Le 25 février 2024
En préambule, j’ai
failli à mon habitude de transmettre une lettre quasiment régulièrement toutes
les deux semaines ce dernier mois. Ceci pour deux raisons. D’une part du fait
d’un petit passage à vide personnel (aussi en lien avec une nouvelle charge
importante de membre du CRRMP d’Ile de France). D’autre part, et surtout, car
je n’ai guère trouvé de sujets très intéressants relatifs à la santé au travail
ces derniers temps, même la jurisprudence apparaissait en berne… aussi, je vous
transmets cette lettre d’information en l’état…
Au sommaire de
cette lettre… Parmi les textes de loi… Un décret sur les attributions du grand
ministère du travail, de la santé… Une jurisprudence sur le maintien éventuel
du paiement du salaire sur la période entre la fin d’un arrêt maladie et la
réalisation de la visite de reprise par le médecin du travail… Et une
intéressante émission de télévision sur les maladies professionnelles à voir ou
revoir…
Les lettres
d’information sont accessibles, depuis janvier 2019, sur un blog à l’adresse
suivante : https ://bloglettreinfo.blogspot.com/.
· Textes de loi, réglementaires, circulaires,
instructions, questions parlementaires, Conseil d’État
Dans le présent gouvernement, un grand ministère du travail, de la santé
et des solidarités a été créé et confié à Mme Vautrin. Il est donc intéressant
d’en connaître les missions en termes de travail et de santé. [NDR - Depuis ce
décret, M. Frédéric Valletoux a été nommé ministre délégué en charge de la
Santé et de la Prévention le 8 février 2024. Frédéric Valletoux, député depuis
2022 (Horizons) a été maire de Fontainebleau (2005-2022) et, surtout, il a été à
la tête de la Fédération hospitalière de France entre 2011 et 2022.]
Voici les missions du ministre du travail dans les domaines du travail et
de la santé au travail :
« 1 Il prépare et met en œuvre les règles relatives aux conditions de travail, à la
négociation collective et aux droits des salariés ;
2° Il est compétent pour la formation professionnelle des jeunes et des
adultes, ainsi que pour la défense et la promotion de l'emploi, y compris la
politique de retour à l'emploi et de l'insertion professionnelle et économique,
notamment en matière de revenu de solidarité active. Il est chargé de la
promotion et du suivi de l'innovation sociale en matière d'emploi ;
3° Il prépare et met en œuvre les règles relatives aux prestations sociales et
celles relatives aux régimes et à la gestion des organismes de sécurité sociale pour l'ensemble des branches de la sécurité
sociale, ainsi qu'aux régimes complémentaires ;
4° Il est chargé de la
préparation de la loi de financement de la sécurité sociale et du suivi de son exécution, conjointement avec le ministre de l'économie, des
finances et de la souveraineté industrielle et numérique ;
5° Il prépare et met
en œuvre la politique du Gouvernement en matière de promotion de la santé, de
prévention, d'organisation et d'accès aux soins. Il élabore et met en œuvre, en lien avec les
autres ministres compétents, les règles relatives à la politique de protection
de la santé et la politique de lutte contre les inégalités de santé dès le plus
jeune âge. En lien avec les autres ministres compétents, il organise et assure
la préparation et la gestion des crises sanitaires. Il est compétent en matière
de lutte contre les conduites addictives. Il définit et met en œuvre la
politique en matière de santé mentale. Il participe, avec les autres ministres
compétents, à l'action du Gouvernement en matière de recherche, de souveraineté
et de promotion de l'innovation dans le domaine de la santé. Il prépare et suit
les travaux du comité interministériel pour la santé ;
7° Il prépare, anime
et coordonne les politiques conduites par l'Etat en direction des personnes en
situation de handicap et en faveur du développement de l'accessibilité et des proches
aidants. Il prépare et
suit les travaux de la conférence nationale du handicap et du comité
interministériel du handicap ;
9° Il est compétent en matière de fonction publique hospitalière, de
professions médicales, paramédicales et sociales »
Le ministère du travail a autorité sur les organismes suivants :
«- le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales ;
- la direction générale de la santé ;
- la direction générale de l'offre de soins (DGOS) ;
- la direction générale du travail (DGT) ;
- la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle ;
- la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques
(DARES) ;
- l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) ;
- le haut-commissaire à l'emploi et à l'engagement des entreprises ;
- le délégué interministériel au développement de l'apprentissage dans
les quartiers prioritaires de la politique de la ville ;
- le délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie. »
·
Jurisprudence
Arrêt de la
chambre sociale de la Cour de cassation du 24 janvier 2024 – Cass. soc.,
pourvoi n° 22-18437, inédit. Intéressant, bien qu’inédit au Bulletin
d’information de la Cour de cassation, ce qui en diminue la valeur
jurisprudentielle. En effet, l’un des moyens soulevés dans cet arrêt, qui a
entraîné une cassation, a trait à une situation très fréquente, et parfois
problématique, celle de la période entre la fin de l’arrêt de travail et la
réalisation de la visite de reprise du travail par le professionnel de santé (qui
doit avoir lieu dans les huit jours et que le médecin du travail peut confier,
suite au décret n° 2022-679 du 26 avril 2022, ayant modifié l’article R.
4623-14 du Code du travail, aux infirmiers en
santé au travail).
Faits et
procédure – Un salarié a été embauché en mars 2008
par une entreprise en tant que menuisier-poseur.
Ce salarié est
en arrêt de travail du 26 août 2019 au 9 novembre 2019. Il est déclaré inapte à
son poste par le médecin du travail le 8 janvier 2020.
La société dans
laquelle il travaillait a été placée en liquidation judiciaire le 21 janvier
2020.
Le 31 janvier
2020, le salarié saisit le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation
judiciaire de son contrat de travail et le paiement d’un reliquat de salaire.
Le 20 février
2020, il adhère à une proposition de contrat
de sécurisation professionnelle dans le cadre
d’un licenciement économique.
Le salarié se
pourvoit en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel qui l’a débouté de sa
demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et du paiement d’un
reliquat de salaire pour la période d’attente de la visite de reprise après la
fin de son arrêt de travail.
Premier moyen du
salarié
Le salarié fait
grief à l’arrêt de la cour d’appel d’avoir rejeté sa demande de résiliation
judiciaire et de confirmer le licenciement pour raison économique. Pour cela,
la cour d’appel a évoqué le fait que la demande du salarié était postérieure au
licenciement survenu le 20 février 2020 et qu’elle n’avait pas été soutenue
oralement devant le conseil de prud’hommes le 8 octobre 2020. Ainsi, la cour
d’appel aurait violé les articles 1103
(ancien art. 1134) et
1224 à 1230 (ancien art. 1184) du Code civil
et les articles L.
1232-6 et L.
1233-67 du Code du travail.
Réponse de la
Cour de cassation
Au visa de
l'article L.
1231-1 du Code du travail, la Haute juridiction
écrit :
« En
application de ce texte, lorsqu'un salarié a demandé la résiliation judiciaire
de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le
juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée.
Pour déclarer
sans objet la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, l'arrêt
retient que même si la demande en résiliation judiciaire était formulée dans la
requête initiale saisissant la juridiction prud'homale, déposée le 31 janvier
2020, celle-ci n'a été soutenue oralement devant la juridiction que le 8
octobre 2020, soit postérieurement au licenciement résultant de l'adhésion du
salarié au contrat de sécurisation professionnelle le 20 février 2020.
En statuant
ainsi, alors que la date de la demande
initiale en résiliation judiciaire du contrat de travail est la date de
la saisine par requête du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé le
texte susvisé. »
Second moyen du
salarié
Le salarié fait
grief à l’arrêt de la cour d’appel de l’avoir débouté d’une demande de rappel
de salaire, et des congés payés afférents, pour la période du 12 novembre 2019
au 8 janvier 2020 correspondant à la période comprise entre la fin de son arrêt
de travail et la visite de reprise avec le médecin du travail. La cour d’appel,
pour juger ainsi, s’était basée sur le fait que le salarié avait indiqué à son
employeur qu’il ne reprendrait pas le travail avant d’avoir passé la visite de
reprise sans qu’elle ait recherché, comme il le lui était demandé, si le
salarié s’était tenu à la disposition de son employeur. Le salarié précisant
qu’il avait vainement demandé à son employeur d’organiser cette visite de
reprise et que, finalement, il avait lui-même entrepris les démarches pour
qu’elle puisse avoir lieu. La cour d’appel aurait donc violé les articles R.
4624-31 et L. 1221-1 du Code du travail.
Réponse de la
Cour de cassation
« Vu
l'article L.
1221-1 du code du travail :
Il résulte de ce
texte que le salarié qui, à l'issue de son arrêt de travail, se tient à la
disposition de l'employeur pour passer la visite médicale de reprise, a droit
au paiement de sa rémunération.
Pour rejeter la
demande du salarié en paiement d'un rappel de
salaire à compter du 12 novembre 2019, l'arrêt retient que le salarié avait
décidé de ne pas se présenter à son travail, faute de visite de reprise.
En se
déterminant ainsi, la cour d'appel, sans
rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si le salarié ne s'était pas
tenu à la disposition de l'employeur pour passer la visite médicale de
reprise, a privé sa décision de base légale. »
Au total,
la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel sur ces deux moyens et
renvoie l’affaire devant une autre cour d’appel.
Vous pouvez accéder à cette émission intitulée « Travail de malade,
malade du travail » qui démontre bien la difficulté de la reconnaissance
des maladies professionnelles pour nombre de salariés.
Diffusé le
25/01/2024 à 21h04 - Disponible jusqu'au 24/11/2024
« Tomber malade à cause de son travail est une réalité qui concerne
chaque année des dizaines de milliers de Français mais ils sont nombreux à être
ignorés par les entreprises. L'équipe de "Cash Investigation" a fait
le calcul : en 10 ans, plus d'un million de personnes ont demandé une
reconnaissance de maladie professionnelle et près de 450.000 d'entre eux se
sont vu opposer un refus. François Cardona a enquêté sur ce système qui exclut
quatre malades sur dix d'une prise en charge et d'indemnités de la part des employeurs.
Il a mis la main sur des documents confidentiels qui montrent les stratégies du
patronat pour limiter le nombre de reconnaissances. »
Présenté par : Élise Lucet
https://www.france.tv/france-2/cash-investigation/5612808-travail-de-malade-malade-du-travail.html
Jacques Darmon
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