Lettre d'information du 25 juillet 2021

 Téléchargement des fichiers joints


Le 25 juillet 2021

 

Dans cette lettre, nous abordons les thèmes suivants… Des textes de loi… Le texte issu de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail… Un décret qui permet de ne pas mettre en surveillance individuelle renforcée les travailleurs exposés au Sars-CoV-2 si cette exposition ne résulte pas directement de leur activité professionnelle habituelle… Un arrêté déterminant le nombre de postes d'internes ouverts pour l'année 2021-2022 dans les différentes spécialités médicales… et un autre arrêté relatif à la formation des infirmiers en santé au travail de la Fonction publique d'Etat… Une question parlementaire consacrée aux effets psychiques de la pandémie sur la population… En termes de jurisprudence…  un exemple de faute inexcusable… et la transmission par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité au sujet des modalités de calcul des cotisations des entreprises aux services de santé interentreprises…

 

Permanence conditions de travail et santé

Vous trouverez, en pièce jointe, le planning des réunions de la permanence pluridisciplinaire Conditions de travail et santé qui accueille des salariés en difficulté. L'accueil est gratuit, sans rendez-vous et permet aux salariés d'exprimer leurs difficultés à des professionnels tels que médecin du travail, inspecteur du travail, avocat, psychologue et ainsi d'obtenir des informations relatives à des possibilités d'action.

 

Forum Saint-Jacques

Le texte de la proposition de loi sur la santé au travail a été adopté le 23 juillet 2021 mais n'a pas encore été publié. Nous avons sollicité la chef de l'inspection médicale du travail à la Direction générale du travail, le Dr Corinne Piron, afin qu'elle nous apporte son éclairage sur ce texte lors d'une réunion du Forum Saint-Jacques début septembre.

 

Je vous rappelle que vous pouvez accéder à mes lettres d’information depuis un an sur un blog à l’adresse suivante : https://bloglettreinfo.blogspot.com/.

 

·     Textes de loi, circulaires, instructions, accords, questions parlementaires et questions prioritaires de constitutionnalité

 

Proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail

La réunion mixte paritaire, du 7 juillet 2021, des députés de l'Assemblée nationale et des sénateurs est parvenue à un texte commun que vous pourrez consulter en pièce jointe et à l'adresse ci-dessous.

Ce texte reprend, en grande partie, les amendements proposés par le Sénat, dans son texte du 6 juillet 2021, évoqués dans la lettre précédente du 11 juillet 2021 (voir sur le blog).

Le texte commun aux deux assemblées reprend, notamment, parmi les amendements du Sénat :

ü la consultation du CSE sur le document d'évaluation des risques professionnels (article 2) ;

ü l'intégration possible dans la négociation annuelle en entreprise du thème des conditions de travail et de la prévention des risques professionnels (article 2 bis) ;

ü la mise en œuvre par le médecin du travail d'un suivi post-exposition ou post-professionnel pour les salariés en surveillance individuelle renforcée dont il constate l'exposition à des risques CMR (article 2 ter) ;

ü une cotisation per capita basée sur le nombre réel de salariés et pas sur l'équivalent temps plein (article 9) ;

ü la possibilité, à titre expérimental, dans trois régions, que les médecins du travail puissent prescrire et renouveler des arrêts de travail er certains soins (article 21 bis).

En revanche, ce texte ne reprend pas les précisions apportées par le Sénat – pourtant fort pertinentes – sur la formation des infirmiers en santé au travail (équivalent d'une formation universitaire).

https://www.senat.fr/leg/ppl20-777.pdf

 

Décret n° 2021-951 du 16 juillet 2021 fixant le cadre applicable des dispositions du code du travail en matière de prévention des risques biologiques dans le cadre de la pandémie de SARS-CoV-2

De nombreuses professions entraînent une exposition importante au risque d'infection par le Sars-CoV-2 du fait de contacts avec de nombreuses personnes. Une certaine logique voudrait qu'ils soient pris en compte au titre de l'article L. 4624-2 et, surtout, du 4° de l'article R. 4624-23 prévoyant l'exposition aux agents biologiques des groupes 3 et 4 et donc justifient ainsi la mise en œuvre d'une surveillance individuelle renforcée.

La Directive européenne 2020/739 (6°) du 3 juin 2020 a classé le Sars-CoV-2 dans le groupe 3 des agents biologiques qui, selon l'article R. 4421-3 du Code du travail, sont susceptibles de " provoquer une maladie grave chez l'homme et constituer un danger sérieux pour les travailleurs. Leur propagation dans la collectivité est possible, mais il existe généralement une prophylaxie ou un traitement efficaces "

Ce décret, entrant en vigueur le 19 juillet 2021, vise donc à éviter une mise en surveillance individuelle renforcée de l'ensemble des travailleurs dont l'activité professionnelle habituelle ne se fait pas au contact d'agents biologiques.

En effet, selon l'article 1 du décret " Lorsque la nature de l'activité habituelle de l'établissement ne relève pas des dispositions du code du travail relatives à la prévention des risques biologiques et que les travailleurs sont exposés au virus du SARS-CoV-2 à raison de leur activité professionnelle, la protection des travailleurs est régie par le présent décret. "

Dans ce cas, l'employeur, pour assurer la protection des travailleurs au titre de l'article L. 4121-2 du Code du travail doit respecter les dispositions des articles R. 4425-6 et 7 et R. 4424-2, R. 4424-3, R. 4424-4 et R. 4424-5 sauf si l'évaluation des risques en indique l'inutilité.

L'article 3 du décret précise donc que " Par dérogation au 4° du I de l'article R. 4624-23 du code du travail et au 4° du II de l'article R. 717-16 du code rural et de la pêche maritime, les travailleurs des établissements mentionnés à l'article 1er ne sont pas considérés comme affectés à un poste présentant des risques particuliers justifiant le bénéfice d'un suivi individuel renforcé de leur état de santé au sens de l'article L. 4624-2 du code du travail. "

Et l'article 4 que " Par dérogation à l'article D. 4153-19 du code du travail, les travailleurs des établissements mentionnés à l'article 1er ne sont pas considérés comme affectés à des travaux les exposant aux agents biologiques de groupe 3 ou 4 au sens de l'article R. 4421-3 du même code. "

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043799977

 

Arrêté du 19 juillet 2021 fixant au titre de l’année universitaire 2021-2022 le nombre d’étudiants susceptibles d’être affectés à l’issue des épreuves classantes nationales en médecine, par spécialité et par centre hospitalier universitaire

Cet arrêté détermine le nombre d’étudiants, susceptibles d’être affectés à l’issue des épreuves classantes nationales en médecine, au titre de l’année universitaire 2021-2022, répartis par spécialité et par centre hospitalier universitaire.

Au total, 8525 postes sont ouverts pour les étudiants ayant satisfait aux épreuves classantes nationales cette année, soit une hausse de 2.9% par rapport à 2020. Les filières en plus forte augmentation du nombre de postes sont la médecine intensive et de réanimation (+ 28%), la dermatologie (+ 7%), la médecine générale (+ 5%) et l'anesthésie réanimation (+ 4%).

La médecine et santé au travail reste stable en termes de postes ouverts, 124 postes.

Les postes ouverts selon les différents centre hospitalo-universitaires et régions :

ü 23 pour l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (le même nombre qu'en 2020),

ü 8 postes pour les Hospices civils de Lyon, l'Assistance publique – Hôpitaux de Marseille et le CHU de Lille,

ü 7 pour le CHU de Bordeaux,

ü 6 pour les CHU de Rennes et de Toulouse,

ü 5 pour les CHU de Clermont-Ferrand, de Brest et les Hospices civils de Strasbourg,

ü 4 pour les CHU de Grenoble, de Rouen et d'Angers,

ü 3 pour les CHU de Reims, de Caen et de Montpellier-Nîmes,

ü 2 pour les CHU de Saint-Etienne, de Besançon, de Dijon, de Limoges, de Poitiers, de Nantes et de Nice,

ü 1 poste pour le CHU d'Amiens,

ü  aucun poste n'est prévu pour les CHU de Tours et de la Réunion.

D'ici fin septembre 2021, nous saurons quels postes ont été retenus par les internes.

https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=7KWk6d3KoPgLV20BRNIjai-C-eBJAZCppc3EUOnVlHI=

 

Arrêté du 2 juin 2021 relatif à l’organisation de la formation professionnelle des infirmiers en santé au travail des services de médecine de prévention de la fonction publique de l’Etat

Je suis passé à côté de cet arrêté intéressant que notre collègue Benoît de Labrusse a rappelé dans sa lettre d'info Santé travail Paca dont j'ai recommandé à plusieurs reprises la lecture.

Cet arrêté apparaît tout à fait intéressant dans la mesure où, à la différence du Code du travail qui exige une formation des infirmiers en santé au travail sans plus de précisions quant à ses caractéristiques, il précise les modalités et le contenu de cette formation.

Le public intéressé par ces dispositions est celui des infirmiers diplômés d'Etat qui initient une activité dans un service de médecine de prévention de la Fonction publique d'Etat. L'employeur doit alors prendre en charge une formation dans les 12 mois après l'embauche..

L'article 1 précise que " La formation d'adaptation à l'emploi prévue par l'article 13-1 du décret du 28 mai 1982 susvisé, doit permettre à l'infirmier d'acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités au regard des compétences et qualifications attendues.

La formation est dispensée par un organisme de formation mentionné à l'article L. 6351-1 et suivants du code du travail. "

L'arrêté prévoit, à l'article 2, que " La formation est d’une durée d’au moins 350 heures réparties en plusieurs séquences, conformément à l’article 4, sur une période de 12 mois.

Elle s’articule autour d’un parcours couvrant sept thèmes correspondant aux activités courantes d’un infirmier en santé au travail d’un service de médecine de prévention de la fonction publique de l’Etat :

– la gestion et l’organisation des visites ;

– la gestion et la logistique service de médecine de prévention ;

– la participation à l’équipe pluridisciplinaire ;

– la réalisation des visites d’information et de prévention ;

– l’action sur le milieu de travail ;

– la gestion des situations individuelles imprévues ;

– la gestion des situations collectives imprévues. "

La formation s'appuie, selon l'article 4, sur :

" - une itération d'apports théoriques et de travaux pratiques ;

- des temps d'échanges entre stagiaires sur la pratique professionnelle ;

- un accompagnement par un référent pédagogique de l'organisme de formation. "

Cette formation peut se dérouler en présentiel et à distance avec des séquences d'exercice professionnel en milieu de travail.

L'encadrement de la formation est assuré au sein du service de médecine de prévention par au moins un médecin du travail avec, si cela est possible, le tutorat d'un infirmier en santé au travail du même service ou d'un autre service.

Selon les articles 4 et 5, cette formation doit donner lieu à une évaluation.

Cette évaluation de la formation s'effectue par l'organisme de formation en lien avec le service de médecine de prévention par rapport à des blocs de compétences qui sont définis en annexe de l'arrêté.

https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=YTVcvdhkGHtWFab16waIuxqAan03mhLJC5z3cVMEAsc=

 

Question parlementaire

Effets psychologiques et mentaux de la crise sanitaire

Question écrite n° 19851 de M. Pascal Allizard (Calvados - Les Républicains) - publiée dans le JO Sénat du 24/12/2020 - page 6180

" M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé à propos des effets psychologiques et mentaux de la crise sanitaire.

Il rappelle que l'impact de la pandémie et du confinement sur la santé mentale inquiète médecins et scientifiques.

En novembre 2020, la dépression touchait presque 21 % de la population, deux fois plus que fin septembre selon une enquête nationale. La proportion est encore plus grande parmi les plus fragilisées par la crise sanitaire, à cause d'une situation financière difficile, de la promiscuité, de l'inactivité ou d'antécédents de troubles psychologiques.

Une autre étude récemment publiée par l'agence du médicament et l'assurance maladie indiquait une augmentation de la consommation de tranquillisants et de somnifères. Il y a quelques semaines, des professionnels ont alerté sur une augmentation du nombre de tentatives de suicides des adolescents.

Par conséquent, face à la multiplication des risques psychologiques et mentaux, il souhaite savoir comment le Gouvernement entend prendre en compte cette situation exceptionnelle et quels moyens seront mis en œuvre. "

Réponse du Ministère des solidarités et de la santé - publiée dans le JO Sénat du 15/07/2021 - page 4439

" La crise sanitaire et ses vagues successives sont particulièrement éprouvantes pour la santé mentale de la population. Leur impa1ct est notamment plus marqué chez certains professionnels, chômeurs et personnes isolées, ainsi que chez les jeunes, dont les étudiants. Le Gouvernement suit de près l'état de santé mentale de la population : par des études régulières menées par Santé publique France (CoviPrev), la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (EpiCov) et de nombreux chercheurs ; par un tableau de bord hebdomadaire transmis par Santé publique France analysant des indicateurs de santé mentale (ciblant notamment les plus jeunes) issus des services d'urgence ; par le lancement de la première enquête pérenne sur la santé mentale des enfants de 3 à 11 ans, pour lesquels il n'existe pas de donnée jusqu'à maintenant. Un dispositif national d'écoute médico-psychologique a été déployé dès le mois de mars 2020, via un numéro vert, disponible 24h/24 et 7j/7. Ce dispositif d'écoute et de prise en charge des appelants présentant des signes de souffrance psychique a été mis en place en collaboration avec quatre associations nationales (Croix Rouge écoute, Sida Info Service, SOS Amitiés et SOS Crise) et le réseau national des cellules d'urgence médico-psychologique. Par ailleurs, de nombreuses autres plateformes d'écoute ont été recensées dans les régions. Outre ces lignes d'écoute téléphonique, de multiples ressources sont disponibles en ligne, comme la page « Santé mentale et COVID » du site Internet de Santé publique France, ou encore le site du Psycom, organisme public d'information en santé mentale. Une campagne nationale d'information grand public a été lancée en avril 2021 afin de favoriser le repérage des principaux symptômes anxieux et dépressifs, ainsi que des problèmes de sommeil, et rappeler à chacun qu'il n'est pas besoin d'être malade de la Covid-19 pour se sentir mal, et qu'il est important de pouvoir en parler, notamment avec des professionnels. La campagne comprend des spots radio et TV, ainsi qu'un volet digital afin de toucher les plus jeunes. Afin de piloter l'offre de soins en psychiatrie, une cellule de crise dédiée « Covid-Psychiatrie » s'est mise en place dès le 16 mars 2020, avec une attention particulière apportée au maintien de l'offre en santé mentale, incluant les patients souffrant d'addictions. Cette cellule est toujours active et suit de près l'évolution des capacités des services, ainsi que la vaccination des personnes vivant avec des troubles psychiques, qui sont plus à risque de développer des formes graves de Covid-19. Le Ségur de la santé a permis l'adoption de mesures fortes en faveur des personnes ayant des troubles psychiques, telles que le renforcement des équipes mobiles psychiatrie précarité (EMPP), des cellules d'urgence médico-psychologiques et de l'offre de soutien psychologique des centres médico-psychologiques avec le recrutement de 160 psychologues supplémentaires. L'accès à des consultations de psychologues en ambulatoire dans les maisons de santé pluriprofessionnelles (avec prise en charge par l'assurance maladie) est en cours d'organisation et des travaux ont commencé pour la création d'un numéro national de prévention du suicide, disponible 24h/24 et 7j/7, qui sera mis en place prochainement. Des mesures spécifiques sont prévues pour améliorer la santé mentale des enfants et des jeunes : le président de la République a ainsi annoncé le 15 avril 2021 le lancement d'un « forfait 100% psychologues pour les enfant » à partir de la fin du mois de mai pendant six mois, pour permettre aux mineurs en souffrance psychique de bénéficier sans frais de dix séances chez un psychologue, sur prescription médicale. Le ministère chargé de l'enseignement supérieur a déjà mis en place le « chèque psy » pour les étudiants. Enfin, des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie sont prévues à la rentrée, avec un volet dédié à l'enfance et à la pédopsychiatrie et l'objectif de permettre à l'ensemble des acteurs, dont la société civile, d'exprimer leurs préoccupations et leurs attentes dans ces champs et de pouvoir y apporter des réponses structurelles. "

http://www.senat.fr/basile/visio.do?id=qSEQ201219851

 

·       Jurisprudence

Un exemple de faute inexcusable

La faute inexcusable de l'employeur est prévue par l'article L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale et elle ouvre droit à une majoration de la rente et à une indemnisation des préjudices extra-patrimoniaux tels que  les souffrances physique et morale, les préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

L'arrêt du 8 juillet 2021 de la 2e chambre civile de la Cour de cassation – Cass. 2e Civ. pourvoi n° 19-25550, publié au Bulletin – traite de la reconnaissance d'une faute inexcusable.

Les faits et la procédure – Un salarié exerçant pour une entreprise de sécurité a été victime d'une agression sur son lieu de travail, le 7 octobre 2011, qui a été reconnue en accident de travail par la caisse primaire d'assurance maladie.

Il saisit une juridiction de Sécurité sociale (à l'époque, le tribunal des affaires de Sécurité sociale) d'une demande de reconnaissance d'une faute inexcusable de son employeur.

La cour d'appel le déboute de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Moyen du salarié

Le salarié fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande.

En effet, pour le salarié, la faute inexcusable est de droit pour le salarié qui est victime d'un accident du travail si l'employeur a été averti d'un risque qui s'est matérialisé. Or, dans le cas présent, le salarié avait fait part à son employeur et au secrétaire du CHS-CT de menaces de mort qu'il avait reçues. Et le salarié avait été victime de l'agression quatre jours plus tard.

La cour d'appel, pour justifier sa décision, s'appuyait sur le fait que le salarié n'avait pas émis de droit d'alerte, ce qui n'est exigé qu'en cas de droit de retrait, que le salarié n'avait pas envisagé.

Réponse de la Cour de cassation

Au visa des articles L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale et L. 4131-4 du Code du travail, la Haute juridiction écrit :

" Selon le second de ces textes, le bénéfice de la faute inexcusable de l'employeur est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle alors qu'eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé.

Pour débouter la victime de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, l'arrêt constate que dans la matinée du 3 octobre 2011, la secrétaire de la société a trouvé dans la boîte aux lettres un courrier anonyme, destiné à la victime, mentionnant « dégage ou on te crève », que ce dernier a transmis par courriel du même jour à son employeur tout en écrivant: « A ce stade où seuls vous, [V] et moi sommes au courant, je préconise le silence radio afin de tenter de faire sortir le loup du bois ». Il retient que cette transmission ne caractérise pas une alerte donnée à l'employeur, portant sur une exposition de sa personne à un risque d'agression physique. L'arrêt en déduit que les conditions posées par l'article L. 4131-4 du code du travail ne sont pas réunies et qu'il incombe en conséquence à la victime de rapporter la preuve de la faute inexcusable, en établissant que son accident présente un lien avec une faute commise par son employeur, dans le cadre de son obligation de sécurité.

En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la victime avait transmis à son employeur une lettre de menaces reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l'entreprise, de sorte qu'elle avait signalé à celui-ci le risque d'agression auquel elle était exposée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés. "

L'arrêt de la cour d'appel est cassé et l'affaire renvoyée devant une autre cour d'appel.

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043805641?cassPubliBulletin=F&cassPubliBulletin=T&init=true&isAdvancedResult=true&juridictionJudiciaire=Cour+de+cassation&origine=juri&page=1&pageSize=10&query=%7B%28%40ALL%5Bt%22m%C3%A9decin%22%5D%29%7D&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typeRecherche=date

 

Une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur les cotisations dues aux services de santé au travail

Il y a un débat autour des modalités de cotisation des entreprises à leur service de santé au travail interentreprises. L'article L. 4622-6 du Code du travail précise que " Dans le cas de services communs à plusieurs entreprises, ces frais sont répartis proportionnellement au nombre des salariés. " Il a déjà été conclu que les cotisations doivent être calculées per capita, en fonction du nombre de salariés, et non à la masse salariale, (décision du Conseil d'Etat du 30 juin 2014, CE pourvoi n° 365071). Mais doit-on prendre en compte le nombre effectif de salariés ou leur équivalent temps plein pour calculer la cotisation ?

L'arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 16 juin 2021 – n° 21-10006 - a trait au mode de calcul de la cotisation.

Les faits – Une entreprise a assigné son service de santé au travail interentreprises (SSTI) en justice en demandant le remboursement d'un trop perçu pour les cotisations des années 2017, 2018 et 2019 car elle considérait le calcul erroné. Et elle a, concomitamment, saisi la Cour de cassation de la QPC.

La QPC repose sur le fait que le SSTI a pris en compte, pour les cotisations des années en cause, les salariés unitairement et pas en équivalent temps plein comme la Haute juridiction avait interprété l'article L. 4622-6 dans une jurisprudence du 19 septembre 2018 (Cass. Soc. pourvoi n° 17-16219, publié au Bulletin d'information de la Cour de cassation). Ce qui entraîne un calcul sur la base de l'effectif calculé selon l'article L. 1111-2 du Code du travail et donc un mode de calcul des cotisations plus favorables financièrement pour les entreprises que lorsque chaque salarié, quel que soit son temps de travail, est pris en compte pour une unité.

Pour pouvoir transmettre au Conseil constitutionnel une QPC, celle-ci doit remplir les conditions suivantes :

ü " la disposition législative critiquée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;

ü la disposition législative critiquée n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ;

ü la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. "

Pour la Haute juridiction, selon les critères de recevabilité énoncés ci-dessus, " La question posée présente un caractère sérieux en ce sens que cette différence de traitement est susceptible de ne pas être justifiée dans la mesure où elle pourrait ne pas être en rapport direct avec l’objet de la disposition contestée.

En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question posée au Conseil constitutionnel ".

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/966_16_47332.html

A noter : dans le texte de la proposition de loi pour améliorer la prévention en santé au travail, commenté dans la dernière lettre d'information, un amendement sénatorial prévoyait d'inscrire dans la loi que chaque salarié devrait compter comme une unité pour le calcul des cotisations (ce qui a été repris dans le texte issu de la commission mixte paritaire, voire ci-dessus dans les textes de loi). Ceci, avec l'argument qu'un salarié à temps partiel nécessitait la même prise en charge qu'un salarié à temps complet. L'amendement de l'article 9 de la proposition de loi préconisait de modifier l'article L. 4622-6 ainsi : " Au sein des services communs à plusieurs établissements ou à plusieurs entreprises constituant une unité économique et sociale, ces frais sont répartis proportionnellement au nombre des salariés comptant chacun pour une unité. "

 

Nous voilà dans une période de congés avec certains d'entre vous qui ont déjà passé, je l'espère, des vacances agréables et d'autres qui vont en profiter prochainement. Ce répit est bienvenu après une période qui s'est avérée assez difficile. Et il faut reprendre des forces car l'avenir prochain risque encore d'être chahuté. Donc on se retrouvera en septembre…

 

Jacques Darmon

 

 

 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire