement 18.4% et 29.4% chez hommes et femmes) que chez les sujets de moins de 45 ans (respectivement 18.1% et 28.7% chez hommes et femmes).
Ce problème entraîne une gêne dans le travail pour 10.5% des sujets, 13.5% des femmes et 7.6% des hommes avec là aussi une fréquence plus importante chez les sujets de 45 ans et plus par rapport à ceux de moins de 45 ans (respectivement, pour les hommes 8.8% versus 6.8% et, pour les femmes, 14.5% versus 12.9%).
Anxiété et nervosité
Ce problème est évoqué par 18.3% des sujets, 22.7% des femmes et 14% des hommes. Les plaintes à ce sujet sont présentes chez 17.4% des sujets, 21.8% des femmes et 13.1% des hommes.
Une gêne dans le travail est ressentie par 7.7% des sujets, 9.9% des femmes et 5.5% des hommes avec peu de différences selon la tranche d'âge. Cet état justifie un traitement chez 2.8% des sujets mais 5.1% chez les femmes de 45 ans ou plus.
Troubles du sommeil
Les troubles du sommeil représentent un problème pour 19.1% des sujets de l'échantillon, 23.1% chez les femmes et 15.1% chez les hommes.
Ces troubles entraînent une gêne dans le travail pour 7.1% des sujets, 8.8% des femmes (10% pour les 45 ans ou plus et 8.1% pour les moins de 45 ans) et 5.4% pour les hommes (6.4% pour les 45 ans ou plus et 4.8% pour les moins de 45 ans).
Les troubles du sommeil sont traités chez 3.1% des sujets, 6.2% chez les femmes de 45 ans ou plu, 3.1% de celles de moins de 45 ans et 3.2% des hommes de 45 ans ou plus.
Association de ces trois problèmes
L'association de ces trois problèmes est présente chez 7.7% des sujets, 10.3% chez les femmes et 5.1% chez les hommes.
Troubles de l'audition
L'existence d'un problème d'audition concerne 5.9% des sujets, 4.4% des femmes et 7.4% des hommes. Pour la présence d'une gêne dans le travail, touchant 1.8% des sujets, cette gêne est présente respectivement chez 3% et 3.4% des hommes et femmes de 45 ans et plus.
Troubles ostéoarticulaires
Troubles ostéoarticulaires de l'épaule
Un taux de 9.9% des sujets de l'échantillon indiquent ressentir l'existence d'un problème lié à un trouble ostéoarticulaire de l'épaule, 11.5% chez les femmes et 8.3% chez les hommes. Ce trouble entraîne des plaintes ou des signes cliniques chez 9.4% des sujets, 11% chez les femmes et 7.8% chez les hommes.
Une gêne dans le travail est ressentie par 5.5% des sujets, 7% des femmes (mais 10.4% de celles de 45 ans et plus) et 4.1% des hommes (mais 6.1% de ceux de 45 ans et plus).
Troubles ostéoarticulaires du coude
Un petit nombre de sujets (3.7%) indiquent l'existence d'un problème lié à un trouble ostéoarticulaire du coude.
Ce trouble ostéoarticulaire entraîne une gêne dans le travail pour 2.1% des sujets, 2.6% des femmes (mais 4.3% de celles de 45 ans ou plus) et 1.6% des hommes (2.8% de ceux de 45 ans et plus).
Troubles ostéoarticulaires du poignet
L'existence d'un problème lié à un trouble ostéoarticulaire du poignet est rapportée par 7.3% des sujets de l'échantillon, 9.5% des femmes et 5.1% des hommes. Ce problème est rencontré encore plus fréquemment chez les sujets de 45 ans ou plus, 14% des femmes et 6.7% des hommes.
Cette atteinte entraîne une gêne dans le travail chez 4.1% des sujets de l'échantillon et respectivement 5.8% et 2.6% des femmes et des hommes, avec une gêne encore plus fréquente chez les 45 ans et plus, respectivement 8.3% et 3.5% pour femmes et hommes.
Atteinte de l'un des trois troubles ci-dessus
Globalement, 16.1% des sujets de l'échantillon indiquent l'existence de l'un des trois troubles du membre supérieur évoqué ci-dessus, 18.7% chez les femmes et 13.5% chez les hommes. Ceci est encore plus fréquent chez les 45 ans ou plus, 18.7% chez les femmes et 18.2% chez les hommes.
La présence de l'une de ces atteintes génère une gêne dans le travail pour 9% des sujets, 11.3% des femmes et 8.2% des hommes mais 16.4% des femmes et 9.6% des hommes de 45 ans et plus.
Troubles ostéoarticulaires du membre inférieur
Un peu plus d'un sujet sur 10 ressent l'existence d'un problème ostéoarticulaire du membre inférieur (10.2%, 10.4% chez les femmes et 9.9% chez les hommes). Il y a une gêne dans le travail pour 4.9% des sujets, 5.2% des femmes et 4.6% des hommes.
Les sujets de 45 ans ou plus sont encore plus touchés avec 7.5% des femmes et 6.4% des hommes se plaignant d'une gêne dans le travail du fait d'une atteinte ostéoarticulaire du membre inférieur.
Troubles ostéoarticulaires des vertèbres cervicales
L'existence d'un problème ostéoarticulaire cervical est rapportée par 10.9% des sujets, 14.8% des femmes et 7.1% des hommes. Là aussi, l'existence du problème est plus fréquente chez les sujets de 45 ans et plus, 18.1% des femmes et 8.7% des hommes.
Il y a une gêne dans le travail du fait de ce trouble chez 6.2% des sujets, 8.8% des femmes et 3.6% des hommes mais chez les sujets de 45 ans et plus, les taux sont respectivement pour femmes et hommes de 10.8% et 5.1%.
Troubles ostéoarticulaires des vertèbres dorsolombaires
Cette atteinte d'un trouble ostéoarticulaire dorsolombaire est évoquée chez 17.8% des sujets, 19.4% des femmes et 16.2% des hommes et elle est encore plus présente chez les sujets de 45 ans et plus, 22.1% des femmes et 19.4% des hommes.
Ce trouble ostéoarticulaire des vertèbres dorsolombaires entraîne une gêne dans le travail chez 9.7% des sujets, 11.1% chez les femmes et 8.3% chez les hommes. Là aussi, la gêne est plus fréquente chez les sujets de 45 ans et plus, 13.2% des femmes et 10.7% des hommes.
Troubles ostéoarticulaires du rachis
Il s'agit de la présence de l'un des deux troubles évoqués ci-dessus. Globalement, on retrouve l'un de ces troubles chez 23.5% des sujets, 27.1% des femmes et 19.9% des hommes. La présence de l'un de ces troubles ostéoarticulaires est nettement plus marquée chez les sujets de 45 ans et plus, 31.1% chez les femmes et 24.1% chez les hommes.
La présence de l'un de ces troubles entraîne une gêne dans le travail chez 12.9% des sujets, 15.7% des femmes et 10.2% des hommes. Cette gêne dans le travail est encore plus présente chez les sujets de 45 ans et plus, 18.8% des femmes et 13.4% des hommes.

·     Photographie du marché du travail en 2020 (Insee)
Vous pourrez accéder à ce n° 1793 d'Insee Première en pièce jointe et sur le site de l'Insee dont l'adresse figure en fin de commentaire.
L'intitulé du document est " Une photographie du marché du travail en 2019 – Le chômage continue de reculer " et il est signé par M. Y. Jauneau et Mme J. Vidalenc de la division emploi de l'Insee.
Données générales sur l'emploi
En France, hors Mayotte, en 2019, il y a 29.2 millions de personnes actives (en emploi et au chômage) de 15 à 64 ans, soit 71.7% de cette tranche d'âge (68.2% pour les femmes et 75.3% pour les hommes).
Parmi ces sujets actifs, 26.8 millions ont un emploi et 2.5 millions sont au chômage, soit 6.1% de cette population de 15 à 64 ans.
Le taux d'activité est le plus important pour les 25-49 ans (87.8%) et il est de 66.9% pour les 50-64 ans.
Dans cette tranche d'âge des 15-64 ans, on dénombre 11.6 millions d'inactifs, des sujets qui ne sont pas en emploi et qui n'en recherchent pas. Les inactifs sont présents à un taux de 33.1% parmi la population des 50-64 ans et ils sont plus nombreux parmi les femmes (31.8%) que parmi les hommes (24.7%).
En 2019, le taux d'activité des 15-64 ans a légèrement diminué de 0.2%, ceci après une forte hausse de 2012 à 2018 (+ 2%). Ceci s'accompagne d'une baisse de la part du chômage plus importante de 0.4%.
Alors que le taux d'activité des personnes de moins de 50 ans recule en 2019, celui des seniors continue d'augmenter, cependant moins vite qu'en 2018.
De fait, depuis les différentes réformes des retraites, le taux d'activité des seniors a augmenté. Entre 2009 et 2019, l'augmentation du taux d'activité des seniors a été de 10.5%, soit 1.7 million de seniors en activité en plus. En 2019, le taux d'activité des seniors a augmenté de 0.4%.
Augmentation du taux d'emploi
En 2019, le taux d'emploi des 15-64 ans augmente de 0.2%, après avoir augmenté de 0.6% en 2018. Cependant, il y a des différences selon les tranches d'âge, le taux d'emploi des 15-24 ans reste stable alors qu'il progresse pour les 24-49 ans (+ 0.4%) ainsi que pour les seniors de 50 à 64 ans (+ 0.4%), particulièrement pour les 60-64 ans (+ 1.5%). [NDR – Ce qui n'est guère étonnant vu le recul de l'âge légal de départ à la retraite.]
Les statuts d'emploi
En 2019, 12.1% des travailleurs ont un statut d'indépendant, qu'ils soient non-salariés ou chefs d'entreprise (soit 3.3 millions de personnes), et 87.9% sont des salariés (91.2% des femmes et 84.7% des hommes).
Le statut d'indépendant est plus fréquent chez les hommes (15.3%) que chez les femmes (8.8%).
Parmi les salariés, le contrat à durée indéterminée représente la majorité des contrats (74.6%, 77.3% chez les femmes et 72.1% chez les hommes).
Les contrats à durée déterminée (CDD) (9.1%) sont plus fréquents chez les femmes (11.1%) que chez les hommes (7.2%) alors que l'intérim est plus fréquent chez les hommes (3.3%) que chez les femmes (1.5%).
Les sujets jeunes de 15-24 ans sont plus souvent en emploi précaire que les autres tranches d'âge, 28.4% sont en CDD et 6.9% en intérim.
En 2019, les contrats de travail précaires, CDD et intérim, ont diminué de 0.4%.
Des emplois plus qualifiés
Entre 2009 et 2019, la part des cadres parmi les personnes en emploi a augmenté de 3.1%, atteignant 19.3%. Ils sont encore plus nombreux parmi les 24-49 ans (20.5%) et les 50 ans et plus (20.4%). De même, ils sont plus nombreux chez les hommes (21.6%) que chez les femmes (16.8%).
Durant cette même période, le taux des ouvriers et des employés a diminué de 4.7% pour s'établir à 46.5%.
Parmi les salariés, les employés qualifiés représentent 13.9% de l'ensemble des travailleurs, les employés non qualifiés 12.9%, les ouvriers qualifiés 12.9% et les ouvriers non qualifiés 6.8%.
Les femmes remplissent plus souvent des fonctions d'employés qualifiés (21.4%) et non qualifiés (20.3%) que les hommes (respectivement 6.9% et 6%). En revanche, les hommes sont plus présents que les femmes parmi les ouvriers qualifiés (21.7% versus 3.5%) et les ouvriers non qualifiés (8.8% versus 4.6%).
Ainsi, les femmes occupent plus souvent des emplois non qualifiés que les hommes, 50% versus 34.1%.
Le sous-emploi diminue
Entre 2008 et 2014, le temps partiel a augmenté de 1.9% puis il s'est stabilisé et, en 2018 et 2019, le temps partiel a diminué de respectivement 0.3% et 0.4%.
Globalement, 18.1% des salariés sont à temps partiel mais 28.4% des femmes et 8.3% des hommes.
Le temps partiel est le plus fréquent parmi les employés non qualifiés (41.4%, particulièrement pour les femmes 47.4%) et les employés non qualifiés (22.7%, 27.4% chez les femmes).
Le sous-emploi, correspondant principalement aux personnes à temps partiel souhaitant travailler plus concerne 5.4% des travailleurs et nettement plus fréquemment les femmes (7.8%) que les hommes (3.1%). Le sous-emploi est plus fréquent chez les sujets de 15 à 24 ans avec un taux de 8.9%, en particulier les femmes (12%).
Le chômage diminue
En moyenne, on compte en France 2.5 millions de chômeurs, soit 8.4% de la population des 15-64 ans. Depuis 2015, le taux de chômage a baissé de 1.9%.
Ce taux de chômage est plus du double chez les sujets de 15 à 24 ans (19.6%) par rapport à celui de l'ensemble de la population, un peu plus élevé pour les hommes (20.8%) que pour les femmes (18.2%).
Le chômage de longue durée, supérieur ou égal à un an, touche 40.1% des chômeurs et 58.3% des seniors. Il est globalement de 3.4% de la population active et il est plus fréquent pour les 15-24 ans (4.9%) et les 50 ans et plus (3.7%). Dans ces deux populations, il est plus fréquent chez les hommes que chez les femmes. Pour les 15-24 ans, 5.7% versus 4% et, pour les 50 ans et plus, la différence est moins marquée, 3.7% versus 3.6%.
Le taux de chômage présente un gradient croissant inverse par rapport à la catégorie socioprofessionnelle et l'on passe de 4% chez les cadres à plus de 12.4% pour les ouvriers. Ce taux de chômage suit un gradient décroissant en fonction du niveau de formation, 15.5% pour les sujets ayant un niveau brevet ou moins et 5.1% pour les bac + 2 ou plus.


Jacques Darmon

Si vous souhaitez ne plus figurer sur cette liste de diffusion, vous pouvez m'en faire part à l'adresse suivante : jacques.darmon@orange.fr.



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