Le 25 juillet 2021
Dans cette lettre,
nous abordons les thèmes suivants… Des textes de loi… Le texte issu de la
commission mixte paritaire sur la proposition de loi pour renforcer la
prévention en santé au travail… Un décret qui permet de ne pas mettre en
surveillance individuelle renforcée les travailleurs exposés au Sars-CoV-2 si
cette exposition ne résulte pas directement de leur activité professionnelle
habituelle… Un arrêté déterminant le nombre de postes d'internes ouverts pour
l'année 2021-2022 dans les différentes spécialités médicales… et un autre
arrêté relatif à la formation des infirmiers en santé au travail de la Fonction
publique d'Etat… Une question parlementaire consacrée aux effets psychiques de
la pandémie sur la population… En termes de jurisprudence… un exemple de faute inexcusable… et la
transmission par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel d'une question
prioritaire de constitutionnalité au sujet des modalités de calcul des
cotisations des entreprises aux services de santé interentreprises…
Permanence
conditions de travail et santé
Vous trouverez, en
pièce jointe, le planning des réunions de la permanence pluridisciplinaire
Conditions de travail et santé qui accueille des salariés en difficulté.
L'accueil est gratuit, sans rendez-vous et permet aux salariés d'exprimer leurs
difficultés à des professionnels tels que médecin du travail, inspecteur du
travail, avocat, psychologue et ainsi d'obtenir des informations relatives à
des possibilités d'action.
Forum
Saint-Jacques
Le texte de la
proposition de loi sur la santé au travail a été adopté le 23 juillet 2021 mais
n'a pas encore été publié. Nous avons sollicité la chef de l'inspection
médicale du travail à la Direction générale du travail, le Dr Corinne Piron,
afin qu'elle nous apporte son éclairage sur ce texte lors d'une réunion du
Forum Saint-Jacques début septembre.
Je vous rappelle
que vous pouvez accéder à mes lettres d’information depuis un an sur un blog à
l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.
· Textes de loi, circulaires,
instructions, accords, questions parlementaires et questions prioritaires de
constitutionnalité
Proposition de loi
pour renforcer la prévention en santé au travail
La réunion mixte
paritaire, du 7 juillet 2021, des députés de l'Assemblée nationale et des
sénateurs est parvenue à un texte commun que vous pourrez consulter en pièce
jointe et à l'adresse ci-dessous.
Ce texte reprend,
en grande partie, les amendements proposés par le Sénat, dans son texte du 6
juillet 2021, évoqués dans la lettre précédente du 11 juillet 2021 (voir sur le
blog).
Le texte commun
aux deux assemblées reprend, notamment, parmi les amendements du Sénat :
ü la consultation du
CSE sur le document d'évaluation des risques professionnels (article 2) ;
ü l'intégration
possible dans la négociation annuelle en entreprise du thème des conditions de
travail et de la prévention des risques professionnels (article 2 bis) ;
ü la mise en œuvre
par le médecin du travail d'un suivi post-exposition ou post-professionnel pour
les salariés en surveillance individuelle renforcée dont il constate
l'exposition à des risques CMR (article 2 ter) ;
ü une cotisation per
capita basée sur le nombre réel de salariés et pas sur l'équivalent temps plein
(article 9) ;
ü la possibilité, à
titre expérimental, dans trois régions, que les médecins du travail puissent
prescrire et renouveler des arrêts de travail er certains soins (article 21
bis).
En revanche, ce
texte ne reprend pas les précisions apportées par le Sénat – pourtant fort
pertinentes – sur la formation des infirmiers en santé au travail (équivalent
d'une formation universitaire).
https://www.senat.fr/leg/ppl20-777.pdf
Décret n° 2021-951
du 16 juillet 2021 fixant le cadre applicable des dispositions du code du
travail en matière de prévention des risques biologiques dans le cadre de la
pandémie de SARS-CoV-2
De nombreuses
professions entraînent une exposition importante au risque d'infection par le
Sars-CoV-2 du fait de contacts avec de nombreuses personnes. Une certaine
logique voudrait qu'ils soient pris en compte au titre de l'article L.
4624-2 et, surtout, du 4° de l'article R.
4624-23 prévoyant l'exposition aux agents biologiques des groupes 3
et 4 et donc justifient ainsi la mise en œuvre d'une surveillance individuelle
renforcée.
La Directive
européenne 2020/739 (6°) du 3 juin 2020 a classé le Sars-CoV-2 dans
le groupe 3 des agents biologiques qui, selon l'article R.
4421-3 du Code du travail, sont susceptibles de " provoquer une
maladie grave chez l'homme et constituer un danger sérieux pour les travailleurs.
Leur propagation dans la collectivité est possible, mais il existe généralement
une prophylaxie ou un traitement efficaces "
Ce décret, entrant
en vigueur le 19 juillet 2021, vise donc à éviter une mise en surveillance
individuelle renforcée de l'ensemble des travailleurs dont l'activité
professionnelle habituelle ne se fait pas au contact d'agents biologiques.
En effet, selon
l'article 1 du décret " Lorsque la nature de l'activité habituelle
de l'établissement ne relève pas des dispositions du code du travail relatives à
la prévention des risques biologiques et que les travailleurs sont
exposés au virus du SARS-CoV-2 à raison de leur activité professionnelle, la
protection des travailleurs est régie par le présent décret. "
Dans ce cas,
l'employeur, pour assurer la protection des travailleurs au titre de l'article L.
4121-2 du Code du travail doit respecter les dispositions des articles R.
4425-6 et 7 et R.
4424-2, R. 4424-3, R. 4424-4 et R. 4424-5 sauf
si l'évaluation des risques en indique l'inutilité.
L'article 3 du
décret précise donc que " Par dérogation au 4° du I de l'article R.
4624-23 du code du travail et au 4° du II de
l'article R. 717-16 du code rural et de la pêche maritime, les
travailleurs des établissements mentionnés à l'article 1er ne sont
pas considérés comme affectés à un poste présentant des risques particuliers
justifiant le bénéfice d'un suivi individuel renforcé de leur état de santé au
sens de l'article L. 4624-2 du code du
travail. "
Et l'article 4 que
" Par dérogation à l'article D. 4153-19 du code du
travail, les travailleurs des établissements mentionnés à l'article
1er ne sont pas considérés comme affectés à des travaux les exposant
aux agents biologiques de groupe 3 ou 4 au sens de l'article R. 4421-3 du même
code. "
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043799977
Arrêté du 19
juillet 2021 fixant au titre de l’année universitaire 2021-2022 le nombre
d’étudiants susceptibles d’être affectés à l’issue des épreuves classantes
nationales en médecine, par spécialité et par centre hospitalier universitaire
Cet arrêté
détermine le nombre d’étudiants, susceptibles d’être affectés à l’issue des
épreuves classantes nationales en médecine, au titre de l’année universitaire
2021-2022, répartis par spécialité et par centre hospitalier universitaire.
Au total, 8525
postes sont ouverts pour les étudiants ayant satisfait aux épreuves classantes
nationales cette année, soit une hausse de 2.9% par rapport à 2020. Les
filières en plus forte augmentation du nombre de postes sont la médecine
intensive et de réanimation (+ 28%), la dermatologie (+ 7%), la médecine
générale (+ 5%) et l'anesthésie réanimation (+ 4%).
La médecine et
santé au travail reste stable en termes de postes ouverts, 124 postes.
Les postes ouverts
selon les différents centre hospitalo-universitaires et régions :
ü 23 pour
l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (le même nombre qu'en 2020),
ü 8 postes pour les
Hospices civils de Lyon, l'Assistance publique – Hôpitaux de Marseille et le
CHU de Lille,
ü 7 pour le CHU de
Bordeaux,
ü 6 pour les CHU de
Rennes et de Toulouse,
ü 5 pour les CHU de
Clermont-Ferrand, de Brest et les Hospices civils de Strasbourg,
ü 4 pour les CHU de
Grenoble, de Rouen et d'Angers,
ü 3 pour les CHU de
Reims, de Caen et de Montpellier-Nîmes,
ü 2 pour les CHU de
Saint-Etienne, de Besançon, de Dijon, de Limoges, de Poitiers, de Nantes et de
Nice,
ü 1 poste pour le
CHU d'Amiens,
ü aucun poste n'est prévu pour les CHU de Tours
et de la Réunion.
D'ici fin
septembre 2021, nous saurons quels postes ont été retenus par les internes.
https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=7KWk6d3KoPgLV20BRNIjai-C-eBJAZCppc3EUOnVlHI=
Arrêté du 2 juin
2021 relatif à l’organisation de la formation professionnelle des infirmiers en
santé au travail des services de médecine de prévention de la fonction publique
de l’Etat
Je suis passé à
côté de cet arrêté intéressant que notre collègue Benoît de Labrusse a rappelé
dans sa lettre d'info Santé travail Paca
dont j'ai recommandé à plusieurs reprises la lecture.
Cet arrêté
apparaît tout à fait intéressant dans la mesure où, à la différence du Code du
travail qui exige une formation des infirmiers en santé au travail sans plus de
précisions quant à ses caractéristiques, il précise les modalités et le contenu
de cette formation.
Le public
intéressé par ces dispositions est celui des infirmiers diplômés d'Etat qui
initient une activité dans un service de médecine de prévention de la Fonction
publique d'Etat. L'employeur doit alors prendre en charge une formation dans
les 12 mois après l'embauche..
L'article
1
précise que " La formation d'adaptation à l'emploi prévue par l'article
13-1 du décret du 28 mai 1982 susvisé, doit permettre à l'infirmier d'acquérir
une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités au regard
des compétences et qualifications attendues.
La
formation est dispensée par un organisme de formation mentionné à l'article L.
6351-1 et suivants du code du travail. "
L'arrêté prévoit,
à l'article 2, que " La formation est d’une durée d’au moins 350
heures réparties en plusieurs séquences, conformément à l’article 4, sur une
période de 12 mois.
Elle s’articule
autour d’un parcours couvrant sept thèmes correspondant aux activités courantes
d’un infirmier en santé au travail d’un service de médecine de prévention de la
fonction publique de l’Etat :
–
la gestion et l’organisation des visites ;
–
la gestion et la logistique service de médecine de prévention ;
–
la participation à l’équipe pluridisciplinaire ;
–
la réalisation des visites d’information et de prévention ;
–
l’action sur le milieu de travail ;
–
la gestion des situations individuelles imprévues ;
–
la gestion des situations collectives imprévues. "
La
formation s'appuie, selon l'article 4, sur :
"
- une itération d'apports théoriques et de travaux pratiques ;
-
des temps d'échanges entre stagiaires sur la pratique professionnelle ;
-
un accompagnement par un référent pédagogique de l'organisme de formation.
"
Cette formation
peut se dérouler en présentiel et à distance avec des séquences d'exercice
professionnel en milieu de travail.
L'encadrement de
la formation est assuré au sein du service de médecine de prévention par au
moins un médecin du travail avec, si cela est possible, le tutorat d'un
infirmier en santé au travail du même service ou d'un autre service.
Selon les articles
4 et 5, cette formation doit donner lieu à une évaluation.
Cette évaluation
de la formation s'effectue par l'organisme de formation en lien avec le service
de médecine de prévention par rapport à des blocs de compétences qui sont
définis en annexe de l'arrêté.
https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=YTVcvdhkGHtWFab16waIuxqAan03mhLJC5z3cVMEAsc=
Question parlementaire
Effets
psychologiques et mentaux de la crise sanitaire
Question
écrite n° 19851 de M. Pascal Allizard (Calvados - Les Républicains) - publiée
dans le JO Sénat du 24/12/2020 - page 6180
"
M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de
la santé à propos des effets psychologiques et mentaux de la crise sanitaire.
Il
rappelle que l'impact de la pandémie et du confinement sur la santé mentale
inquiète médecins et scientifiques.
En
novembre 2020, la dépression touchait presque 21 % de la population, deux fois
plus que fin septembre selon une enquête nationale.
La proportion est encore plus grande parmi les plus fragilisées par
la crise sanitaire, à cause d'une situation financière difficile, de la
promiscuité, de l'inactivité ou d'antécédents de troubles psychologiques.
Une
autre étude récemment publiée par l'agence du
médicament et l'assurance maladie indiquait une augmentation de la
consommation de tranquillisants et de somnifères. Il y a quelques semaines,
des professionnels ont alerté sur une augmentation du nombre de tentatives
de suicides des adolescents.
Par
conséquent, face à la multiplication des risques psychologiques et mentaux, il
souhaite savoir comment le Gouvernement entend prendre en compte cette
situation exceptionnelle et quels moyens seront mis en œuvre. "
Réponse
du Ministère des solidarités et de la santé - publiée dans le JO Sénat du
15/07/2021 - page 4439
"
La crise sanitaire et ses vagues successives sont particulièrement
éprouvantes pour la santé mentale de la population. Leur impa1ct est
notamment plus marqué chez certains professionnels, chômeurs et personnes
isolées, ainsi que chez les jeunes, dont les étudiants. Le Gouvernement suit
de près l'état de santé mentale de la population : par des études
régulières menées par Santé publique France (CoviPrev), la direction de la
recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (EpiCov) et de
nombreux chercheurs ; par un tableau de bord hebdomadaire transmis par
Santé publique France analysant des indicateurs de santé mentale (ciblant
notamment les plus jeunes) issus des services d'urgence ; par le lancement de
la première enquête pérenne sur la santé mentale des enfants de 3 à 11 ans,
pour lesquels il n'existe pas de donnée jusqu'à maintenant. Un dispositif
national d'écoute médico-psychologique a été déployé dès le mois de
mars 2020, via un numéro vert, disponible 24h/24 et 7j/7. Ce
dispositif d'écoute et de prise en charge des appelants présentant des signes
de souffrance psychique a été mis en place en collaboration avec quatre
associations nationales (Croix Rouge écoute, Sida Info Service, SOS Amitiés et
SOS Crise) et le réseau national des cellules d'urgence médico-psychologique.
Par ailleurs, de nombreuses autres plateformes d'écoute ont été recensées dans
les régions. Outre ces lignes d'écoute téléphonique, de multiples ressources
sont disponibles en ligne, comme la page « Santé mentale et COVID » du site
Internet de Santé publique France, ou encore le site du Psycom,
organisme public d'information en santé mentale. Une campagne nationale
d'information grand public a été lancée en avril 2021 afin de favoriser le
repérage des principaux symptômes anxieux et dépressifs, ainsi que des
problèmes de sommeil, et rappeler à chacun qu'il n'est pas besoin d'être
malade de la Covid-19 pour se sentir mal, et qu'il est important de pouvoir en
parler, notamment avec des professionnels. La campagne comprend des spots radio
et TV, ainsi qu'un volet digital afin de toucher les plus jeunes. Afin de
piloter l'offre de soins en psychiatrie, une cellule de crise dédiée « Covid-Psychiatrie
» s'est mise en place dès le 16 mars 2020, avec une attention
particulière apportée au maintien de l'offre en santé mentale, incluant les
patients souffrant d'addictions. Cette cellule est toujours active et suit
de près l'évolution des capacités des services, ainsi que la vaccination des
personnes vivant avec des troubles psychiques, qui sont plus à risque de
développer des formes graves de Covid-19. Le Ségur de la santé a permis
l'adoption de mesures fortes en faveur des personnes ayant des troubles
psychiques, telles que le renforcement des équipes mobiles psychiatrie
précarité (EMPP), des cellules d'urgence médico-psychologiques et de l'offre de
soutien psychologique des centres médico-psychologiques avec le recrutement de
160 psychologues supplémentaires. L'accès à des consultations de
psychologues en ambulatoire dans les maisons de santé pluriprofessionnelles
(avec prise en charge par l'assurance maladie) est en cours d'organisation et
des travaux ont commencé pour la création d'un numéro national de prévention
du suicide, disponible 24h/24 et 7j/7, qui sera mis en place prochainement.
Des mesures spécifiques sont prévues pour améliorer la santé mentale des
enfants et des jeunes : le président de la République a ainsi annoncé le
15 avril 2021 le lancement d'un « forfait 100% psychologues pour
les enfant » à partir de la fin du mois de mai pendant six mois, pour permettre
aux mineurs en souffrance psychique de bénéficier sans frais de dix séances
chez un psychologue, sur prescription médicale. Le ministère chargé de
l'enseignement supérieur a déjà mis en place le « chèque psy » pour les
étudiants. Enfin, des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie sont
prévues à la rentrée, avec un volet dédié à l'enfance et à la pédopsychiatrie
et l'objectif de permettre à l'ensemble des acteurs, dont la société civile,
d'exprimer leurs préoccupations et leurs attentes dans ces champs et de pouvoir
y apporter des réponses structurelles. "
http://www.senat.fr/basile/visio.do?id=qSEQ201219851
·
Jurisprudence
Un exemple de faute inexcusable
La faute
inexcusable de l'employeur est prévue par l'article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale et elle ouvre
droit à une majoration de la rente et à une indemnisation des préjudices
extra-patrimoniaux tels que les
souffrances physique et morale, les préjudices esthétiques et d'agrément ainsi
que préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de
promotion professionnelle.
L'arrêt du 8
juillet 2021 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass.
2e Civ. pourvoi n° 19-25550, publié au Bulletin – traite de la
reconnaissance d'une faute inexcusable.
Les faits et la procédure – Un salarié exerçant pour une entreprise de sécurité a été victime d'une
agression sur son lieu de travail, le 7 octobre 2011, qui a été reconnue en
accident de travail par la caisse primaire d'assurance maladie.
Il saisit une
juridiction de Sécurité sociale (à l'époque, le tribunal des affaires de Sécurité
sociale) d'une demande de reconnaissance d'une faute inexcusable de son
employeur.
La cour d'appel
le déboute de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de
l'employeur.
Moyen du salarié
Le salarié fait
grief à l'arrêt de la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande.
En effet, pour
le salarié, la faute inexcusable est de droit pour le salarié qui est victime
d'un accident du travail si l'employeur a été averti d'un risque qui s'est
matérialisé. Or, dans le cas présent, le salarié avait fait part à son
employeur et au secrétaire du CHS-CT de menaces de mort qu'il avait reçues. Et
le salarié avait été victime de l'agression quatre jours plus tard.
La cour d'appel,
pour justifier sa décision, s'appuyait sur le fait que le salarié n'avait pas
émis de droit d'alerte, ce qui n'est exigé qu'en cas de droit de retrait, que
le salarié n'avait pas envisagé.
Réponse de la Cour de cassation
Au visa des
articles L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale et L. 4131-4 du Code du travail, la Haute juridiction écrit :
" Selon le
second de ces textes, le bénéfice de la faute inexcusable de l'employeur est de
droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d'un accident du
travail ou d'une maladie professionnelle alors qu'eux-mêmes ou un représentant
du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail
avaient signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé.
Pour débouter la
victime de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son
employeur, l'arrêt constate que dans la matinée du 3 octobre 2011, la
secrétaire de la société a trouvé dans la boîte aux lettres un courrier
anonyme, destiné à la victime, mentionnant « dégage ou on te crève », que ce
dernier a transmis par courriel du même jour à son employeur tout en écrivant:
« A ce stade où seuls vous, [V] et moi sommes au courant, je préconise le
silence radio afin de tenter de faire sortir le loup du bois ». Il retient que
cette transmission ne caractérise pas une alerte donnée à l'employeur, portant
sur une exposition de sa personne à un risque d'agression physique. L'arrêt en
déduit que les conditions posées par l'article L. 4131-4 du code du travail ne
sont pas réunies et qu'il incombe en conséquence à la victime de rapporter la
preuve de la faute inexcusable, en établissant que son accident présente un
lien avec une faute commise par son employeur, dans le cadre de son obligation
de sécurité.
En statuant ainsi, alors qu'elle
constatait que la victime avait transmis à son employeur une lettre de menaces
reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l'entreprise, de sorte
qu'elle avait signalé à celui-ci le risque d'agression auquel elle était
exposée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses
propres constatations, a violé les textes susvisés. "
L'arrêt de la
cour d'appel est cassé et l'affaire renvoyée devant une autre cour d'appel.
Une question prioritaire de
constitutionnalité (QPC) portant sur les cotisations dues aux services de santé
au travail
Il y a un débat autour des modalités de
cotisation des entreprises à leur service de santé au travail interentreprises.
L'article L.
4622-6 du Code du travail précise que " Dans le cas de services
communs à plusieurs entreprises, ces frais sont répartis proportionnellement au
nombre des salariés. " Il a déjà été conclu que les cotisations doivent
être calculées per capita, en fonction du nombre de salariés, et non à la masse
salariale, (décision du Conseil d'Etat du 30 juin 2014, CE pourvoi n° 365071). Mais doit-on prendre en
compte le nombre effectif de salariés ou leur équivalent temps plein pour
calculer la cotisation ?
L'arrêt de la Chambre sociale de la Cour
de cassation du 16 juin 2021 – n° 21-10006 - a trait au mode de calcul de la
cotisation.
Les faits – Une entreprise a
assigné son service de santé au travail interentreprises (SSTI) en justice en
demandant le remboursement d'un trop perçu pour les cotisations des années
2017, 2018 et 2019 car elle considérait le calcul erroné. Et elle a, concomitamment,
saisi la Cour de cassation de la QPC.
La QPC repose sur le fait que le SSTI a
pris en compte, pour les cotisations des années en cause, les salariés
unitairement et pas en équivalent temps plein comme la Haute juridiction avait
interprété l'article L. 4622-6 dans une jurisprudence du 19 septembre 2018
(Cass. Soc. pourvoi
n° 17-16219, publié au Bulletin d'information de la Cour de cassation). Ce
qui entraîne un calcul sur la base de l'effectif calculé selon l'article L.
1111-2 du Code du travail et donc un mode de calcul des cotisations plus
favorables financièrement pour les entreprises que lorsque chaque salarié, quel
que soit son temps de travail, est pris en compte pour une unité.
Pour pouvoir transmettre au Conseil
constitutionnel une QPC, celle-ci doit remplir les conditions suivantes :
ü " la disposition législative critiquée est
applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des
poursuites ;
ü la disposition
législative critiquée n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par
le Conseil constitutionnel ;
ü la question est
nouvelle ou présente un caractère sérieux. "
Pour la Haute juridiction, selon les
critères de recevabilité énoncés ci-dessus, " La question posée
présente un caractère sérieux en ce sens que cette différence de traitement est
susceptible de ne pas être justifiée dans la mesure où elle pourrait ne pas
être en rapport direct avec l’objet de la disposition contestée.
En conséquence, il y a lieu de renvoyer la
question posée au Conseil constitutionnel ".
https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/966_16_47332.html
A noter : dans le texte de
la proposition de loi pour améliorer la prévention en santé au travail,
commenté dans la dernière lettre d'information, un amendement sénatorial
prévoyait d'inscrire dans la loi que chaque salarié devrait compter comme une
unité pour le calcul des cotisations (ce qui a été repris dans le texte issu de
la commission mixte paritaire, voire ci-dessus dans les textes de loi). Ceci,
avec l'argument qu'un salarié à temps partiel nécessitait la même prise en
charge qu'un salarié à temps complet. L'amendement de l'article 9 de la
proposition de loi préconisait de modifier l'article L. 4622-6 ainsi : "
Au sein des services communs à plusieurs établissements ou à plusieurs
entreprises constituant une unité économique et sociale, ces frais sont
répartis proportionnellement au nombre des salariés comptant chacun pour une
unité. "
Nous voilà dans une période de congés avec certains d'entre vous qui ont
déjà passé, je l'espère, des vacances agréables et d'autres qui vont en
profiter prochainement. Ce répit est bienvenu après une période qui s'est
avérée assez difficile. Et il faut reprendre des forces car l'avenir prochain
risque encore d'être chahuté. Donc on se retrouvera en septembre…
Jacques Darmon
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